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Albert Samain

 

Lentement, doucement, de peur qu’elle se brise,

Prendre une âme ; écouter ses plus secrets aveux,  

En silence, comme on caresse des cheveux ;  

Atteindre à la douceur fluide de la brise ;

Dans l’ombre, un soir d’orage, où la chair s’électrise,  

Promener des doigts d’or sur le clavier nerveux ;  

Baisser l’éclat des voix ; calmer l’ardeur des feux ;  

Exalter la couleur rose à la couleur grise ;

Essayer des accords de mots mystérieux  

Doux comme le baiser de la paupière aux yeux ;  

Faire ondoyer des chairs d’or pâle dans les brumes ;

Et, dans l’âme que gonfle un immense soupir  

Laisser, en s’en allant, comme le souvenir  

D’un grand cygne de neige aux longues, longues plumes.

 

in Le Chariot d'or

 

 

 

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