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Féministe en paix

Je partage ici un mail que je viens d'envoyer parce que je me dis que ça pourrait être utile actuellement. Pour ma revue, j'ai toujours reçu plus de propositions (de textes rarement de sexe bien que ce soit arrivé aussi) venant d'hommes, ça m'a interrogée, si bien que j'avais faIt un numéro avec que des femmes comme un évènement, alors que ceux avec que des hommes étaient habituels (d'ailleurs des hommes ont tiqué sur le 100 % féminin, mouarf), et puis j'ai noté depuis quelques temps et avec joie que non seulement je reçois plus de propositions de femmes mais aussi et surtout que leur parole semble se libérer, qu'elles écrivent avec leurs ovaires en quelque sorte, on n'était pas beaucoup à le faire (oui, oui je me compte dans le nombre), et là je reçois soudain des textes de plus en plus féministes en colère, alors j'ai toujours beaucoup aimé cette citation de Rebecca West "Je n'ai jamais réussi à définir le féminisme, tout ce que je sais, c'est qu'on me traite de féministe chaque fois que mon comportement ne permet plus de me confondre avec un paillasson." Elle date de 1913 . Mais je me considère humaine, humaniste et j'ai plus envie de trouver et encourager ce qui nous unit que ce qui nous sépare, alors je copie colle ici le contenu de mon mail et merci à la personne qui m'a donné cette occasion de m'exprimer :

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"Je suis très très touchée par tout ce qui est de votre vécu, ceci dit j'ai dans l'idée aujourd'hui que nous n'irons nulle part si nous ne sortons pas du clivage, de l'opposition, de la colère aussi légitime soit-elle et elle l'est, tellement même que la violence qu'elle pourrait légitimer serait vraiment énorme, je pense que l'issue à cette guerre, car c'en est une et de plusieurs millénaires, cela ne peut pas être qu'une révolte de femmes qui rajoute de la violence à la violence et qui est épuisante, nous coupe de nos vrais désirs qui sont d'un autre ordre et de notre véritable puissance qui est aussi d'un autre ordre (je parle là sur le plan de l'idée générale, après nous avons chacune hélas à nous défendre quand il le faut et c'est un problème général, un problème de société sur lequel il faut travailler sans relâche). Je suis cependant donc persuadée que cela ne peut passer que par une transformation radicale et intérieure des hommes et que plutôt que donc les agresser en les mettant tous dans le même sac, s'appuyer au contraire (et leur permettre surtout de s'appuyer sur nous) sur tous les hommes conscients, en voie de transformation ou déjà bien avancés sur ce chemin de reconnexion avec leur féminin intérieur.

Tout ça pour dire que d'une part dans la revue, je publie toujours un auteur avec plusieurs textes, mais donc que celui-là que vous m'avez envoyé, je le prendrais plus facilement (pour un Soliflore, la publication en ligne où là c'est un auteur, un texte) s'il était comme il l'est en grande partie de l'ordre du témoignage personnel sans référence à l'histoire de Cantat par exemple dont on a trop parlé à mon goût et pas assez de toutes les histoires dramatiques de femmes inconnues (74 assassinées cette année à ce jour je crois, en France). Je trouve beaucoup plus intéressant qu'une multitude d'histoires personnelles sans généralisation, car c'est cette multitude même qui montre à quel point c'est général (comme ce qui s'est passé pour metoo), fasse soudain prendre conscience de la réalité de ce qui se passe, ce qui s'est passé et se passera encore si les hommes ne changent pas (mais à vrai dire pas que les hommes, ce changement nous concerne en tant qu'humanité, c'est une histoire aussi d'éducation, quand je vois comment des femmes séparées pourtant, élèvent leur fils, je vois bien qu'on n'en a pas fini). Personnellement j'ai parfaitement conscience que pour les plus jeunes des hommes (les autres sont encore dans la répétition du père qui lui même avait répété son père etc et pourquoi auraient ils changé puisque cela leur octroie un pouvoir avantageux, même si beaucoup ont été écrasés, broyés par un pouvoir dont au fond ils ne voulaient pas), C'est très compliqué car les femmes elles-mêmes ne sont pas toutes au clair avec ça, je fais partie de la génération qui a tout voulu, la liberté, des rapports d'égalité, le respect, voire l'admiration même, être aimée, choyée, mais aussi des hommes qui assurent en tout, j'ai appris à accepter les faiblesses des hommes mais ça a pris du temps, mais je connais tant de femmes qui cultivent le fantasme de l'homme fort tout en voulant les dominer. Les hommes sont perdus, certains osent montrer toute leur sensibilité, ce sont ceux là qui morflent le plus, d'autres se réfugient dans le cliché masculin le plus pathétique et le plus dangereux, il me semble qu'il y a un retour inquiétant vers ça en ce moment, mais qui vient aussi du mélange et du choc des cultures, et puis pour être des êtres complets, il nous faut harmoniser nos deux pôles (féminin, masculin) et surtout s'ancrer dans ce qui les transcende (l'androgyne sacré dans d'innombrables cultures anciennes), Sexe a pour origine étymologique "sectionner", bref, je pense que nous n'irons nulle part si nous ne sortons pas des extrêmes, et la femme en colère peut être tout aussi aveugle et injuste que les hommes sûrs et imbus de ce qu'ils pensent être leur droits, notre colère est légitime, mais la dualité ne fait que nous faire basculer encore et encore d'une extrême à l'autre. La génération de ma fille est en train de refuser d'être coincée dans un genre, ils sont en train de tout exploser, et c'est intéressant, mais là encore beaucoup de résistance et de jugement de la part des générations qui précèdent.

C'est un sujet qui me passionne tout ça, car en tant que femme j'en ai vécu beaucoup, et ma colère est toujours là, en arrière-plan, mais elle ne vise plus les hommes en général mais tout un système (où des femmes sont toutes aussi responsables que des hommes en agissant exactement de la même façon qu'eux dès qu'elles ont du pouvoir) et des individus en particulier, mais je sais aussi que ma colère, ma révolte nie ma puissance, je ne sais pas si je me fais bien comprendre, mais pourquoi est-ce qu'on se lie avec des hommes qui nous veulent du mal ou veulent nous posséder, nous dominer, nous objétiser, là est la grande question ? Les femmes doivent accepter d'être seules plutôt que mal accompagnées, et là il y a un combat à livrer qui est sociétal pour parvenir à un équilibre : femmes puissantes et sensibles, sages de par leur connexion naturelle aux cycles du vivant et hommes sensibles, qui n'ont rien à prouver de leur masculin, conscient de tous les bienfaits qu'ils peuvent apporter avec cette force naturelle qui est la leur, dans toute sa diversité... Homme, femme, chacun des deux sachant être seul et aimant pour eux-mêmes, sans attente vis à vis de l'Autre.... Alors la rencontre peut avoir lieu et la magie du lien opère. J'imagine.... car je suis une de ces femmes qui sait être seule plutôt que mal accompagnée"

 

 

 

Commentaires

  • Fort !

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