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Kent Nerburn - Ni loup ni chien

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Traduction de Charles Pommel • Préfaces de Robert Plant et Kim Pasche • Dessins de Baudoin

 

"Je décrochai le téléphone à la seconde sonnerie. J’entendis de la friture sur la ligne avant que la voix ne lance :
– Vous êtes Nerburn ?
C’était une femme. Je reconnus le ton saccadé d’un accent indien.
– Oui, répondis-je.
– Vous ne me connaissez pas, continua-t-elle, sans même donner son nom. Mon grand-père veut vous parler.

Dan, vieil Indien de la tribu des Lakotas, contacte l’écrivain Kent Nerburn pour l’entraîner dans un road trip au cœur de l’Ouest américain. Au gré des kilomètres et des rencontres, Dan livre son histoire et celle de son peuple, au-delà des mythes et des stéréotypes.
Empreint de douleur, teinté d’humour, Ni loup ni chien est le dialogue entre ces deux hommes, qui luttent pour trouver une voix commune. Un document sans concession sur la culture amérindienne et sur la façon – vio­lente et vorace – dont les États-Unis se sont construits."

 

Kent Michael Nerburn est né en 1946 à Minneapolis, dans le Minnesota. Il a fait des études d’histoire américaine à l’université de Stanford, puis à celle de Berkeley. Il a publié plus d’une quinzaine de livres – des essais ainsi que des ouvrages de creative non fiction – sur la culture amérindienne et américaine. Il a remporté le Minnesota Book Award en 1995 pour Ni loup ni chien, qui est aujourd’hui au programme de nombreux cursus universitaires d’histoire aux États-Unis. Nerburn a fondé et dirigé le Project Preserve, un projet d’histoire orale dans la réserve ojibwée de Red Lake, dans le nord du Minnesota.

 

ISBN : 9782373852776
Collection : La Grande Collection
Domaine : États-unis
Période : XXIe siècle
Pages : 448
Parution : 17 mai 2023

 

*

 

En ce qui me concerne, c'est un livre d'une absolue nécessité, en voici quelques extraits :

 

« - Tu sais ce que ça veut dire, l’heure indienne ? avait-il répondu pendant un cours avec des étudiants de l’université du coin. Ça veut dire : « Quand je serai d’humeur et prêt ».

 

« - T’inquiètes pas. C’est comme ça à l’indienne. Quand t’es là, t’es là. Quand t’es parti, t’es parti. C’est pas un problème d’être parti, tant que t’es vraiment là quand t’es là. »

 

 

« La première, c’est les batailles. À chaque fois que le peuple blanc gagnait, c’était une victoire. À chaque fois que nous gagnions, c’était un massacre. Quelle était la différence ? Il y avait des corps par terre et les enfants perdaient leurs parents, que les corps soient indiens ou blancs. Mais les blancs utilisaient leur langue pour rendre leurs tueries bonnes et nos tueries mauvaises. Eux « gagnaient », nous « massacrions ». Je ne sais même pas ce qu’est un massacre,  mais ça évoque des femmes mortes et des petits bébés aux gorges tranchées. Si c’est ça, c’était le peuple blanc qui massacrait plus que nous. Pourtant, j’ai rarement entendu quelqu’un parler des massacres commis par les Blancs. »

 

« Je pense que vous devriez être prudents. Les mots sont comme des pierres. Même s’ils sont très beaux, si vous les jetez sans réfléchir, ils peuvent blesser quelqu’un. »

 

 


« - Il y a les meneurs et les maîtres. Nous les Indiens, sommes habitués aux meneurs. Quand nos meneurs ne mènent pas, nous nous éloignons d’eux. Quand ils mènent bien, nous restons avec eux. Les Blancs n’ont jamais compris cela. Votre système créé des maîtres par la loi, même s’ils ne sont pas des meneurs.
(…)
« Comment un calendrier peut nous dire combien de temps untel sera un meneur ? C’est insensé. Un meneur est un meneur aussi longtemps que le peuple croit en lui et aussi longtemps qu’il est la meilleure personne pour le diriger. Tu ne peux mener que tant que le peuple te suit. »

 

 


« - Aucun Indien vivant n’ose penser trop souvent au passé. Si nous regardions trop longtemps dans le passé, nous serions trop en colère pour vivre. Vous essayez de vous rattraper en nous présentant comme des héros et des sages dans tous vos films et vos livres. C’est bien pour vous. Mais aujourd’hui encore, je peux aller au musée, y trouver le crâne de ma grand-mère dans une boite et entendre quelqu’un en parler comme d’un vieil objet. T’aurais envie que le crâne de ta grand-mère soit chez moi dans une boîte ? Tu ne serais pas en colère ? 
(…)
Aujourd’hui, dans les musées, il y a les crânes de mes grands-parents, des couvertures et des tambours sacrés sur les murs pour que les gens riches les regardent. Vous les visitez et vous racontez combien tout ça est sacré. Vous dites que c’est sacré parce que rien de ce que vous possédez n’est sacré. Mais ce n’est plus sacré parce que vous en avez extrait le sacré, comme vous le faites pour tout, si bien que désormais, nous avons peine à le sentir nous-mêmes. Vous avez tué notre peuple, vous nous avez pris ce qui était sacré et avait déclaré que cela prouvait que vous étiez meilleurs que nous. »

 

 

« C’est un bel endroit », Dan rétorque : « C’est pas juste un endroit, ça, c’est de la parlotte de blanc. La terre est vivante. On se tient sur elle, on fait partie d’elle. »

 

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