Alain Laboile
MON LOUP D’AMAZONIE
A Punch
Il y avait un ruisseau au fond du potager, l’Amazone, et au-delà c’était la forêt, la grande, la vraie. Et puis toi et moi, à la belle aventure. Toi, chien loup noir et fauve et moi, intrépide héroïne chaussée de caoutchouc vert.
Le pont d’allumettes franchi, nous glissions dans le lit sauvage du ru, pour remonter son cours et pister ses secrets, humer l’acidulé des pommes humides, le frisson phosphorescent d’étoiles grenouilles sur l’argile moussue.
Nous apprenions la langue de l’eau, entre le chuchotis des rives vierges, les périlleux méandres et l’obscur ensorcellement des racines.
Nous galopions, bondissions entre ronces et lianes, nous enfoncions au plus profond de la mer végétale pour connaître soudain la joie ivre et farouche de se savoir enfin perdus. Quand Réel et Imaginaire tissaient le Temps du Jeu alors TOUT devenait possible.
Je m’abandonnais heureuse à cette magie du monde qui m’a tout enseigné.
Et toi beau loup fidèle, sans faute toujours, à la civilisation tu me ramenais.
Civilisation dont l’entrée se situait à hauteur exacte
De la première rangée de carottes du potager.
2005