Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Oscar V. de L. Milosz


Danse macabre

Il est doux d’entendre sonner jusqu’au jour
 Ses genoux creux contre les os de l’amour.

De boire dans les orbites de l’Amie
 Le vieux mensonge des pleurs en eau de pluie.

Et de sentir les rayons des lunes hautes
 Glisser romantiquement entre ses côtes.

Il est doux, il est sage, il est bien
 De n’être plus, de n’être plus rien.

Comme on est joyeux, léger, comme on se porte
 Bien, quand la vermine, la vermine est morte.

Laissons aux bardes les sinistres ballades ;
 Lennore, Helen, faisons de bonnes gambades.

Écartez-vous, rue, escargots, citronnelle ;
 Voici Laure, la plus gaie et la plus belle.

Il est doux, il est sage, il est bien
 De n’être plus, de n’être plus rien.

Plus de maîtresse, plus de chien, plus de Dieu ;
 C’est tout ce que je veux, c’est tout ce qu’il veut.

Passants là-bas, cavalier et cheval noir
 Venez donc un peu par ici, venez voir.

Il s’est enfui, personne, la route sonne.
 Ô comme le désir de vivre m’étonne !

Il est doux, il est sage, il est bien
 De n’être plus, de n’être plus rien.

Clic-clac
 de vertèbres
 qui craquent
 et dans les ténèbres
 mélancoliques
 ici, là-bas, où ?
 clac-clic,
 de dansantes reliques
 Mains et pieds traversés de clous.

Amour remariée, entends-tu ma voix ?
 Cette nuit, dis-moi, combien, combien de fois ?

Mon fils, mon fils, sais-tu déjà épeler
 Mon nom sur la pierre moussue et pelée ?

Sganarelle, hi hi hi ! voici tes gages :
 Treize queues de rats, trois yeux de chats sauvages.

Il est doux, il est sage, il est bien
 De n’être plus, de n’être plus rien. 



in Les Sept solitudes, 1906

 

 

 

 

 

 

Commentaires

  • Très contemporain.

Les commentaires sont fermés.