Miroslava Rosales
« Le gilet pare-balles est nécessaire »
 m'a dit un journaliste
 Et je ne l'ai pas cru
San Pedro Sula
 ville de défaites et d'os accumulés
 ville d'ambulances
 de cadavres comme des fruits sur le trottoir
 ville aux nuits se voulant serpents
 ville au bruit recraché par la phtisie
« Ici, m'a dit le journaliste,
 on te fait cadeau d'un cercueil
 pendant la campagne électorale »
« Quelles tempêtes de pus dissimules-tu dans ton ventre enflammé par tant de cocaïne ? »
 ville braise
 ville charbon
 ville carburant
 ville tonnerre
 ville glaire
 ville cafard
 ville massacreuse d'espoir
 ville chœur de mutilés
 ville plaie
 ville poussière
 ville urine
 ville grouillement de clous
 ville chienne enragée
 ville millions de joies décapitées
 ville fourneau
 ville balle tirée par la colère
 ville suie
 ville avec du calcaire dans les artères
 ville boucherie de biches
 ville gangrène
 orpheline de lune et de miel
 orpheline des mélodies et de la douceur de la pêche
 orpheline de la brise
 qu'est-ce qui pourrait te soulever ?
 quels rêves de cloches conserves-tu encore dans tes labyrinthes tatoués ?
 quelle main saura trouver la caresse d'un talisman à la place d'un scorpion ?
 quels après-midis te couvriront avec la splendeur d'un oiseau multicolore ?
« C'est une ville morte »
 m'a dit le journaliste
 en éteignant sa cigarette
 C'est un cratère duquel on voudrait s'extirper
 avec le moins de blessures possibles
« Ça, c'est une énorme fosse commune
 qui ne se referme jamais »
 m'a dit le journaliste
 en continuant à prendre des notes devant les cadavres
traduction : Laurent Bouisset
http://fuegodelfuego.blogspot.fr/2016/10/cinq-poemes-de-miroslava-rosales.html)