L’affolement des courbes de Marc Tison
*
Des terres vierges sont en attente au fond des verres
Sublimation des cuites solidaires
Dans les bars si dégueulasses qu’on y rêve
Éternelle infusions d’étoiles
Et la voix de Billie Holiday raye l’illusion
Profond
(…)
En enfouissement sous les sourires
Les indifférences cachées dans la foule
S’obstinent à crever les yeux
L’aveuglement l’aveuglement l’aveuglement
Les écrans regardent s’éloigner les enchantements
aux geôliers consentis s’offrent les derniers discernements
nos intimités dépecées en dons
(…)
Parlons marketing, parlons de stimulation des besoins
Parlons d’enfants mineurs adaptés à l’extraction de tonnes de minerais rares et toxiques nécessaires à la fabrication des téléphones portables avec la lampe torche intégrée
(…)
Parlons de marketing d’enfants à l’obsolescence programmée
(…)
Réalité minorée. Ça s’efface. Un delate sur le clavier
Un choix éditorial à la tv
Le quotidien impur disparaît des vérités
Avec les cris, les pleurs, les dignités
(…)
Il m’arrive d’attendre allongé sur l’herbe
Sur un lit de pénombre
Posé dans la banquette arrière de la voiture
Debout entouré d’une foule que j’éteins
Dans le shaker des hontes quotidiennes
Il m’arrive d’attendre
Un instant admirable
Une expiration qui n’en finit pas
De définir l’apaisement
Les espaces profonds
Entre les souffles et les inspirations
Des apnées d’évasion
(…)
Dans le remuage
La voix ma voix
Parle parle parle de nouveau
Comme roule le ruisseau de montagne
Où s’abreuvent les estives
Dévale les pentes au-dessus des pierres
Saute les obstacles de relief
Porte cette voix dans les vallées
Contre les falaises qui résonnent
Tapage la parole dans les canyons
Sur les crêtes
Parle parle parle
Couvre les oracles nauséeux
(…)
Tu es tout ce que j’ai et qui ne m’appartient pas
(…)
Mélancolie des ombres qui fuguent de soi
Au bout du chemin le silence habité des feuilles sous le vent
La transition où s’opère la mue des soirs solitaires
(…)
Devenir la sueur
Devenir l’air
Devenir le vent
Devenir la disparition
Le rien le tout
Mais devenir
(…)
Quel spleen rattrape l’horizon qui s’éloigne
Sur des oiseaux danseurs aux clairs obscurs du ciel
(…)
Dans la montagne souffle le baiser coupant des névés
Dans les cheveux frissonne le chant des pierres
Éparpillées sur le chemin
Un chant de brisure
La chienne Édith, collection Nonosse, 2020