Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Jacques Prévert

 

Les clefs de la ville


Les clefs de la ville

Sont tachées de sang

 L’Amiral et les rats ont quitté le navire

 Depuis longtemps

 Sœur Anne ma sœur Anne

 Ne vois-tu rien venir

 Je vois dans la misère le pied nu d’un enfant

 Et le cœur de l’été

 Déjà serré entre les glaces de l’hiver

 Je vois dans la poussière des ruines de la guerre

 Des chevaliers d’industrie lourde

 A cheval sur des officiers de cavalerie légère

 Qui paradent sous l’arc

 Dans une musique de cirque

 Et des maîtres de forges

 Des maîtres de ballet

 Dirigeant un quadrille immobile et glacé

 Où de pauvres familles

 Debout devant le buffet

 Regardent sans rien dire leurs frères libérés

 Leurs frères libérés

 A nouveau menacés

 Par un vieux monde sénile exemplaire et taré

 Et je te vois Marianne

 Ma pauvre petite sœur

 Pendue encore une fois

 Dans le cabinet noir de l’histoire

Cravatée de la Légion d’Honneur

 Et je vois

 Barbe bleue blanc rouge

 Impassible et souriant

 Remettant

 Remettant les clefs tachées de sang

 Aux grands serviteurs de l’Ordre

L’Ordre des grandes puissances d’argent. 

 

 

 

Les commentaires sont fermés.