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Gregory Mutombo - Terrorismes...

Les temps actuels, par leur intensité, nous obligent à réaliser de profondes prises de conscience. La principale doit nous conduire à mesurer notre responsabilité dans le déroulement et le contenu du spectacle du monde.

Les temps ne sont plus à commenter avec effroi, stupeur, colère, indignation, résignation ou sentiment d’impuissance ce qui se joue devant nous, comme si cela était séparé ou indépendant de nous, comme complètement coupé de nos scénarios intérieurs. Car, que nous l’assumions ou non, ce qui se joue devant nos yeux est le fruit de nos entrailles. Ce qui se joue devant nos yeux est l’expression manifeste de ce que nous portons et produisons individuellement et collectivement. Ce qui se joue devant nos yeux est la densification terrifiante de toutes les paroles et pensées que nous émettons, si souvent empreintes de dualité, de condamnation, de jugement, de rejet, de peur.

Si nous nous croyons étrangers à l’expression du monde, et particulièrement dans ce que nous lui trouvons de plus vil, de plus obscur, de plus violent, de plus cruel, alors nous perpétuons encore et encore l’idée que le problème vient de l’autre et, par conséquent, que la solution arrivera de l’extérieur. Si nous nous croyons étrangers à l’expression du monde, nous nous privons, de fait, de notre capacité à le faire évoluer par notre implication vibratoire collective. Quel être sur Terre a-t-il retrouvé un jour l’apaisement, lors d’un puissant accès de colère, d’angoisse ou de haine du fait qu’on lui hurle dessus, qu’on le frappe ou qu’on le condamne sans merci ? Aucun. Pourquoi continuons-nous alors à croire que cela sera possible si c’est notre voix qui crie, notre main qui maltraite ou notre conviction qui sanctionne ?

Il n’est plus temps de crier à la conspiration, au complot, plus temps de dénoncer telle prétendue manipulation, de blâmer telle dérive, de regretter tel laxisme, de chercher des explications rationnelles fondées sur l’Histoire, l’équilibre des forces ou de vagues concepts sociologiques. Il n’est plus temps de se perdre en prévisions chaotiques ni, non plus, en une sorte d’espérance infantile en l’installation progressive, comme par enchantement, d’heures plus douces.

Pour l’avoir expérimenté durant de longues années, il m’a été donné de comprendre que personne ne revient sain et sauf de la guerre. Personne. Il ne faut jamais se fier à l’absence de blessures physiques… Une partie de nous meurt toujours sur le champ de bataille. Que ce champ de bataille se situe en Centrafrique, en Afghanistan, dans le centre de Paris ou sur la Côte d’Azur. La partie de nous qui meurt est celle qui portait encore certaines croyances fondées sur les notions de bien ou de mal, sur les notions de bourreau et de victime, de vainqueurs et de vaincus. Chacune de nos intentions belliqueuses ou vengeresses, avant même qu’elle ait pris forme dans la réalité concrète, appelle dans l’immédiateté une contrepartie de même nature, émanant de celui que nous considérons comme notre adversaire. On ne combat jamais que soi-même… Jusqu’à ce que l’on dépose les armes et prenne conscience que, faute de l’un des deux combattants, la guerre s’arrête.

Les temps actuels nous amènent à laisser mourir en nous cette idée que ce qui déchire et meurtrit nos existences est la conséquence exclusive de l’ignorance, de l’obscurantisme, de la haine ou du fondamentalisme caractérisant les autres. Tant que nous ne nous reconnaitrons pas comme co-créateurs – par la peur qui nous étreint, nous enferme et nous voile – de ce qui advient en ce monde, alors nous continuerons d’assister, chaque fois plus sidérés, à la matérialisation du manque d’amour en nous.

Combattre la violence ne demande aucun courage, juste de l’inconscience. Le courage, au sens étymologique du « cœur qui agit », consiste en cette reconnaissance humble que seule la paix véritablement installée en nous peut engendrer un climat de paix autour de nous. Tout ce contre quoi nous luttons se renforce. Mettre toute notre énergie dans la riposte revient à focaliser nos efforts vers la haine et la peur. Si aucune énergie ne vient nourrir en nous l’amour, l’harmonie, la guérison, comment pourrons-nous semer autre chose que le contraire, le déni, le négatif de ce que nous sommes ?

Il est temps que l’Humanité cesse de croire que les solutions à tous ses maux sont dans l’action. Elles sont dans l’être. Quel sera le premier des puissants de ce monde à déposer son armure qui, telle une cible, attire nécessairement à elle des flèches ? Quel sera le premier des puissants de ce monde à, courageusement, manifester par sa vibration et son Verbe, l’Amour qui annihile tout ce qui est moins que lumière, plutôt que de repartir encore une fois en guerre, ainsi que cela se reproduit depuis des éons ? Les « puissants » de ce monde sont toujours à l’image des peuples qui les hissent sur leur trône.

Nous sommes responsables de la façon dont nous regardons le monde. Nos yeux sont le portail de notre âme. De la qualité de notre regard dépend l’élévation ou, au contraire, l’abaissement vibratoire de ce qui est observé. Tant que nous projetterons sur l’autre la somme de toutes nos peurs, nous le maintiendrons sous une cloche de plomb de laquelle il ne pourra s’extraire que par la violence.

L’heure est au passage de l’empathie à la compassion. L’empathie nous fait souffrir de la souffrance du monde, en la faisant grossir. La compassion est cet état qui ne nie en rien la peine ou la douleur ressentie par l’autre mais, parce que le regard porté ne l’enferme ni dans le statut de victime ni dans celui de bourreau, permet une aide véritable et d’initier un processus de libération. Si nous pleurons, par empathie, du fait de la souffrance éprouvée par autrui, nous serons tôt ou tard ceux qui sentiront monter en eux la colère, la violence ou le sentiment d’impuissance du fait de la cruauté manifestée par tel autre. Et les rôles s’inverseront, une fois de plus…

Combien de temps allons-nous perdurer dans ces archaïsmes qui ont mené l’Humanité dans sa posture actuelle ? En vérité, la décision nous revient. Elle est intérieure. Elle est notre responsabilité collective et individuelle d’êtres humains dotés de conscience.

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