Jean-Marie Gourio
Disneyland, tu fous du barbelé autour et tu enfermes les gens dedans,
ça fait une prison où tout le monde est fou.
in L'intégrale des brèves de comptoir 1992-1993
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Disneyland, tu fous du barbelé autour et tu enfermes les gens dedans,
ça fait une prison où tout le monde est fou.
in L'intégrale des brèves de comptoir 1992-1993
préface de Jean-Marc Flahaut, Ed. Les Carnets du Dessert de Lune, novembre 2014.
103 pages, 13 €.
Lire Perrine Le Querrec c’est prendre un risque, prendre le risque de se faire engloutir. Les mots ici deviennent matière, tantôt gluante, paralysante, tantôt rêche, étrangleuse, tantôt lourde, étouffante, tantôt acérée, tranchante, de la matière sombre, grouillante et tremblante, puis soudain ils ont des ailes et tentent de s’échapper vers la lumière. Vers la Patagonie.
Ou bien ils s’écrasent. La pâte-agonie.
Il y est question d’enfance, de violence, de peur et de désespoir ravalés, d’extrême solitude. « Son enfance sent toujours le carnage ». Quelque chose qui ne se voit pas de l’extérieur, quelque chose que l’on peut trimballer en soi toute une vie, qui nous dévore de l’intérieur et personne ne s’en aperçoit. Personne ne s’en est jamais aperçu. Alors les mots tentent de donner consistance à cette grande béance, de faire apparaître l’indicible, l’invisible, tentative qui elle-même écartèle : faire à la fois apparaître et disparaître à jamais. Fuir. « Il ne faut pas fermer la porte mais la claquer derrière soi et partir pour toujours ».
Les mots deviennent des encres à colorer le silence pour y faire apparaitre les non-dits, « la parole interdite embusquée derrière la porte close/la parole refusée bâillonnée en-dedans au dehors », des acides pour dissoudre ces murs qui retiennent les secrets qui rongent l’âme, des chimies diverses et variées pour que remontent de sous la terre tous les cadavres enterrés, les vers dissimulés. Toute la saleté enfouie.
On n’est pas dans l’écriture, on est dans l’alchimie, pour dégager la pierre passée au cou de celle qui se noie sans eau, pour dégager la pierre à écrabouiller le cœur. On ne lit pas Perrine Le Querrec, on avale, on mâche une réalité qu’elle nous enfourne, bouchée après bouchée, une réalité figée comme « sauce froide sur les tripes abandonnées dans l’assiette. »
De la douleur brute, interdite, non autorisée, non accueillie, à laquelle les mots ont ordre de donner forme, pour avoir prise sur elle, pouvoir la saisir à pleines mains et la briser, la détruire, l’achever en pleine tête.
Être fillette, puis femme, puis mère, la fillette enfermée dedans. Les nœuds gordiens de la famille. Le passé, le présent et le futur «l’effort du restant de sa vie ». Et ce sentiment de décalage permanent avec le dehors, avec l’autre. Incompréhensible. Alors il ne faut pas que ça se voit : « Tu es dehors. La tête haute. Les gens te saluent. Tu es des leurs. »
C’est cette chose avec laquelle on ne peut pas tricher qui donne tant de consistance, de densité, de force et de beauté, de magnificence même, à la langue de Perrine Le Querrec et la lire fait du bien. Peut-être pas à tout le monde, peut-être faut-il ce quelque chose en soi qui fait écho et que personne ne voit, dont personne ne s’est jamais aperçu. Un bien fou pour un mal fou.
Ce petit quelque chose qui remonte à la genèse de l’être et qui fait que l’on est toujours au bord et « pas de cou autour duquel elle pourrait jeter ses bras pour s’accrocher, comme en a droit toute personne qui se noie. »
Toujours « trop près du bord. » et au loin pourtant, l’espoir encore d’une libre et vaste Patagonie.
Cathy Garcia
Perrine Le Querrec est née à Paris en 1968. Ses rencontres avec de nombreux artistes et sa passion pour l’art nourrissent ses propres créations littéraires et photographiques. Elle a publié chez le même éditeur Coups de ciseaux, Bec & Ongles (adapté pour le théâtre par la Compagnie Patte Blanche) et Traverser le parc. Elle vit et travaille à Paris comme recherchiste indépendante. http://entre-sort.blogspot.be/
Cette note paraîtra à La cause Littéraire :http://www.lacauselitteraire.fr/
Les étoiles viennent boire dans les yeux des enfants.
in Parce que
http://www.michele-ludwiczak.fr/
Merci au Musée Improbable pour ses belles et quotidiennes trouvailles !
Qu'est-ce qu'un serment ? Un mot, emporté par le vent.
in Thersite
Le phare à l’horizon est un bout de terre où je place une bonne partie de mes rêves,
mais qui reste un point d’interrogation, une possibilité encore très lointaine.
cg in Journal 2007
Où sont les exaltés, les enthousiastes, les vivants à cœur ouvert ? Où sont les vrais sages, les lumineux ? Solitude d’une société morte sous son vernis de vie artificielle. Solitude intense du cœur qui bat librement d’un tempo non corrompu.
In Qué wonderful monde (Ed. Nouveaux Délits 2011)
Ce que tous les autres hommes sont m’importe beaucoup, parce que tout indépendant que je m’imagine ou que je paraisse par ma position sociale, dussé-je être pape, tsar ou empereur ou même premier ministre, je suis incessamment le produit de ce que sont les derniers d’entre eux; s’ils sont ignorants, misérables, esclaves, mon existence est déterminée par leur ignorance, leur misère et leur esclavage.
Moi, homme éclairé ou intelligent, par exemple –si c’est le cas- je suis bête de leur sottise; moi brave, je suis l’esclave de leur esclavage; moi riche, je tremble devant leur misère; moi, privilégié, je pâlis devant leur justice. Moi, voulant être libre enfin, je ne le puis pas, parce qu’autour de moi tous les hommes ne veulent pas être libres encore, et ne le voulant pas, ils deviennent contre moi des instruments d’oppression…
…Je ne suis vraiment libre que lorsque tous les êtres humains qui m’entourent, hommes et femmes sont également libres… de sorte que plus nombreux sont les hommes libres qui m’entourent et plus profonde et plus large est leur liberté, et plus étendue, plus profonde et plus large devient ma liberté… Je ne puis me dire libre vraiment, que lorsque ma liberté, ou ce qui veut dire la même chose, lorsque ma dignité d’être, mon droit humain, réfléchis par la conscience également libre de tous, me reviennent confirmés par l’assentiment de tout le monde..
Ma liberté personnelle ainsi confirmée par la liberté de tout le monde s’étend à l’infini…
in La Liberté