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Visage vive de Matthieu Gosztola

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Ed.Gros Textes, photographies de l’auteur, 2011, 96 p. 7 €

 

 

Visage vive n’est pas de lecture aisée, car derrière une langue qui semble s’égarer, s’éteindre avant de se rallumer à nouveau, un peu comme des soubresauts, il y a cette tentative de dire l’indicible.

 

Il faisait un froid terrible

Dans le visage

De cet enfant là

 

Il n’y a pas de mots assez vastes, assez puissants pour contenir la douleur, sans doute la plus insupportable, de la perte d’un enfant. Aussi, par petites touches, ce texte se remémore, parle à l’enfant qui n’est plus, lui imagine même un futur, le tout accompagné de très belles photos de l’auteur, prises en Inde, pays de grande intensité spirituelle. Des photos dont toute la lumière et les vives couleurs aident peut-être à transcender la souffrance. Visage vive est un livre tendu comme une main au-dessus du vide et qui s’adresse aussi à tous ces autres « parents-funambules », qui subissent cette épreuve.

 

Ce n’est pas toi qu’on

Enterre

C’est moi dans ma vie de toi

 

Visage vive est un recueil qui avec amour, avec pudeur, tient en fragile équilibre entre l’écorchement du « pourquoi ? » et une difficile tentative d’acceptation de ce qui est, de ce qui a été et qui n’est plus.

 

Tu n’as jamais vu la mer

Tu es ce qui retourne à sa

Réception d’étoile

 

Mais, l’amour ne s’arrête pas aux frontières de la mort. Des êtres aimés qui les franchissent, demeure le souvenir, la présence intangible mais si puissante du souvenir. Ici l’écriture est comme une catharsis, les mots sont parfois comme retenus ou égarent leur sens dans la vacuité, ils tâtonnent comme des mains dans le noir et soudain ils se déversent à flots précipités, avec cette obsession du visage.

 

La peinture du visage n’a pas eu le

Temps

De sécher

 

Tout finalement tient dans le visage.

 

Tout est là dans le visage

Et je prends tout

Avec mon souvenir

 

Mon souvenir est déjà là même

Dans le présent du regard

 

Il y a vie dans visage, et la peur sans doute que la mémoire des traits ne finisse par disparaitre elle aussi.

 

Ton visage est identifiable à ce qui

Ne viendra jamais

Même avec les décibels des cris

Diminuer le silence

 

Alors par delà l’intolérable déchirure, les mots viennent pour divorcer du silence, tisser un fil auquel se raccrocher.

 

Je crois que c’est possible

De vivre car on est deux

Et ça a duré

 

Des mots que l’on voudrait magiques.

 

Je ferai si c’est

Nécessaire

Dans toute la pièce des

Moulinets

Avec les bras en récitant

Des incantations mais

Malheureusement je me réveille

La vie n’est pas un conte de fée

 

La mort est sourde à nos questions, elle est juste une réponse. Une réponse à la trop vive douleur du corps. Peut-être se fait-elle ainsi pardonner, elle vient apaiser les souffrances de l’enfant aimé, qui sont tout autant, sinon plus insupportables qu’elle. Reste alors un amour indéfectible et le pinceau des mots pour que visage vive.

 

Cathy Garcia

 

 

M_Gosztola.jpg Matthieu Gosztola, né le 4 octobre 1981 au Mans. Doctorant en littérature et sciences humaines, il enseigne la littérature au Mans et à Paris. Il a écrit des critiques dans les revues Europe, Acta fabula, CCP (Cahier Critique de Poésie), Histoires Littéraires, La Main millénaire, remue.net, Poezibao, Terre à Ciel, La Cause littéraire, Contre-allées, ainsi que dans les revues de la Comédie-Française, des Presses Universitaires de Rennes et des éditions Du Lérot. Pianiste et compositeur de formation (sous la direction de Walter Chodack notamment), il donne des récitals, en tant qu’interprète ou improvisateur, qu’ils soient ou non reliés à la poésie comme lors du festival international MidiMinuitPoésie.

 

Publications :

 

Sur la musicalité du vide, Atelier de l’agneau, 2001

Travelling, Contre-allées, 2001

Les Voitures traversent tes yeux, Contre-allées, 2002

Sur la musicalité du vide 2, Atelier de l’agneau, 2003, Prix des découvreurs 2007

Matière à respirer, Création et Recherche, 2003, Livre d’art en collaboration avec le photographe plasticien Claude Py

Recueil des caresses échangées entre Camille Claudel et Auguste Rodin, Éditions de l’Atlantique, 2008, Photographies et poèmes agrémentés d’un dessin à l’encre de Chine de Zuzanna Walas

J’invente un sexe à ton souvenir, Minuscule, 2009

Une caresse pieds nus, Contre-allées, 2009

Débris de tuer (Rwanda 1994), Atelier de l’agneau, 2010

Un seul coup d’aile dans le bleu, Fugue et variations, Editions de l’Atlantique, 2010

Ton départ ensemble, La Porte, 2011

Un père (Chant), Encres Vives, 2011

La Face de l’animal, Éditions de l’Atlantique, 2011, Photographies et poèmes

Visage vive, Gros Textes, 2011, Photographies et poèmes

Contre le nihilisme, Éditions de l’Atlantique, 2011, Essai

Le génocide face à l’image, Éditions L’Harmattan, collection Questions contemporaines, 2012, Essai de philosophie politique

Traverser le verre, syllabe après syllabe, La Porte, 2012

Ariane Dreyfus, Éditions des Vanneaux, 2012, Essai

 

 

Note publiée sur : http://www.lacauselitteraire.fr/visage-vive-matthieu-gosztola.html

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