Elias Canetti
Toutes les choses qu'on a oubliées hurlent à l'aide dans nos rêves
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Toutes les choses qu'on a oubliées hurlent à l'aide dans nos rêves
Ne pas s’attarder
sur les traces du malheur
car il pourrait faire volte-face
in Naissance quotidienne
Dents de mousse, doigts de laine, foie mi-cuit
Et le cerveau parti un jour je ne sais très ailleurs
Où vaguent les chimères
Tout au bout de ma laisse
Pour ne pas déranger
Cathy Garcia a fait paraître en mars 2014 aux éditions Cardère « fugitive ». Avec ce livre elle parvient à la plénitude de son art. Très beau livre dont les illustrations originales de l’auteure, artiste accomplie, sont elles aussi comme dans le livre de F. Ricard en noir et blanc et font de ce livre, un véritable livre d’artiste à la portée de tous (12€).
Lecture de « fugitive » par Christian Saint-Paul à écouter ici dans l'émission du 20 août :
http://les-poetes.fr/emmission/emmission.html
Purgatoire du quotidien, éditions A tire d’ailes, 2014, 22 pages, 5 €
Un « Purgatoire du quotidien »en rien soporifique, où la marque de fabrique de cet humour caustique pratiqué par l’éditrice-poète autodidacte des Nouveaux Délits, Cathy Garcia, se reconnaît dès l’ouverture de ce court et dense opus rafraîchissant, jubilatoire, couleur soleil noir. Un florilège de notes journalières sur la vie, le temps, le monde, les autres, etc. Roboratif, hors des sentiers battus, parfois subversif, toujours salutaire !
Cathy Garcia en annonce la couleur : « Si nous vivions au paradis, je répondrais moi aussi à l’appel, mais nous vivons au mieux au purgatoire ».
Nous savons où nous situer, à la frontière entre le désarroi et la dérision, dans une COURSE QUOTIDIENNE où
Sur la ligne de départ
Comme pour une course,
L’athlète au foyer compte mentalement
Les sauts d’obstacle.
Et si notre foi dans le présent n’a pas été tout à fait sauvegardée, on se range entre la solitude que l’on sait rendre librement nombreuse, le découragement et le rire mais jamais du côté de la résignation : La résignation est un suicide quotidien, lit-on dans l’exergue de l’opus, citation du romancier Balzac. La vie une comédie humaine, soit. Mais l’écriture recoud les déchirures. Comble chaque
LACUNE
Il me manque des pages au manuel de la vie,
entre autres celles concernant le logiciel
de compression des choses à faire.
Les rebonds sont au rendez-vous pour repartir de plus belle, avec un bouquin, un crayon, un cahier, même la figure copieusement aspergée par les phéromones d’un chat (p.11), et l’on parle de l’avenir, malgré tout :
NO FUTUR
Famille motoculteur et tronçonneuse se lancent à l’attaque
et vas-y que se lamentent les moutons en ces temps
foutuistes. Les nuages arrivent de partout, meutes aux
ventres sales. Souffle, fraîcheur, caresse et les antennes nous
grillent.
L’humour ici se pratique en solo, en famille, avec une « madeleine Thaï »,dansune « minute zen », entouré pourquoi pas de chats, au pire de « gens qui vous quotidiennent le quotidien. / On appelle ça des cons » et même au sein du « purgatoire vert » autour de chez soi ; en prose, en distiques, en tercets, avec l’air quotidien d’un haïku ou l’air haïku du quotidien, tout dépend de l’humeur de chacun(e) – par exemple :
PANACHÉ ZEN
Il fait très beau, le ciel est très bleu, les oiseaux chantent très
bien. C’est le jour du premier passage du nuage nucléaire
japonais.
Humour en touches de petites vérités journalières assénées « on the road »,en hamac (« machine à suspendre le temps »), à l’endroit, mieux, à l’envers sans manquer de diffuser pourquoi pas, par-ci par-là – voire en épilogue – comme une petite leçon de vie à celles et à ceux qui n’auraient pas encore compris à quoi elle tient : à presque rien. Un fil. Celui d’un micro-poème pourquoi pas. Un microcosme d’immanquable et féroce bêtise, un monde fait de beautés paradoxales ravissantes et/ou ravies. Le bonheur. Un bonheur immense dans notre décor minuscule.
TROP MINUSCULES
D’un beau vert pomme mais si minuscule, vraiment la moitié
d’un puceron, le voilà sur mon doigt. J’ai soufflé mais il est
resté là, alors je l’ai poussé un peu, et encore un peu et il a
fini par avoir l’air……. Mort. Alors je l’ai poussé pour de bon,
avec tout de même un genre de remords, et c’est alors que ça
m’est venu, je me suis dit que toutes les injustices de notre
condition humaine viennent peut-être de ça… Nous sommes
simplement trop minuscules !
Murielle Compère-Demarcy
Source : http://www.lacauselitteraire.fr/purgatoire-du-quotidien-cathy-garcia
Traduit du suédois par Martine Desbureaux
JC Lattès, février 2015
310 pages, 21,50 €
Terriblement noir, mais captivant, ce roman pourrait tout aussi bien être classé dans les romans pour ados, car il s’agit d’une histoire qui les concerne directement. L’histoire d’une collégienne, Petronella, dit Nella et son petit frère collégien lui aussi, Robert : deux enfants qui ont tout pour en baver. Un père en prison, mais c’est pire quand il en sort, une mère alcoolique qui ne s’occupe pas du tout d’eux, pas d’argent et quasi pas d’amis. Le petit frère, surnommé Robbie, lui est carrément devenu le souffre-douleur d’une bande de tortionnaires un peu plus âgés. Il cumule les tares et ces brimades quotidiennes n’arrangent rien. Sa sœur fait tout ce qu’elle peut pour le défendre, le soutenir et s’en occuper à la place des parents défectueux. Pire que défectueux, des parents qui en rajoutent dans les problèmes au lieu de les régler. Les tortionnaires en question, surtout leur chef, Gérard, ne se contentent pas de harceler Robbie, leurs petits jeux qui n’ont rien de drôles, deviennent de plus en plus cruels, cela vire à la persécution pure et dure et Nella devient victime à son tour d’humiliations et de chantage, quand d’autres exactions de la bande prennent un tournant bien plus compliqué.
Le frère et la sœur surnagent tant bien que mal, persuadés, et pas forcément à tort, qu’on ne peut compter sur les adultes, à part peut être, celui que Nella appelle le Professeur, un Hongrois très cultivé, collectionneur un peu fou, qu’ils avaient rencontré à la bibliothèque, mais lui-même vit seul en marge de la société. Pour Nella, Robbie le petit frère, c’est toute sa vie, il n’y a que lui qui compte, le protéger quel qu’en soit le prix.
C’est dans ce contexte ultra déprimant que quelque chose ou plutôt quelqu’un d’incroyable, d’impossible même, va faire irruption. Nella a un seul copain, un seul, Tommy et Tommy a deux grands frères, deux pêcheurs et ce qu’ils ont ramené, puis caché suite à une pêche un peu frauduleuse en eaux danoises, est tout simplement impensable. Une créature qui n’existe pas, qui ne peut pas exister et qui catalyse comme Robbie toute la haine et la cruauté de ceux qui l’ont capturé par accident, eux et d’autres aussi… Cette créature a une force hors du commun mais elle a été frappée, torturée, blessée et elle ne peut retourner d’où elle vient sans aide et c’est Nella qui va entrer en communication avec elle. Nella aidée de Tommy qui vont tenter de réparer, mais il est difficile et même dangereux d’aller contre la bêtise et l’inconscience humaine.
Ce roman tout en décrivant une réalité sociale suédoise peu connue, s’appuie sur le côté le plus obscur de l’Homme, à côté de laquelle un monstre des abysses parait comme un ange de lumière, cette ombre qui pousse dans n’importe quel terreau pour développer cruauté, sadisme, haine de l’autre, lâcheté, cupidité. Certains y succombent par faiblesse, d’autres par on ne sait quoi d’irrémédiablement mauvais en eux, ceux là pour qui faire du mal devient un sacerdoce.
L’homme-sirène nous pose une question, et il n’y aura pas de réponse, car il est peut-être impossible d’aller contre la bêtise et l’inconscience humaine. Aussi la question reste en suspens, comme un rêve qui met du temps à se dissiper, quelque chose qu’on a faillit toucher du doigt et qui a disparu, et avec elle, l’espoir que les choses puissent être autrement.
Cathy Garcia
Carl-Johan Vallgren est né en 1964 en Suède. Il est l'auteur de 9 romans, mais aussi musicien (7 disques produits à ce jour, sous son nom). Il vit à Stockholm. Il a reçu en 2002 le prix August pour son roman Les Aventures fantastiques d’Hercule Barfuss (Lattès, 2011). Traduit en 25 langues, ce livre a conquis le marché international et est devenu un best-seller dans plusieurs pays dont l’Italie, la Russie et l’Allemagne.
Note publiée sur la Cause Littéraire.
Je remonte
le zig-zag
de la foudre
jusqu’au coup.
in Que la musique
Il faut savoir changer pour rester soi-même