Déesse fluviale en ivoire - Begram - Ier siècle av. jc - Royaume de Bactriane (Afghanistan)
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et si les ailes des anges étaient en fait des oreilles...
Depuis septembre, je n’ai pas écrit un seul poème. Ma tête est ailleurs et ma muse fait la gueule. A croire qu’elle n’aime pas les hommes. Pas ceux qui me détournent d’elle en tout cas.
cg in Journal 1995
J'ai hanté son sexe cercueil et caverne
où naître et mourir étaient une même jouissance
d'algues d'ouest collant aux reins huilés du voyageur
brûlé par les étapes
initié par les poussière et les migrations de comètes
J'ai hurlé de joie dans cette monstrueuse verdure
incendié par des soleils tropicaux
O danse de sioux des globules rouges
O martèlement de tambours nègres des doigts
luisants de semence
j'ai dormi une aube plus vaste que le désert des Tartares
in 19 lettres brèves à Nora N.
Enterrez-moi dans son nom
qu'avec elle je voyage partout
dans le bleu des triangles d'oiseaux sauvages
dans le pollen des fous de Bassan
dans le noir ténébreux des énigmes
dans la chute libre des sangs qui, une fois, ont épousé les soleils caraïbes.
Enterrez-moi dans sa gestualité inquiète
dans sa beauté tuméfiée
dans son agenouillement face aux ordures de la nuit
dans le vert espérance de sa durée.
De sa violente présence
aux vagues et aux Etoiles
aux enfants et aux fées.
in 19 lettres à Nora N.
ne cognez pas à ma vitre
je n'y suis pas
ne me hélez pas entre
les grands arbres de ciment muet
je n'y suis pas
ne me sonnez pas au téléphone
ne courez pas derrière
mon ombre tragique Rue Saint-Martin
je n'y suis pas
ne m'invitez pas à dîner
à danser à boire
Porto Tokaÿ eau de vie
je sais «le beaujolais nouveau
est arrivé»
je n'y suis pas
ne vous glissez pas chaleur ténue
entre les draps défaits
dans le pauvre lit d'effroi
je n'y suis pas
ne fouillez pas vers ma bouche
qui sait se faire lait pur
fruit mat mais aussi lueur de corbeau
et petite pluie de novembre
je n'y suis pas
ne demandez pas à la concierge
l'étage où habite la blessure
sans limites sans nom sans sommeil vrai
je n'y suis pas
ne tourmentez pas je vous en prie
ne tourmentez pas la nuit
pour qu'elle vous dise
sur quelle falaise j'efface mes traces
sous quelle lune d'acide je soliloque
loque de voix
elle ne saurait rien répondre
in 19 lettres brèves à Nora N.
Un corbeau s’écume sur les galets bleus, comme une épave entre les cuisses. Reste la flamme. Les rayons de vent, le souffle du soleil, le chant de la tronçonneuse et la pétarade des oiseaux.
cg in Calepin paisible d'une pâtresse de poules
(Nouveaux Délits, coll. Délits vrais, 2012)
Chacun sa chance de prendre racine et vivre encore, sous une autre forme…
Mourir, renaître, mourir…
CG in Journal 1999
Ne m'enlevez pas la vivante coupée de mon sang par une distance plus terrible encore
que cet espace vaste où rugissent mes mots plaintifs mes mots fous mes mots de métal enragé
Quelque part peut-être dort-elle
caressant encore le corps traversé par les rudes lames des solitudes
Quelque part peut-être gémit-elle
à nouveau reprise par la chaude clarté de mes paumes bavardes
tandis qu'ailleurs une chair bouleversée écrase un cri
d'agonie et de fureur
tandis qu'ailleurs deux yeux se posent comme des blessures sur la grande plaie visible
O Dieux – parce que cette nuit je suis un petit enfant innocent comme l'haleine du fleuve et désarmé –
Ne m'enlevez pas la vivante
qui s'en est retournée au pays sien avec ma terrifiante douceur touchée à mort
enracinée dans son ventre bleu au fond duquel hurle un visage
abordant la nuit de biais
sachant qu'elle mord
Qu'elle fait mal
Qu'elle ne pardonne pas.
in 19 lettres brèves à Nora N.
D'après le premier tome de la Trilogie des jumeaux, un roman d'Agota Kristof qui m'avait profondément marquée : Le Grand Cahier, publié en 1986. Le deuxième tome étant La Preuve et la trilogie se terminant avec Le Troisième Mensonge.