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  • Alfred Kubin

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    EN NERFS ET EN BOSSES

    BIEN EN CHAIR

    COMBLER LA FOSSE

     

     

    Mordre

    Les grappes de nuit lourdes amères

    Mordre

    Jusqu’au sang le soleil

    Mordre la peau

    Punir les marques

    Du temps irrespectueux

     

     

    Abîmer pour abîmer

    Creuser le vertige

    Sculpter un scalpel

    Dans le silex des os

     

     

    Fendre le fruit

    Profaner sa chair

    D’un rite animal

    D’un rire rupestre

     

     

    Injecter au cœur

    Un virus de vie

     

     

    Clarté sereine

    Éblouissement

    Orageuse beauté

    De l’entraperçu

     

     

    Gravir un bout d’éternité

    Était-ce bien la peine ?

     

     

    Plaie obscure de la nuit

    Dans nos paumes accolées

    Rêve bu au carreau du destin

     

     

    Est-ce en creusant que l’on ouvre un espace ?

     

     

    À coup de langues de pioche

    Tirer du sensible un semblant de sens

    Ou tout au moins l’essence

    Le sacre du réel

     

     

    L’homme qui brûle

    Dit à l’homme qui pleure :

     

    Elève-toi !

     

    Jette la dépouille du monde

    Et danse !

     

     

    cg in Mystica perdita, 2009

    (in Eskhatiaï, Ed. de l'Atlantique 2010)

     

     

  • Henri-François Guitard

     

    Non, la révolte me tord,

    Moi l’on ne m’aura pas, moi je résisterai.

    Curieuse façon de s’encourager

    Que de penser à tous ceux qui n’ont pas été les plus forts

    Je veux les supprimer, ne plus être le jouet

    De ces fatalités inexprimées, de ce sort

    Que je voudrais étrangler

    Ou bien pulvériser en le tenant à bras le corps.

    L’idée s’étend, tout devient chaotique.

    Ma main s’appesantit en des combats stupides.

    Oh ! je voudrais quelques obscur narcotique

    Qui me délivre de cette guerre sordide. 

     

     

     

     

  • Hubble Space Telescope - Neptune

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    Voyage au bout de ma nuit. Journal d’une instabilité psychique. La lune plonge et baise avec Neptune. Rythme. Énergie. Son. Vibration. Euphonies incantatoires. Parfois la route est large et resplendissante, tellement que les yeux se ferment, éblouis. En profiter pour faire pénétrer le vent du large dans les poumons. Se mettre au diapason. Ne l’avais–je pas dis ? « Je trouve la paix sur les ailes d’un délire ». J’explore entre deux avenues de soleil, des catacombes étrangement familières. Je suis au-dessous de la ligne de flottaison. Faire confiance. On ne risque jamais rien de plus que sa vie. Naître, c’est risquer sa vie. Je me fraie un passage entre deux falaises, c’est parfois d’une étouffantes lenteur, puis soudain les rapides et la navigation à l’instinct. Prise de risque oui, mais nulle part où débarquer, alors il faut continuer, louvoyer entre les falaises abruptes, immenses. C’est une naissance longue, compliquée, douloureuse mais qu’importe, il ne s’agit toujours que d’ici et maintenant. Je m’épouvante d’un rien, je me réjouis d’un rien, c’est un genre d’équilibre, de grand écart. La vie n’est-elle pas un grand écart ? Buissonnière d’essence. Il me faut encore changer de peau, ma peau d’âme, la peau intérieure, grand ménage. Une période riche, parfois atrocement dérangeante… La peur jugulante. De nouveau crever d’anciens yeux pour déciller les nouveaux, me traquer dans les moindres recoins. Je suis le pisteur, je flaire mes déjections morales, me suis à la trace de mes compromissions, me fouette l’ego parce que j’aime ça. C’est comme une douche glacée en plein hiver dans la montagne.

     

    cg in Journal 2005

     

     

     

  • Charles Baudelaire

     

    L’opium agrandit ce qui n’a pas de bornes ;

     Allonge l’illimité,

     Approfondit le temps, creuse la volupté.

     Tout cela ne vaut pas le poison qui découle de tes yeux, de tes yeux ouverts ;

     Lacs où mon âme tremble et se voit à l’envers…

     Mes songes viennent en foule

     Pour se désaltérer à ces gouffres amers

     Tout cela ne vaut pas le terrible prodige de ta salive qui mord

     Qui plonge dans l’oubli mon âme sans remord

     Et, chavirant le vertige,

     La roule défaillante aux rives de la Mort ! 

     

     

     

     

  • Co Rentmeester - Nu photographié avec un Polaroid SX-70 camera - 1972

    Co Rentmeester A nude photographed with a Polaroid SX-70 camera (with a 15-second time exposure), 1972.jpg

     

    Se séparer. Les pissenlits en graines, réfractaires aux vœux, nous manquons de souffle. Se séparer. Être dans l’instant d’un bourdonnement qui passe, faire taire les pensées, l’espoir, le désespoir. Se séparer. Arrêter les pensées ? Impossible ! Elles tournent, tournent, infernal manège, on n’en veut pas, on n’en veut, à l’autre. Un bourdon sur ma peau, doux, mais aussitôt la peur, ancestrale peut-être, de la piqûre.

     

    cg in A la loupe, tout est rituel