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  • Georges Cathalo

     

    Un peu plus chaque matin

    Vivre doit s’écrire debout

    A l’encre rouge

    Seul de préférence

    Avec des cartouches de mots

    Prêtes à servir

    Dans un silence de cathédrale.

     

    in Quotidiennes

     

     

     

  • Bruno Sourdin

    Le juke-box magique de Claude Pélieu

     

    Un voyageur pris de vertige dans la chambre froide Le fils du Soleil sans bras ni jambes haletant dans les égouts Des diplomates attrapés au lasso sous une étoile filante Une vague de sang et d’os La sueur d’un chaman ébloui Les sanglots du Grand Esprit scalpé dans la cage d’escalier Une main invisible tombée du ciel Les neufs inconnus assis secrètement dans l’arrière-salle d’une cafétéria Des milliers de rats télépathes dévalant l’escalier Un babouin frappé à mort devant le night-club Et l’image syncope d’un homme sans tête faisant peau neuve de l’autre côté de la terre Un téléphone sauvage annonçant l’Apocalypse L’agent secret Cheyenne disparaissant sur la voie express sans laisse de trace Des terroristes échangeant des salutations muettes devant les caméras de CNN Le chant secret d’un enfant Un écureuil sautillant à perdre haleine sur la tombe de Mister Freedom La tristesse du Roi du monde dans le trou noir de Times Square Baron Samedi décapité devant la station-service Un laveur de vitres pris de panique au-dessus du gouffre Les balles traçantes de l’automate aux yeux bandés Un souvenir lumineux de Brocéliande Flashes d’éternité dans le juke-box magique de Claude Pélieu. Le télégramme d’un sorcier empoisonné fiché par l’ordinateur central Le grouillement des blattes derrière la porte blindée de la chambre à gaz Des superstars secouées de frissons en entrant dans le labyrinthe sous le regard de la milice de la téléréalité Des centaines de cadavres engloutis dans les tours perdues Un cortège d’immortels armés jusqu’aux dents dans le hall de l’aéroport Le rêve d’un singe aux yeux d’or emporté dans les airs au-dessus de Brooklyn Les dernières minutes de Captain Parano Le baratin top secret des machines de contrôle dans les rues vides Une pile atomique clignant sous un ciel immense La police le FBI et la CIA patrouillant jour et nuit Et Batman couvert d’excréments braillant derrière la clôture Le manège déglingué de Long Island avec l’usine des sanglots Un dealer égorgé balayé par le vent Des millions de fourmis empoisonnées sortant des entrailles de la cité grise La douleur des supérieurs inconnus se cachant dans la foule La haine de l’homme-tronc sur la piste des forces du Mal Docteur Minuit prenant le micro dans le cercle magique car le spectacle doit continuer La foudre frappant le Chien jaune bâillonné sur le toboggan Un garçon de courses à la voix brisée près du fleuve Les poètes de la nuit demandant l’asile politique Un souvenir lumineux des soirées folles zen vodka et haïkus Flashes d’éternité dans le juke-box magique de Claude Pélieu. Des hommes en colère tournant en rond dans le cabinet noir avant que la ville ne s’éveille Un veilleur de nuit électrocuté dans le tunnel Le cri d’effroi des bébés qui naissent derrière la palissade Sifflets sirènes de flics et bruits de klaxons passant en boucle à toute vitesse sur une bande magnétique dans un repli de l’espace Lambeaux de phrases malaxées du DJ magicien haletant pour la dernière fois devant la mer Un collage de percussions et de machines à sous sur le mur d’écrans La brebis clonée puante enterrée dans un coin obscur Des centaines de micros truqués hystériques au-dessus de Wall Street La fraternité des veilleurs en larmes disparaissant au milieu des flammes Les battements de cœur sacrés de trois anges sur le paratonnerre parlant une langue totalement inconnue Et le réveil hargneux de la Vieille Bête ivre de haine et de sang dans un immeuble oublié de New York Le croassement d’un corbeau en toute liberté dans le ciel mystérieux du grand univers La valise en fer d’un rescapé de l’Holocauste Des centaines de gyrophares contre les murs gris de la maison des fous Un chanteur écorché vif devant la porte des latrines La pulsation de guerre du commando suicide hurlant dans le ciel Un tourbillon de pylônes et de guitares brisées L’œil animal du Môme bleu attendant dans sa chambre pourrie du Bronx L’horreur programmée de milliers de fenêtres vides La nymphe Calypso courant dans les rues glacées au bord de la tombe Un souvenir lumineux de la vallée des Mohawks loin de tout assis regardant la chute des feuilles Flashes d’éternité du juke-box magique de Claude Pélieu.

     

     

     

  • Jean Dif

     

    visage du Bouddha

    au front traversé

    d’une mèche de verdure

    au pays où les arbres

    sont les berceaux des ruines

     

    in Sous les couteaux des horloges

     

     

     

  • Denis Guillec

     

    Si peu loin tant d’amers si peu loin englué « je » voudrait tant pouvoir mais main est immobile et dire bulle en bouche moi sous cellophane et juste de l’autre côté toi toi et les choses toi juste de l’autre côté.

     

    in Je(s)

     

     

     

  • Roger-Gilbert Lecomte

     

    La femme à chevelure
    D'orages

    Aux yeux d'éclipse
    Aux mains d'étoiles rayonnantes
    A la chair tragique vêtue de la soie des frissons
    A la face sculptée au marbre de l'effroi
    Aux pieds de lune et de soleil
    A la démarche d'océan
    Aux reins mouvants de vive houle
    Ample et palpitante

    Son corps est le corps de la nuit
    Flamme noire et double mystère
    De son inverse identité qui resplendit
    Sur le miroir des grandes eaux

     


    in Sacre et massacre de l’amour