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  • Le VIVANT qui se défent de Vincent Verzat (2025)

    En version intégrale.

     

    Vincent Verzat filme les mobilisations écologiques depuis 10 ans sur la chaîne YouTube Partager c’est Sympa (310k abonné·es). Partant d’un récit personnel et sensible, le film “Le VIVANT qui se défend” retrace son cheminement entre militantisme et naturalisme, sa recherche d’un équilibre entre combat et contemplation, traçant un chemin pour vivre dignement et affronter ce qui vient.


    Des luttes forestières du plateau des Millevaches à la tanière d’une famille de blaireaux, en passant par les méga bassines du Poitou, les cerfs du Vercors et l’autoroute A69, “Le VIVANT qui se défend” fait le lien entre les animaux sauvages et les luttes qui sont menées partout en France contre la destruction de leurs habitats. 


    Un documentaire de Vincent Verzat, auto-produit et auto-distribué par Partager c'est Sympa.

     

     

  • Maksym Kryvtsov (1990-2024)

     

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    Un compagnon d’armes du poète, photographe et soldat Maksym Kryvtsov, en Ukraine, en 2023.

    les photos sont extraites de son recueil « Poèmes de la brèche ». 

     

     

    Il a déménagé à Boutcha à la mi-mars 2021
    a pris un petit appartement en sous-sol et un chat
    dont la fourrure avait la couleur du glaçage sur les éclairs.

    Il est allé aux cours d’anglais, à la salle de sport et à confesse
    il aimait regarder la neige tomber
    et la rue disparaître dans la brume.

    Il écoutait Radiohead, les vieux albums d’Okean Elzy, la pluie, l’orage et les battements du cœur d’une fille
    avec laquelle il s’endormait dans son appartement en sous-sol
    et se réveillait dans son appartement en sous-sol
    il embrassait son visage chaud
    se serrait contre son corps collant
    plongeait avec sa paume dans la vague de ses cheveux
    et se débattait dedans comme une mouche prise dans une toile.

    À l’automne, elle l’a quitté
    comme les oiseaux quittent les bois
    comme les ingénieurs quittent l’usine à la fin de leur journée
    et elle est partie en Pologne
    pour y rester.

    Il a pris le chat qui ressemble à une pâtisserie
    et a dit : chat, on doit partir
    comme un matin
    comme la vie
    comme la maladie
    il nous est arrivé
    froide comme la glace
    une guerre
    la leçon qui s’intitule "vie tranquille" est finie.

    Dans la brume disparaît la rue
    tombe la pluie
    on ne l’écoute absolument pas
    le chat s’est enfui dans le champ et il a pour nom le vent.

    Sur la croix comme sur une carte d’identité, il est écrit :
    Ci-gît le numéro 234 souvenir éternel.

    Elle rêvait d’un voyage en Patagonie
    d’une histoire avec un chanteur de rock
    d’une réincarnation en tsarine ou en poisson.

    Elle prévoyait d’écrire un livre
    sur la mémoire,
    fragile comme la croûte d’une crème brûlée
    délicate comme l’amour
    qui s’écoule tel du sable entre les doigts
    et disparaît
    elle n’est plus.

    Elle aimait son vélo
    la glace au lait concentré sucré
    collectionnait les feuilles d’automne
    comme des timbres
    aimait observer les nuages
    éparpillés comme le pop-corn
    d’un gosse débraillé au cinéma.

    Elle partait seule en montagne
    pour inhaler un grand bol d’air et d’aiguilles de pin
    cueillait de la menthe et de l’épilobe en épi
    cueillait des étoiles, les rangeait dans sa mémoire comme dans un album photo.

    Son père était mort en deux mille quatorze
    elle avait quatorze ans quand sa mère était partie en Italie
    pour y rester.

    Elle évitait les relations, parce qu’elle attendait le chanteur de rock.

    Quand l’hiver avait décidé de s’installer
    au minimum jusqu’à l’automne suivant
    le signifiant avec douleur et fracas
    et que ça sentait dans la rue
    le silence horrifiant
    le feu et la terre
    les corbeaux s’envolèrent.

    Alors elle garda la tête froide
    attrapa sur l’étagère du haut une petite boîte
    d’épilobe en épi et de thym séchés
    infusa les feuilles
    versa dans un thermos
    et l’apporta au poste
    aux gars de la défense territoriale.

    Sur la croix, comme un tatouage il est tracé :
    Ci-gît le numéro 457 souvenir éternel.

    Elle vivait près du parc
    dans un petit immeuble
    nourrissait les écureuils
    nourrissait les chiens
    nourrissait les ivrognes
    elle était la gardienne de l’automne
    et la gardienne des souvenirs
    éparpillés comme du sucre en poudre.

    Elle avait 54 ans
    elle travaillait dans une entreprise de service public
    portait un bleu de travail du magasin Épicentre
    et circulait en vélo.

    Elle se peignait les ongles en pourpre
    se peignait les lèvres en pourpre
    et chaque nuit elle faisait des rêves pourpres.

    Elle regardait l’émission "L’Ukraine parle"
    essuyait ses larmes avec un mouchoir blanc
    se rappelait l’enfance
    la chaleur du soleil d’alors
    elle lisait un livre de Kokotioukha avant de dormir
    et plongeait tel un scaphandrier dans ses rêves
    pourpres comme ses ongles
    pourpres comme ses lèvres.

    Elle attendait samedi
    pour ôter la poussière dans chaque pièce
    laver les vêtements
    préparer un gâteau aux pommes
    et penser au passé.

    Elle fut tuée le cinq mars
    en arrivant au coin de sa rue
    en vélo
    tuée comme la nuit tue le jour
    comme l’automne tue l’été
    crucifiée par une rafale de mitrailleuse de char.

    Sur la croix comme sur un panneau d’affichage, on lit :
    Ci-gît le numéro 451 souvenir éternel.

    Dans les rues et dans les champs
    ont surgi de nouveaux calvaires
    mais leurs clous sont des balles
    mais leurs lances sont des canons.

    On voulait
    compter les jours jusqu’à l’été
    compter les chatons
    compter les enfants
    compter les étoiles
    compter jusqu’à cent, et s’endormir.

    Ci-gît le numéro 176 souvenir éternel
    Ci-gît le numéro 201 souvenir éternel
    Ci-gît le numéro 163 souvenir éternel
    Ci-gît le numéro 308 souvenir éternel.

     

    Traduit de l’ukrainien par Nastasia Dahuron

     

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    Merci au Hasard de connivences

    https://auhasarddeconnivences.eklablog.com

     

     

    Deux autres recueils de poètes ukrainiens viennent de sortir publiés en français :

     

    « C’est ainsi que nous demeurons libres » (Dasein oborona prysutnosti), d’Yaryna Chornohuz, traduit de l’ukrainien par Ella Yevtouchenko et Frédéric Martin, Le Tripode, 128 p., 16 €.

    « Nous étions là » (Tut buly my), d’Artur Dron, traduit de l’ukrainien par Nikol Dziub, Bleu et jaune, 128 p., 18 €, numérique 12 €.

     

    *

    GUERRES : STOP !

     

     

     

  • Nathalie Quintane - Soixante-dix fantômes (choses vues)

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    La Fabrique éditions, 17 octobre 2025, 200 pages

    https://lafabrique.fr/soixante-dix-fantomes/

     

     



    Qu’est-ce qu’une expérience fasciste ordinaire ? Qu’est-ce qu’un flash fasciste dans une vie normale ? Un détail, un mot, un geste, dont vous avez brutalement la certitude que c’est ça, que, cette fois-ci, vous n’interprétez pas, ce n’est pas de la parano, c’est pour de bon, pour de vrai. Vous voilà saisi·e. C’est ce saisissement, et ce qui l’a provoqué, que décrivent les courts textes de Soixante-dix fantômes. Parfois, une sortie possible s’ouvre…

     

     

    Nathalie Quintane publie chez P.O.L, des livres sans indication générique. À La fabrique, elle est l’autrice d’Un hamster à l’école, Ultra-Proust et Les années 10.

     

     

  • Lisa O'Neill - The Wind Doesn't Blow This Far Right

     

     

    THE WIND DOESN’T BLOW THIS FAR RIGHT

    I’ve lately been thinking of an old friend,
    Who I haven’t seen in a while
    Last night I dreamed that the same friend, passed without saying goodbye

    Oh, to be wild like the roses
    Oh, to be red with delight
    My blood is red out of fury
    The wind doesn’t blow this far right
    Some terrors are born out of nature
    Some terrors are born overnight
    Some terrors are born out of leaders
    With their eye on a different prize

    The thing is, some leaders are players
    And players sometimes can be clowns
    And clowns then sometimes can be dangerous
    When they’re there and yet they can’t be found..
    The Big Mac, 
    The big man,
    The big bomb
    The power of money and lies
    The power of fear in the people
    The wind doesn’t blow this far right

    Some terrors are born out of nature
    Some terrors are born overnight
    Some terrors are born out of leaders
    With their eyes on a different prize

    Oh, to be wild like the roses
    Oh, to be red with delight
    My blood is red out of fury
    The wind doesn’t blow this far right

    Drill baby drill
    Don’t baby don’t
    Don’t you hear the winds
    Feel the fires as they burn
    Beautiful planet
    Beautiful home
    Drill baby drill
    Don’t baby don’t

    Kill baby kill
    Don’t baby don’t
    Don’t you hear the kids as you blindly bulldoze on
    Beautiful children starved to the bone
    Kill baby kill
    Don't baby don’t 

     

     

  • Ceija Stojka (1933-2013), artiste d'origine rom, survivante du Samuradipen (Porajmos)

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    Auschwitz-Birkenau, Sans titre, 28/07/2009

     

     

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    Auschwitz

     

     

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    Auschwitz

     

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    Birkenau - 1944

     

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    "En acceptant de publier, à partir de 1988, les cahiers où elle consignait les souvenirs des deux années de son enfance passées dans les camps de concentration, Ceija Stojka, Rom autrichienne née en 1933, fit œuvre exceptionnelle. Elle rompait, en effet, le silence qui a longtemps entouré « l’holocauste oublié » de ceux qui furent déportés comme « Tsiganes » (Zigeuner) par les nazis, sous le prétexte qu’ils étaient génétiquement asociaux. Quand elle se mit tardivement à peindre et dessiner, à la fin des années 1990, c’est une autre exception qu’elle réalisa, en choisissant les voies de l’expression figurée dont s’est généralement détournée une tradition culturelle ayant privilégié les formes de la transmission orale. (...) déportée en 1943 à l’âge de neuf ans avec sa mère et son jeune frère, dans les camps de concentration d’Auschwitz, Ravensbrück puis Bergen-Belsen : Sogar der Tod hat Angst vor Auschwitz [« Même la mort est terrifiée à Auschwitz »] (...)  Ceija Stojka est née en Styrie dans une famille de marchands de chevaux relativement aisée qui, en été, se déplaçait à travers le Burgenland et la basse Autriche et, en hiver, résidait à Vienne ou dans les environs. Cette vie régulièrement rythmée fut brutalement interrompue après l’annexion de l’Autriche par l’Allemagne, comme en témoignent sobrement les premières lignes du récit autobiographique publié en français sous le titre Je rêve que je vis : « Avant, quand on roulait, les vieux chantaient et racontaient, et tout à coup, il y eut cette fracture » [Stojka, 2016 : 17]. Dès 1938, en effet, les Roms et Sinti d’Autriche furent privés de droits civiques, empêchés de se déplacer et obligés de rester cantonnés dans des roulottes ou des baraques, en des lieux assignés. Leur déportation commença en 1941, sous prétexte d’une lutte préventive contre le crime et au nom d’une disqualification raciale fondée sur des caractérisations pseudo-scientifiques. C’est ainsi que le père de Ceija Stojka fut arrêté, conduit à Dachau et exécuté. La survie de la famille, privée de moyens de subsistance, devint alors difficile. Grâce à sa débrouillardise et à quelques solides amitiés, la mère parvint à nourrir ses six enfants et à échapper à diverses arrestations. Le décret du 16 décembre 1942 qui ordonna la déportation de tous les « Tsiganes » vivant encore dans le Reich allemand, fut à l’origine de rafles massives en mars et avril 1943. La famille fut arrêtée le 31 mars 1943. Ceija, sa mère et son jeune frère furent envoyés à Auschwitz. Ceija y fut tatouée avec le numéro Z 6399 (Z pour Zigeuner). On sait qu’un an après, au printemps 1944, soixante-dix pour cent de l’ensemble des Roms et Sinti déportés à Auschwitz étaient morts. Les survivants furent soit déclarés aptes au travail et transférés dans d’autres camps, soit gazés dans la nuit du 2 août 1944. Ceija et sa mère furent d’abord envoyées à Ravensbrück ; elles parvinrent finalement au camp de Bergen-Belsen en janvier 1945. Les troupes britanniques qui libérèrent ce camp le 15 avril, se retrouvèrent face à un effroyable spectacle : soixante mille survivants côtoyaient trente-cinq mille morts qui n’avaient pas été enterrés. Construit pour accueillir quelques milliers de détenus seulement, le camp de Bergen-Belsen avait vu l’afflux de déportés rapatriés de camps plus proches de la ligne du front. Plus aucun ravitaillement n’avait été assuré pendant les semaines précédant la fin de la guerre. Les maladies contagieuses, typhus et typhoïde principalement, s’étaient répandues. Dans les jours qui suivirent la libération, quatorze mille personnes moururent encore."

     

    Source : https://shs.cairn.info/revue-ethnologie-francaise-2018-4-page-699?lang=fr