Brigitte Carnochan
Quelque chose de grandiose
Venait de naitre
Une fleur ou peut-être
L’Amour
in États du big bang
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Quelque chose de grandiose
Venait de naitre
Une fleur ou peut-être
L’Amour
in États du big bang
Carnabole
pantin manipulé
ce dégoût de soi
à refaire sans cesse
mêmes sutures
sur plaies purulentes
déchirures
démêler le sordide
du sauvage
distinguer la beauté
au sein des carnages
pureté innocence pendues
à des mamelles animales
pantin suis-je
de quelle mascarade ?
à traîner un mal
une malé-diction
paralysant poison
cette noirceur qui déchire
creuse ses abîmes
et nous voilà
abîmés
poison tu es
poisson je dois être
mais poisson
ne se noie pas
moi si
vertige des eaux soûles
in Mon collier de sel
"« Je ne trahis pas, je témoigne. Je ne révèle pas, je m’insurge. Je ne dévoile pas, je crie. », écrit Michaël Serfaty, gynécologue et photographe.
Depuis trente ans, dans un volumineux carnet d’artiste – composé de dessins, de bouts de scotch, de ficelles et de tissus, d’images collées, de menus objets, de tickets divers -, il note des phrases, des fragments d’histoires, des réflexions émises par les patientes reçues dans son cabinet.
Un livre publié par Arnaud Bizalion Editeur, avec qui il avait déjà réalisé en 2019 Les Bras du séquoia, recompose cet ensemble très riche, surtout très émouvant, et totalement personnel dans la traduction en gestes plastiques des paroles fondamentales qu’il entend."
Michaël Serfaty, Je vous écris avec la chair des mots, textes de Sylvie Hugues et Marie Darrieussecq, graphisme et maquette Marie-Anne Hauth, Arnaud Bizalion Editeur, 2020
Voir sur le site de l'artiste auteur :
https://www.michael-serfaty.com/je-vous-%C3%A9cris
Si ta mémoire mesure le temps
évite la dangereuse nostalgie
se pencher à la portière de sa vie
c’est déjà la Patagonie
le même vent te précède
te suit te délie
t’enracine d’un revers
le vent est libre
les souvenirs aussi
in Ma Patagonie
Un jour la vie sera comme une main ouverte
Nos royaumes réels tous les chants déchiffrés
Je serai parmi vous comme un arbre immobile
Et le soir tombera très doux sur une épaule
Alors je chanterai comme on parle à l’oreille
Un arpège de feuilles dans l’aile bleue du vent
Quelque part le bonheur en nous fera ses nids
Le soleil entrera partout dans les mémoires
Et chacun vibrera de sa harpe profonde
Chacun sa dissonance en l’accord inouï
J’entends depuis toujours un impossible orchestre
J’entends depuis toujours nos échos se brisant
Et tu l’entends peut-être ami du bord du vide
Cette musique d’homme au bout de la jetée
Elle vient de si loin il faut tant de silence
pour la sentir en toi monter avec le sang
Elle vient par milliers de ces voix anonymes
Où tu te reconnais où tu te perpétues
Un jour la vie sera comme une main ouverte
Et le soir tombera très doux sur une épaule
in Célébrations, 1977
Je voulais noyer mes chagrins dans l’alcool,
mais ces damnés ont appris à nager.
voir à l’œil nu le brin
qui s'effiloche et le tirer
pour voir jusqu'où
il peut aller
in Histoires d'amour, histoire d'aimer
L.
Continent_ savane_ traversée_ racines
Je chante un autre continent, celui des vastes étendues, des sorciers et des marabouts, de la savane brûlée de soleil et de ses secrets, le pays de mes racines.
Je chante les chèvres sauvages qui taillent les manguiers, le vert improbable de la saison des pluies, le rouge des crépuscules ; je chante au rythme des djembés, je tape sur les tôles rouillées.
Un bateau qui n’est pas ma pirogue, m’attend au bord du fleuve. On m’a vendu un ailleurs que je n’affronterai pas, une traversée que je ne ferai pas.
Je chante avec les griots. Quand je célèbre mes ancêtres et les grands oiseaux, ce sont mes pieds que j’ancre dans le sable.
Miroir aux alouettes, liberté promise dans les abysses de l’Atlantique ! Puissent mes frères entendre ma chanson ! Je chante…
O.
*
Nos racines sont présentes dans la Savane et la traversée du continent ravive nos origines présentes à tous les instants de notre vie. Les animaux à l’horizon nous rappellent la fuite du soleil, les hommes vont bientôt rentrer du travail, la journée s’achève "JETEZ VOUS A L’EAU ".
J.
*
Le joueur d’orgues des savanes et le joueur de tôle des bidonvilles travaillent de concert pour donner de l’écho aux rêves de tout un continent dont les fortes racines sauront abattre toutes murailles diviseuses. Ils jouent à rendre chèvres les inquiets qui tremblent à l’idée farfelue d’un grand remplacement.
Quelles que soient les traversées, chacun ne fait que rejoindre son centre. Voile soleil de l’espoir qui tel un phénix renait à chaque nouveau départ, voire noire du deuil qu’il faut aussi affronter. Quelle que soit l’embarcation, quelle que soit la forteresse, chacun à un moment doit se jeter à l’eau et jouer sa partition. La mort est un passage, nul mur ne peut le refermer, en attendant il faut vivre pleinement nos traversées. D’où que nous venions, où que nous allions, nous allons vers le centre, le cœur de ce qui nous est donné à vivre et à partager.
C.
*
Partir pour le continent inconnu signifie que tu quittes tes racines pour chasser un rêve. Un rêve teinté de sang dilué dans la mer. Malgré tout, une force te pousse à abandonner la savane, ton cheptel qui se meurt, comme toi. À tenter la traversée comme d’autres avant toi. Malgré les passerelles dangereuses, les barrières dressées et les murs qui s’élèvent, tu te jettes à l’eau.
L.
O.
Trancher_ onirique_fantasque_lumière
La puissance de l’arme pointue, faite pour trancher, a-t-elle la faculté d’éliminer la vie, les animaux, l’art, la nature, les hommes ?.. C’est une question ; quelle réponse : notre puissance onirique et la lumière des temps obligeront ces rêves fantasques à s’évanouir en fumée, dans les étoiles de la nuit céleste.
J.
*
Dali trône en maître fantasque à l’entrée du musée. Son cabinet des curiosités construit à l’orée du bois est ouvert uniquement aux visiteurs égarés. Pour entrer, il faut passer le test du couteau. Cela consiste à trancher le fil invisible qui libèrera le rhinocéros. Le safari onirique peut alors commencer.
Si tu enlèves les bottes du chat en t’éclairant simplement à la lumière d’une bougie, tu as passé avec succès la première épreuve. Ensuite, tu dois chevaucher deux poules en embuscade dans le temple maya et pour finir, reconstituer le centaure. Un petit indice tout de même pour cette dernière épreuve : l’homme et le cheval ne sont peut-être pas d’accord.
Tu termines la visite en caressant le rhinocéros que tu as libéré sans te faire tuer.
L.
*
« — Surréel vous dites, cher professeur ?
— Absolument mon cher Salvador, commencez donc par suivre le Chat Botté qui vous indique le sentier.
— La quête initiatique, cher professeur, tourne vite au fantasque avec moi, je veux bien me prêter à vôtre petite expérience onirique mais je ne garantis pas le résultat. Regardez ces poules confucianistes et l’archer qui guette derrière l’arbre, j’en parierai mon rhinocéros d’ivoire qu’en avançant vers la lumière, elles finiront tranchées en offrande à une divinité étrange, probablement extra-terrestre.
— Pas si sûr, mon cher Salvador, pas si sûr ! Vous savez bien que les poules ne fondent pas comme les montres, je parie que nous les retrouverons bien installées sur le dos de votre rhinocéros, mais méfiez-vous plutôt de leurs œufs ! Qui sait ce qu’il pourrait bien en sortir, vous savez bien comment sont les poules quand elles trouvent un couteau. Méfiez-vous des œufs Salvador, méfiez-vous des œufs ! »
C.
*
Rêve ou réalité ? Bric-à-brac figé, bribes de représentation ; mémoire onirique, pitreries de l’inconscient ou aigreurs du cœur ?
Un fatras de légendes où les empreintes primitives se mêlent aux souvenirs des lectures enfantines. Témoins de l’immobilisme ambiant , le chat botté, malgré ses bottes, dépossédé de son histoire, n’a plus de lieues à parcourir et Tintin n’aperçoit plus que des mirages. Un Pégase empêché, ni Minotaure, ni Centaure , liberté pétrifiée sous la bure rouge, assiste l’archer mythique, reflet du Sagittaire prêt à reprendre la guerre. Tout ce désordre sous la protection du Rhinocéros blanc à la colossale stature qui impose force et puissance mais appelle à la solitude contemplative.
Inutile désormais de mesurer le temps, Dali a largué sa montre molle, rappel surréaliste pour embrouiller un peu plus les esprits.
Subsiste la flamme timide d’un photophore qui inviterait à sortir du marasme et imaginer un avenir. De même, au bout de la grotte ,une trouée mène vers la lumière, celle de l’extérieur, des arbres et des plantes ; la nature toujours en régénérescence ! Vie, mort, résurrection, c’est peut-être le sens de cette histoire fantasque à moins qu’elle ne soit bonne qu’à trancher le cou des poules et que le couteau, dont je n’ai rien dit, ait le dernier mot !
O.
J.
Mosaïque_ diapré_ arche_ rêve
Tenter la traversée. Passer l’arche et croire à demain. Kaléidoscope du temps qui s’enfuit, mosaïque diaprée, jeu de miroirs des souvenirs et des espérances. Fragments de vie déposés en offrande, conjuration des papiers collés, feuilles d’acanthe, croix du sud, bouts de vitraux, autant de talismans ou de prières secrètes pour atteindre mon rêve !
O.
*
Le vitrail de la cathédrale du temps a explosé en une mosaïque de mille éclats. Seule, l’arche de l’édifice a résisté à la force du rêve. Éblouissements diaprés et reflets troubles de vies passées brouillent le regard. Les sens s’interpellent sans se comprendre. Seuls les visages comme les fleurs s’imposent de tout temps.
L.
*
Mosaïque du rêve… Lambeaux diaprés, enluminures et fleurs vives, l’histoire cousue et recousue sous son arche qui enjambe les temps. Pont, passage. Symbole de la quête et de la réconciliation. À l’intersection des lignes, imbrication des mémoires, tissage d’existences. Matière de l’art transmutée, signes et sens, petites fenêtres de sens, fractales du songe. Lamelles d’espoir sous le microscope de la création, l’avenir cherche sa direction : une paix moins incertaine.
C.
*
Les mosaïques de tous les instants s’imbriquent les unes dans les autres, petits bouts diaprés, de tout et de rien, c’est ainsi que la vie s’écoule lente, parfois fragile, parfois rieuse, parfois odieuse.
Néanmoins ces morceaux de vie, de réalité, de projets, peuvent apporter le réconfort et sérénité dans l’arche du rêve.
J.
C.
Relaxation_ serres_ vie_ mémoire
Les glaciers, le ciel pur et bleu embrassent la terre. Et pourtant le masque de jade ne peut-il obscurcir la vie et la mémoire. Je vois la femme nue dans sa pureté, belle radieuse, en relaxation, pourtant a-t-elle la pleine conscience de sa vie ? Car son cœur n’est-il pas dans les serres de la mort.
J.
*
Le cercle polaire se fond dans l’univers. La vie sauvage, la course des planètes, le ciel, l’humanité nue ne font qu’un. Tout est là pour atteindre la plénitude. Les couleurs de la terre, tous les êtres et tous les paysages ouvrent une fenêtre de calme et de relaxation. Être là. Juste être là, présent au monde. Mais les serres, les crocs et les masques menacent. L’équilibre risque de perdre la mémoire.
L.
*
Posée là au milieu de nulle part, dans les déserts blancs des glaciers polaires, Narcisse oublié(e) à l’ image déformée, comment prendre racine ? J’ai la mémoire d’une terre où les grands fauves et les oiseaux sauvages faisaient la loi. Je pliais sous leurs serres barbares, m’inventais une vie fantasque où la relaxation embrassait l’utopie. Il suffisait de remettre le masque pour croire au soleil et vagabonder à s’essouffler.
Déposée là, nue au cœur d’un monde glacial, indifférente au monde, je ne crains ni les pingouins ni les hommes !
O.
*
Entre spleen et idéal, le vivant dévale la pente. Entre la fonte des banquises et les rivières qui coulent tranquilles vers le couchant de l’utopie, le reflet de l’humanité se perd dans la gueule des bêtes acculées. On rêve à une déesse nue, une sauveuse écoféministe qui nous transfuserait l’art de la relaxation malgré les serres du stress qui nous déshumanise toujours plus, nous jette dans l’accélérateur de fin. La vie respire pourtant quelle que soit sa forme et de très anciennes mémoires s’apprêtent à refaire surface. Choisir ce que nous voulons sauver, mettre le cap sur de nouvelles façons d’être sur Terre… Emergency, emergency !
C.