Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

CATHY GARCIA-CANALES - Page 264

  • Et pourquoi moi je dois parler comme toi ? - Anouk Grindberg

    Magnifique Anouk Grindberg. Ce qu'elle ne dit pas dans cet interview, c'est que c'est un sujet qui la touche très directement en rapport avec l'histoire de sa mère et le rejet qu'elle-même a eu en tant que fille par rapport à ce qui a été perçu comme folie par les codes d'une société qui a empêché sa mère d'être ce qu'elle était, de se déployer dans son être, quand on nous empêche de voler, alors on peut se laisser submerger par les forces destructrices du repli.

     

    Et-pourquoi-moi-je-dois-parler-comme-toi-1e-Couv.jpgSorti le 15 octobre dernier aux éditions Le Passeur.

    Anouk Grinberg propose une constellation de textes d'art brut, des bijoux d'inventivité et de liberté, textes écrits par des hommes et des femmes relégués dans les marges des institutions psychiatriques.

     

     

    Chez eux, l’imagination est en tête, les visions débordent, les identités sont multiples, et les sens sont à nu. L’enfance est partout, le réel est augmenté de dialogues avec des esprits et ils parlent couramment la langue du chaos ; le dedans est dehors. On dit d’eux qu’ils sont fous ou idiots.

     

    À leur façon, ils portent aussi le monde. Ils disent, à corps et à cri : « Je ne suis pas ce que vous
    croyez », ils font des danses de vie pour éclairer leurs chambres noires, ils écrivent au monde et le monde
    n’entend pas ; ils créent sans le savoir, et nous nous inclinons devant la vie qu’ils portent en eux. Ils ont eu la pulsion d’écrire, comme on a la pulsion de la vie. Ils se fichaient d’écrire « comme il faut » ; ils
    obéissaient à d’autres lois, inventaient des langues pour se tenir au plus près d’eux-mêmes. Ça jette des étincelles.

     

    Nos cœurs sont à la fête, même quand c’est triste. On retrouve des frères, des sœurs, ou bien nous-mêmes, épluchés de nos falbalas. Avec les écrits bruts, on est à la source de pourquoi l’écriture vient, pour faire monter la vie, pour s’ébrouer du malheur et en faire des feux de camps, pour faire vivre l’esprit.

     

    On ne comprend pas comment le manque de tout l’élémentaire produit cet oxygène. C’est un mystère. Et
    en attendant de comprendre, je tourne autour et avec eux, je me sens vivante.

     

     

    Anouk Grinberg est comédienne et artiste peintre. Ce recueil est un complément au spectacle qu’elle jouera en France en 2020-2021.

     

     

    https://www.le-passeur-editeur.com/les-livres/litt%C3%A9rature/et-pourquoi-moi-je-dois-parler-comme-toi/

     

     

     

     

  • Giovanni Castell - série Aporie

    Giovanni Castell série Aporie  n.jpg

     

    nos petits bateaux

    nos petites histoires

    ont rendez-vous

    au grand océan

    de lumière

                                                         

    c’est lui qui fait battre nos cœur

    tourner nos petites centrales

     

    in Le livre des sensations

     

     

     

  • Auteur inconnu

    123104805_10159641083764879_6044813654127420203_n.jpg

     

    Sentir à quel point nous sommes fait de la même étoffe que les fleurs, les nuages, le vent, la pluie et que nos limites ne sont là que pour jouir de toutes les sensations possibles.

     

    cg, in Le livre des sensations

     

     

     

  • Carles Netto Lluis - Papers 3, 2019

    Carles Netto Lluis - Papers 3, 2019.jpg

     

    Il y a dix, vingt, trente ans et la vie passe. Inconsciente. Même nœuds, mêmes impasses. Nos grimaces et nos cris, étranges colifichets empruntés au théâtre d’ombres. Impasse des tourments, des rancœurs à déloger, des caillots de vanité.

     

    Passez-moi la lame qui incise la matière du langage. Sève d’étoiles, draille des signes. Babel fond sous ma langue. J’en fixe simplement l’ombre sur le papier. Infini fugitif. Mes empreintes sur les neiges éternelles de l’inconnaissance.

     

    in Celle qui manque

     

     

  • Blanche

     

     

    On voit de drôles d’oiseaux échoués sur nos plages
    De drôles d’oiseaux !
    Ils ont de l’écume plein les plumes
    Ils ne bougent plus
    Du sel plein les yeux qui ne s’ouvrent plus
    …Au moins ils ne souffrent plus

    Leur ramage se rapporte à leur plumage
    On voit de drôles d’oiseaux
    Qui arrivent par vagues
    Corps mourants qui dansent
    Bal atroce
    Ils viennent chanter sans voix
    Nous parler d’espoir et d’errance
    De leur avenir pris dans des ronces
    Ils viennent perdre nos regards dans l’vague
    Et Bam ! En réponse
    On ferme nos ports
    Nos cœurs, nos portes
    Ils s’enfoncent

    Je revois ce petit rouge gorge
    Allongé sur le sable
    De loin on dirait la ruine d’un monde qui fait l’mort
    Oui mais de près c’est un enfant
    Qui dort qui dort
    Petit prophète deplumé
    Craché par la tempête
    Minuscule poète
    Petit rêve depouillé

    On voit de drôles d’oiseaux échoués sur nos plages
    Avant sur la rive
    on trouvait des bouteilles et on lisait les messages
    Mais les prières roulées dans des flacons de chair
    On préfère les laisser couler
    On laisse les chagrins se noyer
    En pleine mer
    Y’a tant de sos qui s’perdent
    En pleine merde
    D’oiseaux messagers qui viennent se crasher sur nos ombres
    Et on oublie qu’dans c’monde
    On est tous mi-grands mi-p’tits
    Mi-grands mi-p’tits

    Nous, On voudrait se reposer de nos soucis
    Le plus loin possible des bains d’sang
    Et ça s’comprend
    Ici on d’vient barges alors comment devenir berges ?
    On peut pas voir large
    On peut que gamberger, se murger
    Et puis, Bâtir des murs qui dissimulent mal le murmure de l’animal
    Pour oublier que dans c’monde
    On est tous mi grands mi p’tits
    Mi grands mi p’tits

    En restant mutique on s’mutile
    En même temps que dire ?
    J’me sens si impuissante c’est épuisant
    Comment être utile ?
    Ni mystique ni politique
    Mon seul pouvoir est poétique
    Et ce soir très hypothétique
    Peut être que mon premier devoir
    C’est juste de voir
    Et de dire ce qu’en penserait
    La petite fille que j’ai été :
    Y’a des hommes à la mer
    Des enfants en bas âge à bâbord
    Et des mères dont les larmes débordent des canots de sauv’tage
    Alors pour rester debout demain, humains
    Faudra jeter des bouées
    Et tendre des mains
    Des mains !

    Le cœur en miettes sur la main
    C’est la que les oiseaux viennent se mourir
    La voix tremble, s’étrangle et demande
    Sans plier
    Quitte à supplier
    « Ouvrez les ports
    Laissez nous dev’nir terres d’asile
    Je me doute bien qu’ c’est compliqué
    Mais on peut plus vivre comme des îles…
    L’humanité est en péril
    Si elle laisse ne serait-ce qu’un d’ces Hommes périr sans pleurer
    Quand des corps coulent à pic
    C’est l’urgence on agit
    Toi tu prends l’temps d’reflechir
    Mais leurs poumons qui s’ remplissent sont le sablier
    Leurs poumons sont le sablier !
    bordel ce gosse ça pourrait être ton fils
    T’as toujours pas pigé ?!
    Tu oublies qu’ dans c’monde
    On est tous mi grands mi p’tits
    Mi grands mi p’tits
    …Raisonnement elliptique

    Je vois de drôles d’oiseaux échoués
    Sur mes pages
    J’voudrais leur donner des noms
    Des noms d’Hommes
    Mais ils restent anonymes
    Sans figure et sans âge
    Masse informe qui dérive
    Comme une tache de pétrole, de chloroform’ et d’bile

    J’ai le cœur mazouté
    On compte les morts !
    Humanité j’écris ton nom
    Mais je sais pas où t’es…
    Alors les yeux salés
    Mi ouverts, mi clos
    Je rêve
    Je vois de drôles d’oiseaux
    Je vois de drôles d’oiseaux qui voguent
    Et guident des bateaux qui volent
    De drôles d’oiseaux qui voguent et guident des bateaux qui volent…
    Je rêve et je me souviens
    Que dans cette vie
    on est tous
    Si p’tits et si grands
    Si p’tits mais si grands…
    Ensemble

     

     

     

  • Yuko Shimizu

    859_n.jpg

    avant qu’il ne faille démêler

    dans la chambre d’automne

    le pelage et les ronces

    le miroir aux corneilles

    et les linges souillés

    il nous faudra suivre

    le sentier de cire

    trouver la gâtine

    où l’on a brûlé les lucioles

    de nos crânes roussis

     

    cg in Aujourd'hui est habitable, Cardère 2019