Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

CATHY GARCIA-CANALES - Page 389

  • HF Thiéfaine

    Annihilation


    Qu'en est-il de ces heures troubles et désabusées
    Où les dieux impuissants fixent l’humanité ?
    Où les diet-nazis s'installent au Pentagone
    Où Marilyn revêt son treillis d'Antigone ?
    On n'en finit jamais d’écrire la même chanson
    Avec les mêmes discours les mêmes connotations
    On n'en finit jamais de rejouer Guignol
    Chez les Torquemada chez les Savonarole
     
    Qui donc pourra faire taire les grondements de bête
    Les hurlements furieux de la nuit dans nos têtes ?
    Qui donc pourra faire taire les grondements de bête ?
     
    Lassé de grimacer sur l'écran des vigiles
    Je revisite l'Enfer de Dante et de Virgile
    Je chante des cantiques mécaniques et barbares
    A des poupées Barbie barbouillées de brouillard
    C'est l'heure où les esprits dansent le pogo nuptial
    L'heure où les vieux kapos changent ma pile corticale
    C'est l'heure où les morts pleurent sous leur dalle de
    granit
    Lorsque leur double astral percute un satellite
     
    Qui donc pourra faire taire les grondements de bête
    Les hurlements furieux de la nuit dans nos têtes ?
    Qui donc pourra faire taire les grondements de bête ?
     
    Crucifixion avec la Vierge et dix-sept saints
    Fra Angelico met des larmes dans mon vin
    La piété phagocyte mes prières et mes gammes
    Quand les tarots s'enflamment sur la treizième lame
    On meurt tous de stupeur et de bonheur tragique
    Au cœur de nos centrales de rêves analgésiques
    On joue les trapézistes de l'antimatière
    Cherchant des étoiles noires au fond de nos déserts
     
    Qui donc pourra faire taire les grondements de bête
    Les hurlements furieux de la nuit dans nos têtes ?
    Qui donc pourra faire taire les grondements de bête ?
     
    Je dérègle mes sens et j'affûte ma schizo
    Vous est un autre je et j'aime jouer mélo
    Anéantissement tranquille et délicieux
    Dans un décor d'absinthe aux tableaux véroleux
    Memento remember je tremble et me souviens
    Des moments familiers des labos clandestins
    Où le vieil alchimiste me répétait tout bas:
    «Si tu veux pas noircir, tu ne blanchiras pas»
     
    Qui donc pourra faire taire les grondements de bête
    Les hurlements furieux de la nuit dans nos têtes ?
    Qui donc pourra faire taire les grondements de bête ?
     
    Je calcule mes efforts et mesure la distance
    Qui me reste à blêmir avant ma transhumance
    Je fais des inventaires dans mon Pandémonium
    Cerveau sous cellophane cœur dans l'aluminium
    J'écoute la nuit danser derrière les persiennes
    Les grillons résonner dans ma mémoire indienne
    Et j'attends le zippo du diable pour cramer
    La toile d'araignée où mon âme est piégée

    Qui donc pourra faire taire les grondements de bête
    Les hurlements furieux de la nuit dans nos têtes ?
    Qui donc pourra faire taire les grondements de bête ?
    Qui donc pourra faire taire les grondements de bête
    Les hurlements furieux de la nuit dans nos têtes ?
    Qui donc pourra faire taire les grondements de bête ?
    Qui donc ?

     

     

     

  • Stranieri Ovunque

     

    Contrairement à ce que voudrait nous faire croire la propagande raciste, les migrations ne concernent que pour 17 % les riches pays du Nord, et concernent tous les continents (en particulier l’Asie et l’Afrique) ; ce qui signifie que pour chaque pays pauvre, il s’en trouve un encore plus pauvre d’où fuient des migrants. La mobilisation totale imposée par l’économie et les Etats est un phénomène planétaire, une guerre civile non déclarée et sans frontière : des millions d’exploités errent dans l’enfer du paradis marchand, ballottés de frontière en frontière, enfermés dans des camps de réfugiés, encerclés par la police et l’armée, et gérés par les organisations dites de charité — complices des tragédies dont elles ne dénoncent pas les causes réelles dans le seul but de profiter de leurs conséquences —, entassés dans les « zones d’attente » des aéroports ou dans les stades, enfermés dans des camps […] pour être enfin ficelés et expulsés dans l’indifférence la plus totale.

     

    Stranieri Ovunque (Partout des étrangers), groupe anarchiste italien in le manifeste Agli erranti, cité par Philippe Godard in L'anarchie ou le chaos

     

     

  • Martín Caparrós

    Aujourd’hui, nourrir les affamés n’est qu’une question de volonté. S’il y a des gens qui ne mangent pas suffisamment – s’il y a des gens qui tombent malades de faim, qui meurent de faim, c’est parce ce que ceux qui ont de la nourriture ne veulent par leur en donner ; nous, qui avons de la nourriture, ne voulons pas leur en donner. Le monde produit plus de nourriture que ses habitants n’en ont besoin ; nous savons tous qui sont ceux qui n’en ont pas suffisamment ; leur envoyer ce dont ils ont besoin  peut être l’affaire de quelques heures. Voilà pourquoi la faim actuelle est, en un sens, plus brutale, plus horrible qu’il y a cent ou mille ans.

     

    Ou, du moins, en dit beaucoup sur ce que nous sommes.

     

    in La faim

     

     

     

  • Élisée Reclus

      

    Là où le sol s’est enlaidi, là où toute poésie a disparu du paysage, les imaginations s’éteignent, les esprits s’appauvrissent, la routine et la servilité s’emparent des âmes et les disposent à la torpeur et à la mort. Parmi les causes qui dans l’histoire de l’humanité ont déjà fait disparaître tant de civilisations successives, il faudrait compter en première ligne la brutale violence avec laquelle la plupart des nations traitaient la terre nourricière. Ils abattaient les forêts, laissaient tarir les sources et déborder les fleuves, détérioraient les climats, entouraient les cités de zones marécageuses et pestilentielles ; puis, quand la nature, profanée par eux, leur était devenue hostile, ils la prenaient en haine, et, ne pouvant se retremper comme le sauvage dans la vie des forêts, ils se laissaient de plus en plus abrutir par le despotisme des prêtres et des rois. 

     

    1866