Nanami Cowdroy
Merci au Musée Improbable pour la découverte
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Merci au Musée Improbable pour la découverte
je suis plus facile à vivre quand je ne suis pas là.
in Le joueur
Cycle et fiction
Le chat lèche le poulpe.
Le poulpe lâche le chat.
Le cycle n’est pas une roue fermée.
Seule la vitesse en donne l’illusion.
cg in Le poulpe et la pulpe (Cardère 2011)
Tandis que par la fontanelle
La sainte banquise
Déverse ses poissons
La palpitation lasse
Des jardins hallucinés
Trace un pont
Entre cimes et cimetière
Vers le calme éternel.
cg 2014
in Surréel des surrénales
Je funambule sur le tranchant du Réel en exil perpétuel.
Naufrage en terre-ciel. L’échelle et le sceau du rapace.
L’affront et l’envol.
Ailleurs. Ailleurs.
cg in Fugitive (Cardère 2014)
Mais la paradoxe de l'écriture poétique, c'est justement de se servir des mots pour faire allusion à ce qui, absolument, leur échappe
in Transpoétique. La main cachée entre poésie et science
Allongée. Au bord de la jouissance,
s’ouvre une ruche à la toxique ardence.
Exquise écharde. L’impérieuse salissure allume les ourlets
sur la corniche du souffle.
Conjugaison de l’air et du verrou.
Espace ramifié de torrents et de fourches.
La sève cache ses vieilles ruses de silex
cg in Fugitive (Cardère 2014)
http://www.marion-lepennec.fr/
Alma éditeur, 30 janvier 2014
81 pages, 17 euros.
Comme il l’écrit lui-même dans sa postface intitulée « Lignes de fuite » : « Ma poésie n’est pas grand-chose, elle est militante du minuscule, insignifiante, et je l’écris au quotidien, à la mine de rien. J’ai pensé à ce projet plus conséquent. Un gros livre de petits poèmes. » Pari osé, ce roman-poésie, car on sait bien, l’offre en poésie dépasse de loin la demande, beaucoup en écrivent, peu en lisent ; « je travaille beaucoup à la simplicité » nous dit Thomas Vinau, or rien n’est plus difficile à atteindre que la simplicité, cependant chacun pourra très certainement puiser dans ce « gâteau de miettes » quelque chose à son goût. D’ailleurs, poésie du quotidien peut-être, mais comme le souligne l’air de rien l’intitulé de la postface, il semble qu’écrire de la poésie soit justement pour Thomas Vinau une façon d’échapper au quotidien, ou tout au moins de le rendre parfois plus respirable, plus supportable. C’était peut-être moins évident dans des recueils plus anciens, mais ici on peut distinguer plus nettement des fêlures, des fragilités, dans les constructions qui protègent un quotidien, qui est surtout celui de l’intimité, de soi, du couple, de la famille, comme à opposer à un monde devenu bien trop fou, bien trop agressif pour qui a la sensibilité à fleur de peau. « Tout va bien » écrit-il, « le monde court après le monde dans les paisibles chuchotements de nos agonies veloutées ». Fragile le poète certes, mais aussi « la solidité des parfums de pivoine lorsque tu me piétines ».
Poète… Spécialiste de « l’inutile indispensable ». La poésie aime peut-être l’ordinaire mais elle ne le laisse pas tranquille, quand elle s’engouffre dans le quotidien, elle le chahute, elle le transforme, le bouscule, le bascule et c’est ainsi que lorsque les yeux de Thomas Vinau « fouillent les ratures du paysage », ils « distinguent un troupeau de fenêtres sauvages ».
Dans le quotidien, il y a ce trésor nommé instant présent, un puits sans fond dans lequel Thomas Vinau sait puiser quelques fulgurances, comme on remonterait quelques jolis poissons.
« Souvent j’ai l’impression
d’être un sachet de thé
dans l’eau tiède du monde
mais parfois me rattrape
la sensation violente
d’être une goutte d’eau
saturée de saveurs
dans une boite à thé »
Et la vie est « une petite rivière pleine et fraîche qui nous file entre les doigts » aussi le poète déplore
« le décès instantané
D’un petit matin frais
Fauché en pleine course
Par un quotidien trop pressé
aux dernières nouvelles
Le champ des possibles
S’écoule encore de son ventre
Sur la chaussée
Thomas Vinau a l’âme sauvage, qui le ramène autant que se peut vers la nature, l’enfance, ce qui est un peu la même chose.
Je me sers
d’un toboggan d’enfant
comme chaise longue
je me sers
de l’herbe haute comme déodorant
je me sers
du ciel foutraque
comme cahier de brouillon
D’ailleurs le poète a beau viser l’horizontalité, même s’il sait qu’ « on fait pisser nos rêves à la laisse comme des chiens », il ne peut s’empêcher de lever les yeux au ciel et se dire que Dieu a l’haleine chargée…
« dans sa dent creuse
un soleil
endormi »
Et les poètes sèment leurs innombrables poèmes que les oiseaux du malheur ne manqueront pas de dévorer, c’est pourquoi il faut en semer beaucoup, beaucoup, afin que certains puissent avoir la chance de germer. Ne serait-ce que pour continuer à nous bousculer le quotidien.
Cathy Garcia
Thomas Vinau est né en 1978 à Toulouse. Auteur de plusieurs recueils de nouvelles et de poèmes, il publie en 2011 son premier roman, Nos cheveux blanchiront avec nos yeux, aux éditions Talma. Un road-movie d’inspiration autobiographique, à « l’écriture pudique et organique », qui fait le tour des blogs littéraires et fait sortir le jeune auteur de son microcosme littéraire. Influencé par les poètes américains (Richard Brautigan), et militant du minuscule, Thomas Vinau signe en 2012 un Bric à brac hopperien, portrait du peintre américain Edward Hopper « réalisé à partir de listes, de notes et de chutes autobiographiques » (Ed.Talma). Thomas Vinau vit aujourd’hui près du Lubéron, plante des radis et taille des lilas, écoute les insectes grouillants qui organisent le monde, non loin des chauves-souris qui s’endorment, la tête au pied des mots. Bibliographie complète : http://bibliothomasvinau.blogspot.fr
Note parue sur : http://www.lacauselitteraire.fr/
Dans un monde sans mélancolie,
les rossignols se mettraient à roter