Blixa Bargeld - Soul desert
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Il n’y a qu’aux êtres condamnés qu’est donnée la lucidité de voir à quel point ce qui leur avait paru important n’est que foutaise.
in Les Falaises de Wangsisina
Ô Khusro, la rivière de l’amour suit sa propre loi
Ceux qui l’ont traversée s’y sont noyés à coup sûr
Ceux qui s’y sont noyés l’ont traversée
Chacun porte son temple en soi. Chacun est sa propre offrande.
cg in Journal 1999
Les contes de fées sont les seules institutions démocratiques
Et à l’intérieur de cette femme, il y avait toujours une enfant sans père, une enfant qui n’était pas morte quand elle aurait dû mourir et il y aurait toujours le fantôme de la petite fille qui pleurait à l’intérieur, qui pleurait la perte d’un père.
En mars –79
Las de tous ceux qui viennent avec des mots
Des mots, mais pas de langage,
Je partis pour l'île recouverte de neige.
L'indomptable n'a pas de mots !
Ses pages blanches s'étalent dans tous les sens.
Je tombe sur les traces de pas d'un cerf dans la neige
Pas des mots, mais un langage.
in Baltiques, 1983 / traduction Jacques Outin
Souvent je voudrais échapper à l’enfant que j’étais
mais il arrive toujours un moment où elle regagne le terrain perdu
j’ai beau accélérer pour qu’elle s’essouffle,
creuser la distance pour ne plus l’entendre,
elle finit chaque fois par me rejoindre
et moi par la reprendre
sans doute parce-qu’elle n’est pas finie,
que quelque chose très tôt s’est brisé,
a freiné la courbe et l’élan.
Je voudrais que le barrage cède
je voudrais pleurer un bon coup
j’écris simplement là où je voudrais pleurer.
J’écris où le sang s’écoule,
ruisselle le long des cuisses
j’écris du fond de l’enfance
et du creux de mon ventre
j’écris pour me rapprocher du point de vertige
J’écris sur l’ourlet brûlant de la bouche de l’enfant
j’écris parce-que j’ai décidé de perdre la mémoire
J’écris où il me faut sans cesse revenir
J’écris avec toujours ce mouvement de la mer
qui berce et gronde,
monte et redescend,
se jette pour mieux s’éloigner
j’écris lorsque les vagues sont trop grandes
j’écris pour être moins terrifiée
j’écris parce-que tu ne m’as pas dévorée entièrement
j’écris depuis l’intérieur du labyrinthe
j’écris du fond de mes poches trouées
par poignées de silence
j’écris sur la trame usée du jean
ou l’encre bleue pâlit.
J’écris parce-que je suis mal faite
qu’il y a des vices de forme
un défaut d’origine
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