L’enfant arrache son regard de la main, celle qui n’a que deux doigts, puis ouvre la bouche comme s’il allait dire quelque chose et brusquement repart en courant rejoindre ses camarades, déjà installés au pied du phare. Le vieillard hausse les épaules puis lentement remet la main dans sa poche et s'éloigne d'un pas lourd en direction du petit port. La sueur dégouline sur ses tempes, sur ses joues jusqu’aux lèvres. Il y passe sa langue pour en goûter le sel puis il s’arrête un instant et fait demi-tour. Il retourne vers le phare, là où les enfants cherchent des coquillages entre les grands rochers. Le vieux a soudain envie de parler. Il a tellement, tellement de choses à raconter.
« Hé petit, tu veux savoir pourquoi je n’ai que deux doigts à cette main là ? »
in La pince du vieux marin pêcheur