Sainkho Namtchylak - From Me To You
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Traduit de l’anglais par Camille Chaplain
Dans cet ouvrage pionnier, fondateur des Recherches matriarcales modernes, Heide Goettner-Abendroth propose une nouvelle approche méthodologique du concept de matriarcat, revisitant ainsi l’histoire de l’humanité tout entière. Dans un aller-retour permanent entre le terrain et la théorie, elle offre une vue d’ensemble des sociétés matriarcales dans le monde, faisant apparaître que celles-ci ont non seulement précédé le système patriarcal, apparu seulement vers 4 000- 3 000 ans avant notre ère, mais qu’elles lui ont survécu jusqu’à ce jour sur tous les continents. Elle montre que les sociétés matriarcales, loin d’être une image inversée du patriarcat, comme le prétend l’idéologie dominante dont l’autrice fait une critique radicale, sont des sociétés d’égalité et de partage entre les sexes. D’où l’utilité de leur étude pour aider les femmes et les peuples autochtones en particulier à penser une alternative au système de domination patriarcal et colonisateur.
Ces travaux, qui ont inspiré plusieurs générations de chercheuses et chercheurs en histoire et en anthropologie, sont aujourd’hui enfin disponibles en français.
Heide Goettner-Abendroth, née en Allemagne en 1941, est docteure en philosophie des sciences et a enseigné la philosophie pendant dix ans à l’université de Munich (1973-1983). Elle consacre sa vie et ses recherches aux sociétés et cultures matriarcales dont elle est devenue l’une des grandes spécialistes mondiales, ouvrant la voie à toute une génération de jeunes anthropologues. En 1986, elle a fondé en Allemagne l’Académie internationale HAGIA pour les Recherches matriarcales modernes, dont elle assure depuis la direction et qui est à l’initiative de nombreux congrès internationaux sur le sujet. Elle a été sélectionnée en 2005 par le programme international « 1 000 Femmes de paix à travers le monde » comme candidate pour le prix Nobel de la paix.
Et des ténèbres vers la voûte lactée,
monte la plainte de la Mère qui pleure.
cg in Sursis
Je n'ai jamais participé à une guerre. Je ne connais pas plus l'attaque que la défense. Je ne comprends pas les hiérarchies de la discipline militaire, pas non plus ce que c'est de recevoir des ordres pour exécuter des familles entières sans me poser aucune question. J'ignore le fait de devoir prendre les armes pour protéger la souveraineté de quoi que ce soit. Je n'ai jamais tiré un coup de feu, je n'ai jamais défilé avec un uniforme vert olive. Je ne me suis jamais impliqué dans aucune lutte armée, je ne sais rien du tout des affrontement idéologiques qui durent des décennies et se terminent avec des centaines de milliers de personnes mortes. Je n'ai ni cicatrices, ni mutilations, ni remords. Je n'ai jamais été acculé par ma condition économique ou ethnique, je ne me suis jamais retrouvé dans la situation désespérée de rejoindre une lutte pour survivre. Je ne connais pas la douleur de voir mes parents mourir entre les mains de soldats qui ont grandi avec moi dans l'enfance. Je ne sais pas comment on fait pour séquestrer et assassiner dans le but de financer une révolution. Je ne peux pas m'imaginer en train de brûler un village, personnes âgées et enfants compris, dans le but de protéger la propriété privée. Je ne sais pas ce que c'est de fusiller une personne pour le simple fait qu'elle représente une idéologie contraire à la mienne. Je n'ai jamais dû abandonner mon foyer pour survivre dans un autre pays, en emportant comme seul bagage ce que je porte sur moi. Je ne sais pas ce que c'est d'être un vétéran de la guerre en chaise roulante. Je ne sais pas ce que ressent un ex-guérillero sans emploi qui observe comment ses idéaux sont transformés en démagogie partisane.
Je n'ai jamais participé à une guerre. Je ne sais rien de la douleur. Je ne sais rien de ce pays.
traduit de l'espagnol (Guatemala) par Laurent Bouisset