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  • Je n’en dirai guère plus – Jean-Michel Bongiraud – Ed. de l’Atlantique 2012

    je n'en dirai guère plus.jpg

    - Édition à tirage limité et numéroté - 45 pages – 14 €

     

    Il est pas mal question du doute dans ce recueil, mais en le refermant, c’est du titre que l’on doute. Difficile en effet de croire que Jean-Michel Bongiraud n’en dira guère plus, et on ne le souhaite pas en tout cas, car lire ce livre, c’est comme passer un moment en tête à tête avec un ami. Il ne s’agit pas ici juste d’une formule, mais d’un ressenti bien réel. L’auteur est comme assis en face de nous, le livre devient une table à laquelle on s’accoude, on partage un verre, voire plusieurs, et Jean-Michel Bongiraud nous ouvre son cœur, sans prétention, sans flonflons, sans faux semblants. Une telle simplicité est rare, une telle sincérité aussi. Elle mettra ceux qui sont prompts à juger sans doute mal à l’aise. Il y a quelque chose d’inconvenant, pour ceux qui ne jouent pas cœur sur table, à se livrer ainsi. C’est donc un livre qui fait du bien, qui remet les choses à leur place, la poésie dans la vie, l’homme au cœur de sa vie d‘homme, ni plus, ni moins et les mots tissent des ponts, car au centre de ce livre, il y a un irrépressible désir de partage.

     

    Résoudre par les mots de tous les jours

     

    l’équation de la vie

     

    mesurer la distance

     

    entre son ombre

     

    et la main qui s’ouvre

     

    montrer la lucidité

     

    du poème

     

    au regard qui le croise

     

     

    Mais entre le désir et sa réalisation, le réel peut devenir un obstacle qui ne cesse de nous interroger.

     

    Depuis quand les hommes

     

    sont devenus si durs

     

    et pourquoi leur langue

     

    est-elle brutale et acerbe

     

    Et c’est cela que Jean-Michel Bongiraud partage ici avec nous, les questionnements, les doutes, les élans et les dépits d’un homme parmi les hommes, et chacun de nous lecteur, devient l’ami auquel il offre sans retenue toute sa confiance.

     

    pour vivre entre nous

     

    que faudrait-il

     

    un rire un ronronnement

     

    une peau contre une peau

     

    ou un tassement de vertèbres

     

    au niveau du cerveau

     

     

    L’auteur pour qui, on le sent, des mots comme humanisme et fraternité ont gardé toute leur puissance, n’a cure d’être considéré comme naïf, mais donne au contraire tout sa véritable signification à ce mot. Naïf, c'est-à-dire naturel, sans fard, sans apprêt, sans artifice.

     

     

    ce monde est clair est simple

     

    tel je vous le dis

     

    il a ses qualités

     

    et même celles que j’ignore

     

    car tout n’a pas été dévoilé

     

    et il est bien vivant et serein

     

    et vous pouvez le voir

     

    c’est un monde d’étonnement

     

     

    Témoin de la beauté, il sait aussi la transmettre.

     

     

    Les oiseaux sont des êtres

     

    bien innocents et agréables

     

    (…)

     

    à part froisser l’air

     

    ils ne font aucun mal

     

     

    Et cette naïveté si on peut dire, n’est possible que parce que l’auteur est doté aussi d’une grande lucidité.

     

     

    Un grain bouleverse la vie

     

    on ne sait jamais

     

    la raison de sa venue

     

     

    (…)

     

     

    On veut toujours savoir

     

    si ce que l’on fait est juste ou non

     

    suis-je élégant ai-je une belle bouche

     

    pourquoi celui-ci ne dit pas bonjour

     

    (…)

     

    et je me demande

     

    ce que cherche à dire ce poème

     

     

    Il n’a pas peur de se voir tel qu’il est. L’écriture ici n’est pas un faire-valoir, mais un miroir qui ne ment pas.

     

     

    J’aimerais apparaître

     

    tel que je ne suis pas

     

    un peu plus grand moins gros

     

    plus cultivé plus spontané

     

    mais je l’ai déjà dit

     

    écris à longueur de page

     

    (…)

     

    d’ailleurs de quelle consolation

     

    ai-je vraiment besoin

     

    de changer de forme

     

    ou de cesser la répétition

     

     

    Jean-Michel Bongiraud n’est dupe ni de la vanité de notre condition, ni de la profondeur de notre ignorance, ni de notre petitesse face aux forces de l’univers, mais cela ne l’empêche pas d’aimer. Aimer la nature, aimer les oiseaux, aimer l’autre, égaré peut-être, mais vivant comme lui dans ce monde, où la beauté et l’horreur se partage la mise.

     

    Nous chantons fort

     

    et sans bien suivre la partition

     

    nul ne l’a vraiment apprise

     

    les plus purs la récitent

     

    nuit et jour avec opiniâtreté

     

    les autres avec nonchalance

     

    mais ce n’est pas très cruel

     

    comme jeu juste subtil

     

    les vaches y arrivent et les girafes

     

    je ne sais pas si les cafards le font

     

    mais d’instinct chacun en est capable

     

    au fond pour vivre

     

    il suffit de suivre le troupeau

     

     

     

     

     

    J’aime le murmure du vent

     

    et la parade des oiseaux amoureux

     

    les poules qui ponctuent leur pondaison

     

    par un incessant caquètement

     

    c’est la nature dans sa simplicité

     

    comme un vin qui remplit le verre

     

    il faut tout oublier pour le déguster

     

    les voisins les enfants les supérieurs

     

    dans le gosier tombe la poule

     

    les oiseaux et les brins d’herbe

     

    surtout il ne faut rien recracher

     

     

    Il s’interroge sur ce qui le pousse encore et encore à user de mots pour se faire entendre.

     

     

    Je pourrais rester tranquille

     

    écouter cette même poule pleine d’orgueil

     

    envahir le silence de cette après-midi paisible

     

    elle non plus ne sait pas

     

    ce qui la pousse à chanter

     

    suis-je aussi orgueilleux qu’elle

     

    à vouloir que tout le monde m’entende

     

    mais elle a cessé son vacarme

     

    je peux recommencer le mien.

     

    Sans aucun doute, la réponse est dans ce livre. Rien n’a de sens ici-bas sans l’échange et la communication véritable, celle du cœur. En ces temps où les mots sont tellement galvaudés, vidés de leur sens, la poésie demeure une parole vraie qui peut permettre de nouer avec autrui une relation touchant directement à l’essentiel. En toute simplicité.

     

    Cathy Garcia

     

     

    Jean-Michel%20BONGIRAUD%2001.jpgJean-Michel Bongiraud, est né en 1955 à Saint-Mard (Aisne). Il est l'auteur de plusieurs recueils de poésie ainsi que d'un essai, L'Empreinte humaine, ouvrage publié par les Éditions Editinter. Il a également fait paraître la revue Parterre Verbal entre 1992 et fin 2001 et depuis 2008, il anime la revue Pages Insulaires : http://parterreverbal.unblog.fr/ Il a écrit des articles pour différentes revues ou journaux, dont Le Monde Libertaire, Alternatives Libertaires...

     

    Bibliographie :

    Éditions Editinter : Fermentations poétiques ; Apesanteur fiscale ; le livre des silences ; Du bout de mes orteils ; Un livre pour la pluie ; L'herbe passagère ; Arpège précédé de Une quinte sous nos doigts ; L'Empreinte humaine

    Éditions Encres Vives : A la fin du cri ; Les fruits de l'alphabet ; Mouvements ; Mains

    Éditions Gros textes : Les mots de la maison ;  Pages Insulaires ; Pour retendre l'arc de l'univers

    Éditions L'Épi de seigle : Les mots du manœuvre ; La noisette

    Autres éditeurs : Mots d'atelier, Edition le dé bleu ; Le cou de la girafe, Éditions l'Amourier ; L'ombre de la bêche, Éditions Alain Benoït ; Abeilles, Éditions des Vanneaux ; Sang et broussailles, Éditions Rafaêl de Surtis ; L'herbe et le néant (1994 première édition), Éditions En Forêt (Allemagne) ; Je n’en dirai guère plus, Éditions de l’Atlantique.

     

    Note parue sur :

     

     

  • Retour de plusieurs lectures de Basile Rouchin, auteur publié dans Nouveaux Délits n°41

    "En effet, en dépit de tes bons vœux en langue Navajos, ce numéro 41 est celui d'un triste anniversaire : le Japon un an après la catastrophe nucléaire. Ton engagement pour différentes causes donnent lieu à des contacts variés (Georgie Viccini et les Roms pour le n° 39, ici, cercle de faiseurs de haïkus pour ce numéro). Et si l'on ne peut embrasser toutes les causes (appelées bêtement "perdues" ou "désespérées" souvent par ceux qui refusent la lutte), il importe de rester fidèle à celles que l'on choisit. Et de les faire entendre, tu le dis toi-même : ces voix pourraient disparaître. La poésie comme un carnet de circulation des idées, des pensées et des actes. Une poésie qui n'est pas déconnectée de son temps (mais pas trop "connectée" non plus, dans un autre registre). Bien que très inquiétant, j'ai apprécié « Après Fukushima » : ce recueil de haïkus du cercle Seegan. La responsabilité de chacun qui en découle se mesure à l'échelle planétaire : on n'y coupera pas. Difficile de mesurer les conséquences d'une telle tragédie : les chiffres nous dépassent ! 24 000 ans, ça met le vertige ? A la suite, les textes d'Alain Gourhant et ses extraits de « la poésie du désastre et de la guérison » semblent constituer une prise de léger recul. J'ai été sensible à cette conception de la promenade comme manière de se retrouver : c’est un temps solitaire, hors production, sans concession (technologies) - l’ultime promenade étant la mort. Enfin, dans un genre différent, j'ai été désarçonné par le style d'écriture de Timotéo Sergoï et « Le diagonaute amouraché ». Son autoportrait en spectateur : « ai-je d’autre pouvoir que celui d’applaudir » reste dans la lignée de la sidération provoquée par les 3 auteurs précédents. Enfin tes résonances documentées sont toujours très instructives et originales. J'ai donc été content de figurer parmi ces auteurs : le sujet que je traite n'étant pas non plus très réjouissant. Mais ne parle-t-on pas de fission du couple ? Il restait donc quelques repères culturels, à la geisha évoquée dans mon dernier texte. J'avais noté dans le "purgatoire du quotidien", cette ouverture aux autres cultures et probablement ces pensées notées lors ou après un voyage. Notamment à travers le respect tout oriental de toute forme de vie. Il est des cultures où l'on n'attente pas à la vie des insectes, je crois.

    De même, "le poulpe et la pulpe" fait état d'écritures brèves, d'encres de chine et d'une sagesse diffuse. Avec l'intermède médiatique (p 32), on louvoie entre "laisser aller" et nonchalance orientale (pour faire dans le cliché) et "sens critique" occidental. C'est comme deux parties à faire coexister : j'ai beaucoup aimé ce texte, espèce de cours d'eau par moments troublé et heurté qui apparaît d'autres fois, paisible et harmonieux. La place réservé au corps y est sans doute pour beaucoup dans cette impression.

    Dans un tout autre style plus dérangeant, j'ai bien lu et relu ton "Qué Wonderful Monde" (titre pied-de-nez à l'europe et à son espéranto ? Qui le parle d'ailleurs ?). Le recueil égratigne bien nos US et Coutumes et quelques vérités sont assenées avec vigueur : faut le temps de les digérer, de les discuter, d'y réfléchir... Je souscris aux déformations de nos sociétés que tu évoques, ces tsunamis à effets différés que sont le jeunisme, le consumérisme, la peur de "réintégrer nos monstres" conséquence à mon sens d'un certain angélisme (ne pas voir le mal qui pousse d'abord en nous, refuser la laideur, le temps qui passe sur nous. Mais ne parle-t-on pas de vécu ? Ce mot est-il incompatible avec celui de  "beauté"?...). "

    Basile Rouchin

     

     

     

     

     

  • Les mots allumettes, présenté par Christian Saint-Paul

    dans l’émission Les Poètes.fr du 12 avril 2012 sur Radio Occitania, écoutable en ligne ici :http://lespoetes.fr/emmission/emmission.html

     

    Les éditions CARDERE www.cardere.fr poursuivent leur difficile travail de diffusion et font paraître deux livres de poésie dont nous recommandons la lecture aux auditeurs ; chacun coûte 12 € et l’achat peut se faire directement sur le site de l’éditeur.

     

    Le premier est celui de l’infatigable revuiste, artiste, photographe et surtout poète Cathy GARCIA« Les mots allumettes » richement illustré par elle-même. Un appel à la sérénité, une quête spirituelle où la révolte n’appelle qu’à la tendresse, à la fraternité des êtres, tous en mal d’absolu :

     

    Les mots en gravats dans ma tête. Des tonnes.

     

    Je retiendrai celui qui brise l’encerclement, dégage une spirale et m’élève jusqu’au ciel.

     

    Jusqu’au grand, grand ciel. N’avoir que celui-là en bouche.

     

     

    Lecture d’extraits du recueil.

     

    Le second « Triptyque du veilleur » est celui de Louis RAOUL poète connu des abonnés des éditions Encres Vives qui l’ont publié dès 1992, qui totalise aujourd’hui une quinzaine de recueils et a obtenu en 2008 le Prix de la Librairie Olympique pour son livre « Logistique du regard » publié chez N&B/Pleine Page. Ecriture délicate et pudique qui semble effleurer mais imprègne sa trace durable dans les esprits. Il faut lire ce poète discret. Lecture d’extraits du livre.

     

    Vous abordez

     

    Au pied de la tour

     

    Qui est vous

     

    Il vous faut rejoindre la hauteur

     

    Où veiller

     

    Dans l’éternité d’une heure

     

    La rouille d’un jour

     

    Qu’on aurait oublié.

     

     

     

  • Café Littéraire - Atelier Thot'M - 26 avril à Tarbes


    « Poésie Feu Rebelle… »


    « Il n'y a de véritable résistance que dans et par la création… » (Patrick Chamoiseau)


    Lectures, échanges, débat, autour de la poésie comme insurrection de l'imaginaire, invention du futur, avec


    Cathy Garcia, Plasticienne, Poète, Revuiste,

    et

    Eric Barbier, Poète.


    Cette rencontre, organisée par L'Atelier Thot'M, aura lieu à la Librairie « Les Beaux Jours », avenue de la Marne, à Tarbes, le Jeudi 26 Avril de 20h30 à 23h.

    Renseignements: E-mail : ogam.pc7@orange.fr

    « Thot'M, l'Atelier d'Ecriture »

    voir : tract EB.CG 4.pdf

  • Le vent d’Anatolie - Zyrànna Zatèli

    Note parue sur : http://www.lacauselitteraire.fr/le-vent-d-anatolie-zyranna-zateli.html

     

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    Quidam éditeur (collection Poche) 2012 - Traduit du grec par Michel Volkovitch - 56 pages - 5 €

     

     

    Sympathiques petits livres pour un prix plus qu’abordable, la collection Poche de Quidam séduit d’emblée. Un beau chat bleu en couverture de celui-ci. Le Vent d’Anatolie est une nouvelle de Zyrànna Zatèli, tirée du recueil Gracieuse dans ce désert.

     

    C’est un texte qui se lit d’un trait, d’une grande beauté, troublant, qui raconte dans une langue simple, très fortement empreinte de poésie, une étrange histoire d’amitié. Celle d’une jeune fille et d’une vieille tuberculeuse un peu folle. Mais est-elle réellement folle ou plutôt désespérément seule ? Isolée par la communauté qui craint sa maladie, mais la nourrit quand même par acquis, sans doute, de bonne conscience, elle meurt à petit feu dans sa maison, comme une pestiférée, brassant souvenirs et délires.

     

    Un jour, la jeune fille qui est la narratrice de l’histoire, est chargée d’apporter à manger à Anatolie, c’est le nom de la vieille malade. La nouvelle débute ainsi par le trajet qui mène à sa maison, un bref portrait de quelques personnages de ce coin perdu au nord de la Grèce : Naoum le bijoutier qui met des pompons aux oreilles des chats et qui vend aussi bien des bijoux que des fusils de chasse, le souvenir d’une jeune fille morte à 17 ans dans un sanatorium, un boucher cynique, pétomane, coureur de jeunes jupons et ainsi, on arrive chez Anatolie.

     

    « Je suis là » dit-elle sèchement, levant haut le menton. Puis elle tourna la tête et ajouta l’air songeur : « Gracieuse dans le désert… ».

     

    L’auteur a une façon de traduire le regard de la jeune fille sur Anatolie qui donne le ton de tout ce qui suivra, on est un peu chez la sorcière du conte de fée. La maladie, la différence, la solitude donnent à Anatolie une sorte d’aura magique, à la fois inquiétante et fascinante.

     

    « ses mollets luisaient comme la gélatine »

     

    « Sa démarche et son corps lui-même avaient quelque chose d’oblique, une ondulation incessante et fascinante en forme de huit… huit… huit… ».

     

    « Deux très grandes chaussures, presque autant que celles des clowns, vertes comme des poivrons et munies d’attaches rouges en corne ».

     

    Peu à peu, se tisse un lien entre Anatolie et cet enfant qui vient la nourrir, qui brave les interdits en demeurant auprès d’elle et qui, dès la première fois, va jusqu’à partager la nourriture à la même cuillère.

     

    « C’est Anatolie, on s’en doute, qui eut cette idée imprévue de manger ensemble, issue d’un désir pas vraiment clair et généreux mais plutôt cruel : celui de partager avec quelqu’un, avec moi, le poids de sa solitude, de cette maladie qui la torturait ».

     

    Parfois Anatolie souffre trop, délire ou se laisse aller à une certaine méchanceté, malice plutôt.

     

    « Tu veux donc voir une photo rouge ? demanda-t-elle quand la terrible toux se calma. Tiens ! Et elle déplia le mouchoir, plein de sang… Voilà mes rubis ! Tu en as, toi, des comme ça ? »

     

    D’autres fois elle raconte, son passé, son père, sa mère, sa sœur et son frère cadets. Bien qu’elle ne le montre pas, elle s’attache à sa visiteuse, celle qui ose rester avec elle et les deux finalement ont une certaine bizarrerie en commun.

     

    Un jour Anatolie parle du vent, ce vent qui devient parfois un homme et qui vient la chercher, la harcèle, mais elle lui résiste, alors il repart.

     

    Elle l’appelait le vent (…) il avait toujours le dos tourné ; elle voyait seulement son omoplate gauche, nue, son cou, une partie de sa tête, puis rien que le torse – il devait être assis au bord du lit, à sa droite –, tandis que l’autre côté se perdait dans les ténèbres.

     

    (…)

     

    Comme il doit se sentir seul de n’être désiré par personne… C’est pour ça qu’il vient vers moi comme un sauvage. Comme un mendiant.

     

    C’est que malgré tout elle est solide Anatolie, elle en a vu dans sa vie, cependant, vient le jour où elle arrête de manger. La jeune fille continue de lui rendre visite, de rester avec elle.

     

    Je précise que je n’ai jamais cru un seul instant que j’étais l’amie d’Anatolie par héroïsme. C’était ce charme surnaturel qui m’enveloppait quand je traversais sa cour, en arrivant ou en repartant (…). C’était cette image de la brume dorée, le premier matin, qui ne m’avait pas quittée depuis (…). C’était ses paroles, qui lorsqu’elles ne débordaient pas de méchanceté, étaient attirantes comme la nuit.

     

    Elle sera là jusqu’à la fin, jusqu’à ce que :

     

    « J’ai sommeil, dit-elle ».

     

    (…)

     

    Je me levai enfin pour partir. Le vent avait laissé la porte ouverte.

     

    Et on referme le livre, non sans une certaine émotion, ébloui par cette histoire si simple, mais que l’auteur, grâce à un véritable talent de conteuse, réussit à rendre absolument envoûtante.

     

    Cathy Garcia

     

     

     

    Zyrànna Zatèli.jpg

    Zyrànna Zatèli est née en 1951 à Sohos, près de Thessalonique et vit à Athènes. Elle a reçu le Grand prix national du roman en 1994 et 2002. Du même auteur : Le Crépuscule des loups, le Seuil 2001 ; La Fiancée de l’an passé, Le Passeur 2003 - Publie-net 2009 ; La Mort en habits de fête, Le Seuil 2007.

     

    Note publiée également ici : http://traversees.wordpress.com/2012/04/26/zyranna-zateli/


  • Mémoires du Serpent de Michel Host

     

    Note parue sur : http://www.lacauselitteraire.fr/memoires-du-serpent.html

     

    Mémoires du serpent, Michel Host

    Hemann 2010, 170 pages, 22 €

    Dans ces Mémoires du Serpent, on y entre et on y plonge même, avec un plaisir quasi enfantin, et il s’agit bien de cela, d’une fable fantaisiste et ludique, mais néanmoins pleine de fond et de sens. Ces Mémoires du Serpent ne sont rien de moins que la véritable histoire de la Genèse, narrée par celui qui en fut le maître d’œuvre, connu sous le nom de Satan et bien d’autres noms encore plus ou moins désobligeants, et à côté de laquelle la version de la Bible fait figure de mauvaise et lugubre plaisanterie.

    « Pourquoi ne m’ont-ils pas reconnu, moi leur créateur, si visible, à leurs pieds parmi les herbes, dans les trous de la terre, ou sous leurs yeux dans les branches des arbres ? Mon nom est Heywa. Je suis l’envers et l’endroit, je suis la vie riante et belle, la vie sombre et laide, je suis le commencement et la fin, le serpent coloré qui aime à dérouler ses anneaux dans les ténèbres et dans la lumière ».

    Edmund Orpington, professeur anglais fraîchement retraité, décide d’acquérir pour ses vieux jours un vieux château des Highlands, hanté comme il se doit (mais ceci est une autre histoire), le château de Deathstrike. Outre la population locale des plus accueillantes, il y fait la connaissance de la jeune et charmante Miss Ophélia Mac Callahan, qui deviendra sa nouvelle gouvernante. C’est elle qui conduira le professeur, lors d’une de leurs excursions, dans un souterrain oublié où ils découvriront, après quelques fouilles guidées par un mystérieux reptile, ces mémoires transcrites à cet endroit même par le moine Paphnuce, au XIe siècle. Miss Mac Callahan deviendra alors aussi une assistante à la traduction de ces textes rédigés en latin, non pas en anglais, mais en français, langue bien plus à-propos selon le professeur.

     

    « Porter des santés à l’Écosse, à ses collines venteuses, à ses averses rafraichissantes, à ses brouillards impénétrables, à ses habitants valeureux… fit monter la chaleur ambiante de plusieurs degrés Celsius ».

    Michel Host avec ce livre s’est fait plaisir et nous prenons tout autant le nôtre, bons vins, bonne chère, soutiennent nos deux traducteurs, et de là à passer aux plaisirs de chair, nous patienterons encore quelques chapitres… Un minimum pour aller au fond du sujet, si gentiment et joyeusement subversif (certains voudront peut-être dresser le bûcher ?).

    Nous noterons qu’en cela, nos deux protagonistes et avec eux au moins une bonne partie de la population locale, voire de l’Écosse toute entière, sont les dignes créatures de leur créateur qui, après avoir inventé l’espace et mis le temps en marche, créa sa première œuvre incontournable : le premier bar du monde.

    « je vis clairement que “cela était bon”, et cela l’était bel et bien : il fallait que nous nous désaltérions mes aides et moi, la tâche de créateur n’étant pas si simple et la chaleur paradisiaque s’avérant accablante ».

    Un roman plein d’humour et de bonnes manières y compris envers les animaux.

    On connaît Michel Host pour son amour de la langue et de la culture hispanique, aussi est-il surprenant de voir ce livre prendre place en Angleterre, mais il a eu donc vite fait de déménager en Écosse, et l’Écosse on le sait, n’est pas l’Angleterre. Il faut souligner que l’auteur règle subtilement ses comptes avec certaines manières anglo-saxonnes, avec la présentation de deux démons infréquentables pour leurs pairs, Time is money et My taylor is rich, qui, bannis pour tentative de corruption du couple originel pas même encore réveillé, s’en iront construire la City avant de se répandre plus tard Outre-Atlantique.

    « Et dès qu’il leur prit la fantaisie de faire des enfants, j’envoyai ceux-ci plus loin encore, au-delà du grand océan, en un autre lieu qu’ils allaient nommer Wall Street, au bord du fleuve Hudson… Je l’avoue, mon ami, tout cela, qui fut plutôt mal inspiré, mis en œuvre de manière approximative, finira un jour selon le pire des scénarios. Inflation ! Récession ! Chômage ! Rhumatismes chez les banquiers ! Crise mondiale… ! Que sais-je encore ! »

    Et nous nous régalons donc d’apprendre enfin la vérité sur l’histoire de nos commencements, mais petite critique, cependant, était-ce l’abondance de plus en plus rabelaisienne de mets et boissons ? Il semblerait que sur la fin, la traduction des Mémoires du Serpent soit un peu vite expédiée, afin sans doute de passer à la fête et au baptême, doux sacrilège, de deux chatons, personnages non négligeables de ce roman, devenus grands. De véritables bacchanales donc, qui devaient clore en beauté ce roman des plus pertinemment facétieux et si délicieusement épicurien.

     

    Cathy Garcia

     

     

    Michel Host.pngMichel Host né en 1942, en Belgique, de parents français, vit actuellement entre Paris et un village de Bourgogne. A enseigné avec un immense plaisir la langue et la littérature espagnoles, successivement à des lycéens, des étudiants et des agrégatifs. A toujours écrit et aussi traduit de l’espagnol et du portugais. A publié des poèmes : Déterrages / Villes (Dumerchez, 1997) ; Graines de pages (Eboris, Genève, 1999) ; Alentours (L’Escampette, 2001), Poème d’Hiroshima (Rhubarbe, 2006). Figuration de l’Amante (Poèmes, Ed. de l’Atlantique, 2010).Des romans chez Grasset : L’Ombre, le fleuve, l’été (1983, prix Robert Walser), Valet de nuit (1986, prix Goncourt)… chez Fayard : Converso ou la fuite au Mexique (2002), Zone blanche (2004)… Des nouvelles : Les Cercles d’or(Grasset, 1989), Heureux mortels (Grand prix S.G.D.L. de la nouvelle, Fayard, 2003)… etc. L’Amazone boréale (nouvelles, Ed. Luc Pire, Bruxelles, 2008). A traduit de Luis de Góngora : Les Sonnets (Dumerchez, 2002), la Fable de Polyphème et Galatée (L’Escampette, 2006), d’Aristophane, Lysistrata, (Ed. Mille & Une Nuits, 2009),3O Poèmes d’amour de la tradition Mozarabe d’al-Andalus (Ed.de l’Escampette, 2010), de Jorge Manrique, Coplas por la muerte de su padre (Ed. de l’Atlantique -Collection Hermès 2011).« La poésie m’est langue fondamentale, surgissement et violence, parfois traduisibles dans la langue maternelle. Son haut voltage n’est tolérable que par intermittence. Selon ma pratique, elle peut informer le roman, voire la nouvelle. » Direction d’ateliers d’écriture durant plusieurs années en milieux scolaires difficiles, professionnels et étudiants, au Blanc-Mesnil, à Bobigny, Nanterre, Cherbourg, Paris, et aujourd’hui à Muret. « Je suis né à la littérature et à la langue française dans l’exploration des poètes et penseurs de la Renaissance (Marot, du Bellay, Ronsard, Montaigne, Rabelais…). De là m’est venu naturellement un profond intérêt pour les classiques grecs, latins, allemands, espagnols et portugais notamment. Mes philosophes de prédilection : Socrate, Jésus, Jeremy Bentham, tous témoins d’une « morale naturelle » de fond : « Ne fais à autrui ce que tu ne voudrais qu’il te fasse, aime-le, ne porte pas atteinte à sa vie. » Mes devises : « Faisons provision de rire pour l’éternité. » (Marquise de Sévigné) – « Le combat est mon repos. » (Don Quichotte). Ces quelques lignes proposent un portrait subjectivement positif : je laisse de côté des défauts bien ordinaires, entre autres un art certain de déplaire, source de plaisirs et de déplaisirs selon les circonstances. Je ne puis me passer de silence et de musique, de l’amour et de la conversation des femmes et des enfants ; de la confiance des animaux familiers ou non ; de l’amitié dans les travaux partagés ; d’un jardin où respirer, voir les arbres, les nuages, la beauté du monde, oublier les faux maîtres à penser, penser avec ma tête après avoir lu de vrais maîtres.»

  • Les carnets d’eucharis n°33

    http://lescarnetsdeucharis.hautetfort.com/archive/2012/04/09/les-carnets-d-eucharis-n-33-printemps-2012.html

     

    PRINTEMPS 2012

     

     

    LES CARNETS D'EUCHARIS N°33, Nathalie Riera

    2012 © Photo : Nathalie Riera - Série « Photobiographique/Autoportrait en herbe »

     

     

    Photobiographique

    NATHALIE RIERA

     

    Gertrude Käsebier

    PHOTOGRAPHE

     

     

     

     

     

    ■■■Thomas Brummett

     

    DU CÔTÉ DE…

    Jos Roy(choix de poèmes)

    Roberto BolañoTrois/Les chiens romantiques

    Cathy Garcia(Délit de photos)

     

    CHRISTIAN BOURGOIS EDITIONS ADOLFO BIOY CASARES quelques jours au Brésil

    EDITIONS ISOLATO CLAUDE DOURGUIN La peinture et le lieu

    EDITIONS NOUS JEAN DAIVE L’énonciateur des extrêmes

    CARDERE EDITIONS CATHY GARCIA Les mots allumettes

     

    AUPASDULAVOIR

    PIERRE AGNELGustave Roud, Le temps de l’Adieu n’est plus. Le temps de la Salutation commence

    NATHALIE RIERAGustave Roud, attaché à la même seule échappée

     

    ■■■ AMELIA ROSSELLI[Hommage]

     

    Patti Smith … Walter Benjamin

     

    DES LECTURES/DES PORTRAITS

    Susan Sontag Le prurit de l’interprétationpar Nathalie Riera

    Roberto Bolaño lâche ses chiens romantiques par Patrice Beray

    Guido Cavalcanti / Danièle Robert IME, éditions Rimes & raison par Claude Minière

    Paul Louis Rossi IME, éditions La porteuse d’eau de Laguna & Les Chemins de Radegonde par Tristan Hordé

    [Disparition]Antoni Tàpies, métaphysicien de la matière par Claude Darras

     

    REVUE(S)

    Diérèse – # 56 (Thierry Metz)

    La Voix des Autres – # 5 (Cahier central Angye Gaona)

  • Eaux promises de Porfirio Mamani-Macedo-

    traduit de l’espagnol par Max Alhau

    Edilivre 2011 – 44 pages – 10 €

    Eaux Promises.JPG


     

    Mon vieux visage amoureux continuera d’être orphelin de tout, quelque part où personne ne se souviendra de lui. (…) Maintenant, je cherche seulement un visage dans la neige, un signe, une étreinte pour apaiser l’hiver de mon être.

     

    Ainsi débute Eaux Promises de Porfirio Mamani-Macedo.

     

    Exil, errance, solitude, boue, poussières, vent, fleuve, rêve et mémoire, et comme une marche forcée qui n’arrivera jamais nulle part, car nulle issue possible à la douleur et à la perte imposée par l’exil.

     

    Le premier recueil de Porfirio Mamani-Macedo que j’ai lu il y a quelques années, lorsque j‘avais publié Porfirio dans la revue Nouveaux Délits (n°5, mai 2004), c’était Voix au-delà des frontières, dans lequel il raconte son arrivée en Espagne, après avoir quitté le Pérou, et cette terrible et double peine de celui qui est à la fois l’étranger en territoire inconnu et l’exilé d’un pays aimé mais désormais interdit. Dans Eaux Promises, Porfirio reprend ce thème si important de son vécu, toute la douleur associée et se fait porte-voix de cette condition d’exilé, errant, clandestin, fuyard, de tout temps et de partout. Ode universelle à ceux, toujours plus nombreux, qui ne sont sur cette terre plus que des ombres en transit.

     

    Seules tes traces diront que tu es passé

     

    Je retrouve dans ce recueil cette belle voix, amoureuse de beauté et de fraternité, hantée par la déchirure et une immense solitude.

     

    Combien nous désirons la pluie en chemin, combien nous cherchons l’amour, seuls, parmi les heures interminables lorsque nous traversons un pont, un parc, une montagne pour voir ce qu’il y a de l’autre côté !

     

    Cette douce voix d’homme qui implore que cesse enfin la violence.

     

    La parole, pas la guerre. La voix, pas les armes. Plus de bruit, mon âme est brisée. Plus de chemins à travers les montagnes de la haine et de la douleur.

     

    Porfirio Mamani-Macedo nous renvoie l’écho de ce vide vertigineux qu’est celui de l’errance, le désert sans consolation du déracinement et la si frêle béquille de l’espoir.

     

    Faisant route vers des terres inconnues, des hommes et des femmes, malheureux, vieux, malades, doivent encore marcher attendant le soir ou l’aube qui les sauvera.

     

    Arrachés à leur vie comme des pierres par un fleuve en furie, il leur faut marcher, marcher toujours, fuir l’intolérable, l’injustifiable, l’atroce.

     

    Que n’éclate plus, ô mon dieu, le feu dans la chair, que l’on n’entende plus le bruit d’un homme tombant, le corps criblé.

     

    (…)

     

    Que d’enfants sans lumière sur les chemins ! Que de cadavres serrés dans la terre comme une boue maudite ! O vent, éloigne ce siècle en ruine rempli de honte et de folie !

     

     

    Il faut marcher encore et encore, hommes, femmes, enfants, jetés hors de leur foyer, de leur pays, poussés sur les routes, broyés contre les frontières, dispersés dans les brumes de contrées où ils ne sont pas les bienvenus, les yeux emplis de peur et le cœur en miettes.

     

    Sur le chemin glissant et étroit, ombre après ombre, s’avancent les pas des exilés.

     

    (…)

     

    Etire ton cou, cygne enchaîné, pour voir ceux qui s’éloignent. Le chemin qu’ils suivent ne les conduits vers aucune porte.

     

     (…)

     

    Que te dire, cloche ancienne, en ce soir de printemps, car ce ne sont pas des ombres qui passent mais des plaies ouvertes qui cheminent ; ce sont des rêves brisés que les vents obscurs soufflent.

     

     

    Et Porfirio Mamani-Macedo aussi, continue à marcher et à maintenir vive la mémoire, à ressasser, car il le faut, le souvenir.

     

    Qu’elle est loin la mer que je ne vois pas ! Qu’elle est loin la vieille montagne où je suis allé m’asseoir après un après-midi interminable ! Qu’elles sont loin ces aubes sans mère, sans fruit, sans café !

     

    (…)

     

    Quelque part je resterai, vieille montagne. Toi qui m’as vu franchir la frontière comme le vent entre la pluie, préserve mon silence dans un bois.

     

    Car le souvenir, aussi douloureux soit-il, ne doit pas s’effacer, car à l’auteur comme à tous les exilés, la mémoire est tout ce qui leur reste, le souvenir, leur seul et unique bagage.

     

    Tu avances, absorbé, silencieux, tu te consumes jour après jour. Tous les tiens ne vont pas avec toi. Peut-être un jour les rencontreras-tu, peut-être un jour te rencontreront-ils, peut-être ne vous rencontrerez-vous jamais.

     

    Et Porfirio Mamani-Macedo marche et mâche le chagrin et l’indéfectible solitude.

     

    Les pas gris que je fais et qui m’attendent, rue après rue, sont des épines qui emmêlent mon âme.

     

    (…)

     

    Car malgré l‘appel des Eaux Promises,

     

    Il n’y a pas de rivages sur cette mer que je traverse. Toute parole prend l’eau et tout écho s’éloigne avec les vents. Il pleut des souvenirs oubliés, des chemins que l’on ne parcourra plus, des paysages dont mes yeux noirs ne pourront plus jouir.

     

    Nulle issue à l’errant sinon de marcher encore et encore et la boucle incessamment est bouclée autour du cou de l’espoir.

     

    Un spectre m’arrête derrière chaque porte. Là, j’attends encore que tu sortes ou que tu arrives, voix humaine, pour consoler mon âme.

     

     

    Cathy Garcia

     

     

     

    porfirio mamani macedo.jpgPorfirio MAMANI MACEDO est né à Arequipa (Pérou) en 1963. Docteur es lettres à la Sorbonne Nouvelle. Il a obtenu son diplôme d’avocat à l’Université Catholique Santa María, et a fait ses études de Lettres à l’Université Nationale de San Agustin (Arequipa).

     

     

     

     

     

     

    Ses blogs :http://porfiriomamanimacedo.blogspot.com/ et http://letrasdeporfirio.blogspot.com/

     


    Bibliographie :


    La Luz del camino. (poésie) Lima, Hipocampo Editores, 2010.
    Tres poéticas entre la guerra civil española y el exilio (essai): Miguel Hernández, Rafael Alberti, Max Aub. Lima, Fondo Editorial de la Universidad Mayor de San Marcos, 2009
    Lluvia después de mi caída y un Requien para Darfur, (poésie) Lima, Hipocampo Editores, 2008.
    La sociedad peruana en la obra de José María Arguedas (essai), Lima, Fondo Editorial de la Universidad Mayor de San Marcos, 2007
    Représentation de la société péruvienne au XXème siècle dans l'œuvre de Julio Ramón Ribeyro. (essai)Paris, Editions L'Harmattan, 2007
    Avant de dormir,(nouvelles) L’Harmattan 2006.
    Poème à une étrangère. (poésie) Editinter, 2005.
    Un été en voix haute, (poésie) Trident neuf, 2004.
    Voix au delà des frontières, (poésie) L'Harmattan 2003.
    Flora Tristan : La paria et la femme étrangère dans son œuvre, (essai) Editions L'Harmattan, 2003.
    Voix sur les rives d'un fleuve, (poésie) Editions Editinter, Paris, 2002.
    Le Jardin et l'oubli, (roman) Editions L'Harmattan, Paris 2001.
    Au-delà du jour, (poèmes en prose) Editions Editinter, Paris 2000.
    Début de la promenade, (poésie) Editions Encres Vives, France.
    Les Vigies (nouvelles) Editions L’Harmattan, Paris 1997.
    Dimanche, (récit) Editions Barde la Lézarde, Paris 1995.
    Ecos de la Memoria, (poésie) Editions Haravi, Lima, Pérou 1988.

     

     

     

  • Pour répondre à la question de Fabrice Marzuolo

     

    Réponse publiée dans L’Autobus n°4

    http://autobus.centerblog.net/48-numero-4

     

    L'univers poétique actuel, pour moi ça ne veut rien dire ou alors faut parler de multivers. Il y a donc toutes sortes de choses dans les multivers poétiques actuels, multitude de courants, de réseaux, de pelotes emmêlés, d'auteurs divers et variés, variables aussi, de styles et d'anti- styles qui font styles etc.


    En tant que revuiste autant qu'en tant qu'auteur, je garde un œil distancié sur les bousculades, les polémiques, les défenseurs de la vraie poésie, les défenseurs de la poésie pour tout le monde, les défenseurs de la non-poésie, les censeurs et les sangsues, les poètes rebelles et ceux qui ont la part belle, les poètes maudits et ceux qui maudissent, les poètes d'hier et d'aujourd'hui, les poètes et les pouets.


    La poésie c'est tout ça et rien de tout ça. Haaaaaaaaaaaaaaaa, la poésie !


    En tant qu'auteur, la poésie, je n'en "fais" pas, elle est là, elle était là avant moi, elle y sera après, je ne pense pas qu'elle soit l'apanage des poètes, les poètes à la limite sont des révélateurs de la poésie qui elle-même est révélatrice de quelque chose que faute de mieux on appelle poésie. La poésie c'est un mot. En tant que mot, elle rejoint le dictionnaire. J'ai déjà dit que les poètes sont des bergers, les mots toutes sortes de bestiaux, qu'on regroupe, qu'on aligne pour en tirer sens, et parfois on les tisse pour en tirer de la magie, qui est au-delà du sens. La poésie a quelque chose à voir avec la beauté, mais pas pour tout le monde, donc je pense qu'il n'y a pas de règle à imposer sinon à soi-même si on en a envie ou besoin de règle. Chacun s'exprime comme il le souhaite, et pour moi finalement l'important dans la poésie, c'est le lecteur. En tant que lectrice, j'aime, je n'aime pas, ça me parle, ça ne me parle pas, ça m'exalte, ça me laisse froide, quels que soient le style, l'école, le genre, le sujet, et donc ainsi se font les rencontres, entre un auteur qui écrit et un(e) lectrice/lecteur qui aime... Alors la poésie elle est peut être là, dans cet entre-deux, dans l'espace de la rencontre. Le reste... n'est que... ce qu'on voudra.


    En tant que revuiste, je peux dire qu'il m'arrive d'avoir la nausée de la poésie, sous toutes ses formes, comme un pâtissier peut-être ou un chocolatier qui ne supporterait plus le sucré... donc là je fais des pauses. Je vous avouerais cependant que je suis extrêmement difficile en poésie, et que je ne m'enthousiasme pas si souvent que ça, et je peux avouer aussi qu'il y a de la poésie que j'aime, parce qu'en fait ce n'en est pas... ce sont des histoires, des récits, des instantanés de vie, et seuls les poètes peuvent peut-être arriver à y voir de la poésie. D'où le fait que beaucoup de lectrices-lecteurs de poésie sont des poètes.

     

     

    Cathy Garcia, 2011

  • Les mots allumettes, lu par JL Millet

    Texte aride, très court racontant un rêve-vie cauchemar.

    J’ai été projeté dans une arène, dans « l’enclos en soi de ce qui se tait. Ce qui est noir dans l’obscurité, si rouge dans le sang »

    Mais arène austère, crétoise, lieu de naissance du Père Zeus-Taureau, taureau Minotaure, mais la Fille est beaucoup plus cheval de picador aux yeux bandés « ‘’serti’’ dans (le) jardin amer » de cette arène aveuglée « labyrinthe affamé d’humanité »

    D’où cette absolue nécessité  de gratter des mots allumettes car « ce qui transpire des murs, c’est le goût de l’ombre » et puis il faut tenter encore et encore d’apercevoir les fentes de la palanquère «  vestiges des rites », « déloyale consolation (de cet) l’horizonescale » « tout brûler et repartir, de déchirure en déchirure » pour retrouver « le cercle de la cohérence oubliée »

    Faire en sorte que par l’un de ces «  chas d’aiguille, tout un univers se faufile » afin de retrouver « l’air qui sépare le mot de la mort » «  d’une fusillée au crache-lueur »

    Et puis ne retenir qu’un mot un seul, « celui qui brise l’encerclement, dégage une spirale et (l’)élève jusqu’au ciel »

    Mais «  chaque solution n’est toujours qu’une étape. » car « peut-il y avoir une fin à nos servages gigognes ? » 

    Alors vite, encore  « des mots. Des mots fous. Des mots amulettes. »

     

    JL Millet, avril 2012