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  • Jean Giono

     

    Dès que les sens sont suffisamment aiguisés, ils trouvent partout ce qu’il faut pour découper les minces lamelles destinées au microscope du bonheur. 
    Tout est de grande valeur : une foule, un visage, des visages, une démarche, un port de tête, des mains, une main, la solitude, un arbre, des arbres, une lumière, la nuit, des escaliers, des corridors, des bruits de pas, des rues désertes, des fleurs, un fleuve, des plaines, l’eau, le ciel, la terre, le feu, la mer, le battement d’un cœur, la pluie, le vent, le soleil, le chant du monde, le froid, le chaud, boire, manger, dormir, aimer.


    in La Chasse au bonheur

     

     

     

  • 30 ans dans une heure de Sarah Roubato

     

    Publie.net éd., 5 septembre 2018

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    142 pages, 14 €.

     

     

    « 30 ans dans une heure » : qu’est-ce qui relie les paroles de ces presque trentenaires d’ici et d’ailleurs ? Un âge qui marque une étape importante dans la vie, l’âge où la pression sociale se fait plus forte et où on commence à prendre conscience du temps qui passe.

     

    Toutes ces voix rassemblées dans ce roman forment une polyphonie dont la note commune est un questionnement sur le sens, une quête de sens, de liberté et d’authenticité. Tout ne coule pas de source et dans le monde qui se présente à elles, elles n’ont plus forcément envie de perpétuer des habitudes, des modes de vie et de pensée sans en interroger véritablement le sens. C’est une sorte de crise qui se traduit plus fortement pour ces personnes — pour cette génération ? — par un besoin pressant et vital de cohérence.

     

    « C’est une espèce de courbature à l’âme. Comme un muscle qui tire chaque fois qu’on triche. »

     

    Certains ont déjà fait le pas, le pas de côté.

     

    Travailler, s’insérer, fonder une famille, éduquer ses enfants pour qu’ils aient une bonne situation, assurer sa propre carrière, sécuriser ses arrières, avoir des loisirs, des projets, être compétitif, prévoyant mais consommer sans se poser de questions. Voilà le réel qu’on leur a appris.

     

    « Il vaut mieux peut-être s’exténuer à essayer d’inventer autre chose, au lieu de chercher à s’abriter dans les ruines de ce qui nous rassure. Il vaut mieux peut-être travailler à se donner les moyens de dire merde. », dit l’une des voix.

     

    Même quand elles sont marginales ces voix qui s’expriment ici, ce qu’elles disent est universel, va à l’essentiel et défie toute catégorisation, elles parlent de ce pas de côté qui permettrait de donner sens justement, de sortir des ornières et des sens uniques obligatoires, de donner de la dignité à ce que l‘on vit, ce que l’on fait, à soi-même comme aux autres.

     

    Comme Olivier chez qui « on était reçu comme des rois, mais jamais comme des invités » (…) Sa pauvreté n’était pas un refuge pour le laisser-aller, ni son exigence un abri pour l’orgueil. Quitte à faire quelque chose, autant le faire pour de vrai. Pour lui le mieux possible, c’était l’ordinaire. (…) Aucun de ses gestes ne clashait avec ses valeurs. »

     

    Ces voix parlent de réappropriation, réappropriation de sa propre vie, de sa pensée, de ses choix et de sa responsabilité, y compris celle de ses erreurs et échecs, elles parlent aussi d’apprendre à disparaître.

     

    « "Il devait avoir une faille". C’est pas une faille, Madame, c’est un tunnel. Un couloir qui s’enfonce dans la vérité d’un homme. »

     

    Elles parlent d’angoisses, de pertes de repères, de la violence du monde, de solitude.

     

    « Un animal a envie de chialer en moi. Mais il a perdu son cri. Je me sens sec. Sec comme un arbre mort qui a encore assez de feuilles pour ne pas que ça se voie. Il faudrait quelque chose pour me rendre à nouveau vivant. Un autre regard qui se poserait sur ma vie. Quelqu’un qui verrait ce que je ne m‘autorise pas à être. Quelqu’un qui ferait bien plus que m’apprécier. Qui pourrait m’espérer. »

     

    Il y a des voix qui ont choisi de se mettre au vert pour de bon, qui préfèrent parler aux animaux :

     

    « Tu dois penser que les humains, ça assure. On t’apporte du foin, de l’orge, des carottes. Ta citerne ne manque jamais d’eau. (…) On donne l’impression de savoir ce qu’on fait. Si tu les voyais, une fois dans leur monde, pas foutus de vivre ensemble ces humains ! Chacun dribble avec son petit moi. Ils jouent à un jeu sans connaître les règles. Alors ils se cognent, fatalement, de tous les côtés. Ils se cognent des mots, des intentions, des sourires, des projets, des caresses.

     

    Ce ne sont pas les plus féroces qui ont les coups les plus cinglants. Ce sont tous ceux qui font mal sans faire attention, par paresse ou par négligence. Rien qu’avec des non-dits, des oublis, des laisser-faire. »

     

    Il y a des voix qui cherchent à dénuder l’évidence, des voix qui chuchotent d’autres possibles.

     

    « Il dit qu’il faut toujours porter en soi l’opposé de ce qui nous entoure, car sans l’ombre, la lumière ne sait pas éclairer. »

     

    Des voix qui nous invitent, quel que soit notre âge, notre sexe, notre genre, notre identité, à danser avec elles sur le quai des possibles.

     

    Qu’est-ce qu’on cherche au fond, toutes et tous, et que nous sommes si habiles à couvrir de mensonges qui nous font croire que ce n’est pas possible ?

     

    Sarah Roubato, entre autre pisteuse de paroles, écouteuse à temps plein, parcourt depuis pas mal de temps et par tous les temps, la France et plus encore, pour glaner justement des voix, les rassembler, les porter, les faire entendre. Bien qu’ici elles sortent toutes de sa propre imagination, on ne peut s’empêcher de penser qu’elles sont nourries de rencontres réelles.

     

    Une polyphonie où la fiction se fait miroir, écho des possibles, à nous d’en capter toutes les résonances, tous les reflets et peut-être parvenir ainsi à mieux nous voir et nous écouter nous-mêmes.

    Cathy Garcia

     

     

     


     

     

    005A1322-600x400.jpgAnthropologue, auteur compositeur interprète, bloggeuse, écrivain, Sarah Roubato travaille toujours avec les mots. Elle les écrit, les chante ou les enregistre. Quand les routes toutes tracées passent au-dessus des terrains les plus riches, elle n’hésite pas à les quitter et à prendre les tournants. Des grandes écoles françaises aux universités québécoises, des colloques au terrain de recherche, des murs du conservatoire à l’école des bars et des petites scènes, de l’écriture aux portraits sonores, elle ne perd jamais son verbe : exprimer les potentiels. Bibliographie : Lettres à ma génération, Michel Laffont 2016 ; Trouve le verbe de ta vie, éd. La Nage de l'Ourse, 2018. Son site : http://www.sarahroubato.com/

     

     

     

     

     

     

  • Rouge de soi de Babouillec

     

     

    Rivages éd., mars 2018

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    142 pages, 15 €.

     

    Expérience d’immersion totale, Babouillec nous offre avec son Rouge de soi, un roman spirale qui nous entraîne dans son tourbillon jusqu’au centre, là où l’auteur ne fait plus qu’un avec son personnage. Éloïse Othello est un alter ego plus intégré, indépendant, autonome à qui l’auteur peut confier ce qui se trouve à l’intérieur d’elle-même, au plus rouge de soi, au cœur de l’être : ses rêves, ses élans, ses désirs, sa liberté de voir, de penser, de bouger, ses profonds questionnements existentiels. Éloïse Othello danse, a des amis, des projets, des poids et des peurs aussi dont elle veut se libérer en suivant une thérapie. Elle est perçue comme différente mais c’est une nana qui rebondit. Cependant, plane sur elle une peur ultime et on ne peut s’empêcher de frissonner en lisant ceci parce qu’on comprend à quel point l’auteur est tout près derrière ces mots-là :

    « Entrer dans la confusion de l’amour et de la folie est ordinaire dans ce monde qui bombarde nos vies de slogans ordinaires, un amour fou, fou d’amour. Alors pour une personne traquée par la folie depuis son enfance, l’amour est synonyme de piège. Sa vie a pris des allures d’animal traqué. Pour dominer ses peurs, pour chasser ses angoisses, elle se réfugie dans ses entrailles où elle devient son ombre, une zombie sociale hantée par une peur ultime, la folie, l’enfermement. »

    Il y a de l’autofiction dans Rouge de soi car si on a lu Algorithme éponyme et autres textes, on ne peut que reconnaître Babouillec à travers Miss Othello, sa vision juste, percutante, inédite, aiguisée et brillante du monde et de l’humain, un monde dans lequel son personnage aussi doit se battre pour trouver sa place.

    « Le mécanisme de la survie de l’espèce humaine tisse habilement sa toile, le piège se referme rapidement et commence l’ascension sociale. Un peu comme les montagnes russes, on monte et on descend. »

    La danse pour Éloïse Othello, qui se perçoit comme nomade sociale et sauvagement mutante, c’est comme les mots pour Babouillec, ils permettent d’échapper à la pesanteur, à la solitude, à l’angoisse, à la sensation d’enfermement, aux difficultés des relations humaines.

    « Donner une définition de l’être en soi, sans déborder sur la ligne rouge du boulevard de l’autre, est un exercice compliqué. Nous mordons la poussière à pleines mâchoires de jour comme de nuit pour mettre la mécanique de l’existence sur les rails. »

    Éloïse Othello s’interroge beaucoup, son cerveau bouillonne en permanence, la fragilise, et l’écriture devient alors pour elle aussi l’issue de secours : « Avec l’écriture, j’ai enfin trouvé un moyen de me raconter sans parler de moi. »

    Rouge de soi n’est pas un roman comme les autres et ici ce n’est pas juste une formule, dans sa structure même, il est différent, déstabilisant. Une expérience vraiment étonnante car à la fois étrange et terriblement familière. L'écriture offre à Babouillec la possibilité de s’exprimer et elle le fait dans une quasi totale liberté, détachée des règles, des normes, des habitudes du genre, le résultat est inclassable, unique, plein de fraîcheur, de poésie et d’humour.

    « Marcher à contre-courant de la culture établie donne du fil à détordre, des nœuds à l’estomac, des cheveux en pétard, une vie dépareillée. »

    Le simple fait que ce roman existe est un merveilleux pied de nez justement à tout ce qui voudrait nous enfermer dans des cases et des limites.

    « Rouge comme les interdits, le sang, l'intimité, l'émotion suprême, la timidité, le dépassement de soi dans la profondeur de l'identité, le carrefour des sens interdits. »

    Rouge de soi, d’émotion et de plaisir.

     

    Cathy Garcia

     

    SI_6170701_1.jpgBabouillec, alias Hélène Nicolas, jeune femme née autiste sans parole, en 1985. Diagnostiquée « déficitaire à 80 % », jamais scolarisée, son habileté motrice est insuffisante pour écrire, elle est enfermée dans le silence. Hélène a intégré vers l’âge de huit ans une institution médico-sociale qu’elle quitte en 1999. À partir de cette date, elle suit un programme de stimulations neurosensorielles accompagné d’activités artistiques et corporelles au domicile familial – un travail quotidien partagé entre Hélène et sa maman. Au bout de vingt ans, elle réussit, grâce et avec le soutien de sa mère, à écrire à l’aide de lettres en carton déposées sur une feuille blanche et toute la richesse de son être et ses talent se révèlent. Plusieurs livres sont  alors publiés, des pièces sont mises en scène. En 2016, Julie Bertucelli sort un documentaire sur Babouillec : Dernières nouvelles du cosmos.

     

    Bande annonce : https://www.youtube.com/watch?v=SkHtzY-9DEs

    Entretien avec Julie Bertucelli : https://www.youtube.com/watch?v=2NMFWE1gtf8

     

     

     

  • Boris Vian

     

    A tous les enfants
    Qui sont partis le sac au dos
    Par un brumeux matin d’avril
    Je voudrais faire un monument
    A tous les enfants
    Qui ont pleuré le sac au dos
    Les yeux baissés sur leurs chagrins
    Je voudrais faire un monument
    Pas de pierre, pas de béton
    Ni de bronze qui devient vert
    Sous la morsure aiguë du temps
    Un monument de leur souffrance
    Un monument de leur terreur
    Aussi de leur étonnement
    Voilà le monde parfumé
    Plein de rires, plein d’oiseaux bleus
    Soudain griffé d’un coup de feu
    Un monde neuf où sur un corps
    Qui va tomber
    Grandit une tache de sang
    Mais à tous ceux qui sont restés
    Les pieds au chaud sous leur bureau
    En calculant le rendement
    De la guerre qu’ils ont voulue
    A tous les gras tous les cocus
    Qui ventripotent dans la vie
    Et comptent comptent leurs écus
    A tous ceux-là je dresserai
    Le monument qui leur convient
    Avec la schlague, avec le fouet
    Avec mes pieds avec mes poings
    Avec des mots qui colleront
    Sur leurs faux-plis sur leurs bajoues
    Des larmes de honte et de boue.

     

     

     

  • Nouvelle collection : mes cartes d'artiste

     

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    "Cheveux rouges"
     
     127 x 178 mm
     
     
     

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     " Cancelled"

    127 x 178 mm

     

     

     

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     "Calavera de fiesta"

    127 x 178 mm
     
     
     

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    "Ange vagabond"
     
     110 x 220 mm
     
     
     
    350-400 g/m², super qualité, super solides, toucher soyeux,
    pas de brillance, pas de reflet, fabrication écolo sans chlore élémentaire (ECF)
     
    chacune sera signée au dos
     
    5 euros la carte (+port)
     
    à réserver par mail : mc aroabse orange.fr
     
     
    disponibles également à la boutique Fourmillard à Cahors