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Mon cœur impatientA l’aubeRêve de la nuit solitaireSerré et lasIl fait du vacarme des joursSon excuseMais quand vient le soirLe même cœurSe met à chanter l’auroreEt quand vient la nuitLes branches de ses rêvesSe mettent à bourgeonnerInconscient de lui-mêmeIl s’envole sans limiteVers le cielAh ! si seulementCueillir la luneSi seulement la nuitPouvait pour le prixD’une seule étoileRacheter ma courbureSi seulement l’aubePouvait ne point jaillirAlors cette cité de la nuitJe l’habillerais de lumièreEt mon regardSerait pour l’éternitéBuveurs d’étoiles puresQue faire de ce cœurBrodeur de rêvesCe cœurQui noie mon êtreDans un tissu d’imaginaireJusqu’à quand cette vieille sorcièreMe jettera ses charmes de vierge ?
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Bijan Chemirani - Jurjuna
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Judith en den bosh
Je voudrais des ailes. Aile comme lumière, aile comme légère.
Hélas…. Mes ailes lasses.
Je touche aux bas-fonds où rampent fous et insanités. Tunnels lugubres, lancinants. Je me creuse au-dedans pour accueillir la vie mais mes yeux ne surprennent que la mort. Mort des mouches, mort du souriceau, mort dans l’âme que je traîne d’un matin à l’autre.
L’âme… Une superstition ?
Ainsi donc j’étais folle et je ne le savais pas. J’avais oublié. Je l’avais trop bien caché, dissimulé dans mes brouillards, mes fumées. Folle sans aile. Sans amour. Sans amour surtout. Toujours à me frotter au côté crin de la vie.
Peau douce mais le cœur si friable.
A force d’user ma solitude, elle est devenue fine et translucide.
Fragile, si fragile…
2002
in Ourse bipolaire
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Auteur inconnu
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Emily Dickinson
Ils m’ont enfermée dans la Prose —
Comme lorsque j’étais une Petite Fille
Ils m’enfermaient dans le Placard —
Parce qu’ils me voulaient « calme » —Calme ! S’ils avaient pu jeter un œil —
Et espionner dans mon esprit — le visiter —
Ils auraient aussi bien pu enfermer un Oiseau
Pour trahison — à la fourrière —*
They shut me up in Prose —
As when a little Girl
They put me in the Closet —
Because they liked me "still" —Still! Could themselves have peeped —
And seen my Brain — go round —
They might as wise have lodged a Bird
For Treason — in the Pound —un poème d'adolescence
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Iness Mezel - Amazone
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Wolfgang Suschitzky
enfouir dans l’argile
les cendres de palabres
quand l’onde fraîchit
courir vers la forêt
danse effilochée des sentiers
s’imprégner du chant
sur la peau de la pluie
foudre de joie
fulgurante lucidité
primitive
in Aujourd'hui est habitable, Cardère 2018
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Daniel Masclet - La fille au pot de confiture - Quai d'Orléans - Paris - 1950
J'emmerde les artistes et les poètes qui se pensent à part.
Le mot ART ne devrait pas exister, à la place il faudrait lire VIE.
Pulvériser ces ghettos qui font que les poètes ne fréquentent que les poètes. Tracer, tresser des ponts, se faire passeurs d’ailes.
Que le poète s’enivre avec le plombier, que le plombier danse avec les ballerines, que les danseuses recoiffent les infirmières, que les infirmières peignent les maçons, que les maçons bâtissent des charpentes d’étoiles,
que les étoiles fassent des confitures, que les grand-mères fassent la révolution, que les révolutionnaires fassent du yoga, que les yogis fassent des plans sur les comètes qui ouvriraient des bars pour les poètes qui s’enivreraient avec les policiers en tricotant des alouettes pour faire rire les plombiers.
Que tout se mêle se mélange, semer l’ange bleu de chez Armani, costard de travail, babouches bleu blanc rouge et baguette au sésame. Que tout s’enlace dans l’immense orgie de l’humanité réconciliée et dans un grand feu de joie à ciel ouvert, toutes les machinations du monde seraient jetées.
in Chroniques du hamac
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Léo Ferré - Les poètes de sept ans - 1964
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Vo Anh Kiet
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Odysseas Elytis
J’ai quelque chose à dire de limpide et d’inconcevable.
Comme un chant d’oiseau en temps de guerre.
in Le soleil sait
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Vincent Munier - Lorraine
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Ile Eniger
L'indifférence du ciel a blanchi ses cheveux, rétréci son pays. La serpe du vivre a taillé son chemin, ses rires, ses rêves. Des souvenirs traînent un air nostalgique qu'elle balaie. Régulièrement. Une poignée d'épines dans le sucre fondu des jours, elle est riche d'anciens bouquets et en avance d'une fleur. Elle aime que le trou du mur soit refuge de souris. Elle connaît le chant des terres. Sa vivante sève. Minuscule déploiement de folle envergure, remise à grains inépuisable, elle écrit : "ma saison c'est l'amour," et elle sourit. Au brûlot d'écriture, elle rassemble sa maison, ranime le feu. Comme la vie même, elle défie la raison raisonneuse.
in Les pluriels du silence
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Gustave Gain - Femmes sur la plage de Siouville-Hague vers 1908
AMER PÂLE
Si pâles, toutes ces pages que le vent tourne
Si sale, la plage où la viande se retourne
A l'abandon vont les vieux bateaux
Leurs grandes voiles tombées en lambeaux
Les flots tournent en rond, à genoux
Jusqu'au fond des draps
Et les femmes pleurent tous les époux
Qu'elles n'épouseront pas
Mais allez venez, n'y pensez plus
Allez dansez, dansez pour la mer
Même si tout l'amour semble perdu
Tournez, tournez trop blanches pages
Que le vent jaloux balaie sur les plages
Femmes, laissez coulez vos flots amers
Qu'ils s'en retournent à la mer pâle
Laissez partir toutes ces pages
Que le vent tourne, tourne encore.
in Au fond du tiroir, Livre d'artiste n°2, 2012
http://cathygarcia.hautetfort.com/archive/2012/11/27/livre-d-artiste-n-2-au-fond-du-tiroir.html
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Albert Kahn Collection - Autochrome