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RÉSONNANCE & COPINAGES

  • Cèdre - Être là

     

        « La proportion de sondés déclarant souffrir de la compagnie des autres est revenue à son niveau d’avant crise. […] À ce jour, les trois millions de Français tombés dans la solitude chronique n’ont pas retrouvé une vie affective normale. […] Tout se passe donc comme si le confinement a constitué une parenthèse où il était acceptable de se sentir seul, parenthèse qui est maintenant révolue. »
        Baromètre « Les Français et la solitude », Ifop, 2022.

     

     

    Il y a des moments où seul, ça veut dire abandonné. Il y a des abandons même au milieu des foules, et ils sont d’autant plus glacés.

    Quand je dis je vis seul, certains entendent abandonné. Détaché et flottant à la dérive, naufragé. Mais je ne parle pas de ce vertige froid, de ce radeau médusé.

    Je suis île. Je vis dans des archipels. Je respire dans la ligne d’horizon dégagée et mon cœur bat dans la courbure de la terre.

    Quand je dis je vis seul, je parle de vivre depuis un havre, sortant et venant dans le monde puis revenant refleurir dans un lieu où les mouvements qui sont les miens sont uniques à troubler l’air, où je peux me déployer sans me cogner contre un regard, contre une présence.

    Où je peux me rassembler aussi, trier mes pièces, les nettoyer, réfléchir à leurs emboîtages. Mon corps et ma tête sont comme un appartement où vivent les gens, j’ai besoin de l’aérer de présence. J’ai besoin de toi.

    Dans le regard de l’autre il y a une piscine nocturne, ou peut-être une mer ou un océan. J’en sens l’odeur. Je n’y vais pas. L’eau me lèche les pieds. Je détourne les yeux. Si je plonge, je me perdrai dans les profondeurs. Mais j’entends toujours les vagues. J’entends le ronflement de l’eau derrière les mots. J’écoute.

    « Tu as beaucoup de sensibilité face aux émotions des autres », on me dit. Mais ce n’est pas vrai. Je vois les abysses, mais je ne me tiens qu’au bord. Je refuse d’entrer dans la mer. J’ai mes propres précipices. Je refuse d’y aller aussi. La pente est étroite. Nous vivons toustes, peut-être, au seuil de quelque chose. Parfois de la pourriture, et parfois du printemps. D’un côté comme de l’autre du seuil, tu m’attends.

    Je mets un pied devant l’autre. J’avance dans tes paysages. Tu m’offres les forêts où j’oublie la parole. Les heures où l’on pourrait tout oublier. Quand je lis, quand je marche, je bois à ta source.
    On voit ce à quoi je renonce pour toi. On ne voit pas quand on renonce à toi. Cet espace que tu étends à l’intérieur.

    Dans Nous sommes la poussière [1], Plume Serves parle de personnes qui vivent avec de particules tout autour d’elles, qui les fatiguent, et qui font barrage devant les gens. C’est un peu comme le contraire pour moi : ce sont les autres qui sont pleins de particules que j’aspire auprès d’eux, et qui me fatiguent. Même si l’interaction se passe bien et qu’il s’agit de gens que j’aime.

    Quand je vis seul, quand je reviens dans mon appartement vide, c’est comme un bruit de fond incessant, qu’on ne remarquait pas forcément, qui s’éteint d’un coup. Comme un radiateur chaud contre lequel, en collant son dos, on se rend compte avoir eu froid. Une seconde de soulagement immédiat. J’imagine qu’on peut vivre cela en rentrant chez soi trouver la personne avec qui on vit. Je vis avec toi.

    Je me souviens avoir demandé à une amie ce qu’elle avait fait une fin de semaine, et elle m’avait répondu : « J’étais avec M. » Être en compagnie de quelqu’un, pour elle, c’était déjà une action en soi. De même, vivre avec toi, c’est déjà une action en soi. Cette action, si on lui donne un nom, ou plutôt un verbe, ce serait ce que Giorgio Agamben, citant Benveniste, appelle un « verbe moyen ». Comme naître, mourir ou souffrir, les verbes moyens sont à la fois actifs et passifs, sujets et objets, et ceci par leur action même. Des verbes où le sujet effectue en s’affectant : « en agissant, en effectuant une action, il va en être affecté lui-même ».

    Vous voyez dans les romans d’amour déchirants quand les amoureuxses se revoient après une longue séparation et qu’on ne peut plus les décoller, qu’iels se boivent et se respirent. Iels se manquent. Iels se retrouvent. Tu me manques. Je me retrouve.

    Je suis absent de moi quand je suis avec des autres, et pour quelques heures cela n’a pas d’impact mais trois jours raclent et une semaine déchire. Et par cette déchirure se heurtent les fatigues, cauchemars et les rivières de monstres.

    Comment peut-on être ailleurs quand on est là ? Le moi qui vit avec les autres et le moi absent que je veux retrouver ne sont pas deux entités distinctes. Mais quand je suis avec les autres, je les accueille sous ma peau, et il n’y a plus assez de place, et je vide un peu de lest de moi. Grain par grain, un bourdonnement constant à l’oreille qui recouvre la musique sous ma peau, et je suis exsangue, à un moment. Et j’ai besoin de me reremplir de moi. J’ai besoin de toi. De ton espace.

    Quand je rentre de voyage, ce qui coïncide souvent avec une période où j’ai été en permanence avec d’autres pendant plusieurs jours, je dois avaler et laver (manger, me doucher), pour me réancrer sur le sol, faire prendre fin au voyage, m’arrimer. Faire le tour de la pièce-moi pour balayer, ranger, remettre au début, remettre les lieux dans l’état où ils étaient avant qu’on les trouve. Aérer. Reprendre conscience de mon corps. La pièce n’est plus tout à fait la même, les autres nous changent, laissent des traces sur nous, déposent des fleurs ou des pierres. Il faut trouver comment les nouveaux éléments vont prendre leur place. Comment faire avec ce que les autres, volontairement ou non, nous ont laissé.

    Il m’est arrivé de garder mes bottes pleines de terre pendant des jours, des mois. C’était la terre d’un autre pays d’où je venais. Qui pourtant n’était pas le mien, plus le mien. Je l’avais quitté. Je veux toujours quitter le monde extérieur, quitter les autres, les vivants et les fantômes. Et cette terre était pleine de fantômes. Quelque part, je n’osais pas la nettoyer. Je n’osais pas les effacer. Les ancêtres au siphon. Quand je l’ai fait, je me suis senti vide et léger. Détaché des vésicules de limon des racines. Il y en a qui n’arrivent pas à jeter, qui accumulent tous les bouts de ficelles. Jeter, vider, effacer. Détruire. Purger les fantômes incrustés. Il y a quelque chose de la tache sur la clé de Barbe Bleue. Est-ce la personne que j’aurais dû être que j’essaye de récurer ?

    La légèreté est aussi celle de l’oubli, de la corbeille vide, de l’instant de la chute. De la possibilité du regret. C’est un pas vers un autre seuil. Faire la trace. Une trace que personne d’autre n’empruntera. Un instant l’eau emplit mes empreintes dans le sable rocailleux, vite bues par le rivage. On ne vit pas pour les générations futures. On ne se bat pas pour les générations futures. On se bat déjà pour vivre rien que sa vie à soi. Hors case, pour créer un lieu où être là.

    Marcher une heure pour prendre le train, seul avec le soleil qui se lève, après quatre jours en famille : enfin s’entendre penser. Réaliser l’arrêt du brouhaha incessant qu’on n’a pas entendu arriver, comme une hotte de ventilation pour un bouillon de 96 heures. Ce n’est pas : récupérer une capacité de réflexion. C’est : récupérer une part de soi, ré-aborder ses contours, se ré-installer dans sa tête, maintenant que n’y traînent plus les valises et les cartons et les vélos que les autres y avaient garé.

    Reprendre possession entière.

    C’est là que viennent les mots. Que les pensées assemblent calmement leurs maillons. Que mon champ de vision s’éclaircit. Comme une plante désaltérée qui relève ses tiges et étire ses feuilles ; la lumière dorée qui nimbe la crête des arbres peut enfin atteindre mon regard, y déposer sa douceur. Tu me reviens.

    Tu n’es pas l’absence, tu es un état propre et autonome. Le silence n’est que quelques instants l’absence de bruit ; ensuite il reprend sa texture, son volume, sa durée qui n’est pas l’attente jusqu’à l’irruption d’un nouveau bruit. On peut d’ailleurs l’écouter, l’apprécier. Clos le tourbillon des personnes, les choses peu à peu se remplissent de vie, lourdes et lustrées, attentives.

    Stillness. Still life. En français on dit : natures mortes. Cela peut aussi être rangé en : vie quotidienne. Heidegger dit : seul l’humain existe. Les fleurs, les fruits, les choses sont, mais n’existent pas, car elles n’ont pas conscience de leur mortalité. Pourtant, les fleurs, les fruits, les choses sont aussi dans le temps, portent l’empreinte des jours. Nous avons conscience pour elles de leur finitude. Notre regard en fait des natures mortes de la vie quotidienne. Souvent « inintéressantes à regarder car il ne se passe rien ».

    Il n’y a pas bouger d’un côté, et rien de l’autre. L’immobilité est une action. Les choses immobiles font quelque chose.

    Wikipédia dit : « Une nature morte est un genre artistique, principalement pictural qui représente des éléments inanimés. » Inanimé, ça veut dire : qui ne bouge pas. Ça veut dire aussi : qui n’a pas d’âme. Nous avons si peur de l’immobilité. Nous avons si peur de la mort. Pour certains, tu apportes cette angoisse. Pour moi au contraire, tu permets d’entendre la vie lente des choses immobiles.
    Être là. Dans la solitude c’est le seul endroit où je peux être là.

    Dans l’éternelle attente des choses. Dans la lumière chargée de silence.

    Dans les choses qui s’arrondissent sous le poids du silence.

    Le vide n’est pas le rien. Le vide est même la seule chose qui compte.

    Le ma c’est le séparateur qui relie, le seuil qui est aussi le centre, le vide qui donne sa forme au plein. Entre les notes, entre les mots, entre le fil de deux sabres dans un combat. Être là, dans
    cet intervalle.

    Espace sans objet, temps sans action, et pourtant, ce n’est pas que le ma n’est pas insignifiant, c’est qu’il est la seule chose qui existe vraiment. Le passé est passé et n’existe plus ; le futur n’est pas advenu et n’existe pas encore. Dès qu’une action se passe, dès qu’un objet est perçu par nos sens, ils appartiennent déjà au passé, et n’existent plus. Tout n’est que souvenirs ou rêves, sauf le ma. Le présent est la suspension entre le passé et le futur.

    Avant d’être un état, la solitude est un lieu, un lieu où l’on est seul. Un désert. Un lieu déserté. Ou peut-être, un lieu d’où l’on déserte.

    J’ai parlé de la désertion, du désœuvrement au sens actif : action qui désœuvre, qui rend inopérant quelque chose. Désœuvrer les œuvres : je désœuvre, tu désœuvres, nous désœuvrons. Action de soustraire nos actions à leur économie propre.

    Comme le poème est un désœuvrement des mots. Le poème est formé des mêmes mots que le livre de cuisine ou le manuel de l’aspirateur, mais ces mots sont désactivés de leur fonction informationnelle. On fait un autre usage de ces mots. L’usage n’est pas aboli. C’est toujours un usage, mais autre. Cela ne veut pas rien dire.

    (« inintéressantes à regarder car il ne se passe rien. »)

    Tu t’y glisses. Ton envahissement est toujours à la fois soudain et délicat.

    Les livres sont des lieux où l’on te puise. Les reflets dans l’eau qui bouge aussi, ces histoires-paniers sans début ni fin ni but ni progression ; mouvements jamais identiques mais jamais fondamentalement différents, jamais de toute façon atteignant à la solidité d’une forme. L’état liquide fuit toujours mais jamais ne se perd, flaques de pluies, fontaines, gouttelettes pressées de se séparer et de se rejoindre, identité plurielle rhizomatique et pourtant unique, non partitive. Tu es liquide comme moi. Avec toi j’affronte les océans des regards et les rivières de monstres.

    Avec toi je suis là.

    Je t’appellerai quiétude.

    CÈDRE.

     

    [1] Nous sommes la poussière, Plume D. Serves, les moutons électriques, 2023.

     

     

    Source : https://www.trounoir.org/Etre-la - Mai 2024

    avec l'autorisation de l'auteur, merci Cèdre (que l'on peut lire aussi dans la revue Nouveaux Délits n°81) 

     

     

     

     

     

  • Anne Dufourmantelle

    Comment nommer cette part sauvage de nous-mêmes qui va chercher aux confins de ce retrait qu’on appelle « être seul », le commencement de cette vie choisie et non subie ?

     

    in Puissance de la douceur

     

     

  • L'énergie est notre avenir, socialisons-la !

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    L’énergie est notre avenir, socialisons-la ! (80p. 8€) est paru en librairie le 21 mai 2025.

     

    Ce livre d’Attac propose une alternative crédible : sortir l’électricité des logiques spéculatives et la réinscrire dans un véritable service public sous contrôle citoyen. Face à l’urgence climatique et aux dérives du marché, il trace la voie d’une transition énergétique juste, efficace et démocratique. Publié dans la collection « Comprendre pour agir », qui propose des alternatives face aux crises sociale, écologique, démocratique et trace les contours d’un autre futur possible, il décrit un chemin possible pour choisir démocratiquement notre avenir énergétique. Il pose des jalons pour construire de manière efficace le système électrique de demain au bénéfice de toutes et tous.

     

    En savoir plus et commander : 

    https://france.attac.org/nos-publications/livres/article/nouveau-livre-d-attac-l-energie-est-notre-avenir-socialisons-la

     

     

     

     

  • Felipe Fittipaldi - La marche de l'océan

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    Felipe Fittipaldi, photographe brésilien, vit à Vancouver et collabore régulièrement avec la presse internationale. Depuis 2014, il mène un travail photographique en profondeur sur la relation complexe qui lient une communauté à son environnement menacé par la destruction.

    Photos tirées de
    La marche de l’océan - Felipe Fittipaldi, photographe
    et Marie-Hélène Ruz, géomorphologue spécialiste du littoral
    D'une rive à l'autre édition, mai 2023
     

     

    "Le littoral a toujours été en constante évolution, mais notre époque est marquée par l’accélération de son érosion. Prise en étau entre la montée des eaux et l’érosion côtière, Atafona est devenue le symbole de ce double phénomène. C’est dans cette ville brésilienne, où le temps semble s’accélérer, que Felipe Fittipaldi ancre son travail depuis 2014. En une cinquantaine d’années, plus de 500 maisons ont été détruites par les vagues. Un phénomène principalement d’origine anthropique, mais intensifié par l’élévation du niveau de la mer. La déviation des eaux pour les besoins croissants de la population, de l’industrie et de l’agriculture a entrainé une réduction du débit fluvial et de la bande de sable qui formait autrefois une barrière protectrice entre la côté et l’océan."

     

     

     

  • Daniel Birnbaum - L'instant malgache

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    Un magnifique livre de Daniel Birnbaum, autant ses texte que ses photos, paru aux éd. Jacques Flament en novembre 2020. Tous deux nous ont quitté depuis et ce n'est pas sans émotion que j'ai plongé avec beaucoup de retard dans ce très émouvant témoignage d'un homme, Humain avec un très grand H, dont la vocation était de guérir les autres avec une humilité rare. Je connaissais déjà une partie des poèmes pour en avoir publié dans ma revue en 2018 (numéro 60), celui-ci par exemple :

     

    Les ongles  

    La petite 
    toute belle toute fine
    elle a des ongles peints
    au feutre noir
    il n’y a pas de vernis dans ce pays 
    il a été gratté depuis bien longtemps
    elle a les pieds infectés 
    suintants
    sanguinolents
    il faudrait les mettre à l’abri de la poussière 
    de la boue des ordures des mouches
    mais il fait trop chaud dans ce pays
    elle marche pieds nus
    elle a les ongles peints
    et le feutre s’usera 
    lui aussi très vite. 

     

    Un des poèmes que j'avais publié ne figure pas dans le livre et la fin d'un autre a été modifiée, cette modification me touche car à elle seule, elle dit tout :

    "l’heure viendra-t-elle un jour
    une heure dans ce pays 
    où l’on pourra dire enfin au lieu de faim ?"

    qui est devenu dans le livre "où l'on pourra dire enfin au lieu de fin".

     

    En ce moment, la jeunesse de Madagascar, île tellement sacrifiée, se soulève comme une marée montante contre les inégalités, injustices, corruptions, coupures d'eau et de courant et, fait peu commun, les militaires envoyés contre eux, ont lâché leurs armes, Daniel aurait apprécié ce geste sans aucun doute. Aussi ce livre prend une dimension intemporelle, l'instant malgache est de tous les instants.

     

    Daniel a présenté son livre ainsi :

    Pourquoi L’instant malgache ?
    Malgache parce qu’il s’agit de Madagascar, une petite partie seulement, de Tananarive, la capitale, à Majunga, sur la côte Nord-Ouest.
    L’instant, parce que sur la Grande Île la plupart des gens vivent au jour le jour.
    Et accessoirement parce que les photos, prises sans grande technique et livrées ici sans grandes retouches, sont des instantanés. On pourrait dire que les poèmes, comme les photos, sont également bruts. 

     

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    Daniel Birnbaum, né en 1953, était médecin-chercheur à Marseille, biologiste moléculaire, directeur de recherche à l'Inserm et vivait près d'Aix-en-Provence. Il a aussi vécu en Creuse et en gardait des souvenirs très forts. Il a beaucoup écrit les quinze dernières années de sa vie, publié une vingtaine de recueils de poésies, essai, nouvelles, romans chez plusieurs éditeurs (Jacques Flament, P.i.sage intérieur, Voix tissées, Unicité...). Il m'avait demandé d'écrire la présentation de son polder chez Décharge/Gros Textes, "Monde, j'aime ce monde" (2015). Il a aussi publié chez L'Harmattan dans la collection éthique et pratique médicale, un livre qui relate la vie d'un laboratoire, l'avènement de l'oncologie moléculaire à l'hôpital et le développement de la médecine personnalisée. Il y évoque les difficultés, les problèmes, les choix, les défis, mais aussi les accomplissements de cette discipline. On peut lire l'hommage de l'INSERM ici et mesurer l'humilité vraiment exceptionnelle de cet homme qui jamais ne mettait en avant quoi que ce soit de lui-même : https://pro.inserm.fr/daniel-birnbaum-une-vie-de-passion-et-dengagement-au-service-de-la-recherche-contre-le-cancer

     

    Daniel nous a quitté en août 2024, ce fut un grand choc de l'apprendre. Laurent Bouisset m'a proposé de lui dédier (à lui et à un photographe mexicain) le dernier numéro de la revue Nouveaux Délits, le 82 paru ce mois-ci, un spécial Mexique et Guatemala que nous avons réalisé ensemble. Daniel, avec sa grande ouverture aux autres, appréciait énormément l'intense travail de traduction des poètes contemporains latino-américains auquel s'adonne inlassablement Laurent. 

     

     

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    Qui va s'élever un jour

    qui va gronder

    bousculer

    taper du poing

    sur cette putain de face du destin

    mille fois vendue

     

    qui sera un jour peut-être

    comme les vagues

    qui obéissent au rythmes

    mais ignore le destin

     

    qui sera un jour...

     

     

    in L'instant malgache, Jacques Flament éd., 2020

     

     

     

     

  • Victor Hugo

     

    Quel est, en effet j'en appelle à vos consciences, j'en appelle à vos sentiments à tous, quel est le grand péril de la situation actuelle ? L'ignorance. L'ignorance encore plus que la misère. L'ignorance qui nous déborde, qui nous assiège, qui nous investit de toutes parts. C'est à la faveur de l'ignorance que certaines doctrines fatales passent de l'esprit impitoyable des théoriciens dans le cerveau des multitudes.

     

    1848, à l'Assemblée nationale

     

     

  • Hommage à Jane Goodall (1934-2025)

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    Une grande dame est partie

     

    "J'aimerais qu'on se rappelle de moi comme de quelqu'un ayant aidé les gens à faire preuve d'un peu d'humilité et à réaliser que nous ne sommes pas séparés du règne animal, mais que nous en faisons partie."

     

    Jane Goodall, éthologue, anthropologue et militante (3 avril 1934 - 1er octobre 2025)

    in entretien avec Ira Flatow, 2022

     

     

     

     

  • Mathilde Saliou - L'envers de la tech Ce que le numérique fait au monde

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    Parution le 3 octobre 2025

    éditions Les Pérégrines

     

     

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    cliquez sur l'image pour lire mieux

     

     

    Mathilde Saliou est journaliste spécialiste des enjeux numériques et a été secrétaire générale de l’association Prenons la Une. Elle partage ses réflexions dans sa newsletter Technoculture et est également l’autrice de Technoféminisme. Comment le numérique aggrave les inégalités (Grasset, 2022).

     

     

     

  • Ghassan Kanafani

     

    Si seulement les enfants ne mouraient pas !
    Qu'ils soient élevés temporairement vers le ciel, le temps que la guerre se termine, puis qu'ils rentrent chez eux en sécurité ! Et lorsque leurs parents, perplexes, leur demanderaient : "Ou étiez-vous ?", ils répondraient joyeusement : “Nous jouions avec les étoiles.”



     

     

     

  •  Eduardo Galeano

    Dans tout le continent américain, du nord au sud, la culture dominante admet les Indiens comme objets d’étude mais pas comme sujets de l’histoire. Les Indiens peuvent avoir des folklores, mais pas une culture ; des superstitions, mais pas des religions ; ils parlent des dialectes, et non vraiment des langues ; leurs produits sont considérés comme de l’artisanat, non comme de l’art.

     

     

  • Adresse publique suite aux journées RESPAIX à La Courneuve, les 19,20,21 septembre

    Francis Combes a fondé les célèbres éditions Le Temps des Cerises en 1993. Près de trente ans plus tard, il invite la poésie et la littérature humaniste à se poser à La Courneuve en y créant Le Merle moqueur, une association à vocation culturelle et artistique. Une initiative des «Poètes de le Planète» et des éditions du Merle Moqueur : la Maison de la citoyenneté, en partenariat avec la ville de La Courneuve, a accueilli une soirée dédiée à la poésie polyglotte. Des poètes et poétesses venus des quatre coins du monde, et de France, se sont réunis pour faire entendre leurs voix pour la paix.

     

    Adresse publique

     

    Adoptée par les poètes, écrivains et artistes réunis aux journées RESPAIX,

    (Poètes de la Planète, les 19, 20, 21 Septembre 2025 à Paris - La Courneuve) - PROJET -

     

     

    Nous pouvons explorer les trous noirs de l’univers mais nous laissons s’agrandir autour de nous et en nous des trous noirs qui s’ouvrent sous nos pieds et dans notre propre conscience et peuvent nous engloutir.

    Tout se passe actuellement comme si le droit international, qui s’était à peu près imposé après les deux guerres mondiales, n’existait plus. C’est le règne de la loi du plus fort. Dans tous les domaines. La coexistence pacifique est oubliée et la guerre est à nouveau considérée comme normale ; dans l’économie, comme dans les rapports entre États, voire dans les relations entre individus. On peut envahir un pays voisin, envoyer la jeunesse à la mort et tuer des civils, comme dans la guerre en Ukraine.

    On peut organiser un génocide, affamer et assoiffer délibérément des millions d’êtres humains, hommes, femmes, enfants, dans le but de les faire disparaître ou de les contraindre à l’exil, comme cela se passe sous nos yeux, à Gaza.

    Le racisme le plus bestial, qui consiste à dénier à l’autre jusqu’à sa qualité d’être humain, est à nouveau ouvertement prôné par des hommes d’État.

    Plus généralement, personne ou presque ne prend plus en considération le droit des peuples à l’auto-détermination ; ce qui serait pourtant un élément essentiel à la résolution de bien des conflits.

    Au moment où le réchauffement planétaire apparaît évident et où les incendies et les catastrophes climatiques se multiplient à la surface de la Terre, les pays les plus développés, au lieu de se mobiliser pour faire face ensemble aux défis communs de l’humanité, s’engagent dans une nouvelle course aux armements.

    C’est bien sûr le moyen de relancer les affaires, mais ce n’est pas que cela. Face à l’émergence de nouvelles puissances, et à un déclin relatif des anciens empires, il s’agit comme à la veille de la Première et de la Deuxième Guerre mondiales, de se partager le monde et ses richesses. Et aussi, par la militarisation des esprits, de juguler les protestations contre la corruption et les injustices qui soulèvent l’indignation des opinions publiques.

    Vu l’accumulation démentielle des armes, notamment nucléaires, le moindre de ces conflits peut nous entraîner vers une nouvelle conflagration mondiale. La puissance que l’humanité détient entre ses mains est telle qu’elle peut sans doute surmonter ses problèmes les plus difficiles mais aussi s’auto-détruire et détruire ses propres conditions d’existence.

    Mais il n’est pas écrit dans les étoiles que l’humanité est prête à se suicider.

    Nous savons que toutes les guerres qui visent à modifier les rapports de force s’achèvent obligatoirement par des discussions et nous refusons que la vie des enfants, des femmes, des hommes passe par pertes et profits.

    En tant que poètes, écrivains, artistes, hommes et femmes de langage nous savons que c’est par la parole que nous accédons à l’humanité. Et c’est par la parole que l’humanité peut se sauver. Il faut que la force du langage se substitue au langage de la force, que le dialogue l’emporte sur le monologue inégalitaire et meurtrier des armes.

    Bien sûr, un poème, une chanson ne peuvent pas arrêter un missile. Mais nous ne sommes pas sans pouvoir. Nous pouvons dire la vérité, dénoncer les coupables et redonner vigueur aux raisons d’espérer. Nous sommes ici non seulement pour sauver l’honneur mais pour affirmer un courant culturel pro-paix.

    Face à la guerre, face à l’échec de la mondialisation ultra-libérale qui engendre partout la montée du chauvinisme et du néo-fascisme, nous pouvons faire vivre l’idée que nous appartenons tous à la même nation, multicolore et solidaire, des habitants de la Terre.

    Nous saluons les peuples qui se mobilisent et cette génération nouvelle qui se lève un peu partout dans le partage de l’indignation et de la fraternité. Nous sommes le Peuple-monde, le peuple des femmes et des hommes qui viennent des quatre coins du monde et qui se retrouvent ici et partout, car « le centre du monde est partout et chez nous ». Nous sommes partie prenante de ce peuple d’hommes et de femmes solidaires de leurs semblables et de la vie sur terre, ce Peuple-monde en puissance qui doit accéder à la conscience et à l’existence car c’est par lui que passera notre commun salut.

    En tant qu’artistes, écrivains, poètes, nous n’avons pas de plus haute aspiration que d’y contribuer.