Bétyles de Tan Khedidja, Tassili-n-Ajjer - Algérie
photo (c)Malika Hachid
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photo (c)Malika Hachid
Tous ces gens qui savent d'avance ce qu'est la méditation doivent désapprendre pour pouvoir apprendre à nouveau. Vous voyez la différence ? Puisque vous ne savez pas ce qu'est la méditation, nous allons apprendre. Pour apprendre à connaître la méditation, voyez comment fonctionne votre esprit. Vous devez regarder, comme vous regardez un lézard qui passe sur un mur. Vous voyez ses quatre pattes, comment il colle au mur et, en regardant, vous voyez tous ses mouvements. Eh bien, de la même façon, observez votre propre pensée. Ne cherchez pas à la corriger, à la supprimer. Ne dites pas: « Tout ceci est trop difficile. » Simplement, regardez ; maintenant, tout de suite, ce matin.
Pour commencer, restez assis, absolument tranquilles. Prenez une position confortable, croisez vos jambes, restez. assis, tout à fait immobiles. Fermez les yeux. Et voyez si vous pouvez essayer de les empêcher de bouger. Vous comprenez? Vos yeux ont tendance à remuer. Gardez-les complètement immobiles, comme par jeu. Et puis, étant assis comme cela, très tranquilles, découvrez ce que fait votre pensée; observez-la comme vous avez observé le lézard. Observez la pensée, sa façon de couler, une pensée suivant une autre, et ainsi vous commencez à apprendre, à observer.
Observez vos pensées : comment une pensée succède à une autre et comment elle se dit : « Celle-ci est une bonne pensée, celle-là ne l'est pas. » De même quand vous vous couchez, quand vous vous promenez, observez votre pensée.
Simplement, observez-la. Surtout, ne cherchez pas à la corriger, vous découvrirez alors ce qu'est le commencement de la méditation.., et le faisant, vous êtes prêts à apprendre. Et quand vous commencez à apprendre, cela n'a pas de fin.
Parce-ce qu'il faut rester allumé dans un monde qui s’éteint.
in Cheval Rouge
Gros Textes, 2017
60 pages, 9 €
La première fois que j’ai lu Florentine Rey, c’était dans la revue Traction Brabant et aussitôt son nom est resté. Elle m’avait envoyé des textes pour la mienne de revue, mais en début d’année mon ordinateur est mort en les emportant avec lui, aussi ce fut un vrai plaisir de recevoir un recueil entier de Florentine, publié par ce cher Yves Artufel et ses éditions Gros Textes.
Florentine Rey est de ces magiciennes qui distillent en secret dans leur cuisine la poésie du quotidien, une bonne eau de vie qui vous arrache la gorge en passant, mais vous réchauffe le ventre. Pas besoin d’aller chercher on ne sait quels fruits rares ou épices coûteuses, tout est là sous la main, y’a qu’à faire avec, mais ce n’est pas si facile que ça de faire de la gnole buvable avec le gris des jours. Cela permet par contre, indubitablement, de danser encore après minuit, comme dit dans le titre du recueil avec un clin d’œil appuyé à Cendrillon. La nique aux douze coups, à ce qui veut nous enfoncer, nous maintenir dans les cases obligatoires et le poème d’ouverture a déjà tout dit :
Il fait un petit peu froid
on va
un petit peu rentrer
dans notre
petite maison
on fera
un petit feu
on préparera
un petit repas
on parlera
de nos petits projets
le mien
c’est de tout faire péter.
Voilà. Et les munitions, elles sont là, bien rangées dans un livre, mais méfiez-vous des poètes, surtout quand elles sont femmes et qu’elles viennent vous parler du « désordre ordinaire », vous canardent avec de l’énergie pure. « Ça sonne ! C’est l’heure ! Laisse-moi faire, je peux me démouler toute seule. »
Ce qui caractérise ces héroïnes de l’ordinaire, c’est leur humour tout aussi féroce que leur lucidité.
« La voie est libre, elles peuvent foncer, les chaussures, toutes dans la même direction, toutes dans le mur. »
Le proverbe japonais qui dit « Sept fois à terre, huit fois debout » est fait pour elles. Fatigantes, amoureuses, désespérées, combattantes, bonnes comme la terre, vastes comme le cosmos, fragiles et redoutables, des femmes quoi ! « J’ai un cœur de bouchère qui rissole à chacun de coups de sang, un cœur femelle qui déverse son eau quand il fait trop d’excès puis réclame du sel pour refaire du sentiment ».
Florentine Rey manie les mots comme des armes de vérité, renoue avec cette nature sauvage de la féminité, celle qui fascine tellement qu’on n'a eu de cesse de tenter de la dompter, la museler, la ferrer, elle renoue avec la femme d’avant son mythe, la vraie femme ordinaire : « D’ailleurs je vais me promener. Personne dans la forêt, personne sur le sentier, je peux sortir mon cul et pisser ».
Une femme comme tout le monde, « énervée comme tout le monde, la gorge nouée comme tout le monde, réversible comme tout le monde, inquiète, en quête, en manque comme tout le monde, (…) n’a pas écouté où se trouve la sortie de secours comme tout le monde ». Une enfant aussi encore, grande, grande comme seuls savent l’être les enfants : « tu vas cesser de camper sur le rond-point des âmes errantes, tu vas vider la décharge des émotions usées, tu vas recolorer ton corps, tu vas tracter ta joie depuis les profondeurs, tu vas bouger ton cul et honorer la vie. »
Une femme….. qui parfois se sent être « une chose venue d’un autre siècle : un mannequin sur une chauffeuse qui réclame une place en vitrine pour montrer ses dentelles, un tablier de ferme cousu de trop d’enfants, une aiguille qui défait les générations. »
Une femme qui sait « des femmes perdues dans un monde d’hommes » qui « traversent la vie à la nage en tenant d’un côté le réel, de l’autre la main de leurs enfants » et qui nous alerte. « Il manque la moitié du monde au monde, il manque des variations, des visions, il manque des yeux sans fards de temps en temps, des sentiments sans manipulation, des intuitions, (…) une petite marche pour se rehausser, se cambrer et crier : est-ce qu’on pourrait en placer une de temps en temps ? »
Je danse après minuit est un condensé d’émotions non pasteurisées, des cycles d’émotions à boire cul sec, des oh !, des bah… Le tricot des espoirs, le tricot désespoir, une maille à l’endroit, dix mailles à l’envers, des pépites de poésie plein les poches.
« Réparation
C’est pas la pomme que j’ai mangée, c’est le serpent. On peut être heureux maintenant ? »
Et cette soif de vivre, immense soif de vivre vivante, « je veux la vérité, je veux entendre une vraie chose, donne moi la météo ».
Rire toujours, de soi, des autres, de tout, « on va se marrer jusqu’à la dernière flamme » et danser ! Danser même et surtout après minuit.
Merci Florentine Rey.
Cathy Garcia
Florentine Rey est née en 1975, elle vit et travaille à Saint-Étienne. Des études de piano intensives (classe musicale à horaires aménagés) affinent sa sensibilité, lui apprennent l'exigence mais l'isole. Une année d'hypokhâgne lui fait rencontrer la philosophie. En 2000, elle obtient le diplôme des beaux arts et crée la même année une structure de production artistique où se croise l'art et la technologie. Six ans plus tard, installée au château d'Hérouville, dans le Val d’Oise, la nécessité d'écrire et de créer la rattrape. Le destin place alors Jacques Lanzmann et Yves Michalon sur son chemin. Dès l'annonce de la publication de son premier roman, elle quitte Paris toutes affaires cessantes et part sur les routes de France, inspirée, rêvant de pouvoir se consacrer un jour pleinement à son travail d’écriture qu’elle considère comme un travail d’invention, d’exploration et d’expérimentation, garant de sa liberté de penser.
En complément de son travail d’écrivain, Florentine Rey a développé une pratique d’ateliers d’écriture, qu’elle mène dans le cadre de l’association Paragraphe, à Lyon et dans le cadre du programme SOPRANO Rhône-Alpes. Son site : https://florentine-rey.fr
Bibliographie : Blandine-Marcel, Michalon, 2006 et Blandine-Marcel 2, Business Story, Michalon, 2007 ; Mon œil !, roman graphique, éditions des Ronds dans l'O, prix Olympe de Gouges, 2010 ; Bubon, éditions Gros Textes, 2016 et Je danse encore après minuit, poésie, éditions Gros Textes, 2017.
Les mots sont sans fin mais la communication est d'ordre verbal autant que non verbal. Entendre un mot est une chose, entendre une absence de mot en est une autre.
in Journal
octobre 2018
Quand j’ai commencé la revue, dans les premiers numéros, j’étais systématiquement au sommaire. C’était une façon de faire connaître mon travail en même temps que celui des autres auteurs que j’accueillais. Puis devant leur nombre sans cesse croissant et lassée aussi de ma présence, j’ai libéré la place avec joie. Mais le problème des poètes revuistes, comme ces cordonniers (quand il y en avait) mal chaussés, c’est qu’à force de se mettre au service de l’écriture des autres, ils n’ont plus beaucoup, voire plus du tout de temps pour la leur. Il y a aussi un fait : la réciprocité chez les êtres humains — et les poètes ne font pas exception — ne coule pas de source, c’est pourquoi le proverbial « jamais aussi bien servi que par soi-même » prend au final tout son sens.
Alors pour une fois, je reprends un bout de territoire ici, juste le temps de mettre un coup de projecteur entre autre sur la sortie d’un livre à lente maturation auquel je tiens et que publient les éditions Cardère, qui hébergent déjà trois autres de mes bébés. La bonne maison Cardère publie avant tout des ouvrages sur le pastoralisme, la poésie c’est en plus et elle n’a jamais eu l’imbécile idée de choper la grosse tête ou de s’illusionner sur un quelconque pouvoir d’éditeur, pas plus qu’elle ne s’illusionne sur les auteurs eux-mêmes. Une chose est essentielle en poésie — et qui dit poésie, dit vie — : une forme d’humilité. Pas une posture humble non, juste quelque chose de très naturel, humus, humilité, humain, cette racine plantée dans la terre qui nous nourrit et qu’il ne faut jamais oublier, quelle que soit la force et l’envolée de notre imaginaire ou de nos prétentions.
Écrire est une chose, être lu en est une autre. Entre les deux se tissent de fragiles et éphémères passerelles dans lesquelles se prend la rosée de l’aube, trésor qui scintille un instant — précieux instant — avant que le jour ne vienne le boire.
CG
monde de rosée
rien qu'un monde de rosée
pourtant et pourtant
Issa
illustrations : Muriel Dorembus
en savoir plus :
http://larevuenouveauxdelits.hautetfort.com
Nulle forme de méditation consciente n’est la véritable méditation, et ne le sera jamais. Tenter de méditer délibérément n’est pas méditer. La méditation survient, on ne la provoque pas. Ce n’est pas un jeu de l’esprit, elle ne dépend ni du désir, ni du plaisir. Toute volonté de méditation porte en soi sa propre négation. Prenez simplement conscience de ce que vous pensez, de ce que vous faites – rien d’autre. Voir, entendre, c’est agir, sans que jouent les notions de récompense et de punition. Le savoir-agir passe par le savoir-regarder, le savoir-entendre. Toute autre forme de méditation mène inévitablement à la déception, à l’illusion, car le désir aveugle.
in Journal
La méditation est un dur travail. Elle exige la plus haute forme de discipline — non celle du conformisme, de l'imitation, de l’obéissance ; mais celle qui résulte de ce que l'on est constamment conscient, à la fois du monde extérieur et de la vie intérieure. Donc ? La méditation n'est pas une activité dans l'isolement, mais une action dans la vie quotidienne, faite de coopération, de sensibilité et d'intelligence. Si la méditation ne pose pas les fondements d’une vie irréprochable, elle devient une évasion et par conséquent n'a absolument aucune valeur. Être irréprochable, ce n'est pas se conformer a une morale sociale, mais être libéré de l’envie, de l'avidité et de la recherche du pouvoir, qui sont des causes d’inimitié. On ne s'en libère pas par une action volontaire, mais en en étant conscient, du fait qu'on se connait. Si l’on ne connait pas les activités du moi, la méditation devient une excitation sensorielle et a très peu de sens.
La Révolution du silence