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  • Serge Carfantan

    « Pour étouffer par avance toute révolte, il ne faut pas s’y prendre de manière violente. Il suffit de créer un conditionnement collectif si puissant que l’idée même de révolte ne viendra même plus à l’esprit des hommes. L’idéal serait de formater les individus dès la naissance en limitant leurs aptitudes biologiques innées.

     Ensuite, on poursuivrait le conditionnement en réduisant de manière drastique l’éducation, pour la ramener à une forme d’insertion professionnelle.

     Un individu inculte n’a qu’un horizon de pensée limité, et plus sa pensée est bornée à des préoccupations médiocres, moins il peut se révolter. Il faut faire en sorte que l’accès au savoir devienne de plus en plus difficile et élitiste. Que le fossé se creuse entre le peuple et la science, que l’information destinée au grand public soit anesthésiée de tout contenu à caractère subversif. Surtout pas de philosophie.

     Là encore, il faut user de persuasion et non de violence directe : on diffusera massivement, via la télévision, des informations et des divertissements flattant toujours l’émotionnel ou l’instinctif. On occupera les esprits avec ce qui est futile et ludique. Il est bon, dans un bavardage et une musique incessante, d’empêcher l’esprit de penser.

     On mettra la sexualité au premier plan des intérêts humains. Comme tranquillisant social, il n’y a rien de mieux. En général, on fera en sorte de bannir le sérieux de l’existence, de tourner en dérision tout ce qui a une valeur élevée, d’entretenir une constante apologie de la légèreté, de sorte que l’euphorie de la publicité devienne le standard du bonheur humain et le modèle de la liberté.

     Le conditionnement produira ainsi de lui-même une telle intégration que la seule peur – qu’il faudra entretenir – sera celle d’être exclus du système et donc de ne plus pouvoir accéder aux conditions nécessaires au bonheur.

     L’homme de masse, ainsi produit, doit être traité comme ce qu’il est : un veau, et il doit être surveillé comme doit l’être un troupeau. Tout ce qui permet d’endormir sa lucidité est bon socialement, ce qui menacerait de l’éveiller doit être ridiculisé, étouffé, combattu. Toute doctrine mettant en cause le système doit d’abord être désignée comme subversive et terroriste et ceux qui la soutiennent devront ensuite être traités comme tels. On observe cependant qu’il est très facile de corrompre un individu subversif : il suffit de lui proposer de l’argent et du pouvoir. »

     

    Une prosopopée du cynisme politique incarné par le personnage cynique du "meilleur des mondes" d'Aldous Huxley (1931)

    Extrait de « Sagesse et révolte »,  leçon 163, 2007

    http://www.philosophie-spiritualite.com/cours/sagesse_revolte.htm

     

     

     

  • Erich Maria Remarque

     

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    Auteur inconnu - Première guerre mondiale

     

    Je n'ai encore jamais entendu crier les chevaux et je puis à peine le croire. C'est toute la détresse du monde. C'est la créature martyrisée, c'est une douleur sauvage et terrible qui gémit aussi. Nous sommes devenus blêmes. Detering se dresse : Nom de dieu ! achevez-les donc ! [...] Je vous le dis, que des animaux fassent la guerre, c’est la plus grande abomination qui soit.


    in À l’Ouest, rien de nouveau

     

     

     

  • Histoire de famille : World War I

    Un de mes arrière-grands pères anglais a fait cette guerre, dans un corps vétérinaires, il était à Ypres... (le lieu, je l'ai appris aujourd'hui vu que c'est un des lieux du livre que je viens de lire, et qu'une série de coïncidences m'a donné envie d'en savoir plus), il avait au moins 44 ans, puisque né en 1870. Il était cocher pour un hôtel qui existe toujours d'ailleurs, le "George Hotel" à Ilminster, donc il connaissait bien les chevaux, d'où sans doute cette affectation. De retour en Angleterre, il ne trouve pas de travail alors retourne en France pour enterrer les morts. Déjà bien attaqué sur le plan de la santé, le bon air des tranchées.... il meurt en 1921, mais sa veuve ne touchera pas de pension de guerre, comme toutes les familles qui ont perdu un père, un mari, des suites de la guerre mais pas pendant... Ils étaient innombrables ceux qui ont succombé dans les années qui ont suivi, perclus de rhumatismes, les poumons attaqués, entre autre par le gaz moutarde. Ma grand-mère avait alors 14 ans, sa mère sans revenu s'est remariée avec un connard qui a tué sur un coup de violence, le chien de ma grand-mère, je n'en sais guère plus à ce sujet, si ce n'est qu'il fut suffisamment connard pour que ma grand-mère perde toutes ses dents vers 18 ans... de stress... Et je me dis : pas de guerre, pas de connard avec qui se remarier.... et ma grand-mère aurait gardé son père, le chien qu'elle adorait et ses dents... C'est con, c'est tellement con la guerre. "On croit mourir pour la patrie, on meurt pour des industriels", écrivit Anatole France, dans L'Humanité le 18 juillet 1922, mais mon arrière-grand père était déjà mort comme 20 millions d'autres de ceux qui ont été comptés comme victimes, c'est à dire morts pendant la guerre et non après, donc au final bien plus de victimes encore...
     

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    L'article intégral d'Anatole France :

    https://fr.wikisource.org/wiki/On_croit_mourir_pour_la_patrie...

     

     

     

  • Le Chemin des âmes de Joseph Boyden

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    (titre original : Three-day road, 2004), Albin Michel 2006. 475 pages.

     

    Je viens de terminer ce livre inoubliable, dont la fin m’a fait pleurer. Un hymne tordu de douleur, mais puissant, à la vie arrachée aux champs de mort. Un chant de mort aussi et un chant de guérison. J'y ai appris encore des choses sur cette première guerre mondiale et notamment sur les soldats amérindiens qui y ont pris part. Ici, ce sont deux amis d‘enfance de la nation Cree. En cherchant un peu plus sur le sujet suite à cette lecture inspirée de faits bien réels, j'ai appris, sans surprise hélas, la façon dont ces recrues (comme les autres minorités) ont été traitées, avant, pendant, après...  Mais entre les hommes jetés dans cette grande boucherie, les soldats de base rampant, pataugeant et crevant dans la même soupe de boue et de sang, il n'y avait plus beaucoup de différences. Les deux jeunes Cree vont se distinguer sur le terrain par leurs qualités de chasseurs mais ils en paieront le prix fort : quelque chose les sépare et cette séparation va peu à peu se transformer en gouffre. L’un, abandonné par sa mère qui avait sombré dans l’alcoolisme, avait été sauvé du pensionnat tenu par de rudes religieuses, missionnées pour bouter le païen hors de ces corps de sauvageons, par sa tante, une des rares Cree à perpétuer la vie d’avant à l’écart de la ville et des wemistikochiw et qui l’a pris avec elle au fond des bois, pour lui enseigner tous les savoirs et traditions de son peuple, celles du monde visible mais aussi du monde invisible, elle qui était une des dernières chasseuse de wendigos. L’autre, orphelin, a passé trop d’années dans ce pensionnat, avant que la tante de son ami d’enfance, ne vienne lui aussi le chercher. Le Chemin des âmes force une réflexion sur l'humain dans l’enfer de la guerre, le meurtre autorisé, les limites (y en a t-il ?), mais aussi sur les conséquences de la colonisation et de l’acculturation, leur violence et heureusement il y a cette sagesse ancestrale, qui malgré tout, palpite encore, resurgit quand on la croit disparue à jamais sous la pression de la culture qui se voulait et se veut encore dominante et qui a envoyé des milliers d’hommes colonisés finir en morceaux de viande faisandée au fond d’une tranchée, dans des pays qui leur étaient totalement étrangers. Un livre qui m’a vraiment bouleversée.

     

    Joseph Boyden, né en 1966, est canadien avec des racines amérindiennes, écossaises, irlandaises. Le chemin des âmes est son premier roman. D’autres ont paru depuis, le dernier : Dans le grand cercle du monde, 2015.

     

    En savoir plus sur l'auteur :

    https://www.etonnants-voyageurs.com/spip.php?article2344

     

     

     

  • 1914-1918 - Des Amérindiens dans les tranchées

    Lire le document en entier :

    https://webdoc.rfi.fr/amerindiens-grande-guerre-1914-1918-canada/

     

    Je l'ai découvert dans le livre que je viens de terminer : "Le soldat amérindien le plus médaillé durant la Première Guerre mondiale a été le caporal Francis Pegahmagabow. Né le 9 mars 1891 et décédé le 5 août 1952, il a reçu trois fois la Médaille militaire et a été blessé sérieusement deux fois au combat. Membre d’un commando d’attaque des tranchées et tireur d’élite, celui que ses camarades appellent « Peggy », reste le soldat amérindien le plus décoré de l'histoire militaire canadienne." (...)
     
    Il est ensuite devenu un des premiers à lutter pour les droits des peuples autochtones.
     
    "S’il est si difficile de retrouver la trace des combattants amérindiens du conflit de 14-18, c’est notamment parce que lors de leur engagement, ils le faisaient sous un nom d’emprunt, à consonance francophone ou anglophone, héritage des écoles blanches obligatoires. Il n’était pas de bon ton en effet, dans le Canada de l’époque, de mettre en avant la part que prenaient ces populations à la Première Guerre mondiale. "
     
    Assez bon pour mourir, mais pas assez sous leur propres noms....!!!
     
    (...) "Fins tireurs, éclaireurs exceptionnels, leurs qualités de chasseurs résistants et rusés trouvèrent à s’employer tout naturellement au combat. Pour ceux qui revinrent à la vie civile, la reconnaissance de la patrie s’était arrêtée en 1918. De retour chez eux, plusieurs ont constaté que leurs terres avaient été attribuées à d’anciens combattants blancs…"...................

     

     

     

  • Rodney Harvey - Blurring the Line

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    nous irons célébrer l’élan

    avant le vermoulu de la neige

    et du vieux bois d’hiver

    quand les sarments seront noirs

    et qu’il nous faudra être chaste

    à cause des filets tendus

    pour les papillons perdus

    à l’envers des fleurs

     

    cg in Aujourd'hui est habitable, Cardère 2018