Téhéran tabou d'Ali Soozandeh (2016)
Les destins croisés de trois Téhéranais aux prises avec les contradictions de leur pays. Ce film d'animation dresse le portrait d’une société où sexe, corruption et prostitution flirtent dangereusement avec les interdits religieux.
À Téhéran, Pari élève seule Elias, son fils muet d’une dizaine d’années. Depuis que son mari, toxicomane, est en prison, elle n’a d’autre choix que de vendre son corps. Non loin de là, Sara, enceinte, étouffe entre une belle-mère acariâtre et un beau-père grabataire. Elle n’aspire qu’à travailler, une activité que son époux lui interdit. De son côté, Babak, un jeune musicien, trompe l’ennui entre quelques joints et des soirées en discothèque. C’est lors de l’une d’entre elles qu’il rencontre Donya, avec qui il passe la nuit. Le lendemain, la jeune femme lui avoue qu’elle se marie bientôt. Babak doit alors payer une opération pour lui refaire une virginité.
Sexe, drogues et ayatollahs
Pour son premier long métrage, Ali Soozandeh frappe fort. Exilé en Allemagne depuis plus de vingt ans, le cinéaste iranien chronique sans fard la double vie des Téhéranais dans une société étouffée par ses interdits moraux et religieux. Par-delà une implacable radiographie des tabous, ce film choral suit les destins entrecroisés de personnages en lutte pour leur liberté. Cœur de la résistance, le Téhéran underground apparaît comme le seul lieu d’espoir. On s’y presse pour contourner, à coups de faux certificats, les règles machistes d’une bureaucratie d’un autre temps. Mis en scène comme une bande dessinée animée grâce au procédé de rotoscopie, qui permet de redessiner des acteurs filmés auparavant sur fond neutre, ce bijou visuel offre une plongée acide dans les contradictions d’un pays.