Jean-Michel Bongiraud
L’homme est vertige. Vin et calcaire.
in Sang & Broussailles
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L’homme est vertige. Vin et calcaire.
in Sang & Broussailles
On ne peut pas réveiller une personne qui fait semblant de dormir.
Lumières. Pluies.Océans sauvages. Emportez-moi dans la moelle frénétique de vos articulations.Emportez-moi ! Il suffit d’un soupçon de clarté pour que je naisse viable. Pour que j’accepte la vie. La tension. L’inexorable loi de la maturation. L’osmose et la symbiose. Emportez-moi ! Il suffit d’un bruit de pas, d’un regard, d’une voix émue, pour que je vive heureux de l’espoir que le réveil est possible parmi les hommes.
Emportez-moi ! Car il suffit d’un rien, pour que je dise la sève qui circule dans la moelle des articulations cosmiques.
in L’oiseau schyzophone
Et rien ne peut clore ces plaies sèches que les mains de l’homme dénudent
Ni le benjoin de la lune
Ni cette chaude confiture d’astres au fond du bol céleste
Ni la liturgie âpre des cigales aux ailerons découpés
dans le mica friable de l’air
in Toute chair appelle
La maison bouge sous le vent
A crève toit à crève voile
Et nos enfants du peu de toile
En font mille et un cerfs-volants
in La Maison (Traction Brabant 37)
mais j’ai soif
d’une soif
qui ne veut pas mourir
in Sang & Broussailles
On a fouillé tous les hasards on a
repeint les mots
on a fêté l’ennui
in La houle des hasards (Saraswati n°10)
Brin d’herbe, qu’as-tu décidé ?
Je saigne…
in Il n’y a pas de raison (Pages Insulaires 9)
S’inverser. Dans le murmure odorant d’un été. Dans l’écriture aveuglante du ciel. Dans le gouffre doré des blés. A l’instant où un vol de corbeaux réinvente la nuit dans le ventre furieux du soleil.
in Voix inverse
La poésie
a
toutes déraisons
d’être
in Opium de personne
Il ne manque rien à rien. Que pourrait-il manquer à ce jeu nu de fictions et d’artifices ? Même l’absence n’est pas manque, mais songe ajouté au songe, et celle de Dieu, vertige ajouté au vertige.
in Voix Inverse
Quand
Le soleil montre
Les dents de sa tête
De mort
Quand
Les morts montrent
Les dents
Debout dans la ville
Quand
On plante des fleurs
Au bord des fenêtres
Tellement
Tout est gris
Et sourds les voisins
Que la fiente
De pigeon fait un fond
De teint
Aux carreaux des jours
Quand
Le ciel n’a plus de pneu
De rechange
Que les nuages
Roulent sur des essieux
Rouillés
Et qu’on rechape
Les vieux dessins creux
Des constellations
C’est qu’un poème passe
Comme on dit
D’un ange
Durant une conversation
in Te Spectem
Le figuier s’est dépouillé :
Ses branches nues
Laissent ici et là
Quelques fruits ahuris.
Je sais la force des mots, la force des mots tocsin.
Pas de ceux-là qui savent ravir les foules.
Des autres, qui de terre feraient sortir les morts,
Et les cercueils défilent d’un pas de chêne sonore.
Souvent, ni lus, ni imprimés, les mots tombent au panier,
Mais ils en sortent et ils galopent le mors aux dents,
Tonnant pendant des siècles et les trains viennent en rampant,
Lécher leurs mains calleuses.
Je sais la force des mots. Moins que rien.
Moins que des pétales sous le talon d’une danse.
Et l’homme pourtant, de toute son âme, des lèvres, de la carcasse…