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  • Two Moons (1847–1917) ou Ishaynishus en Cheyenne

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    photos : Richard Throssel

     

    Il n'a pas vingt ans lorsqu'il participe à l'attaque de Platte Bridge aux côtés des Lakotas en juillet 1865. Il combat ensuite avec les Lakotas, les soldats du général Patrick E. Connor qui venaient envahir les territoires de chasse de la Powder River en août 1865. Pendant la guerre de Red Cloud, il participe à l'embuscade dans laquelle tombent les hommes du capitaine William J. Fetterman en décembre 1866, puis au combat de Hayfield au mois d'août suivant. Après la signature du traité de Fort Laramie en 1868, Two Moons s'établit sur la Grande réserve sioux.

    Le 17 mars 1876, sur Lodge Pole Creek, dans la vallée de Powder River, au Wyoming, l'éclaireurtis Frank Grouard découvre un camp indien dissimu dans la neige.Il affirme qu'il s'agit du camp de Crazy Horse. C'est en fait le camp de Two Moons et des Oglalas de He Dog qui avaient quitté la serve afin de chasser le bison. Le colonel Joseph J. Reynolds qui commande l'avant-garde du général George Crook, décide d'attaquer sans attendre. Venant des deux côtés à la fois, cinq compagnies de cavalerie chargent brutalement le camp endormi pendant qu'un autre groupe s'empare des sept cents poneys. D'abord totalement surpris, les guerriers se ressaisissent rapidement. Dissimulés derrière des rochers, ils tiennent en respect les soldats pour permettre aux femmes et aux enfants de fuir, puis ils se replient dans les collines. Les soldats mettent le feu aux tipis et aux réserves de nourriture et emmènent avec eux les chevaux indiens. La nuit suivante, les guerriers cheyennes et oglalas, pourtant durement éprouvés, dont les familles ont du fuir dans la neige abandonnant vêtements et couvertures, se glissent dans le camp des soldats et parviennent à reprendre leurs montures. Certains poussent jusqu'au camp principal de Crook et s'emparent de ses bêtes de bât. Maintenant montés et munis de quelques chariots, les Indiens parviennent à rejoindre le camp de Crazy Horse qui les nourrit et les réconforte.
     

    De
    ux mois plus tard, le 17 juin, Two Moons participe aux côtés de Crazy Horse à l'attaque des troupes de Crook sur la Rosebud River. Crook sera désormais incapable de poursuivre la campagne contre les Sioux. La semaine suivante, Two Moons, charge les soldats du lieutenant-colonel George A. Custer qui venaient les attaquer sur la Little Bighorn. Alors que les Indiens se dispersent après leur victoire, Two Moons reste avec Crazy Horse. Ensemble, ils repoussent les soldats du colonel Nelson A. Miles dans les Wolf Mountains en janvier 1877. Au printemps 1877 tandis que Crazy Horse fait sa reddition à Fort Robinson, Two Moons se rend au colonel Miles à Fort Keogh, au Montana. Quelques mois plus tard, il devient éclaireur dans l'armée et participe à la campagne contre les Nez-Percés, arrêtant le peuple de Chef Joseph en fuite vers le Canada. Le fait d'avoir fourni des éclaireurs à l'armée évitera au clan de Two Moons la déportation en Territoire Indien comme les autres Cheyennes.

    En
    mars 1879, Two Moons rencontre le Cheyenne Little Wolf et les siens à l'issue de la terrible "Longue marche des Cheyennes". Il les persuade de faire leur reddition à Fort Keogh. C'est le profil de Two Moons qui sera utilisé pour l'effigie de la pièce de cinq cents en 1913. Two Moons s'établit sur la réserve Northern Cheyenne au Montana où il meurt en 1917.
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    Two Moons (1847–1917), or Ishaynishus (Cheyenne Éše'he Ôhnéšesêstse).jpg

     

     

  • Quatre lettres d’amour de Niall Williams

     

    traduit de l’anglais (Irlande) par Josée Kamoun

    éditions Héloïse d’Ormesson, à paraître le 25 janvier 2018

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    395 pages, 20 €.

     

    Dans ce roman, qui fut le premier pour l’auteur de théâtre Niall Williams, l’écriture est remarquable, un très beau travail de création littéraire, très inventif, très poétique, les mots sont comme une pâte à pétrir chaude sous la plume de l’auteur et la traduction le rend sans doute admirablement bien, mais aurait-on perdu quelque chose dans ce passage entre les deux langues ? Car il y a tellement d’évanescence dans ce roman malgré une intense dramaturgie, comme un paysage de brumes permanentes qui entourerait les personnages et leur vie. Cela aurait-il à voir avec une particularité du climat irlandais ou bien l’auteur nous aurait-il à notre insu fait pénétrer dans une sorte de grand tableau mouvant et évoluant ? C’est difficile à expliquer en tout cas. Le lecteur lit, imagine, mais il y a comme une distance avec le ressenti. Il y a une profusion de détails pourtant, la mécanique des personnages est précise, il y a oui quelque chose de l’horlogerie, la grande horlogerie divine et d’ailleurs le questionnement sur la place du hasard ou de Dieu dans la destinée des uns et des autres, est au centre de la narration qui prend ainsi une évidente dimension métaphysique.

     

    Il y a un chapitre, mais ce n’est pas le dernier donc on ne peut pas parler de crescendo, dans lequel l’émotion afflue d’un coup comme une grande marée, comme si le soleil avait enfin percé la brume, que la pâte avait levé de façon exceptionnelle, mais l’auteur n’a usé d’aucuns artifices pour faire advenir le miracle, juste le temps qui travaille et ce qui devait être s’est mis en place. Le lecteur lui-même ressent là très fortement ce soulagement, mais après une telle l’intensité, la suite qui s‘étire de nouveau en longueur peut provoquer une sorte d’anesthésie émotionnelle et le lecteur peut regretter de ne pas avoir quitté le livre au moment le plus fort, quand les matins sont lustrés et brillants et que la mer frissonne comme une fièvre. Mais ici, comme dans la vraie vie, le fil n’est pas censé s'arrêter au moment le plus intense.

     

    Le titre lui-même nous égare un peu car il faut attendre quasiment la fin pour le comprendre. D’ailleurs, que le livre soit divisé en sept parties, n’est peut–être pas un hasard, surtout que la sixième tient sur une seule page. Il faudra d’abord suivre l’histoire de deux enfants, deux familles. L’une à Dublin et c’est le fils, Nicholas Coughlan, qui sera le narrateur des enchainements tragiques qui vont bouleverser son enfance à partir du moment où son père quittera son travail, déclarant que Dieu lui a demandé de se consacrer entièrement à la peinture.

     

    « Il n’y a pas de hasard dans la nature, tel était le crédo essentiel de la philosophie de William Coughlan. Ainsi le saumon qui s’en va nager dans les vastes mers, dans cette immensité sans cartes ni repères, démesurée pour un poisson solitaire ; et puis son retour, le bond vertigineux vers l’amour, son élan qui s’argente et le porte vers le lieu de sa naissance. Et pourquoi ? Parce qu’il en a été décidé ainsi. C’est l’ordre des choses. Une fois qu’on a compris l’ordre des choses, c’est la fin des soucis. Ce qui est juste est juste. C’est indéniable, il y a une place pour chaque chose ; Dieu a prévu que tout s’imbrique. »

     

    Foi, sagesse mystique ou folie ? Y a-t-il une différence ? C’est la question que se posera inlassablement son fils âgé de 12 ans jusqu’à ce que son destin le conduise bien des années plus tard, à la recherche du seul tableau encore existant de son père, chez l’autre famille, celle qui vit sur une petite île à l’Ouest de l’Irlande, une île « qui parfois semble faire voile à des milles vers le néant noir de l’Atlantique ». La famille d’Isabel Gore, son père, l’instituteur qui a fini par abandonner la poésie pour le whisky, sa mère qui veille sur son frère Sean et sur ce qu’il reste de ses rêves de jeune fille. Famille marquée elle aussi par la fatalité, de celle qui s’abat d’un coup et semble ôter tout sens à l’existence.

     

    « – Mais c’est peut-être Dieu qui…

    – Rien du tout. Dieu qui rien du tout, comme il le fait depuis des années. »

     

    Sombre malheur et sublime grâce, les deux fils avec lesquels sont tissés les destinées, avec pour tableau de fond la beauté et l’âpreté des terres et de la mer d’Irlande, une palette de tristesse, d’espoirs fanés, d’amour fou, d’élans mystiques, à petites touches non dénuées d’humour aussi, tout sauf de la résignation, n’en déplaise aux veuves aigries et puis l’invisible réalité, là tout près, juste de l’autre coté d’un rideau de brume et qui parfois le traverse et traverse les murs.

     

    Peut-être que l’essentiel dans ce roman n’est justement pas dans le roman lui-même, ni dans les mots, aussi beaux soient-ils.

     

    « Mon père le savait, je crois, il savait que les mots parfois aplatissent les émotions les plus profondes, les épinglent, papillons dont le vol splendide s’engourdit et qui ne seront plus désormais que le lointain souvenir de ce qui naguère colorait l’air et le faisait palpiter comme de la soie. Mieux vaut imaginer. (…) Imaginer que le monde ne contenait rien qui fût sans grâce et que nous marchions, vivantes preuves des miracles, nos pieds touchant à peine le trottoir, sur le visage un sourire, tandis que des milliers d’oiseaux chantaient au ciel.  »

     

    Peut-être l’essentiel, nous le trouverons dans notre cœur, nous lecteurs et dans la qualité du silence qui nous entoure, juste après avoir refermé le livre.

     

    Cathy Garcia

     

     

     

    AVT_Niall-Williams_2870.jpegNiall Williams est un écrivain et dramaturge irlandais, né en 1958. Il a étudié à l'University College de Dublin où il a obtenu une maîtrise en littérature américaine. Après avoir travaillé comme rédacteur à New York, il a quitté les États-Unis en 1985 et vit actuellement à Kiltumper, dans le comté de Clare, dans l’Ouest de l’Irlande. Quatre Lettres d'amour est son premier roman, il a été publié en Irlande en 1997 et chez Flammarion en 1998. Parmi ses autres ouvrages, on peut citer Comme au ciel (1999) et Destins crépusculaires (2003).