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MES LECTURES - Page 2

  • Pieds nus sur la terre sacrée, par T.C. McLuhan

    pieds-nus-sur-la-terre-sacree-9782070466429.jpgUn cadeau, le genre de lecture qui devrait m'être interdite comme je faillis être (ou fus ?) interdite de western, pour cause de pétage de plomb à chaque Indien assassiné... faut croire que la propagande hollywoodienne ne marchait pas sur moi... j'avais déjà choisi mon camp de façon innée, ça n'a pas changé....
     
    ""Pieds nus sur la terre sacrée" rassemble des textes appartenant au patrimoine oral ou écrit des Indiens d'Amérique du Nord. Cette sélection se propose d'apporter des éclaircissements sur l'histoire des Indiens et de montrer la pérennité de leur civilisation. Le ton de ces écrits, classés par ordre chronologique, est tour à tour celui de la sagesse, du lyrisme, de l'éloquence ou de l'émotion profonde. Portrait de la nature et de la destinée indiennes, ils sont avant tout la preuve de la renaissance d'une civilisation authentiquement indienne. Cette anthologie tend à mettre en relief les traits caractéristiques de cette civilisation où les considérations politiques et historiques s'estompent au profit d'une harmonie de l'homme et de la nature, dans laquelle la terre devient une création sacrée. Voilà un domaine de l'expérience indienne qui peut entrer dans notre héritage commun."
     
    Textes rassemblés par Teresa Carolyn McLuhan [Touch the Earth : a Self-Portrait of Indian Existence] - Trad. de l'anglais (Canada) par Michel Barthélémy, première publication en 1974.
     
     
     

  • Nouvelles Calédoniennes - Vents d'ailleurs, 2012

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    Avec mes amis poète écrivains Nicolas Kurtovitch et Frédéric Ohlen, ainsi que Waej Génin-Juni, Noëlla Poemate, Denis Pourawa, Claudine Jacques et Anne Bihan. "Des nouvelles écrites par des auteurs d’origine et d’horizon multiples qui racontent leur profond attachement pour les cultures de Nouvelle-Calédonie. Des nouvelles, des récits, comme autant de portes d’entrée vers les cultures de la Nouvelle-Calédonie, murmurent leurs histoires croisées. Des auteurs, venus de tous les horizons, imprégnés de la terre, de la mer et des visages, esquissent des silhouettes, souvent furtives, pour laisser entrevoir existences et trajectoires… Les histoires sont des gestes, les vies sont des souffles. Il y a Hula, cette jeune promise qui semble se résigner au mariage que l’on attend d’elle. Et là, tout près, cet individu que le regard de l’autre a rendu lépreux avant d’être homme, mais qui ose à nouveau rêver quand tombe le soir de sa vie. Il y a aussi ces souvenirs d’une enfance enfuie, ces moments indistincts qui deviennent soudain si précis sous l’influence d’une odeur, d’un regard. Partout, la temporalité fugitive, éternelle de la terre rythme les récits comme le battement d’un cœur à la fois unique et partagé. Une mémoire qui se réveille et se révèle, des récits d’existences entre imaginaires et empreintes tissent la trame d’une écriture en archipels."

     

    Caractéristiques * *Prix: * 14,20 € * *Format : * 15 × 23 cm * *Nombre de pages: * 128 pages * *ISBN : * 978-2-36413-011-1 

     

     https://www.ventsdailleurs.com/index.php/les-livres/litterature/item/nouvelles-caledoniennes

     

     

  • Une histoire des abeilles de Maja Lunde

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    Je viens de lire et j'ai bien apprécié ce premier roman de la norvégienne Maja Lunde qui a eu un vif succès à sa sortie en 2015, malgré quelques longueurs, traduit depuis en de nombreuses langues dont en français par Loup-Maëlle Besançon, sorti en août 2017 aux Presses de la Cité. 

    "Un triptyque écologiste qui raconte l'amour filial à travers le destin des abeilles.
    Angleterre, 1851. Père dépassé et époux frustré, William a remisé ses rêves de carrière scientifique. Cependant, la découverte de l'apiculture réveille son orgueil déchu : pour impressionner son fils, il se jure de concevoir une ruche révolutionnaire. Ohio, 2007. George, apiculteur bourru, ne se remet pas de la nouvelle : son unique fils, converti au végétarisme, rêve de devenir écrivain. Qui va donc reprendre les rênes d'une exploitation menacée par l'inquiétante disparition des abeilles ? Chine, 2098. Les insectes ont disparu. Comme tous ses compatriotes, Tao passe ses journées à polliniser la nature à la main. Pour son petit garçon, elle rêve d'un avenir meilleur. Mais, lorsque ce dernier est victime d'un accident, Tao doit se plonger dans les origines du plus grand désastre de l'humanité. "

     

     

  • Raoul Vaneighem - Retour à la base

     

     

    9782390490326-475x500-1.jpg« Jouissez d’aujourd’hui car demain sera pire » a été le slogan consumériste le plus efficace du capitalisme. Désormais, il n’en a plus l’usage car il nous met devant un fait accompli. Il décrète « Le pire est arrivé, force est de vous en accommoder. » Le modèle chinois est en place, en attente de technologies toujours plus efficaces.

     

    (…)

     

    Le capitalisme ne voit dans la vie qu’un objet marchand. Il ne tolère pas qu’elle échappe à la toute-puissance de l’argent.

     

    (…)

     

    Le consumérisme avait fondé son pouvoir de séduction sur le mythe de l’abondance édénique. Le « tout à la portée de tous » prêtait une éphémère séduction à ces libertés de supermarché qui s’arrêtent au tiroir-caisse. Le salaire durement gagné trouvait sa récompense dans un laisser-aller qui avait les vertus d’un défoulement. Avec la paupérisation qui vide le « panier de la ménagère » l’exhortation à se sacrifier remonte en surface, tel le péché originel que l’on croyait enfoui dans le passé. Il faut accepter la Chute, il faut admettre que la vie s’assèche. Le temps est venu de rappeler qu’on ne travaille jamais assez, qu’on ne sacrifie jamais assez. L’existence non-lucrative est un délit. Vivre est un crime à expier.

     

    (…)

     

    L’État n’est plus qu’un instrument manipulé par les firmes multinationales, qui, avec ou sans le relais de l’Europe, lui imposent leurs lois et leurs juridictions. La répression policière est la seule fonction qui lui incombe encore.

     

     

    (…)

     

    De défenseur de la République qu’il prétendait être, l’État en est à se protéger contre les citoyens à qui il arrache les droits dont il était le garant. (…) Hochet du capitalisme financier, l’État règne sans gouverner. Il n’est plus rien. Son inanité sonne pour nous l’heure d’être tout.

     

     

    (…)

     

    Pendant que s’affrontent rétro-bolchévisme et rétro-fascisme, les mafias mondialistes empoisonnent et polluent impunément villes et villages.

     

    (…)

     

    L’État et ses commanditaires font primer leurs intérêts en méprisant les nôtres. À nous de nous préoccuper de notre propre sort. Le sens humain est notre légitimité.

     

    (…)

     

    Que risquons-nous à expérimenter des sociétés du vivre ensemble alors qu’en permanence nous servons de cobayes dans les laboratoires de la déshumanisation et du profit ?

     

    (…)

     

    Le dialogue avec l’État n’existe plus. Aucune doléance du peuple n’a été reçue, si ce n’est à coups de matraque. Pourtant, malgré la rupture effective — et sans même espérer des manifestations de rue qu’elles obtiennent le retrait de décrets iniques —, il est bon de soumettre l’État à un harcèlement constant. Rappeler leur parasitisme aux instances gouvernementales gagnera en pertinence lorsque les micro-sociétés qui font retentir dans la rue les cris de la liberté offensée, opposeront aux diktats du totalitarisme démocratique la légitimité de décrets votés en assemblées de démocratie directe.

     

    (…)

     

    L’insurrection planétaire en cours émane de la vie quotidienne des femmes, des hommes, des enfants. Le phénomène n’est pas nouveau, c’est la prise de conscience qui la propage. Ses revendications vont bien au-delà de la satisfaction consumériste. Sa poésie s’échappe du panier de la ménagère avant même qu’il ne soit vidé par la paupérisation.

     

    L’insurrection de la vie quotidienne offre une surprenante singularité. Elle est une insurrection pacifique en ce qu’elle veut dépasser la lutte traditionnelle entre pacifisme réformiste et révolution barricadière. En ce qu’elle brise ce piège des dualités — du pour et du contre, du bien et du mal — qui a besoin pour fonctionner du terrain miné et militarisé où le pouvoir est roi.

     

    La vie est une arme qui harcèle sans tuer. L’ennemi ne manque pas une occasion de nous entraîner sur un terrain qu’il connaît parfaitement car il en possède la maîtrise militaire. En revanche, il ignore tout de la passion de vivre qui renaît sans cesse, abandonne un territoire dévasté, se le réapproprie, multiplie les occupations de zones à défendre, disparaît et reparaît comme le chat de Cheshire. Il est incapable de comprendre que le combat de la vie pour l’être dissout l’avoir et révoque l’ordre de la misère. Notre guérilla est sans fin au contraire de la lutte pour l’avoir qui, elle, ne survit pas au dépérissement de l’être qu’elle provoque. La cupidité est un étouffement.

     

    « Ne jamais détruire un être humain et ne jamais cesser de détruire ce qui le déshumanise » est un principe de lutte qui a le mérite de s’en prendre à un système d’oppression et non à ceux qui s’en croient le moteur et n’en sont que les rouages. Saboter l’implantation d’une nuisance n’est pas tuer ceux qui en sont responsables.

     

    Le temps est avec nous. L’insurrection de la vie quotidienne commence à peine à faire preuve de sa créativité et de sa capacité de renaître sans cesse. Mieux vaudrait se soucier non d’aller plus vite mais d’aller plus loin.

     

    (…)

     

    L’important n’est pas le nombre des insurgés mais la qualité des revendications. L’autonomie des individus est la base de l’autogestion. Elle émancipe de l’individualisme, cette liberté fictive assignée aux moutons de la servitude volontaire. Elle apprend à distinguer militantisme et militarisme. L’engagement passionnel ne peut se confondre avec le sacrifice. Le combat pour la liberté refuse les ordres. La confiance et le mandat que lui accorde la solidarité lui suffit.

     

    L’autonomie individuelle dispose d’une puissance de harcèlement inépuisable. Or, la peau du Léviathan en ne cessant de se distendre devient vulnérable aux piqûres de moustiques.

     

    (…)

     

     

    Dans un univers de plus en plus en proie à la laideur de l’argent et du calcul égoïste, le retour à la beauté, à l’amitié, à l’amour, à la générosité, à l’entraide propage une subversion qui ridiculise la ritournelle des belles intentions morales et caritatives.

    Le sens humain se moque de l’humanitarisme, tout ainsi que la vie authentique se fout des mises en scène qui la falsifient.

     

    Le consumérisme a démontré qu’un plaisir acheté est un plaisir gâché. En éteignant le néon des supermarchés, la paupérisation s’éclaire de lumières moins trompeuses. En annonçant l’effondrement de l’inutilité rentable, elle laisse à la disette à venir le temps de renaturer la terre, de retrouver une nourriture saine et des agréments qui ne soient plus frelatés. De même que le coronavirus nous a enseigné à mieux renforcer notre immunité, la faillite économique nous enjoint de recourir à nos ressources créatives. Le « do it yourself » fait la nique au self made man dont l’affairisme avait fait son héros.

     

    68 pages, Cactus Inébranlable éd., été 2021

     https://cactusinebranlableeditions.com/produit/retour-a-la-base/

     

    B9715630370Z.1_20180511170844_000+GKPB82LRE.2-0.jpgRaoul Vaneigem est né en 1934 à Lessines. Son Traité de savoir vivre à l’usage des jeunes génération, paru en 1967, a contribué, avec La société du spectacle de Debord, à insuffler au Mouvement des Occupations de Mai 1968 une radicalité qui commence à peine à démontrer aujourd’hui ses effets novateurs.

     

     

     

  • L’érotisme de vivre d'Alice Mendelson

     

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    Ne jamais bâcler de vivre.

    5 février 2019

     

    *

     

    Pour te plaire je dis

    Qu’une main d’artisan façonne le temps

    Qui nous gorge de cuivres, de peaux,

    De futailles, d’étains…

    Pour me plaire je dis

    Que tu es la matière première

    Brute et pourtant raffinée,

    De l’amour.

     

     

    (…)

     

    Retiens mon vertige, grand arbre,

    Mur,

    Ma lancée,

    Mon abri,

    Ligature de terre et de ciel.

     

    (…)

     

    Je n’ai d’autres mots que sacrés,

    Plus d’autres,

    Pour dire combien tu me rends

    Claire, et fervente,

    Et surprise,

    Inépuisablement.

     

    in Chant des heures d’amour

     

     

    *

     

    Le plaisir d’être douce

    Encore

    Et plus douce que l’eau sous la barque

     

    Bois mon sillage

    Et pour toi je respire

    Plus douce que le lac au signal de la nuit

     

    In Délire

     

     

    *

     

    Tu traceras de tes mains toutes

    Mes lignes de flux

    Et chaque doigt et tes paumes et ta bouche

    Dresseront derrière eux

    Une fulgurante limaille de plaisir

    Je ne suis pas à voir

    Je suis à sillonner

    Fais donc de moi tes champs et non ton paysage

     

    (…)

     

    Tracer de tes mains mes lignes de fierté

    Mes lignes de défaites

     

    in Si tu veux que je sois belle

     

     

     

    *

     

    Mais tu mords dans ce jour avec moi

    Dans la pulpe et l’écorce

    Le jus de la joie

     

    Buvons notre force.

     

    In Beau fruit

     

     

    *

     

    Protection : le cauchemar c’est c’qui s’arrête !

     

    in Joies princières minimales

    4 août 2020

     

     

     

    *

     

    Peu, c’est déjà beaucoup.

    C’est entre peu et rien qu’est le grand TROU.

    30 juillet 2018

     

     

     

    *

     

    Patience, mon ressuscité,

    Mon lointain que je palpe,

    Mon agonie.

     

    Je cicatrise.

     

    In Le retour

     

     

    *

     

    Dans mille ans serons-nous mon amour

    La dalle qui porte le vide et enfonce l’humus

    Le cordage qui casse le vent

    La chaîne qui lutte à chaque maillon

    Le long couloir noir où s’étire la peur

    Et naît le plaisir d’à peine mourir ?

     

    In Dans mille ans mon amour

     

     

    *

     

    Aimer simplement, en tranquillité, en couvrance, en magnanimité pour soi-même et l’autre, sans perdre la transe de simplement exister, quel bienfait pour les racines des plantes et des arbres !

     

    in Le confort des racines

    14 février 2020

     

     

    *

     

     

    Pour bien vieillir il est bon d’avoir

    le vice de la joie.

     

    3 août 2018

     

     

    Alice Mendelson in L’érotisme de vivre Rhubarbe Ed. décembre 2021

     

     

     

     

  • J'attends la foudre et autres textes de Samaële Steiner

    18_9782842609122_1_75.jpgJ'ai lu et recommande, quand la poésie envahit le théâtre :
     
    J'attends la foudre
     
    Arpentant la nature alentour, forêts, collines, sentiers, une jeune fille se rêve frappée par l’éclair et changée en arbre. Le chemin pour qu’elle devienne une femme prendra d’autres détours.
     
     
    K-libre
     
    Alors que le fleuve qui traverse la ville doit être enseveli pour construire un centre d’affaires, les citoyennes se mobilisent. K-libre est l’histoire de femmes qui s’unissent contre le cynisme des marchands et créent une zone à défendre.
     
     
    Ronce
     
    Quand Agathe est morte, sa compagne a désiré mourir et brûler leur ferme. Mais Ronce, leur vache, refuse cette issue et la sauve des flammes, comme une métaphore de l’union possible entre l’humain et l’animal.
     
     
     
     

  • Zora Neale Hurston - Mais leurs yeux dardaient sur Dieu (extrait)

     

    Voici les 26 premières pages de ce magnifique roman américain écrit en 1937, par Zora Neale Hurston dans une traduction inédite et magistrale de Sika Fakambi (Zulma édition) et lues par moi-même.


    Zora Neale Hurston, née le 7 janvier 1891 à Notasulga dans l'État de l'Alabama, et morte le 28 janvier 1960 à Fort Pierce dans l'État de la Floride : romancière, nouvelliste, essayiste, dramaturge, anthropologue, folkloriste et journaliste américaine qui est une des figures majeures du mouvement culturel afro-américain dit de la Renaissance de Harlem, notamment avec ce roman (Their Eyes Were Watching God) qui célèbre la culture afro-américaine dans la ruralité du Sud. Elle fait partie des co-auteurs du manifeste Fire !! pour une esthétique afro-américaine libre. Élève de Franz Boas, elle a contribué à l'élaboration d'une anthropologie des traditions orales afro-américaines, elle a également mis en valeur la culture caribéenne exposée par son essai Voodoo and Life in Haiti and Jamaica.

     

     

  • René Depestre - Hadriana dans tous mes rêves

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    René Depestre, poète, romancier haïtien, un roman sorti en 1988 alors qu'il vivait dans le Languedoc, il a eu le prix Renaudot la même année. J'aime beaucoup la littérature haïtienne, et ce magnifique roman confirme, de plus, c'est une des rares fictions littéraires à aborder le vrai sujet de la zombification en Haïti.

     

    "Jacmel (Haïti) en 1938, à l’époque des réjouissances du Carnaval. Patrick Altamont, le jeune narrateur, nous conte deux événements qui se produisent en simultané : d’abord la fin de sa très chère marraine Germaine Villaret-Joyeuse, puis les noces de l’éblouissante Hadriana Siloé, laquelle tombe raide morte au pied de l’autel à la minute où elle prononce le oui sacramentel.
    Mais nous sommes en pays vaudou où le rituel des métamorphoses permet de mêler les horreurs de la mort aux rires de la fête. Et si Hadriana, l’héroïne française du récit, est enterrée en grande pompe dans sa belle robe de mariée, elle ressuscite aussitôt sous la forme d’une zombie, l’une des formes mythiques du destin des Haïtiens.
    Autour de ce thème lié aux mythes de l’esclavage et de la colonisation, symbole de l’ambiguïté du réel-merveilleux dans les cultures de la Caraïbe, l’humour et l’imagination du conteur se débrident pour éclairer le vécu haïtien dans sa fantaisie, sa sensualité, son surréalisme démonté, son désordre toujours hallucinant…
    René Depestre, magicien de l’écriture, sait une fois de plus entraîner son lecteur à l’intérieur d’une sarabande macabre et burlesque au cours de laquelle les danses colorées et la musique sont indissociables des cérémonies funèbres. La joie de vivre et la terreur de passer à trépas procèdent d’une seule et même énergie. Et la verve extravagante et somptueuse de l’auteur nous force à croire à ce récit bourré de personnages plus insolites les uns que les autres. "

     

     

     

  • L'île des rêves écrasés de Chantal T. Spitz

    libriweb.jpgviens de terminer ce livre dans sa réédition à la très chouette édition Au vent des îles et j'ai beaucoup apprécié, une parole juste et essentielle :

     

    "en 1992, Chantal Spitz écrivait, avec L’Île des rêves écrasés, le premier roman tahitien. Cet ouvrage, fondamentalement anticolonialiste, ne recule devant aucun défi dont celui, que ne renieraient pas Deleuze ni Guattari, d’ébranler, par le biais d’un récit individuel, océanien, l’assise établie d’une historicité collective, coloniale, ou encore, paradoxe ultime, de restituer à l’écrit et en français la sacralité et le souffle oratoire, performatif, d’une langue et d’un univers océaniens."

     

     "L’Île des rêves écrasés met en scène ce malaise omniprésent qui déchire la Polynésie française d’aujourd’hui. Si son écriture semble agressive, c’est à une histoire d’amour que l’auteur nous convie. La publication en 1991 de L’Île des rêves écrasés a suscité de nombreuses réactions dans la société tahitienne, allant des appréciations les plus élogieuses aux condamnations les plus frénétiques. De courriers anonymes en appels non identifiés, la violence des attaques a été à la mesure des désordres que la lecture de ce roman a provoqués à une époque où le conformisme tenait lieu de pensée.

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    Douze ans après, la réédition, dans la collection Littératures du Pacifique, de cet ouvrage épuisé depuis longtemps était une nécessité."

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

  • Mais leurs yeux dardaient sur Dieu de Zora Neale Hurston (1937)

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    J'ai lu et vraiment adoré magnifique roman américain écrit en 1937, par Zora Neale Hurston dans  une traduction inédite, effectivement magistrale, de Sika Fakambi !


    Zora Neale Hurston, née le 7 janvier 1891 à Notasulga dans l'État de l'Alabama, et morte le 28 janvier 1960 à Fort Pierce dans l'État de la Floride : romancière, nouvelliste, essayiste, dramaturge, anthropologue, folkloriste et journaliste américaine qui est une des figures majeures du mouvement culturel afro-américain dit de la Renaissance de Harlem, notamment avec ce roman (Their Eyes Were Watching God) qui célèbre la culture afro-américaine dans la ruralité du Sud.
    Elle fait partie des co-auteurs du manifeste Fire !! pour une esthétique afro-américaine libre.
    Élève de Franz Boas, elle a contribué à l'élaboration d'une anthropologie des traditions orales afro-américaines, elle a également mis en valeur la culture caribéenne exposée par son essai Voodoo and Life in Haiti and Jamaica.

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    https://www.zulma.fr/livre/mais-leurs-yeux-dardaient-sur-dieu-3/


    Zora Neale Hurston est l'auteure afro-américaine qui fut la plus lue de son temps. Sa propre vie est tout un roman souvent tragique. 

     

     

     

     

     

     

     

  • Goliarda Sapienza : L'art de la joie

     

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    éd. Le Tripode, 2016

     

     

    Et bien je viens de terminer les 800 pages de "L'art de la joie", merci à celle qui me l'a offert !! Belle revanche pour ce livre qui avait été étouffé, magnifique, jouissif, contestataire, féministe c'est à dire intégralement vivant, je le conseille vivement !

     

    écrit entre 1967 et 1976, ce livre est resté longtemps inédit jusqu'à la mort de l'auteure. Même l'intervention du président de la République, ami de sa mère, ne suffit pas à faire accepter son manuscrit qui ne sera publié pour la première fois qu'en 1986 à compte d'auteur par Angelo Pellegrino (un acteur et écrivain italien, mari de Goliarda Sapienza et après la mort de celle-ci — en 1996 — et passe à l'époque inaperçu. C'est en 2005 avec la publication en Allemagne par Waltraud Schwarze, puis en France par son amie Viviane Hamy, qu'il devient un best-seller et un long-seller, traduit en quinze langues et enfin reconnu aussi en Italie. 

     

     

     

  • La cathédrale des noirs de Marcial Gala

    Couv_CATHEDRALE_OK_web.jpgtraduit de l’espagnol (Cuba) par Maïra Muchnik, Belleville éditions, octobre 2021. 240 pages, 19 €.

     

     

    « SI T’ATTERRIS ICI, C’EST POUR LA VIE, quelqu’un l’avait écrit sur le mur d’une maison, et c’est vrai que le quartier était chaud, vraiment chaud. »

     

    D’une construction fort originale, La cathédrale des noirs avec ses airs de simplicité et son humour caustique de quartier populaire, se bâtit sur une succession de témoignages qui dessine de plus en plus clairement une réalité trash et sanglante.  Nous sommes à Cienfuegos, la « perle de Cuba », sa fameuse baie et ses plages adulées par le touriste mais dans La cathédrale des noirs, nous ne verrons pas la plage, juste quelques virées au quartier blanc de Punta Gorda pour y vendre de la viande et quelle viande !

    Les faits qui sont au cœur de ce roman se déroulent à Punta Gotica, quartier pauvre, quartier noir, avenir barré, vilaines combines, drogue, alcool, sorcellerie, putes et criminalité. Punta Gotica est un quartier où on pisse sur la tête de l’ennemi vaincu.

    « Naitre noir, c’est déjà être dans le pétrin, alors imagine si en plus tu dois vivre dans les baraquements d’un quartier pareil. » raconte Alain Silva Acosta, psychologue doté d’un master en gestion d’entreprise et dans la mouise comme tous les autres.

    C’est là que vient emménager la famille Stuart et ses trois enfants : la splendide Johannes et deux garçons, David King qui sera vite surnommé Le Grillon et le plus jeune, Samuel Prince, le tout beau, le tout doux mais Bárbaro Suárez Rosales que cette douceur insupportait et qui avait voulu le surnommer Gélatine a vite compris à ses dépens qu’il y avait de la férocité qui couvait chez le poète.

    Le père Stuart est un patriarche visionnaire, illuminé par sa foi, pas un tendre, mais un dur et sévère qui fiche des raclées à son aîné au nom du droit chemin et il a un projet grandiose, soutenu par des pasteurs de plusieurs États nord-américains : la congrégation du Saint Sacrement, une de ces innombrables églises évangélistes, qui a son pasteur déjà à Cienfuegos. Ce projet, c’est une cathédrale du Saint Sacrement, celle qui sera surnommée la cathédrale des noirs, une construction toujours plus démesurée et sans fin.

    Et puis il y a donc Ricardo Mora Gutiérrez, alias le Gringo et son acolyte La Porcasse. Le Gringo, ils sont nombreux à témoigner à son propos et lui-même témoigne souvent et on suivra son parcours jusqu’à l’injection terminale. Un parcours marqué par l’avidité. Avidité d’amour, d’argent, de reconnaissance : puissant sceau de damnation. Et parmi tous ces personnages hauts et chauds en couleurs et pour certains surtout en noirceur, il y a les fantômes, les morts qui sont restés esclaves du palero, le maître, le « parrain » d’El Gringo et plus tard aussi de Samuel Prince.

     Le Palo, religion afro-caraïbéenne proche de la Santeria et du Candomblé mais d’origine bantoue mélangée d'éléments de spiritisme, de magie et de catholicisme. Le Palo fonctionne par la manipulation de deux forces : la Lumière et les Ténèbres et dans La cathédrale des noirs, rares sont ceux qui peuvent échapper aux Ténèbres.

    Âmes sensibles s’abstenir donc, Marcial Gala nous embarque dans la peau des habitants de Punta Gotica et ce n’est pas un voyage touristique.

    « Dieu n’en voulait pas. Dieu n’en voulait pas de cette cathédrale, et tout est devenu confus. »

     

    Cathy Garcia Canalès

     

    164007314_129864569081357_3343425861374324748_n.jpgMarcial Gala est né à La Havane en 1965 et vit aujourd’hui entre Buenos Aires et Cienfuegos. La Cathédrale des noirs, son troisième roman, a été élu meilleur roman cubain en2012 et lauréat du prix Alejo Carpentier. Il conte les grandeur et décadence d’un peuple qui aspire à une profonde spiritualité, mais qui sombre dans ses contradictions. Gala est déjà considéré comme l’une des voix cubaines les plus originales de sa génération.

     

     

     

     

  • Le rapport sexuel n’existe plus de Philippe De Jonckeere

    couv-rapportsexuel-bnf.jpgéditions Inculte, 3 février 2021 – décembre 2020. 300 pages, 18,90 €.

     

    Qu’un homme puisse éjaculer à la vue d’une pantoufle ne nous surprend pas, ni non plus qu’il s’en serve pour ramener le conjoint à de meilleurs sentiments, mais personne assurément ne peut songer qu’une pantoufle puisse servir à apaiser la fringale, même extrême, d’un individu.

    Jacques Lacan (1901-1981, psychanalyste français)

     

     

    Entre autofiction et séance de psychanalyse étalée sur près de 300 pages, dans Le rapport sexuel n’existe plus, l’auteur est son propre personnage, endossant son propre nom et une partie en tout cas de sa vraie vie. Le fait que le récit prenne place en 2022 et s’achève en 2024 invente une distance temporelle avec ce qui semble pourtant être un véritable journal intime. Récit à visée thérapeutique pour guérir la douleur d’une déception amoureuse, dont l’auteur — cinquantenaire, se décrivant lui-même comme obèse et obsédé par l’arrivée de l’andropause qui vient alourdir le bilan d’une vie sexuelle de plus en plus fantasmatique — n’arrive pas à se défaire. Autoflagellation, autodérision, décorticage hyperlucide de son manque de lucidité, c’est grâce à son grand humour que l’auteur/personnage se rattrape toujours et parfois in extremis avant la chute dans le pathétique.

    Philippe De Jonckeere, informaticien, personnage donc de l’auteur Philippe De Jonckeere, et c’est là que réside l’originalité parfois inconfortable de ce roman — où commence la fiction ? Où s’arrête-t-elle ? —, cherche à travers ce processus d’écriture à autopsier une relation affective que son imagination a rendu bien plus forte et réciproque qu’elle ne l’était en réalité, le but étant de parvenir à en faire le deuil, mais il y a aussi la possibilité que la personne en question, la cause de ses souffrances, lise le roman une fois publié, ce qui rend le deuil impossible puisque cela demeure une énième tentative, même masquée, de faire perdurer le lien. Donc le but du roman lui-même se mord la queue finalement.

    Un roman comme une tentative de mise à jour :

    « Internet c’est étonnant parfois. On dit souvent que c’est une mémoire, c’est tout le contraire, c’est une fiction dont les mises à jour gomment les données les plus anciennes, elles les écrasent, comme on dit en informatique. Car, comme vous savez, je suis informaticien. »

    C’est très intéressant sur le plan du questionnement du pourquoi de l’écriture et du pourquoi nous faisons les choses dans la vie en général. L’intention affichée et l’intention sous-jacente. Tout lecteur peu disposé à réfléchir en profondeur sur ses propres fonctionnements psychologiques posera sans doute assez vite ce livre. Lecteur qui se retrouve happé dans ce processus très intime, témoin et même complice malgré lui d’une autoanalyse, où on retrouve notamment des narrations de rêves et des citations de Lacan, comme par exemple : « On finit toujours par devenir un personnage de sa propre histoire » ou « La vérité a la structure d’une fiction » et qui a inspiré le titre même de ce roman.

    Une plongée dans la micro-réalité la plus intime du personnage de l’auteur donc, qui ainsi dévoile le moindre ressort de ses pensées, divaguant entre fantasme et réalité dans un roman qui lui-même sème le doute chez le lecteur quant à ce qu’il est en train de lire. Parfois, ce dernier peut se sentir de trop dans ce monologue intérieur, qui à force de détails des plus anodins et de ressassements, peut devenir même lassant et puis il est rattrapé, parce que c’est drôle aussi, impudiquement et férocement drôle, parce qu’il peut aussi se reconnaître – plus encore si le lecteur est un homme cinquantenaire en perte de confiance et tourmenté par les premiers signes de l’andropause. Sujet d’ailleurs rarement abordé en littérature ou dans la vraie vie même et qui est ici largement exposé. « Soixante-neuf fois le mot andropause. Vous pouvez vérifier. »

    Dans « Le rapport sexuel n’existe plus », il est question de sexe bien-sûr, mais plus encore de solitude, de manque d’affection et d’élévation, de stimulation intellectuelle et sensorielle et il est beaucoup question de musique, de jazz en particulier, car celle autour de qui tourne tout le roman — en plus du nombril malmené, vieillissant et inquiet de son auteur — est une contrebassiste. Musique, cinéma, poésie, littérature et le sentiment d’impuissance face aux drames du monde forment aussi le canevas du récit bien plus que les problèmes d‘érection.

    « Le rapport sexuel n’existe plus » est donc une sorte de journal de bord, journal hyper détaillé d’une obsession érotico-sentimentale, qui use et abuse du pouvoir thérapeutique de l’écriture pour se sonder en profondeur, se traquer dans les recoins, s’avouer ses plus inavouables faiblesses, disséquer ses pensées, comportements, fuites et addictions, et remonter ainsi peu à peu la pente de la dépression. Un lecteur ne connaissant pas du tout le travail de l’auteur et ses livres précédents ne saura pas si l’objet de ce roman est réellement ce qu’il prétend être, mais en comprenant la démarche de cet auteur qui, pensant ne pas savoir écrire, s’est obstiné à le faire — un réflexe de survie à sa propre histoire — on ne peut que saluer le courage de cette extrême mise à nu qui épargne en même temps le lecteur du fardeau excessif de pathos, grâce à cette distance que permet un sens aigu de l’humour et de l’absurde.

    C’est bon de lire une voix d’homme osant aborder ses fragilités de mâle et en déconstruire les clichés, osant afficher ses peurs, sa sensibilité jusque dans ses accès les plus larmoyants, ses manques, ses obsessions et ses petites hontes intimes, qui ne craint pas de montrer des aspects peu glorieux de lui-même.

     

    Cathy Garcia Canalès

     

     

    philippejonckheereOFF.jpg1951, Robert Frank prend une petite fille en photo dans les rues de Paris. Cette petite fille sera ma mère. Né le jour de la 1964ème commémoration du massacre des innocents. Entrée en 1986 à L’École Nationale Supérieure des Arts Décoratifs à Paris où je perds un peu de temps faute de recevoir l’enseignement que j’étais venu y chercher. Les professeurs de photographie sont des photographes stricto sensu, c’est dire. En 1988, deux ans d’études à The School of the Art Institute of Chicago, où je reçois notamment l’enseignement de Barbara Crane, Joyce Neimanas, Ken Josephson, Karen Savage et Bart Parker, je rattrape amplement le temps perdu aux Arts Décos. En 1990, je suis l’assistant de Robert Heineken, j’assiste à des miracles tous les jours. Fin 1991, retour en France, les choses vont mal. En 1993, à la suite d’un deuil, je commence à écrire, force est de constater que je ne sais pas écrire, mais je m’obstine, comme en toutes choses. 1995, Mai de la Photo à Reims, seule exposition d’envergure, l’exposition est censurée. Ça foire, comme en toutes choses. En 1995, je pars à Portsmouth en exil. Je fais les trois huit, travail alimentaire, sommeil, travail dans l’atelier ou travail alimentaire, travail dans l’atelier, sommeil, ou travail dans l’atelier, travail alimentaire, sommeil. En 1998, retour en France, je ne fais plus de photographie, presque plus, je continue d’essayer d’écrire, je fais des petits progrès. J’habite à la campagne. En 1999, j’achète un ordinateur personnel, j’apprends à m’en servir en apprenant à écrire, de même que j’apprends à écrire en apprenant à me servir de mon ordinateur. 1999 : Naissance de Madeleine Hannah De Jonckheere. En 2000, je construis un site Internet, le Désordre. C’est très long. Je me couche souvent très tard. Ça foire pas mal, mais je m’entête. En 2002, je reçois le prix multimédia de la Société des Gens de Lettres, ça ne foire pas tout le temps. En 2002, je tiens le journal de cette existence désordre, le bloc-notes du désordre, étonnant succès. En 2004, je reçois des lettres très encourageantes d’éditeurs mais qui ne proposent pas de projet d’édition. Ça foire encore un peu. Finalement, Adèle est née le 9 avril 2004, Nathan est enfin diagnostiqué autiste et mon père est opéré du cœur, les trois plus ou moins le même jour, c’est tout moi. Le journal de cette aventure est publié en 2008 par François Bon sur publie.net. En mai 2009, je participe à la grande rétrospective du Terrier au Nova de Bruxelles. Fin 2009, je travaille à l’iconographie et à la réalisation du numéro 109 de Manière de Voir (Monde diplomatique) : Internet, révolution culturelle. Depuis fin 2010, je travaille au spectacle Formes d’une Guerre avec l’écrivain François Bon et les musiciens Dominique Pifarély et Michele Rabbia. En 2012, Publication de Robert Frank, dans les lignes de sa main, Publie Papier. Philippe, film d’animation de trois minutes sur une musique d’Elémarsons. Un an de prises de vue, trois minutes d’animation. On ne rit pas. Invité envouté de Marie Richeux sur France Culture pour son émission Pas la peine de crier du 10 septembre 2012. En 2013, nouveau spectacle avec François Bon en lecteur de mon texte intitulé Contre et Dominique Pifarély, violon. Succès critique et salle (presque) pleine. Le rapport sexuel n’existe plus est son troisième roman publié aux éd. Inculte après Une fuite en Egypte (2017) et Raffut (2018). Les trois sont clairement autobiographiques.