Hermann Hesse
On ne peut vivre intensément qu’aux dépends du moi.
in Le loup des steppes
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On ne peut vivre intensément qu’aux dépends du moi.
in Le loup des steppes
Encore frissonnant
Sous la peau des ténèbres,
Tous les matins je dois
Recomposer un homme
Avec tout ce mélange
De mes jours précédents
Et le peu qui me reste
De mes jours à venir.
Me voici tout entier, je vais vers la fenêtre.
Lumière de ce jour, je viens du fond des temps,
Respecte avec douceur
Mes minutes obscures,
Épargne encore un peu
Ce que j'ai de nocturne,
D'étoilé en dedans
Et de prêt à mourir
Sous le soleil montant
Qui ne sait que grandir.
in La fable du Monde
J'ai vu que ce n'était pas l'homme qui était impuissant dans sa lutte contre le mal, j'ai vu que c'était le mal qui était impuissant dans sa lutte contre l'homme. Le secret de l'immortalité de la bonté est dans son impuissance. Elle est invincible.
Nul ne peut voir par-dessus soi.
Je veux dire par là qu'on ne peut voir en autrui plus que ce qu'on est soi-même.
C'est pendant que le vieux seau est encore là qu'il faut en fabriquer un neuf.
Qu’auront nous dit vraiment ?
Le silence est préférable à ces babils,
ces faux-savoirs,
ces mensonges appris comme une leçon.
Ces bribes de rien, de tout, d’abject aussi, récitées par cœur
quand le plus grand dénominateur commun ouvre sa gueule
dans l’immonde barnum du tube cathodique,
ce rectum de la pensée qui souille
tout ce qu’il touche.
in L'éponge des mots
Pour définir la capacité des armes on parle de pouvoir de destruction. Pour définir la capacité de destruction de certains hommes il faut parler du pouvoir d’achat.
in Dernières nouvelles du Sud
Surveillés par des gardiens, nous sommes coupables de voyages
in Aller simple
C'est plus fort que vous : il vous est nécessaire de refuser une quantité considérable de rencontres, afin de préserver une chose dont la plus juste formule est "rien" ; ne rien faire, rien dire, presque rien être. Vous y découvrez le cœur subtil du temps, son cœur battu par le rien du sang dans les veines. C'est un état limite dont vous avez besoin, une mince ligne de rien entre l'ennui et le désespoir, et la joie qui passe en funambule sur ce fil, la joie qui se nourrit précisément de rien
Emportez-moi dans une caravelle,
Dans une vieille et douce caravelle,
Dans l'étrave, ou si l'on veut dans l'écume,
Et perdez-moi, au loin, au loin.
Dans l'attelage d'un autre âge,
Dans le velours trompeur de la neige,
Dans l'haleine de quelques chiens réunis,
Dans la troupe exténuée des feuilles mortes.
Abreuvée de lune camomille au bar des petites heures,
elle aime la peau de chagrin et la monnaie de singe
qui réclame sa part de miracles.
A la fin, nous nous souviendrons non pas des mots de nos ennemis,
mais des silences de nos amis.
la mer se referme plus rapide que le désert.
in Aller simple
Des mains m’ont saisi, douaniers du Nord, gants en plastique et masque sur la bouche. Ils séparent les morts des vivants, voici la récolte de la mer, mille de nous enfermés dans un endroit pour cent.
in Aller simple
Je rêvais de toucher la tristesse du monde au bord désenchanté d’un étrange marais je rêvais d’une eau lourde où je retrouverais les chemins égarés de ta bouche profonde j’ai senti dans mes mains un animal immonde échappé à la nuit d’une affreuse forêt et je vis que c’était le mal dont tu mourais que j’appelle en riant la tristesse du monde une lumière folle un éclat de tonnerre un rire libérant ta longue nudité une immense splendeur enfin m’illuminèrent et je vis ta douleur comme une charité rayonnant dans la nuit la longue forme claire et le cri de tombeau de ton infinité.
in L’Archangélique et autres poèmes