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CATHY GARCIA-CANALES - Page 237

  • Edward Okuń - La mort de Paganini - 1898

    Edward Okuń La mort de Paganini 1898.jpg

     

    quand j’entends des violons
    inexistants
    et oublie ces mots ces gestes
    qui bafouillent 
    je t’aime
     
    je naufrage au revers
    d’un alcool de brume
    ma robe est noire
    mes yeux brûlés
    des accents nomades
    me font couler
     
    mes sourires
    tournent grimaces
    et  je tremble et grince
    le vent se lève
    tempête dans ma tête
    gicle à mes lèvres
    un jus noir amer

     

    cg in Salines

     

     

     

     

  • Olga Zima - Baikal Zen Stone - Irkutsk Oblast, Siberia - 2016

    Baikal Zen_n.jpg

     

    Nous sommes chacun des fractions, d’infimes fractions d’expérience et nous nous pensons tellement importants, mon expérience versus ton expérience, votre expérience versus notre expérience… Vanité ! Un claquement de doigts dans une bulle de rêve. Le plus difficile est de marcher sur le fil de ce rêve sans basculer d’un côté ou de l’autre. Réel, irréel, le même mirage, miroir, miracle.

     

    cg in Le livre des sensations

     

     

  • Pour une nouvelle conscience : déclaration des droits et devoirs de l’individu conscient

     

    par Sarah Roubato

    I.

    Quand les fondations sur lesquelles reposent l’organisation du monde se fissurent, chaque individu est en droit d’en questionner les fondements. Car par ces fissures sombrent déjà les plus fragiles mais tôt ou tard, l’ensemble des populations. 

    Ce qui nous arrive, nous avons du mal à le nommer. Mais chacun sent que nous nous dirigeons vers un état du monde qui ne sera pas supportable. 

    Cette crise nous met face aux limites d’un système mondial, aux échecs de nos gouvernements et face à nos modes de vie. Aujourd’hui les inégalités se révèlent sous une lumière impitoyable. Le répit qui est offert au vivant n’est que temporaire et artificiel. 

    Nous sommes devenus à la fois victimes, bénéficiaires, outils et commanditaires du consumérisme néolibéral, c’est-à-dire d’un rapport à la vie, à nos besoins, à nos loisirs, au savoir, ou encore au soin basé sur une satisfaction immédiate et éphémère, vouée à se renouveler le plus rapidement possible et à nourrir la courbe exponentielle des profits de marchés dérégulés. 

    Nous nous sommes laissés piéger dans un état de dépendance matérielle, économique, énergétique, intellectuelle et émotionnelle à laquelle nous consentons, et nous avons renoncé à croire que nous pourrions le changer.

    II.

    Mais au cours de son histoire, l’être humain a su tracer une ligne entre l’acceptable et l’inacceptable et a démontré qu’aucun état des choses n’est inexorable. 

    Nous avons trop longtemps préféré nous accommoder des souffrances d’un état du monde que nous connaissons, plutôt que de risquer les incertitudes d’un changement nécessaire. 

    Nous ne pouvons pas regarder la crise actuelle par la fenêtre, en espérant retourner rapidement à ce que nous appelons la vie normale. Nous l’avons déjà fait tant de fois. 

    Et pourtant, que faire ? Comment prétendre se dresser contre ce qui nourrit toutes les grandes forces de ce monde et qui constitue la norme pour la plupart de nos contemporains ? Dénoncer, expliquer, donner à voir, analyser ? Nous savons déjà. À l’heure de l’information, le savoir seul ne mène plus à la raison. L’idéal des Lumières a avorté. Marcher, revendiquer, signer des pétitions ? Beaucoup de bruit pour si peu de changement. 

    Nous savons que l’heure n’est plus aux petits gestes de chacun. Mais les individus que nous sommes devenus sont-ils encore capables de penser un commun et de s’organiser pour le faire advenir ? 

    Le grand élan nécessaire ne peut venir que d’individus ouverts à une nouvelle forme de conscience, capables d’énoncer les principes sur lesquels ils veulent réorienter leur vie, de les appliquer avec exigence, de les défendre avec fermeté et de les transmettre avec conviction.

    III.

    Mon droit au bonheur ne saurait, à aucun moment, reposer sur la destruction du vivant ou l’atteinte à la dignité humaine. Ma liberté individuelle reste l’un des plus précieux lègues des combats passés, mais elle ne pourra plus être l’alibi qui justifie ma participation à la destruction des équilibres du monde. 

    J’aspire à un mode de vie qui me permette d’habiter le temps, d’être là pour mes proches, de trouver du sens à mon travail, de m’ancrer dans mon voisinage et de restaurer mon lien au vivant.

    J’aspire à une société qui considère les anciens et les enfants comme les deux pôles qui la tiennent et non comme ses éléments passifs. 

    Je chercherai des manières de me nourrir, de me déplacer, d’éduquer, de me divertir, de m’informer ou encore de gouverner qui respectent la dignité de l’humain et qui préservent le vivant. J’encouragerai au mieux de mes capacités ceux qui déjà y travaillent.

    Je chercherai parmi ceux qui expriment le monde, ceux qui me feront voir le réel dans sa complexité, qui nourriront mon imaginaire, et qui me donneront des outils pour distinguer ce qui est essentiel de ce qui ne l’est pas.

    J’encouragerai une utilisation des nouvelles technologies qui n’efface pas la présence aux autres ni à ce qui m’entoure.

    Je veillerai à ce que soit préservées dans chaque aspect de ma vie la diversité et la complémentarité des formes de vie, des opinions et des expressions dans le respect du droit.

    J’exigerai des responsables politiques, que j’approuve ou non, qu’ils consacrent leurs mandats à trouver les moyens de préserver le vivant, à nous assurer le plus d’autonomie possible et à respecter toutes les professions essentielles à l’harmonie sociale. Qu’ils puissent envisager avec nous de nouvelles formes de gouvernance pour que les citoyens puissent être pleinement intégrés à l’exercice politique. 

    IV.

    Ces principes ne sont pas de lointains idéaux. Ils forment la boussole qui désormais oriente ma vie. Ils me rendent un pouvoir qui m’avait été confisqué : celui de décider au service de quoi je mets mon temps et mon travail. Car je l’ai compris, chaque geste que je fais et que je ne fais pas, agit sur le monde. 

    Je sais que ces principes exigeront que je secoue mon confort, mes habitudes, que je recalibre mes priorités et que j’interroge mes certitudes. Que j’envisage ce qui semblait impossible, ou bien pour les autres. Je le ferai, car je sais que l’avenir en dépend.  

    Pour ce qui ne dépendrait pas de mes choix personnels, j’exigerai que ceux qui peuvent agir le fassent, qu’il s’agisse de ma famille, de mes voisins, de mes collègues, de mon employeur, de mes formateurs ou de mes représentants. 

    En énonçant ces principes et en m’engageant à les suivre, je gratte à nouveau l’allumette d’une conscience volée, celle d’appartenir à l’humanité et au vivant. 

     

    (...)

    Texte intégral : http://www.sarahroubato.com/po/nouvelleconscience/