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CITATIONS - Page 123

  • Cécile Sauvage

     

    Ô mon fils, je tiendrai ta tête dans ma main,

    Je dirai : j'ai pétri ce petit monde humain,

    Sous ce front dont la courbe est une aurore étroite j'ai logé l'univers rajeuni qui miroite Et qui lave d'azur les chagrins pluvieux.

    Je dirai : j'ai donné cette flamme à ces yeux,

    J'ai tiré du sourire ambigu de la lune,

    Des reflets de la mer, du velours de la prune

    Ces deux astres naïfs ouverts sur l'infini.

    Je dirai : j'ai formé cette joue et ce nid

    De la bouche où l'oiseau de la voix se démène;

    C'est mon oeuvre, ce monde avec sa face humaine.

    O mon fils , je tiendrai ta tête dans ma main et, songeant que le jour monte, brille et s'éteint,

    Je verrai sous tes chairs joyeuses et vermeilles

    Couvertes d'un pétale à tromper les abeilles,

    Je verrai s'enfoncer les orbites en creux, l'ossature du nez offrir ses trous ombreux,

    Les dents rire sur la mâchoire dévastée

    Et ta tête de mort, c'est moi qui l'ai sculptée.

     

    in L'âme en bourgeon, un recueil de poésie de 1908, qu'elle dédie à son fils Olivier Messiaen

     

     

     

  • Luis Sepúlveda

     

    « - Comment avez-vous fait ? a demandé mon socio.

    - Quoi donc ? s’est étonnée la vieille dame.

    - La fleur, ai-je ajouté en montrant le rameau qui avait fleuri entre ses mains.

    - Je ne sais pas. C’est un don, parait-il. Tout ce que je touche vit, a-t-elle répondu timidement. »

     

    in Dernières nouvelles du Sud

     

     

  • Louis Raoul

     

    Je te cherche encore

    Sachant l’inutile

    J’interroge les rues de tes pas

    J’essaie des portes

    Dans la chambre-seconde

    Où ton souffle habitait. 

     

    in Triptyque du veilleur

     

     

     

  • Jacques Coly

     

    & la moelle & l’âme dans la gueule du loup ce sont toujours les mêmes personnages hirsutes qui posent l’indéchiffrable énigme saurions-nous marcher sans croix blanche dans le dos ? n’éveillez pas le chien qui dort dites-lui tout bas que la lune n’est pas une tranche de citron amer qu’elle saigne bel et bien fidèle & glacée

    in  Livre d'Öpame

     

     

  • Marthe Émon-Peyrat

     

    seins de silence

    arbres profonds

    la lumière transperçait les feuilles

    tu me montrais les sangliers

    qui se baignaient dans l’eau du monde

    et qui gîtaient contre mon ventre

     

     in tu as ouvert l’autre porte

     

     

     

  • Ile Eniger

     

    – Tu comprends, à choisir un code je n’en vois qu’un : l’amour. Je me fiche que cela paraisse désuet, ou décrété impossible par une tonne de crétins. Il y a une perfection quelque part, je la cherche. Je ne vis pas à contre-courant, j’essaie d’aller dans mon courant. 

     

     in La femme en vol

     

     

     

  • Georges Cathalo

     

    sept ans de visites

    ont achevé Lascaux

    effacé 15000 ans d’Histoire

    mais on a reconstitué

    une grotte postiche

    pour se souvenir du passé

    après ça dépêchons-nous

    de reproduire la planète

    en photocopie-minute

    car elle n’a pas de double

     

    in Quotidiennes pour oublier

     

     

  • Saïd Mohamed

     

    La dentelle des jours nous pousse à faire escale

    dans les ports aux romances inachevées,

    à chercher dans la multitude des petits riens

    ces choses de peu qui manquent le plus.

     

    in L’éponge des mots

     

     

  • André Laude

     

     Je longe le long sillon qui conduit aux morts muets.

    Je songe à la neige, aux chevaux de feu,

    à l’hiver des paroles.

    Je vois des bois brûlés, des vaisseaux échoués,

    des mouettes prises par le gel.

    Je longe le fleuve de sang et de larmes

    qui traverse les inquiétantes ruines.

    Je sens l’odeur des prédateurs, l’urine

    de la hyène, la matière fécale des jeunes bébés.

    J’écris à partir d’un noyau de nuit.

    J’écris à partir d’une tranchée noyée de boue.

    J’écris corde au cou.

    La trappe déjà tremble sous mes pieds.

    Je longe le marbre froid qui donne le frisson

    et chante une très étrange et vieille chanson,

    qui dit qu’aujourd’hui et pour toujours

    le ver est dans le fruit.