Jean Gédéon
Crainte d’une faille dans la mécanique
par où s’engouffrerai l’entre-deux
innommable.
Ce lieu de personne
avec ses chemins de broussailles têtues
où se cognent les rêves.
in Matières premières
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Crainte d’une faille dans la mécanique
par où s’engouffrerai l’entre-deux
innommable.
Ce lieu de personne
avec ses chemins de broussailles têtues
où se cognent les rêves.
in Matières premières
Il y a
dites-vous
encore
trop
de
leçons
mal apprises
trop de lacunes
de confusion
de trous
d’excroissances
d’amalgames
de fautes de
syntaxe de style de goût de jeunesse de frappe de non-concordances des temps
d’ailleurs incertains
d’ici controversés
de lendemains qui
chantent faux
de pannes inexpliquées
d’erreurs d’aiguillage
d’étourderies de montage
de retards d’exécution
de mauvaises passes
de situations d’échec
de macérations oubliées
de vapeurs non identifiées
de colportages intempestifs
d’exagérations perdues
de pendules mal réglées
de fiches non répertoriées
d’artistes égarés en
quadruple file et
qu’on ne revoit plus
toute la sainte
journée
in Le rappel des titres
Être poète c’est être en permanence en instance d’expulsion
in la poésie m’emmerde
Je suis un et indivisible monument du ratage
de votre chaîne de production de couillons.
in Le projet terreur
Le présent nous étouffe et déchire les identités. C’est pourquoi je ne trouverai mon moi véritable que demain, lorsque je pourrai dire et écrire autre chose. L’identité n’est pas un héritage, mais une création. Elle nous crée, et nous la créons constamment. Et nous ne la connaîtrons que demain. Mon identité est plurielle, diverse. Aujourd’hui, je suis absent, demain je serai présent. J’essaie d’élever l’espoir comme on élève un enfant. Pour être ce que je veux, et non ce que l’on veut que je sois.
Je veux parler d’un désert monstrueux, le désert parfaitement planétaire, parfaitement mondialisé. Le désert de l’Homme par l’Homme, celui qu’il édifie dans son cœur, lui l’orgueilleux qui marche sans mémoire.
in Itinéraires vers le silence
Si la chance est avec toi, pourquoi te hâter ?
Si la chance n'est pas avec toi, pourquoi te hâter ?
Le poisson attrapé est toujours petit,
le poisson échappé est toujours grand.
Un enfant marche en sifflotant aux limites du visible
il n'a pas du tout l'air craintif.
A ses tempes des boucles de neige doucement tremblent
Il est du pays d'au-delà des moissons déchiquetées
par les pics d'au-delà les grands murs lépreux qui se taisent
Il est du pays des alchimistes et des brûleurs de souches pourries
in 19 lettres brèves à Nora Nord
Souffles jumeaux de la marche et du métier de se taire. Celui de renoncer au silex des mots, à leur envie de puissance, à leur impatience de torrent, eux qui devraient toujours se cantonner à la source, où l’ombre porte encore nourriture et secret.
in Itinéraires vers le silence
Nous perdons toute chose
Et le rêve à chaque
Instant
Se recompose
Une ouverture sombre et à l’intérieur,
des siècles de fantômes dépenaillés
grimpant à l’assaut du pays de cocagne.
in La peur
Tout est devenu d’une incroyable simplicité
Même les montagnes on peut les voir à plat
De temps en temps pourtant la mer se soulève
Et rappelle qu’il reste encore des innocents
in Chose Dite
Parfum
Comme un éclair
Dans les rues à rimmel.
Dans les fin fonds du ciel,
tout s’ouvre, tout se ferme :
Un brouillard d’anges
donne le ton, dessine un visage.
On va vers le sommeil
Sans laisser d’adresse.
On ne sait déjà plus pourquoi.
in Paris : les Halles
Foulant les ombres,
Je marche d’un arbre d’hiver
à un autre arbre d’hiver.