André Laude
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et une forêt d'Amazonie soudain s'est tendrement refermée
sur mes aventures
Les oiseaux verts rouges jaunes ont crié notre règne
au cœur de l'été torride, infracassable.
in 19 lettres brèves à Nora Nord
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et une forêt d'Amazonie soudain s'est tendrement refermée
sur mes aventures
Les oiseaux verts rouges jaunes ont crié notre règne
au cœur de l'été torride, infracassable.
in 19 lettres brèves à Nora Nord
Dis-moi d'urgence le tracé des îles
combien sont les gardes qui veillent sur les carcasses
pourries des navigations
donne-moi le nord
j'ai hâte des vents maigres chiens affamés des ressacs de plomb
je brûle pour ces énigmatiques figures de proue
qui hantent mes rues chaudes
et lavent leurs épaules douces dans des alcools de lune
farouche
Dis-moi où la fête se passe
Où les portes ne sont que des
soupirs d'amantes
à peine blessées par le duvet nocturne.
in 19 lettres brèves à Nora N.
J'ai hanté son sexe cercueil et caverne
où naître et mourir étaient une même jouissance
d'algues d'ouest collant aux reins huilés du voyageur
brûlé par les étapes
initié par les poussière et les migrations de comètes
J'ai hurlé de joie dans cette monstrueuse verdure
incendié par des soleils tropicaux
O danse de sioux des globules rouges
O martèlement de tambours nègres des doigts
luisants de semence
j'ai dormi une aube plus vaste que le désert des Tartares
in 19 lettres brèves à Nora N.
Enterrez-moi dans son nom
qu'avec elle je voyage partout
dans le bleu des triangles d'oiseaux sauvages
dans le pollen des fous de Bassan
dans le noir ténébreux des énigmes
dans la chute libre des sangs qui, une fois, ont épousé les soleils caraïbes.
Enterrez-moi dans sa gestualité inquiète
dans sa beauté tuméfiée
dans son agenouillement face aux ordures de la nuit
dans le vert espérance de sa durée.
De sa violente présence
aux vagues et aux Etoiles
aux enfants et aux fées.
in 19 lettres à Nora N.
ne cognez pas à ma vitre
je n'y suis pas
ne me hélez pas entre
les grands arbres de ciment muet
je n'y suis pas
ne me sonnez pas au téléphone
ne courez pas derrière
mon ombre tragique Rue Saint-Martin
je n'y suis pas
ne m'invitez pas à dîner
à danser à boire
Porto Tokaÿ eau de vie
je sais «le beaujolais nouveau
est arrivé»
je n'y suis pas
ne vous glissez pas chaleur ténue
entre les draps défaits
dans le pauvre lit d'effroi
je n'y suis pas
ne fouillez pas vers ma bouche
qui sait se faire lait pur
fruit mat mais aussi lueur de corbeau
et petite pluie de novembre
je n'y suis pas
ne demandez pas à la concierge
l'étage où habite la blessure
sans limites sans nom sans sommeil vrai
je n'y suis pas
ne tourmentez pas je vous en prie
ne tourmentez pas la nuit
pour qu'elle vous dise
sur quelle falaise j'efface mes traces
sous quelle lune d'acide je soliloque
loque de voix
elle ne saurait rien répondre
in 19 lettres brèves à Nora N.
Ne m'enlevez pas la vivante coupée de mon sang par une distance plus terrible encore
que cet espace vaste où rugissent mes mots plaintifs mes mots fous mes mots de métal enragé
Quelque part peut-être dort-elle
caressant encore le corps traversé par les rudes lames des solitudes
Quelque part peut-être gémit-elle
à nouveau reprise par la chaude clarté de mes paumes bavardes
tandis qu'ailleurs une chair bouleversée écrase un cri
d'agonie et de fureur
tandis qu'ailleurs deux yeux se posent comme des blessures sur la grande plaie visible
O Dieux – parce que cette nuit je suis un petit enfant innocent comme l'haleine du fleuve et désarmé –
Ne m'enlevez pas la vivante
qui s'en est retournée au pays sien avec ma terrifiante douceur touchée à mort
enracinée dans son ventre bleu au fond duquel hurle un visage
abordant la nuit de biais
sachant qu'elle mord
Qu'elle fait mal
Qu'elle ne pardonne pas.
in 19 lettres brèves à Nora N.
je n'y suis pas
je suis ailleurs nulle part dans un ventre chaud
d'outre-univers
dans une nudité somptueuse implacable
dans une dimension inatteignable
par vos yeux
je suis dans un grand cimetière d'éléphants
qui ont la couleur de mes famines
de mes amours soies sombres déchirées de haut en bas
par une corne de cruauté aux froides résonnances de métal
je suis enterré dans la glaise d'un paysage vocal
dans la luminosité stridente d'un ongle
dans la courbe d'un fleuve bu à la source
dans la chair d'aube d'une épaule émouvante à gémir doucement
pour ne pas réveiller les racines
dans le ciel de la voyageuse
dans les paumes absentes
in 19 lettres brèves à Nora Nord
Les livres sont des miroirs,
et l'on n'y voit que ce qu'on porte en soi-même
in L'ombre du vent
aller vers soi
c’est sans fin
se frayer un chemin
in Livre sans objet
L'eau calme est plus profonde que l´eau agitée
Le nuage est sombre mais ce qui en tombe est de l'eau pure
j’en ai tant sur le cœur
que j’éclate
de dire
à tout propos
in Livre sans objet
L'eau coule du haut en bas.
La chance va vers celui qui fait du bien.
nos rêves chaque nuit
s’emmêlent en nos cheveux
et l’aube qui nous sépare
en emporte sa part
in Livre sans objet
C'est toujours quand y'a pas de pont qu'on veut aller de l'autre côté. Toujours.
in L'intégrale des brèves de comptoir 1992-1993