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CITATIONS - Page 56

  • Antoine Emaz

     

    Ce monde est sale de bêtise, d’injustice et de violence ; à mon avis, le poète
    ne doit pas répondre par une salve de rêves ou un enchantement de langue ;
    il n’y a pas à oublier, fuir ou se divertir. Il faut être avec ceux qui se taisent
    ou qui sont réduits au silence. J’écris donc à partir de ce qui reste vivant dans
    la défaite et le futur comme fermé. S’il n’est pas facile d’écrire sans illusion,
    il serait encore moins simple de cesser et supporter en silence. Donc, j’aime
    à penser la poésie comme un lichen ou un lierre, avec le mince espoir que
    le lierre aura raison du mur.

    in Entretien, in revue "Scherzo" n° 12-13, été 2001

     

     

     

  • Louis Calaferte

     

    LE MONDE EST NOUS TOUS, OU RIEN

    Haïssez celui qui n’est pas de votre race.
    Haïssez celui qui n’a pas votre foi.
    Haïssez celui qui n’est pas de votre rang social.
    Haïssez, haïssez, vous serez haï.
    De la haine, on passera à la croisade,
    Vous tuerez ou vous serez tué.
    Quoi qu’il en soit,
    vous serez les victimes de votre haine.
    La loi est ainsi :
    Vous ne pouvez être heureux seul.
    Si l’autre n’est pas heureux,
    vous ne le serez pas non plus,
    Si l’autre n’a pas d’avenir,
    vous n’en aurez pas non plus,
    Si l’autre vit d’amertume,
    vous en vivrez aussi,
    Si l’autre est sans amour,
    vous le serez aussi.
    Le monde est nous tous, ou rien.
    L’abri de votre égoïsme est sans effet dans l’éternité.
    Si l’autre n’existe pas, vous n’existez pas non plus.



     

  • Jorge Amado

     

    (…) c’était encore trop pour les pauvres de vivre, vivre en résistant à tant de misère, à des difficultés sans fin, à cette extrême pauvreté, aux maladies, au manque total d’assistance, vive quand ils n’avaient que les moyens de mourir. Pourtant ils vivaient, c’étaient des gens obstinés, et ils ne se laissaient pas liquider facilement. Leur capacité de résistance à la misère, à la faim, aux maladies, venait de loin, elle était née sur les bateaux des négriers, et elle s’était affermie dans l’esclavage. Leurs corps étaient aguerris ; ils s’étaient endurcis au dénuement.

    Et non contents de vivre, ils vivaient heureux, qui plus est. Et plus ils avaient des difficultés, plus ils riaient au son des guitares et des harmonicas (…). Ils affrontaient la misère avec allégresse, se moquaient de leur pauvreté et allaient de l’avant. Lorsqu'ils ne retrouvaient pas dès leur naissance les angelots des cieux, élus par Dieu et par la dysenterie, la faim et le manque de soins, les enfants s’élevaient à cette dure et joyeuse école de la vie, ils héritaient de leurs parents la résistance et la capacité de rire et de vivre. Ils ne se rendaient pas, ils ne se soumettaient pas au destin, humiliés et vaincus. Non, ils résistaient à tout, affrontaient la vie et ne la trouvaient pas nue et froide, ils la revêtaient de rires, de musique, de chaleur humaine et de gentillesse (…).

    Voilà comment ils sont ces gens simples, des durs à cuire. Voilà comment nous sommes nous hommes du peuple, joyeux et obstinés. C’est ceux de la haute qui sont des mous, des piliers de pharmacie bourrés de barbituriques, rongés d’angoisse et de psychanalyse (…).

     

     in Les pâtres de la nuit (1970)

     

     

     

     

     

     

  • Jean Giono

     

    Dès que les sens sont suffisamment aiguisés, ils trouvent partout ce qu’il faut pour découper les minces lamelles destinées au microscope du bonheur. 
    Tout est de grande valeur : une foule, un visage, des visages, une démarche, un port de tête, des mains, une main, la solitude, un arbre, des arbres, une lumière, la nuit, des escaliers, des corridors, des bruits de pas, des rues désertes, des fleurs, un fleuve, des plaines, l’eau, le ciel, la terre, le feu, la mer, le battement d’un cœur, la pluie, le vent, le soleil, le chant du monde, le froid, le chaud, boire, manger, dormir, aimer.


    in La Chasse au bonheur

     

     

     

  • Boris Vian

     

    A tous les enfants
    Qui sont partis le sac au dos
    Par un brumeux matin d’avril
    Je voudrais faire un monument
    A tous les enfants
    Qui ont pleuré le sac au dos
    Les yeux baissés sur leurs chagrins
    Je voudrais faire un monument
    Pas de pierre, pas de béton
    Ni de bronze qui devient vert
    Sous la morsure aiguë du temps
    Un monument de leur souffrance
    Un monument de leur terreur
    Aussi de leur étonnement
    Voilà le monde parfumé
    Plein de rires, plein d’oiseaux bleus
    Soudain griffé d’un coup de feu
    Un monde neuf où sur un corps
    Qui va tomber
    Grandit une tache de sang
    Mais à tous ceux qui sont restés
    Les pieds au chaud sous leur bureau
    En calculant le rendement
    De la guerre qu’ils ont voulue
    A tous les gras tous les cocus
    Qui ventripotent dans la vie
    Et comptent comptent leurs écus
    A tous ceux-là je dresserai
    Le monument qui leur convient
    Avec la schlague, avec le fouet
    Avec mes pieds avec mes poings
    Avec des mots qui colleront
    Sur leurs faux-plis sur leurs bajoues
    Des larmes de honte et de boue.

     

     

     

  • Jacqueline Kelen

     

    Dans la vie de tous les jours, on reconnaît un être bon à ce qu'il aime l'incognito, à son goût de la discrétion, voire de l'effacement. Il ne déroule jamais son curriculum vitae, ses diplômes ni ses prouesses. Il a à peine de biographie et se désintéresse de l'événementiel. Mais il veille sur la neige, le vent, les taupinières, le duvet des peupliers, les étoiles, les enfants, le silence, bref sur tout ce qui est vivant.


    in Inventaire vagabond du bonheur

     

     

     

  • Fanny Sheper

     

    Ils sont les hémophiles de l’amour.

    A peine une égratignure

    Et ils se répandent sur les murs.

     

    Une coupure

    Et c’est l’hémorragie

    Et des litres et des litres

    D’émotion qui se vident au sol.

     

    in Cheval Rouge

     

     

  • Empédocle

     

    Car son corps n'est pas pourvu d'une tête humaine ; deux rameaux ne s'élancent pas de ses épaules ; il n'a pas de pieds, pas de genoux agiles, pas de parties velues ; il est seulement un esprit sacré et ineffable, dont les pensées rapides traversent le monde entier comme des éclairs. 

     

     

     

  • Bernard Werber

    Notre système de surveillance fonctionne trop bien, et la population est en mode paranoïaque constant. Le nuage électronique stresse, là où le nuage psychologique, la Noosphère* à la possibilité de nous apaiser. Et si les gens ont oublié l’importance du contact avec la Noosphère, ils n’oublient pas en revanche, de regarder chaque soir les actualités télévisées, qui n’annoncent que des catastrophes et les maintiennent dans la peur.

    (…) Quand on a l’impression d’être attaqué, nous avons un noyau dans le cerveau, l’amygdale, qui envoie un signal mettant le corps en mode combat ou fuite. C’est une sorte de mode alerte. Le cœur bat plus vite, les poils se dressent, la vigilance est accrue, de la cortisone est envoyée dans le sang pour apaiser la douleur de futures blessures potentielles. Pour que cela fonctionne, il faut que le cortex préfrontal, siège de la raison, s’éteigne, car réfléchir ralentit l’action. Une fois le danger passé, l’hippocampe envoie un produit calmant, ralentit le cœur et permet au cortex préfrontal de fonctionner à nouveau.

     

    - Donc ce mode alerte nous empêche de réfléchir ?


    - Oui. Et puisque les actualités nous envoient en permanence un signal de danger, à force, nous sommes toujours sous tension, comme si nous étions agressés. Et notre cortex préfrontal reste en veille.
     

    in Le sixième sommeil

     

    * Noosphère : l'hémisphère gauche de notre cerveau est dévolu à la logique, c'est le cerveau du chiffre. L'hémisphère droit de notre cerveau droit est dévolu à l'intuition, c'est le cerveau de la forme. Pour une même information, chaque hémisphère aura une perception différente pouvant déboucher sur des conclusions absolument contraires. Il semblerait que, la nuit seulement, l'hémisphère droit, conseiller inconscient, par l'entremise des rêves, donne son avis à l'hémisphère gauche, réalisateur conscient, à la manière d'un couple dans lequel la femme, intuitive, glisserait furtivement son opinion à son mari, matérialiste. Selon le savant russe Vladimir Vernadski (aussi inventeur du mot "biosphère") et le philosophe français Teilhard de Chardin, ce cerveau droit intuitif serait doté d'un autre don encore, celui de pouvoir se brancher sur ce qu'ils nomment la "Noosphère". La Noosphère pourrait être représentée comme un grand nuage cernant la planète tout comme l'atmosphère. Ce nuage sphérique immatériel serait composé de tous les inconscients humains émis par les cerveaux droits. L'ensemble constituerait un grand ensemble, l'Esprit humain global en quelque sorte. C'est ainsi que nous croyons imaginer ou inventer des choses alors qu'en fait, c'est tout simplement notre cerveau droit qui va les chercher dans la Noosphère. Et lorsque notre cerveau gauche écoute attentivement notre cerveau droit, l'information passe et débouche sur une idée apte à se concrétiser en actes. Selon cette hypothèse, un peintre, un musicien, un inventeur ou un romancier ne seraient donc que cela: des récepteurs radio capables d'aller avec leur cerveau droit puiser dans l'inconscient collectif puis de laisser communiquer hémisphères droit et gauche suffisamment librement pour qu'ils parviennent à mettre en œuvre ces concepts qui traînent dans la Noosphère à la disposition de tous.

     

     

  • Pablo Santis

     

    Il y a une tristesse que seuls peuvent provoquer en nous les cirques, les théâtres, les carnavals, les gens déguisés, toute tentative de représentation : comme si les artistes sous leur maquillage et leurs masques voulaient convoquer les choses mauvaises du monde pour les vaincre et les exiler, mais finissent toujours vaincus.

    in La fille du cryptographe

     

     

     

  • Salvatore Sanfilippo

     

    Il a eu un accident mortel

    Dans sa nouvelle  voiture

    Une Ferrari douze cylindres

    Quarante-huit soupapes

    Il n’aurait pas dû

    Choisir le modèle

     

    Dernier cri

     

    in L’homme qui regarde l’homme