Marina Brydnya
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Direction artistique : Ivana Caffaratti Giro
Le cerveau pieuvre étend ses tentacules, oppresse et enserre le cœur, les poumons, la nuque. Ouvrir la fenêtre, voir arriver l’air d’arbre en arbre, l’appeler pour qu’il vienne desserrer l’emprise de la tête pensante qui ressasse ses peurs, ses ombres, ses problèmes, des plaques d’acier compriment mes muscles, je suffoque mais c’est dans la tête.
in Le livre des sensations
l’incise de la langue sorcière
la voilà qui tu n’es pas gentille qui
reproche tu n’es pas aimable qui
taraude qui affable rode
allez couche-toi brutale carrément qui
ta langue pendue on croirait un étendard qui
triture quiqui toi toi moi spectatrice insolvable
baisse-la tu veux ta petite tête mais tu veux causer
et la voilà qui ouvre sa grande bouche pas jolie tu cries tu es moche
on voit tes dents elles ne sont pas white tu pleures on voit ton plombage
là
elle l’ouvre encore et
as-tu essayé la tête sous l’eau pour voir c’est radicalta langue n’est pas rose
arrêtes de hurler ainsi tu es toute déformée
tu as toujours été agressive
tu me fatigues je te le dis dans la langue des yeux puis je me couche
je suis sans mots vacante vacancetu m’as échappée je te portais en moi
on n’aime pas trop ce qui nous échappetu peux crier moi suis couchée emmitouflée dans mon corps
barricadée forclose fous le feu à la baraque si tu veux
tu verras ça avec le croque-mitaine je ne te le conseille pas
aimes-tu les cimetières ?tu as peur tu es malade elle est ma-la-de
c’est triste ça commence mal !
on va s’enliser si on va par
là on va s’enfoncer dans mon lit j’y suis souvent
il faut que cette fille baisse la tête et se couche silence ! pitié
ou alors il aurait fallu mais non il aurait mais ouiiiii
un garçon
oooooooooh cela aurait été bien plus simple si
mais nongarçon ne pleure pas
c’est antinomique
je vais te museler si tu continues
pas de chichi ils sont forts
ça m’impressionne je ne sais pas ce que ça cacheje ne sais pas ce qu’ils font de leurs déchets
comment dissocient-ils leurs émotions du reste de leur corps
s’évaporent-elles
leurs larmes où doncsi je retiens je ne sais plus trier
le mot de l’ivraie
ma langue se défait défaille me dédit
m’encombre s’affole se fige
s’onomatopéïse
piétine balbutie turlupine
se débraille inconvenante
on me dit méchanteje me nulle
me désolidarise de moi-même
ma peau fourvoyée se flamme
faut me cacherme sortent tatouées les émotions maltraitées
je me couche pour la bienséance du monde
car
j’ai un corps qui s’exclame
on n’aime pas trop les corps par ici
d’autant moins lorsqu’ils s’expriment dans leur langue
qui comme chacun sait est une langue barbare
tu ne peux pas encore savoir
tu es petite et ignorante
tu cries dans ta langue enfante
comme qui chanteraitchanter pas bien vu non plus
dans la rue par exemple par distraction
ou par insouciance surtout pas de
ou de spontanéité
on va t’enfermer maladie contagieuseet arrête de sautiller comme ça
c’est un lit pas un terrain de jeutoi non plus tu ne sais pas retenir
maladroite tu te rues engouée
alors que tu as des pores comme tout le monde
ça devrait pouvoir s’aérer avec une certaine éléganceque ta peau est délicate je l’aime son grain gamin
l’ai tant soignée rien à faire elle se flammec’est que l’on ne choisit pas son héritage
tu me portes en toi tout comme je t’ai porté en moi
nous sommes des mot-valiseselle se croit libre la mioche
excuses-moi si je ris non je t’assure je ne fais pas exprès
suis fatiguée laisse-moi
arrête de me harceler comme ça tu ne sais rien de moi
de mon histoire que tu porterasje me couche pour l’exemple
moins j’en fais et plus je me couche dedans
mais elle tend vers dehors petite branche naine vers la lumière
la vie en moi se couche oh oui tout doux tout doux
je m’enfonce mmmhhh c’est bon
je survole je glisse mmhhh
je somnole tout se tait tout senon mais là voilà qui se lève à nouveau je rêve
assez rêvé je n’ai pas demandé à rêver
juste dormir indolore
une bouillote oh oui une bouillotte ça fait du bien mmmhhhet ça continue couche-toi tu veux
l’autre avec ses petits cris là débout increvable
branches tordues vers la lumière et moi qui voulais somnoler
mmmmhhh somnoler
alors que débout vigilante qui va là sur le qui-vive
qui veux-tu qui aille là rien qui vailledes gens des mots s’étourdissant de redites
garrotant ton esprit et ses touches funambules
ses lumières ses éclairs ses éclats ses nuances
car
ils savent vivre savent comment faire
tout carré oui parfaitement
d’un jugement assuré
savent où commence et où se termine une pensée
point barre et à la ligne
dans nos périmètres sécurisés nous sommes rectilignes
nous exécrons le mouvement le changement le tempo
et les vagues
nous convient mieux un monde statique
nous entre nous
nous ainsi satisfaits du monde ma chère mon cher
et de nous-même on n’est pas des guignols
performant tout va bien très très bien
dans des bouches rassasiées de mots bien repus
assommant de Il FAUT d’un ton dégagéje me couche ça me fauche la chique
c’est vide qu’on cause et si c’est vide pour quoi faire
faut-il qu’on remplisse
pourquoi ça parle
comme pour comme si
de rien comme s’il n’en était
rien
comme s’il n’en restait pas moins que
rien
comme si n’étions-nous
tu parles sans écho
pourquoi ça parle comme pour
comme si de rien comme s’il n’en était
rien
comme si de rien d’être
sommes-nous sans écho tu parlesoui
je redoutes à chaque fois à nouveau y couler dans cette nébuleuse
et cette parole sans suite de son tout plein asséché
et ce son creux qui retentit à l’intérieur le dévale
sans fond sans face l’informe qui guette
le sens qui fuite par tous mes pores
en vrac sur le lit en manque d’agencementfatiguée
je me couche
on m’a fait vide
je ne sais plus quoi faire de ces quatre bras pieds mains jambes
je confonds ça fait huit je ne sais pas quoi en faire
et ces mots liquéfiés en dedans
mes bras pieds mains jambes qui en épongeant s’effilochentje me noie je prends l’eau
monte elle monte
me déborde
monte elle monte
me bouche les oreillesdormir
mais on me secoue on m’habite
elle m’habite debout làun bon shoot de mélancolie et tu vas voir comme tu te calmes ma belle
là ouf enfin docile
couchée bien aimableelle voulait élargir sa pensée par les mots
excuses-moi si je ris non je t’assure je ne le fais pas exprès
ne sais-tu pas que ça fait mal
ce n’est si souple que tu le crois la matière grise
ça pousse les membranes vers l’extérieur quand ça grabuge
un mal de chien encagé n’y songes même pasooooh ! un peu de silence à présent
toi et moi
on a nos petits secrets ça donne du charme
tu me ressembles que tu es jolie
tu me donnes envie d’ouvrir grand les yeux
dans mon beau miroir speculum
là toutes les deux allongées
réfléchies aimantesaliénées paisiblement
ça rime éternellement
ah non arrête
tu ne vas pas te remettre debout encore des questions
laisse-moi me reposer sois mignonne rasante la miochemais oui j’avais oublié tu parles toi aussi
et dire que c’est moi qui t’ai appris mais tu m’as échappé
et après que je cause et que je questionne
que je m’amuse à la tournoyer la faire claquer clapoter cette langue
dans les bulles de ma bouche et virevolter virtuose carrément
que c’est amusantque tu crois
souviens-toi de la voix de grand-père :
t’es comme toutes les bonnes femmes une emmerdeusec’est moelleux ici dans mon lit n’est-ce pas
restons-en là toi et moi
bien sûr pour les garçons c’est différent
je le dis pour ton bien
c’est tout un apprentissage que de parler en femelle
en son nom dans son sang en son seing
moi tu vois couchée pas même besoin de mots mondains
et pourtant j’avais un corps je croismaintenant que la dépossession est inoculée tu vas voir
la saveur du silence mmmhhhh comme une saignée
ça soulagebéante souris oui tu es mignonne
qu’ils imaginent toi face au monde couchée
on ne s’en sortirait pas autrement comment veux-tu
qui est-ce la grande personne là c’est moi et je te dis que : !
jusqu’à qu’on ne sache plus ce qu’on ressent et ce qu’on fabule
comme ça pour faire partie non pas participer non
appartenir
ooooh appartenir
ooooh je ne suis pas ma seule partie amputée moi
moi j’appartiens et je colle
je colle je colle je colle à
une image
devant le miroir je m’y essaie
je suis conforme soulagement je jolie
selon les jours j’y arrive
je décolle mes mots de mon corps
l’un après l’autre ça fait un peu mal
et les voilà sans corps
et à la place du corps des mots des images sur mon corps creux
et un grand bruissement général continu accablant confondantdonc
la vérité mon enfant que tu cherches tant dans les mots
tu peux toujours chercher
tu le vois bien qu’ils sont vides sans corps
souvent
tout ce vide entre noustu l’entends
ce silence
qu’aucun mot
aucune image aucune chose
allez parlons d’autre chose
je t’avais bien dit de te coucher mais non debout là
avec tes petits halte-là une contradiction !! je pointe !
tu crois changer quoi le monde ?
avec ta langue qui je thaumaturge j’abracadabre
s’y croit
full d’as abattu sur table nous révèle who’s whoa-t-on droit à un joker ?
met-là au rancart ta langue tu veux
somnolons ensemble
mmmhhhh
c’est bon le goût d’un blanc ça creuse le mystèreallez viens-là te coucher près de moi et laisses-moi rire dans ma barbe
car je me laisse pousser la barbe depuis que les hommes les mots tout ça
m’a passé
me voilà sorcière couchée
https://www.terreaciel.net/Silvia-Marzocchi
à lire aussi son entretien avec Claire Regy publié à la suite
O.
homme_ persévérance_mort_lumière
La mort accrochée à ses tibias, une main au volant de sa voiture de sport, son élan vers la lumière aura raison de sa persévérance.
G.
Le dieu puissant de la possession aujourd’hui est mort dans la lumière. Les hommes ne connaissent plus la persévérance et l’amour, ils meurent tous dans l’ennui, dans la pauvreté ou dans la richesse excessive.Tout juste sorti du cercle des origines, l'homme se mesure à Dieu et brûle de la flamme divine.
J.
Homme, tu retourneras en poussière avait dit l’homme d’église. D’accord, mais avant d’y retourner, il faudrait déjà en sortir, avait-il pensé et c’est avec persévérance qu’il avait tenté de s’arracher au tourbillon premier : travail, argent, épouse, voiture, tout retomberait avec lui en poussières mais qui dont éteindrait derrière lui la lumière ?
C.
La vendeuse des quatre saisons s'est installée sous ma fenêtre. Elle attend, des légumes d'été mêlés aux crânes dans ses paniers, la fin annoncée. L'homme passe. À peine sorti du chaos qu'il supplie qu’on lui accorde la lumière, mais déjà la mort rôde. Avec persévérance, il a franchi les âges, invoqué et escroqué les dieux, espéré… Déjà l'heure n'est plus aux passions flamboyantes mais aux examens de conscience, à la sagesse acceptée : « Souviens-toi que tu es né poussière et que tu redeviendras poussière »
O.
J.
diffracté_caillou_partition_fragilité
La pensée diffractée diffuse ses rayons. Caillou planté au cœur de la partition, l'âme du peintre visité traverse les regards.
Coup de feu, rouge sang, fragilité du souvenir et de l'instant.
G.
Un caillou a traversé la fenêtre, éclater la vitre en morceaux. La lumière qui semble diffractée mêle les fragments de verre aux partitions éparses qui jonchent un tapis inondé de sang. Les programmes du prochain récital narguent l'espace de ce qui me reste de vie. Ma musique, en lambeaux, remise en question par la fragilité des choses, les pitreries du destin . Rien ne se passe comme prévu. Lâche ton revolver ! rien ne se résout dans la violence.
O.
Immobile devant la fenêtre, elle contemple le crépuscule aux ondes diffractées et tandis que dans son cœur se joue la partition de la fragilité, elle laisse remonter à sa mémoire tous les visages du passé. À la marelle du temps, elle a joué : 1 2 3 4 5 6, éviter l’enfer, tomber sur paradis, petit caillou blanc de sa vie qu’elle a lancé bien sagement. Petit caillou blanc de son cœur. Immobile, elle contemple les lambeaux de sa vie sans pleurer tandis que tombe la nuit et le doigt sur la gâchette, elle joue à la roulette russe : enfer ou paradis…
C.
Un caillou, un seul, dans le rouge sang. Est-ce un symbole ? pourquoi cette image diffractée empreinte de fragilité, surement une partition, une émotion, un instant de vie comme une onde lumineuse, dans un arbre qui ne cesse de parler.
J.
G.
cauchemar_prisonnier_consommation_conscience
Oui ! notre cinéma est toujours ouvert, notre vie stimule la pellicule. Le grand REX, opportuniste diffuse les films qui parlent à notre conscience. Apprenons le rire, le cauchemar, l’amour, la musique, la mort... et bien d’autres choses. Il ne faut pas que nous devenions prisonniers de notre consommation, les images défilent tout au long de la vie.
J.
Il disait : « la terre est bleue comme une orange », je pensais : la vie a basculé dans un cauchemar ! « Qui a volé l’orange ? » Tours de verre, lumières des galeries commerciales, fureur et agitation …nous sommes des nains de jardin, des pantins au mauvais goût institué, prisonniers de nos habitudes de consommation comme les pélicans qui ingèrent n'importe quoi. Mais pour ces derniers, quand leur proie est bien au chaud dans leur poche gulaire, ils recrachent l’eau qu’ils ont avalée en s’emparant du poisson, c’est alors seulement qu’ils l’engloutissent …Quand cracherons-nous notre conscience avant d’ingurgiter n’importe quoi ? En attendant ce jour illusoire, m’offrir une balade ; cheveux au vent, avaler un peu de CO2 dans la vieille 2 CV de papa !
O.
Sainte Trinité du Boulet de la Sainte Consommation, priez pour nous pauvres prisonniers du cauchemar matérialiste. Du grand cinéma roi de la vie, les spectateurs sont sortis tout affolés, les uns divaguent à propos d’un grand pélican de la mort qui voudrait les gober, d’autres sont restés dans la salle, ils se seraient étouffés avec des frites. Dieu est une tête de veau, hurlent les autres et tous de vomir leur tripe dans le caniveau. Sainte Trinité du Boulet de la Sainte Consommation, priez pour eux et pour l’avènement de la conscience collective, dit très calmement l’homme qui sort en dernier de la salle en jonglant avec des oranges.
C.
Innocent souvenir d'un voyage en 2CV,
Le rêve se transforme en cauchemar !
Le règne glorieux de la consommation est désormais révolu,
Carcasses et vieux déchets font bien marrer les nains !
Mais n'es-tu pas pour l'instant prisonnier de cette conscience ?
G.
C.
solitude_ouverture_caverne_quête
Tout se bouscule, tout se ferme dans l’obscurité de la caverne. Pourtant cette nuit, avec ou sans homme, la frontière n’existe pas. Regarde, malgré tout, si elle apparait l’ouverture est là ! Proche.
La quête est incessante et la solitude se vaincra.
J.
Écrire. Écrire au-delà des frontières, trouver une issue, une ouverture à ma solitude peuplée. Ouvrir une fenêtre sur le monde, assassiner le paraître et tous ces hommes qui m'assaillent. je les veux sans têtes, sans regards, et nus. Ils traverseraient ma vie comme des fantoches, me laisseraient poursuivre ma quête, seule dans ma caverne, enchaînée à mes ombres. Quand je ferme les yeux, vêtue de dentelles et de froufrous d’une autre époque, je voyage dans un monde imaginaire au milieu des cygnes et des chevaux ailés. La vie n’est acceptable qu’onirique. Un homme tente cependant le passage à travers une trouée de lumière. Arrivera-t-il à m’atteindre ?...
O.
Homme des cavernes, il est grand temps de naître !
Saute dans le vide sur le dos de Pégase
Le voyage est risqué, par-delà les frontières,
Mais l'histoire s'écrit et elle devrait te plaire...
La femme solitude parée de son sourire et ses plus beaux atours
Se déploie comme un cygne dans ta profonde nuit...
C'est peut-être l'ouverture espérée de ta quête !
G.
Crapahuter nu dans les souterrains du sens, toujours cette quête d’une improbable ouverture, solitude de qui a perdu sa quête, sa tête même en des transes archaïques pour oublier la poussière et les vieux plis du passé. Rejouer la métamorphose du cygne, croire encore au cheval ailé, à la lumière qui perce la nuit de l’homme. Écrire comme ouvrir une fenêtre qui s’ouvre sur une fenêtre qui s’ouvre sur… Retourner au fond de la caverne interroger les ombres, descendre encore jusqu’au lac profond où se dissolvent les frontières. Plonger alors jusqu’au noyau et se fondre au métal en fusion pour en tirer la joie qu’il faudra de sa main propre forger.
C.
Huile d'olive, sel..... et mes piments de différentes espèces
l’érosion déshabille
les mirages du seigle
énigme pourpre
de ce qui aveugle
hérisse heurte
et fait pleurer les abysses
sève de ciel
tremblement
dans le froissé troué
cavale fragmentée
du frêle
frissons emmurés
dans l’obscurité
in (en cours)