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CITATIONS - Page 32

  • Alexandre Marius Jacob (1879-1945)

     

    « Plus un homme travaille, moins il gagne ; moins il produit, plus il bénéficie. Le mérite n’est donc pas considéré. Les audacieux seuls s’emparent du pouvoir et s’empressent de légaliser leurs rapines. De haut en bas de l’échelle sociale tout n’est que friponnerie d’une part et idiotie de l’autre. […] Vous appelez un homme “voleur et bandit”, vous appliquez contre lui les rigueurs de la loi sans vous demandez s’il pouvait être autre chose. A-t-on jamais vu un rentier se faire cambrioleur ? J’avoue ne pas en connaître. Mais moi qui ne suis ni rentier ni propriétaire, qui ne suis qu’un homme ne possédant que ses bras et son cerveau pour assurer sa conservation, il m’a fallut tenir une autre conduite. La société ne m’accordait que trois moyens d’existence : le travail, la mendicité, le vol. le travail, loin de me répugner, me plaît, l’homme ne peut même pas se passer de travailler ; ses muscles, son cerveau possèdent une somme d’énergie à dépenser. Ce qui m’a répugné, c’est de suer sang et eau pour l’aumône d’un salaire, c’est de créer des richesses dont j’aurais été frustré. En un mot, il m’a répugné de me livrer à la prostitution du travail. La mendicité c’est l’avilissement, la négation de toute dignité. Tout homme a droit au banquet de la vie. […]  Le droit de vivre ne se mendie pas, il se prend. […] Le vol c’est la restitution, la reprise de possession. Plutôt que d’être cloîtré dans une usine, comme dans un bagne ; plutôt que mendier ce à quoi j’avais droit, j’ai préféré m’insurger, combattre pied à pied mes ennemis en faisant la guerre aux riches, en attaquant leurs biens. Certes, je conçois que vous auriez préféré que je me soumette à vos lois ; qu’ouvrier docile et avachi j’eusse créé des richesses en échange d’un salaire dérisoire et, le corps usé et le cerveau abêti, je m’en fusse crever au coin d’une rue. Alors vous ne m’appelleriez pas “bandit cynique”, mais “honnête ouvrier”. Usant de la flatterie, vous m’auriez accordé la médaille du travail. »

     

    Extrait de sa défense qu‘il a assuré lui-même lors de son procès, texte publié dans Germinal le 19 mars 1905. Il prendra 25 ans de bagne, il est le modèle de l'’Arsène Lupin de Maurice Leblanc.

     

     

     

  • Murièle Modély

     

    « Peut-être que maintenant vous êtes assez construite »

     

    je me répète en boucle la phrase du docteur

    mais sur le chemin du retour

    je trébuche sur une pierre, et

    en me relevant, je m’aperçois

    qu’il me manque une brique ou deux au niveau de l’épaule

    j’entends aussi rouler sur le trottoir un de mes boulons

    je suis assez construite, certes, mais je fais de drôles de bruits

    les murs grincent, craquent, les volets claquent

    je ne sais toujours pas si c’est le vent

    ou les esprits errants dans la maison

     

     

     

  • Frédéric Botton - Barbara

     

    Ils buvaient de l’absinthe,
    Comme on boirait de l’eau,
    L’un s’appelait Verlaine,
    L’autre, c’était Rimbaud,
    Pour faire des poèmes,
    On ne boit pas de l’eau,
    Toi, tu n’es pas Verlaine,
    Toi, tu n’est pas Rimbaud,
    Mais quand tu dis “je t’aime”,
    Oh mon dieu, que c’est beau,
    Bien plus beau qu’un poème,
    De Verlaine ou de Rimbaud

     

     

     

  • Philippe Godard

     

    D’une certaine façon, à l’échelle planétaire, tous les ressortissants des pays dits développés sont des parvenus, et cela dès la naissance : nous sommes en effet redevables aux très pauvres du Sud de toutes sortes de biens que nous leur volons, non pas nous personnellement, mais le système dans lequel nous vivons. L’organisation mondialisée de la dette du tiers-monde en est l’expression la plus évidente : nous vivons à crédit sur le dos des très pauvres, et en ce sens, par rapport à l’extrême misère que connaissent deux ou trois milliards d’humains, nous sommes bel et bien des parvenus.

     

    in L'anarchie ou le chaos

     

     

  • Pier Paul Pasolini

     
    Le refus a toujours été un geste essentiel. Les saints, les ermites, mais aussi les intellectuels. Les quelques-uns qui ont fait l'histoire sont ceux qui ont dit non, pas les courtisans et les assistants des cardinaux. Le refus de fonctionner doit être grand, pas petit, total, pas sur tel ou tel point, ′′ absurde ", pas de bon sens. .
     
     
     
     
     

  • Jérémy Rodriguez

     

    L'enfer ?

    L'enfer c'est le désert des déserts

    cinquante jours par 45 degrés dans le Majâbat al-Koubrâ

    sept chameaux squelettiques

    le huitième s'est enfui

    avec le dernier bidon d'eau

    les djinns mangent l'ombre

    on devient fou

     

    in Traction Brabant n°82

     

     

     

     

     

     

  • Elena Mikhalkova

     

    Ma grand-mère m'a un jour donné un conseil: dans les moments difficiles, fais de petits pas. Fais ce que tu as à faire, mais petit à petit. Ne pense pas à l'avenir ou à ce qui pourrait arriver demain. Lave la vaisselle. Retire la poussière. Écris une lettre. Fais une soupe. Tu vois? Tu avances pas à pas. Fais un pas et arrêtes toi. Repose-toi. Félicite-toi. Fais un autre pas. Ensuite un autre. Tu ne le remarqueras pas, mais tes pas grandiront de plus en plus. Et le moment viendra où tu pourras penser à l'avenir sans pleurer.

     

     

     

  • Stéphane Mallarmé

     

    La mort a des égards envers ceux qu’elle traque :

    Elle enivre d’azur nos yeux, en les fermant,

    Puis passe un vieux frac noir et se coiffe d’un claque

    Et vient nous escroquer nos sous, courtoisement.

     

     

     

  • Georges Saint Bonnet

     

    Notre civilisation est un cloaque.
    Et nous sommes au fond de ce cloaque comme autant de bêtes immondes en rut d’amour ou d’argent, d’orgueil, d’ambition ou de puissance, comme autant de démons imbéciles acharnés à se violer de l’âme au corps, à se dominer, à se contraindre, à se pressurer, à se dépecer dans une épouvantable sanie de pensées rongeantes, de théories truquées, de fausses sciences, de théologies sans ciel, de doctrines à double fond et de dogmes morts…
    Comment s’évader de cette prison de boue ? Comme rompre nos chaînes, culbuter nos barrières et renverser notre fatalité ?...
    A coups de compromis politiques ou de replâtrages d’idées ? A coup de codicilles d’articles subsidiaires et de clauses résolutoires ?
    Le mal est trop profond.
    Les remèdes extérieurs ont fait faillite. Ils sont comme autant d’emplâtres de papier mâchés sur des cancers à leur dernier degré. Tous les arbres de la forêt humaine sont malades et c’est la sève qu’il faut soigner.
    Mais comment ? Comment ?