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CITATIONS - Page 30

  • Pat Ryckewaert

     

    J’en appelle à ton silence
    pour retrouver ma voix
    et les cordes du ring
    me renvoient au milieu.
    Laisse le cri dans ta gorge
    l’instinct dans ta poche révolver
    il n’est plus le temps
    de la roulette russe et du froid sibérien.
    Regarde comme il fait beau ici
    sous le néon du jour
    au ciel rose de décembre
    la neige carbonique
    fait de la fourrure d’ange
    et des cendres qui craquent.
    J’ai replié mes ailes
    et la corneille est morte
    enfouie dans mon chagrin
    tu m’as fait tant de peine
    et du bien aussi, il y a longtemps.
    Regarde la fleur de ma bouche
    elle a le goût des autres
    et des baisers d’hier
    c’est un poème d’amour
    avec du souffre dedans
    et du sang sous les ongles
    d’avoir griffé la nuit, lacéré les heures
    la croute va se faire, je le sais
    pour soulager ta chair et ta mémoire.
    Regarde ce qu’il reste de nous
    dans nos gestes et nos cœurs qui hésitent
    on est à se recoudre ensemble
    dans un corset de mots.

     

    in La corneille

     

     

     

     

  • Daria Colonna

     

    Je coupe au couteau les coins de ma bouche, je suis tout sourire. Le siècle est un souper qui se trempe, s’arrose, s’asperge, se douche, s’inonde. J’apprends à respirer sous l’eau, à jurer du beau temps, je fais mon âge et je l’entends gémir, chaque mois, de corvée de culotte et de jours enclos. C’est par considération que je meurs.

     

    Je tourne autour des soleils jusqu’à ce que l’un d’eux me rajeunisse.

     

    Alors j’ai la joie et trois ans; pardonnez ma voix borgne, pardonnez l’enthousiasme, les mensonges de rien, le rire aigu, je suis un entrepôt de boue, d’agrumes et de limon où pousse un chapeau de fête.

     

    Laissez la pourriture recouvrir les murs de mes écoles.

     

    Demain j’irai mieux, je dormirai clouée à mes écrans, attachée à mes personnages de série, nous à nouveau, grouillantes de passés simples, pourries d’espérance, flanquées des versions les plus pâles du Christ. Je ressusciterai par balle, par colis, par habitude.

     

    Nous aurons toujours de quoi veiller.

     

     

  • Martin Caparrós

    La stratégie des dominants a toujours été de maintenir leurs dominés au niveau le plus bas possible. De déterminer à chaque fois ce niveau par la méthode empirique : essais et erreurs. L’erreur a pu consister en ce que des milliers de gens meurent de faim ou en ce qu’ils se dressent et exigent. (…) Alors entre en action la charité chrétienne ou sa version contemporaine, l’assistanat : donner aux pauvres le minimum pour qu’ils survivent et n’éclaboussent pas de leur sang ou de leurs os les écrans de télévision.

     

    (…) Mais nous ne sommes pas trop de manière abstraite, en général : certains sont en trop.

    (…) Si on administrait un jour aux patrons argentins — les riches et leurs représentants  — la dose adéquate de penthotal, il serait amusant de les entendre : ils pourraient parler de la manière de se débarrasser de cinq ou six millions de personnes. Ils l’envisageraient comme un véritable service à la patrie : le reste de la population vivrait plus confortablement, l’indice de criminalité chuterait, les sectes évangélistes perdraient de leur influence, il y aurait beaucoup d’espace libre pour de nouvelles cultures ou quartiers résidentiels, les transports en commun marcheraient mieux, l’État économiserait des ressources — en subsides, organismes, policiers, gardiens de prison — qu’il pourrait employer à améliorer par exemple les écoles, les universités et les hôpitaux que des usages éduqués utiliseraient avec discernement. On perdrait peut-être quelques footballeurs et quelques boxeurs, deux ou trois chanteurs ringards ; (…) et  ils auraient tous plus de difficultés à trouver des femmes de ménage mais, globalement, ils y gagneraient plus qu’ils n’y perdraient.

     

    in La faim, éd. Buchet-Chastel, octobre 2015

     

     

     

  • Rapport de l’Institution of Mechanical Engineers (Royaume-Uni), janvier 2013

    « Aujourd’hui nous produisons environ quatre milliards de tonnes de nourriture par an. Et pourtant, en raison de mauvaises pratiques de récolte, de stockage et de transport, ainsi que du gaspillage à la vente et à la consommation, on calcule qu’entre 30 et 50% de cette nourriture — 1,2 à 2 milliards de tonnes  — n’arrive jamais dans un estomac humain. Et encore, cette estimation ne reflète pas les grandes quantités de terre, d’énergie, d’engrais et d’eau qui sont également gâchées dans la production d’aliments qui finissent tout simplement à la poubelle. »

     

     

     

     

     

  • Warren Buffet, la quatrième fortune du monde

    Il y a une lutte des classes depuis vingt ans, et ma classe l’a gagnée. Nous sommes les seuls à avoir vu leur taux d’imposition baisser de manière spectaculaire. En 1992, les 400 personnes qui ont payé le plus d’impôts aux États-Unis avaient un revenu moyen de 40 millions de dollars. L’an dernier, le revenu moyen de ces 400 personnes étaient de 227 millions, soit cinq fois plus. Durant cette période, la proportion de ce qu’ils ont payé sur leurs revenus est passée de 29% à 21%. Grâce à la baisse de ces impôts, ma classe a gagné la guerre : ce fut un vrai carnage.

    2011

     

  • Martin Caparrós

    (…)

    Alors que 200 milliards de dollars atterrirent sur le marché alimentaire, 250 millions de personnes tombèrent dans l’extrême pauvreté. Entre 2005 et 2008, le prix de la nourriture augmenta de 80 % (…). Quelques gouvernements tombèrent, les prix finirent par chuter, des millions de personnes basculèrent dans l’extrême pauvreté et le monde eut plus d’affamés que jamais dans son histoire. Ils atteignirent pour la première fois le milliard de personnes.

     

    Un milliard d’affamés.

     

    (…)

    « La nourriture est le nouvel or », écrivit alors un journaliste du Washington Post, dans une formule qui fit mouche : elle signifiait surtout que ce n’était plus un bien de consommation mais un bien de thésaurisation et de spéculation, et pas n’importe lequel : le bien dont le prix avait le plus augmenté durant les dernières années.

     

    Pour beaucoup, cela signifiait qu’ils avaient cessé d’en manger.

     

    (…)

    Elles s’appellent Archer Daniel Midlands, Bunge, Cargill, Louis Dreyfus et on les appelle, cela va de soi, ABCD. Elles contrôlent à elles quatre 75 % du marché mondial  des grains : les trois quarts des grains de la planète. En 2005, leur chiffre d’affaires s’élevait à 150 milliards de dollars ; en 2011, à 320 milliards.

     

    (…)

    « Aujourd’hui, le ravitaillement alimentaire mondial doit non seulement se battre contre une offre moindre et une demande accrue de grains réels, mais les financiers ont en outre créé un système qui augmente artificiellement le cours futur des grains. Résultat : le blé imaginaire détermine le prix des céréales réelles, puisque les spéculateurs — autrefois un cinquième du marché — sont aujourd’hui quatre fois plus nombreux que les acheteurs et les vendeurs réels. Aujourd’hui les banquiers et les spéculateurs sont assis au sommet d’une chaîne alimentaire : ce sont les carnivores du système, ils mangent tout ce qu’il y a en dessous » (…).


    in La faim, éd. Buchet-Chastel, octobre 2015

     

     

     

  • Alejandro Jodorowsky

    Nous ne sommes pas des anarchistes qui nous rebellons contre Dieu, la Science ou l’État. Pas du tout. Un combat pareil n’apporte au pauvre que des coups de bâton et une pluie de balles… L’État, et à travers lui, le capital, peut prendre toutes les formes, il a gagné la bataille pour deux ou trois siècles. Rien ne viendra changer le cours de l’Ère industrielle. Les vers ont commencé à dévorer le fromage et nul ne peut les arrêter. La production ne cessera pas avant la dégradation complète de la planète. Peu y survivront. Dans un futur proche les pauvres auront peut-être de meilleurs costumes, ils seront mieux logés et nourris, mais ils continueront à être pauvres ; c'est-à-dire qu’ils seront de plus en plus endettés vis-à-vis du pouvoir, et que s’ils n’y laissent plus leur sang et leurs poumons, ils devront payer avec quelque chose d’aussi précieux que leur rire, et leur intelligence aussi. Le pauvre deviendra un imbécile casé et grave. La conclusion évidente ? L’essentiel est de survivre ! Que l’effondrement de la société ne nous détruise pas…

     

    (…) Mais venons-en au fait : le pouvoir n’est pas créatif et les riches s’ennuient. Ils possèdent tout sauf eux-mêmes. C’est logique. Pour se trouver soi-même, il faut tout lâcher et eux, au contraire, s’approprient tout. Vous me suivez ?

     

    in L’arbre du Dieu pendu

     

     

     

     

  • Michel Baglin

    Cette vie l’éclairer
    à la danse des flammes
    sur une hanche nue,
    aux feux de camps des femmes,
    à l’étoile allumée
    sur un visage ému.
    L’éclairer d’allégeances
    faites à la lumière,
    à la terre, à la pluie, 
    au navire en partance,
    à la fontaine claire
    comme à l’alcool des nuits.

    in De chair et de mots

     

     

  • Jacques Lacarrière

    Toi qui es eau et qui es terre

    Qui es lumière et boue mêlées

    Toi qui es source et qui es cendre

    Qui es berceau, tombeau mêlés

    Toi la salubre et la salie

    Toi la sainte et toi la souillée

    Toi la très sage et l’insensée

    Qui est début, qui est déchet

     

    in Marie d’Égypte

     

     

  • Anais Nin

     

    Équilibre ? Un rêve impossible pour moi, padre amor. Parce que je suis née sous le signe de Sainte-Thérèse et des grandes courtisanes perverses.

    Mysticisme de la terre ou du ciel, mais des extrêmes.