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CATHY GARCIA-CANALES - Page 1327

  • A propos des auteurs qui se font arnaquer

     

    Suite à un message coup de gueule balancé à bon nombre de personnes, dont moi, par une poétesse qui a des soucis avec des éditeurs numériques (entre autre), et à qui j'ai répondu en privé, et suite à une réponse qu'elle a eu d'une personne bien intentionnée mais qui dans sa réponse a écrit ça :

     

    "Alors, pourquoi avoir besoin d’un éditeur malhonnête et imbécile qui vous regarde de haut et ne voit que le plaisir de vous voler ?

     

    Par le réseau VIADEO (professionnel) j’ai l’adresse d’une pro qui prend 500 euros pour faire démarches ISBN, mettre les livres sur les sites de vente, dépôt légal, >>>les bases. si besoin, je vous donne ses coordonnées. Je ne l’ai pas utilisée mais cela me fait bonne impression."

    Je n'ai pas pu m'empêcher de réagir, et je rends cette réaction publique ici, en me disant que ça pourrait servir...

     

    500 euros pour faire démarches ISBN, mettre les livres sur les sites de vente et faire le dépôt légal !!!! Alors là je vous le fais quand vous voulez, à votre disposition, messieurs, mesdames !

    Autoédition = on se démerde tout seul ! S'il faut payer 500 euros pour ces bricoles... c'est exactement pareil que de se faire enfler par éditeur ou autre ! Mais j'ai donc un savoir qui vaut 500 euros et il est à disposition ;-)

    Je pense aussi, même si c'est vrai que "le monde est pourri", que les auteurs devraient faire attention à leur envie démesurée d'être publiés, ça en fait des pigeons de choix et depuis longtemps, "vous écrivez ? nous bla bla bla bla". Je me suis faite avoir comme ça à 18 ans, une fortune pour moi à l'époque, j'ai attendu ensuite d'en avoir 31 pour dire oui à un éditeur, mais pas sans le connaître, le pratiquer, savoir quel genre de personne il était (une perle !) Même si ce premier contrat n'était pas un contrat éditeur, c'était juste et honnête, je payais le papier, il faisait TOUT le reste du boulot.

    Mais lui ce fut l'exception, ensuite éditeur = contrat d'éditeur ou rien.

    Le numérique ? Faites-vous des blogs alors et/ou des flip-books, gardez la maitrise autant que possible, toot en gardant à l'esprit que TOUT ce que vous mettez sur le net peut vous échapper.

     
    Et pour le reste l’autoédition ce n'est pas honteux loin de là. D'abord c'est tout bénef (mais là je parle du fait intégralement maison, pas l'autoédition qui passe par un imprimeur, parce que là aussi, bonjour la saignée - sauf encore une fois si vous avez un ami imprimeur), mais donc l'autoédition, aujourd'hui, dans ce monde détraqué, c'est la même chose que le paysan bio qui vend sa production à la ferme ou sur les marchés, c'est du lien direct : producteur-consommateur.

    Moralité : reprendre les clés de notre travail et soutenir les éditeurs de confiance, et il y en a, on les reconnait vite, les passionnés désintéressés du gain, ce qui n'empêche qu'il faut qu'ils s'en sortent aussi, ça veut dire entraide. L'auteur roi, ça va un temps aussi, je dis ça en tant que revuiste qui en a pratiqué quelques-uns...

     

    Il y a des con(ne)s partout.

      

    Mais, en fait, nous devrions appliquer certaines règles à tous les domaines de notre vie, achetons aussi tout le reste de ce que nous consommons, autant que possible à des filières courtes, respectueuses des autres et de l'environnement, que chacun(e) puisse vivre du fruit réel de son travail réel.

    C'est bientôt noël, pour les cadeaux pensez aux artistes, aux poètes, aux artisans d'art, aux petits producteurs, etc. etc..... et de préférence à ceux qui sont les plus proches de vous.

     

     

    Si chacun(e) fait ça, on verra vite la différence

     

     

     

    Cathy Garcia

  • Brûler de l’intérieur, Ahmed Kalouaz, photographies d'Alain Cornu

    Note parue sur : http://www.lacauselitteraire.fr/bruler-de-l-interieur-ahm...

     
    Littérature jeunesse/ado
     
    Brûler de l'intérieur, Ahmed Kalouaz
     
    "photo roman" Thierry magnier, octobre 2012, 88 p. 9,50 €

     

    Un concept original que ces photos romans, qui n’ont rien à voir avec les romans-photos. Ici photos et roman sont présentés séparément, d’abord les photos, dès la première page, on entre dans l’image, une photo par page. Ici des vues horizontales de bord de mer, plages du Nord en morte saison, des maisons, des rues, vides pour la plupart, une chaise de maître-nageur où s’accrochent des algues, une caravane à gaufres fermées… Des photographies très esthétiques d’où l’humain semble quasi absent et qui ouvrent la porte à l’imagination. Puis démarre l’histoire qui, en contraste peut-être, met l’accent surtout sur l’humanité, ce qu’elle a de plus beau en elle : l’altérité. Le concept de ces photos romans veut que l’auteur écrive une histoire à partir d’une série de photos dont il ignore tout. Pour le lecteur qui a d’abord, lui aussi, regardé ces photos, au fur et à mesure de sa lecture, surviennent tout d’un coup des impressions de déjà vu, des images se superposent, se mélangent à ses propres images, les souvenirs des protagonistes sont aussi les siens : il a vu. Cela donne une texture toute particulière à l’histoire.

    Ici c’est celle d’un moment de vie d’une famille qui vit en Provence. Sophie, la narratrice, adolescente et fille unique, s’interroge sur cette étrange maladie qui menace son père, le burn out, un incendie qui couve déjà depuis un moment et menace de tout emporter.

    « Le travail de papa débordait sur la vie à la maison (…).

    Moi j’aimais bien l’idée d’un père héros défendant les pauvres du monde entier, mais j’avais aussi envie d’un dimanche calme avec lui, dans les Alpes ou en Auvergne, pour admirer au-dessus d’un étang le vol des bernaches, des colverts. (…) Lorsque miraculeusement, il rentrait un peu plus tôt, c’était chargé de dossiers, et quand maman le lui reprochait, il répondait :

    – C’est pas juste des feuilles et du papier qu’il y a là-dedans, mais des hommes et des femmes ».

    Son père mène un combat, depuis longtemps, contre l’injustice, il se démène pour aider les exclus, les réfugiés, les sans-papiers, les blessés de la société, il est tellement pris par ce combat qu’il ne parvient plus à prendre du temps avec sa propre famille, pour partager avec eux aussi un peu de cet amour de l’autre qui le consume. La mère de la narratrice est originaire du Nord, de la Côte d’Opale et elle aimerait bien y retourner un peu, y emmener la famille en vacances, et que ce père, au bord de l’explosion, accepte de souffler un peu, faire une pause.

    « Il se prenait pour un dur à cuire, alors qu’elle ne rêvait que de l’entraîner de temps en temps, même en morte-saison sous les nuages bas que le vent charriait, vers l’écume venant maquiller les galets, le sable gris. (…) Et moi je m’imaginais, dans le chenal, (…) marchant sur la dune en leur tenant la main jusqu’à la fameuse cabane à gaufres ».

    Sophie a des souvenirs de ces lieux, ces plages du Nord, la maison de la grand-mère, elle aimerait y retourner elle aussi, mais quand son père dit qu’ils iront, elle ne le croit pas, elle ne le croit plus. Aussi, un jour, elle enfourche sa bicyclette avec en tête l’idée de « partir à l’aventure, fuir contre mon gré cette maison où le feu couvait dans la tête de papa ».

    C’est ainsi que Sophie va faire deux très belles rencontres. Il y a d’abord Marcelle, une vieille dame originaire du Nord elle aussi, qui a passé une bonne partie de sa vie à Lyon, à photographier les gens de la banlieue, des gens comme celles et ceux pour lesquel(le)s son père se bat aujourd’hui. Tous les murs de sa maison, où elle invite Sophie à manger, sont pleins de ces photos plus admirables les unes que les autres et une amitié instantanée va naître entre ces deux femmes, l’une à peine à l’aube de sa vie et l’autre qui arrive au bout de la sienne, bien remplie et porteuse d’un trésor de cinq mille photos. Sophie voit son père différemment au travers des yeux de Marcelle. Et puis elle rencontre aussi sur le chemin du retour, Justine, qu’un chagrin d’amour a lancée sur les routes et qui a transformé sa douleur en force pour faire le tour de France à pied avec un cheval et un âne. Ces deux rencontres vont insuffler une énergie nouvelle à Sophie, lui élargir ses horizons, et pendant qu’elle apprend ainsi à prendre un peu de recul, à découvrir que la vie recèle bien des surprises, bien des trésors, son père, grâce à un acupuncteur et l’aide de sa femme, retrouve un peu d’énergie pour prendre lui aussi un peu de recul. C’est ainsi qu’un peu plus tard, il fera la surprise d’emmener toute la famille dans le Nord, voir si la cabane à gaufres est toujours sur la plage.

    C’est donc une belle histoire très émouvante, parcourue d’un grand souffle d’humanité, que les photos d’Alain Cornu ont inspirée à Ahmed Kalouaz, qui rend hommage également dans ce texte à une autre photographe, Marcelle Vallet, décédée en février 2000 à l’âge de 93 ans.

    Marcelle Vallet est une des rares femmes photographes et reporters à Lyon dans les années cinquante. Témoignage d’une vie et d’une époque, ses photographies prises jusque dans les années 70 font partie des collections de la Bibliothèque Municipale de Lyon : un ensemble de quelques 5000 pièces, dont plus de 1700 clichés négatifs, que Marcelle Vallet a donnés à la Ville de Lyon en juin 1994.

     

    Cathy Garcia

     

    AVT_Ahmed-Kalouaz_7873.jpgAhmed Kalouaz est un écrivain français né en 1952 à Arzew, en Algérie. Il a publié plus d’une trentaine d’ouvrages (poésie, nouvelles, roman, théâtre, textes pour la jeunesse). Ses romans adultes et jeunesse sont maintenant publiés au Rouergue : Paroles buissonnières, Le Bruit des Autres, 2012 ; Les chiens de la presqu’île, Le Rouergue, 2012 ; Je préfère qu’ils me croient mort, Le Rouergue, 2011.

    Alain Cornu, photographe, est né en 1966 à Decize (Nièvre). Il vit à Paris. Formé à l’école de l’image aux Gobelins à Paris.

  • Livre d'artiste n°2 : Au Fond du Tiroir

    Poèmes et collages

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     LivrArt n° 2

     

     

    Achevé à St Cirq-Lapopie,

    le 27 novembre 2012

     

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     « Une poupée d'osier et quelques fleurs séchées

    Un coffret poussiéreux, des souvenirs qui traînent

    Un parfum de rose depuis longtemps fané.

    Quelques fioles teintées, un livre refermé

    Des crayons de couleurs, des pages inachevées

    Un silence ponctué de chutes et d'automne

    Le manège éraillé d'un tourne-disque aphone. »

     

     

     

    Format 13x19

     

    45 pages

     

     

    Réalisé partir d’un album photo récupéré et détourné

    Une œuvre originale par page (collage, encre, pastels)

    Ouvrage unique, certifié authentique et signé par l’auteur.

     

     

    Contient un véritable trèfle à quatre feuilles

     

     

    VENDU

     

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  • Nous les femmes

    Aujourd'hui c'est ma fête et c'est aussi la journée pour attirer l'attention sur les violences faites aux femmes pour que plus jamais jamais jamais ça... Stop !

     

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    Nous les femmes, Cathy Garcia -2011

  • Ailleurs simple, éditions Nouveaux Délits, décembre 2012

     


    A tous les voyageurs mobiles ou immobiles


                                   
    Poèmes de Cathy Garcia

    Illustrations de Jean-Louis Millet
     
     
     

     

      
     
    ABSENCE


    Chemin cagneux
    Soleil de chevrotine
    Vent cailloux
    Poussière

    Une maison blanche
    Un chien
    Endormi

    Sous le ciel cru
    L'ombre d'un serpent
    L'arbre tordu

    Au vent claque
    Une boîte
    Aux lettres

    Et sur la table branlante
    De l’unique pièce
    Juste un courrier
    De sable
     

     
                          

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    Composé et imprimé sur beau papier recyclé

    par


     Éditions Nouveaux Délits
    Létou 46330 St Cirq-Lapopie

     
     
     
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    Tirage limité et numéroté

    40 pages


     13 €

    Port offert pour toute souscription avant le 1er décembre 2012
    Chèque à l'ordre de l'Association Nouveaux Délits





    Il n'y a pas d'ailleurs
    Où guérir d'ici.

    Eugène Guillevic


  • Quelques photos de l'Exposition Indignation "Hommage à Liborio Noval - Limoges

    A la Grange aux Calèches, du 16 au 23 octobre 2012

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    Pouch

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    Marylène Philippe, chiffonière et Lionel Lefèvre, plasticien

     

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    Marylène Philippe, chiffonière et Lionel Lefèvre, plasticien

     

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    Lionel Lefèvre

     

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    André Bielen - Lou Florian

     

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    André Bielen - Lionel Lefèvre

     

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    Patrick Vogel

     

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    Yves Bordes

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    Cathy Garcia

     

     

    Photos(c)Cathy Garcia

     

  • Je serai de nouveau au Supermarché de l'Art de Rignac

    Le supermarché de l'art à l'espace culturel de Rignac fête ses 10 ans!

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    Vendredi 23, samedi 24 et dimanche 25 novembre 2012

    Il vous propose d'acheter, comme dans un supermarché, des oeuvres d'art à des prix abordables parmi un choix d'une centaine d'artistes. Ouverture des portes le vendredi de 18h à 21h, samedi non stop de 10h à 19h et dimanche de 10h à 12h30 et de 14h à 19h.

     

     J'y présenterai 15 gribouglyphes.

     

     

     

     

    Office de Tourisme du Pays Rignacois

     

    Place du Portail-Haut 12390 RIGNAC

  • Hommage à Liborio Noval. Exposition Indignation à Limoges

    Hommage à Liborio Noval, réalisé le 16 octobre 2012 à Limoges, lors du vernissage de l'exposition "Indignation" à la galerie d'art: "La Grange à Calèche". Une collaboration fructueuse entre l'association "Bigousse" Art et Citoyenneté, et Art@Live International. Liborio Noval était l'un des talentueux photographes de Che Guevara...

     

  • L’autre vie de Valérie Straub, de Stéphane Padovani

     Note parue sur : http://www.lacauselitteraire.fr/l-autre-vie-de-valerie-straub-stephane-padovani.html

     

    L'autre vie de Valérie Straub, Stéphane Padovani

    2012, 60 p. 5 €

    Quidam Editeur

     

     

    Valérie Straub « n’aspire plus qu’à la tranquillité des pierres ». Elle a passé plusieurs dizaines d’années en prison pour des idées mises en application de la manière la plus violente. Elle a tué pour ces idées-là, pour un idéal de justice, pour un monde meilleur, elle était jeune, rebelle, déterminée. « Ce combat, il t’a fallu quand même le mener jusqu’au bout, jusqu’à la mélancolie, jusqu’à une certaine forme de folie, au fond d’une prison ». Et quand elle en sort, c’est pour entrer dans un monde qu’elle ne reconnaît plus.

    « Les gens t’ont oubliée. Ne reste vaguement que le bruit superficiel de tes éclats, d’armes ou de voix, dans un espace social replié comme un linge dans une armoire de réfectoire ».

    Une ancienne compagne de cellule, Isa, va l’accueillir et l’aider à faire ses premiers pas, et la femme de son petit frère qu’elle avait à peine connu et qui est décédé, vient lui confier un journal qu’il n’a écrit, tout au long de ses années, que pour elle. Un journal plein d’amour mais aussi de questionnements, face au vide, que cette sœur inaccessible et constamment en révolte avait laissé suite à son arrestation. Valérie ne sait pas trop ce qu’être libre pourra bien vouloir signifier dans une société qui a poursuivi son cours vers quelque chose qu’elle et ses compagnons d’armes avaient combattu de toute leur âme.

    « Pourquoi t’es-tu battue ? Le monde que tu souhaitais n’est pas advenu, n’aura jamais été que dans les interstices d’espoir, des alliances clandestines traquées par la violence d’État. C’était un monde déjà perdu au moment même où tu l’entrevoyais ».

    Mais elle aspire cependant à la paix, à un peu de bonheur si jamais cela était encore possible, le chat écorché accepterait bien quelques caresses. Elle a beaucoup lu, étudié, médité lors de ses années d’incarcération. Elle a tué et elle a payé. Mais peut-on vraiment payer sa dette de mort ? Le cercle de la violence est un cercle infernal et chaque acte n’en finit jamais de porter à conséquence. Les peuples de la vendetta connaissent bien ça. Une agression en pleine rue va le lui rappeler alors qu’elle est sur le point de commencer à travailler avec son amie Isa, dans une pépinière. Elle se sent bien là-bas, chez ces espagnols, chez Pablo, sa sœur Clara et ses trois enfants. Elle s’y sent bien au point de ne plus les quitter, et très vite entre Pablo et Valérie, quelque chose de beau et de bon commence à lui faire oublier toutes ces années passées à l’ombre.

    « Mon histoire est là à présent, sous les mains de Pablo et dans les miennes, dans les intervalles qu’il me reste à parcourir. Et je me dis que je n’aurais pas trop d’une troisième vie pour me rejoindre ».

    Mais peut-on vraiment payer sa dette de mort ? Valérie Straub aspire à la paix mais elle n’est pas le genre de femme à se dégonfler devant son destin.

    Un destin que vous découvrirez en lisant ce livre, court mais intense. Une écriture fluide et envoûtante pour un clin d’œil courageux à ces idéalistes, les gauchistes comme on dit, extrémistes certes, mais on sait bien que l’ennemi qu’ils combattent ne l’est pas moins, et qui ont choisi un jour ou l’autre la manière la plus directe, la plus brutale, et la plus vaine aussi, pour tenter de changer le monde.

    Vraiment un très beau texte, fort et poignant, que l’on pourrait peut-être résumer ainsi : courage, dignité et désespoir.

    Soulignons au passage aussi l’éditeur, Quidam, qui encore une fois, publie un texte de grande qualité, dans un ouvrage bien réalisé, pour un prix dérisoire.

     

    Cathy Garcia

     

     

     

    stéphane padovani_.jpgStéphane Padovani est né en 1966 à Courbevoie et a vécu en région parisienne jusqu’en 1999, dans différentes banlieues, où il a commencé à enseigner. 1995 : premières publications en revues. Il a obtenu la bourse « découverte » du CNL et animé quelque temps un atelier d’écriture en maison d’arrêt. Il vit et enseigne désormais en Bretagne. Il est aussi l’auteur de L’Homme de bois (2002) et Chiens de guerre (2004), tous deux chez Bérénice. Aux éditions Quidam, il a publié en 2007 La Veilleuse, où il poursuit, sur un fil toujours tendu, des itinéraires intimes pris dans la marche du monde.

  • Je sauve le monde quand je m’ennuie de Guillaume Guéraud

    Note parue sur : http://www.lacauselitteraire.fr/je-sauve-le-monde-quand-je-m-ennuie-guillaume-gueraud.html

    Je sauve le monde quand je m'ennuie, Guillaume Guéraud

    illustrations nb de Martin Roméro, collection zig zag, Ed. Le Rouergue, octobre 2012, 96 p. 7 €

     

    Voilà un petit livre bien drôle et plein d’énergie qui prend le parti des rêveurs, des têtes en l’air, des touchent pas terre. Le pouvoir de l’imagination versus les tables de multiplication. Eugène, alias le Capitaine Sans-Gêne, s’est donné pour mission de sauver le monde des méchants, et de protéger tout particulièrement Lisa.

    « Lisa est la plus jolie fille de toute l’école. Elle est forte en tout. Et tout le monde est amoureux d’elle. Même moi ».

    Hélas, même Kévin, qui est « le gros costaud de la classe. Tout le monde veut être son ami. Sauf moi ».

    Et en réalité, ou plutôt de l’autre côté de la réalité, en vérité, Kévin a été mis à terre et massacré bien plus d’une fois, par le capitaine Sans-Gêne, alias le cavalier le plus intrépide, le chevalier plus fort que les Jedi, le meilleur joueur de foot de la galaxie…

    Et pas un méchant ne lui résiste, lui qui a pour matelot pas moins que Jack Sparrow en personne, qui lui doit d’ailleurs la vie. Pas un méchant non, qui ne soit réduit en bouillie, étranglé, défenestré, coupé en tranches etc. Nul ne résiste à l’incroyable et invincible Capitaine Sans-Gêne, ni le professeur Charbonax, ni « Le Caméléon Foutraque. Le Noctambule aux Yeux Jaunes. Le Réfrigérateur de la Mort. Le Millionnaire Suceur de Sang. Le Kamikaze en Fauteuil Roulant. Le Cuisinier Cannibale des Caniveaux. La Poubelle Atomique. Le Curé au Crucifix Coupant. Le Scorpion Nucléaire des Neiges ». Même Harry Potter, « ce pleurnichard de la baguette. Ce sorcier de mes fesses (…) Je lui fauche sa baguette à la noix, je lui crame les poils de son balai. Et il suffit que je lui fasse une grimace, pour qu’il se mette à sangloter ». Faut dire que Lisa elle est un peu amoureuse de cet Harry Potter et ça… Ce n’est pas possible ! Parce que Lisa, en vérité, enfin de l’autre côté de la vérité, en réalité, elle est folle amoureuse du Capitaine Sans-Gêne, qui l’a sauvée des androïdes de l’espace, arrachée à la forteresse des pandas géants au Japon. Lisa, elle danse sur les plages des Caraïbes avec un collier à fleurs, et avec elle il fait le tour du monde !

    Seulement voilà, à force de courir les mers et foncer au travers des étoiles, Eugène a peu de temps, et il faut le dire peu de goût, pour des choses aussi insipides que rester sur terre et tout particulièrement en classe… Et Madame Charbonneau, la maîtresse, est du genre rabat-imaginaire, si bien que les parents d’Eugène doivent prendre les choses en main, direction le spécialiste. Eugène a déjà vu un saxophoniste, comprenez un orthophoniste, un air opiniâtre (un neuropédiatre) et voilà qu’il doit maintenant voir un messie contorsionniste (un pédopsy comportementaliste) : le docteur Le Singe (Lessage). Et la sentence tombe :

    « Eugène a juste besoin de s’évader… diagnostique Le Singe.

    (…) “Juste besoin de s’évader” ? Mais on en a tous besoin !

    (…) – Oui, mais votre fils est capable de le faire ».

    Capable !

    « Il a dit ça comme si c’était un pouvoir que j’étais le seul à posséder. (…) Et comme si tout le monde devait m’envier.

    Ce gars-là me plaît bien. Il faudra que je le mette dans une de mes histoires ».

    Et c’est ainsi que de retour en classe, alors que Lisa danse sur des pétales de fleurs, que Kévin et Harry Potter briquent le pont, Le Triton, le fameux vaisseau du capitaine Sans-Gêne, va pouvoir mettre le cap sur les îles Galápagos et leurs trésors flamboyants !

     

    Cathy Garcia

     

    Guillaume-Gueraud_author_full.jpgGuillaume Guéraud, né en 1972 à Bordeaux, est un écrivain français. Il a d’abord suivi des études de journalisme et a travaillé dans divers quotidiens régionaux. Il vit actuellement à Marseille. Il est notamment l’auteur du roman policier Affreux, sales et gentils qui a remporté le prix Fnac des jeunes lecteurs en 2006. Il réalise aussi de petites leçons d’écriture « impertinentes » qu’il appelle des autofilms, réalisés avec son téléphone portable. Il les publie sur le site de partage de vidéo YouTube.

     

    Bibliographie :

    Cité Nique-le-ciel, roman, Éditions du Rouergue, Coll. doAdo, 1998

    Chassé-croisé, roman, Éditions du Rouergue, Coll. doAdo, 1999

    Les Chiens écrasés, roman, Éditions du Rouergue, Coll. doAdo, 1999

    Coup de sabre, roman, Éditions du Rouergue, Coll. doAdo, 2000

    La plus belle fille de la planète, roman, Milan Jeunesse, coll. Milan poche cadet, 2001

    Dernier western, roman, Éditions du Rouergue, Coll. La brune, 2001

    Apache, roman, Éditions du Rouergue, Coll. doAdo, 2002

    La belle est la bête, album, Ill. Claire Franek, Éditions Thierry Magnier, Coll. Petite Poche, 2002

    Arrête ton cinéma, roman, Éditions du Rouergue, Coll. Zigzag, 2003

    Ça va déménager, roman, Éditions Thierry Magnier, Coll. Petite Poche, 2003

    Couscous clan, roman, Éditions du Rouergue, Coll. doAdo, 2004

    Ma rue, album, Ill. Anne von Karstedt, Éditions du Rouergue, Coll. doAdo. Image, 2004

    Arc-en-fiel, roman, Ill. Goele Dewanckel, Éditions du Rouergue, Coll. Varia, 2004

    Manga, roman, Éditions du Rouergue, Coll. doAdo Noir, 2005

    La plus belle fille de mes rêves, roman, Milan Jeunesse, coll. Milan poche cadet, 2005

    Affreux, sales et gentils, roman, Éditions Pleinelune, 2006

    Je mourrai pas gibier, roman, Éditions du Rouergue, Coll. doAdo Noir, 2006

    Va savoir comment ?, album, Éditions Sarbacane, 2006

    La plus belle fille de tous les temps, roman, Milan Jeunesse, coll. Milan poche cadet, 2007

    Ça va mal finir, roman, Éditions Thierry Magnier, Coll. Petite Poche, 2007

    La Brigade de l’œil, roman, Éditions du Rouergue, Coll. doAdo Noir, 2007

    Raspoutine, album, Ill. Marc Daniau, Éditions du Rouergue, Coll. Varia, 2008

    Le Contour de toutes les peurs, roman, Éditions du Rouergue, Coll. doAdo Noir, 2008

    La Grande Bagarre, roman, Milan Jeunesse, coll. Milan poche cadet, 2008

    Oméga et l’ourse, album, Ill. Béatrice Alemagna, Éditions du Panama, 2008

    Déroute Sauvage, roman Éditions du Rouergue coll. DoAdo Noir 2009

    Anka, roman Éditions du Rouergue coll. DoAdo Noir 2012

     

  • Le Meilleur des Jours, Yassaman Montazami

    Note parue sur : http://www.lacauselitteraire.fr/le-meilleur-des-jours-yassaman-montazami.html

    Le meilleur des jours, Yassaman Montazami

     144 p. 15 € Edition: Sabine Wespieser août 2012

     

    Ce livre, le premier de Yassaman Montazami, est un émouvant hommage au père, une manière de conjurer la perte et de faire vivre encore cette forte figure familiale au travers de l’écriture. Un père original, épris de justice, généreux et impertinent, doté d’un grand talent pour les pitreries, qui fut surnommé à sa naissance, en 1940, plusieurs semaines avant terme, Behrouz – en persan « le meilleur des jours ». Un enfant miraculé, premier né d’une famille aisée de Téhéran, et qui survécut grâce aux soins d’une mère, qui n’eut de cesse ensuite toute sa vie de veiller obsessionnellement à ce qu’il ne manque de rien. Behrouz est mort d’un cancer à Paris en 2006, et sa fille a alors pris le crayon pour l’immortaliser et nous plonger ainsi dans l’histoire de sa famille, avec un pied en France, l’autre en Iran.

    Son père est envoyé faire des études à Paris vers la fin des années 60, il a d’ailleurs été éduqué en français, comme bon nombre d’enfants de la bourgeoisie téhéranaise de l’époque. Il se trouve alors « pris dans une ivresse sans limite devant la vastitude des connaissances qu’il pouvait acquérir à Paris » et comme ses parents lui assurent leur soutien pécuniaire, après avoir épousé Zahra, dans un élan romantique lors d’un retour à Téhéran, il restera un éternel étudiant.

    Il vit à Paris avec Zahra quelques années, puis lorsque celle-ci tombe enceinte, il la renvoie en Iran et part à Londres pour se lancer dans un projet de thèse faramineuse : « La détermination de l’histoire par la superstructure dans l’œuvre de Karl Marx », dont il rédigera des milliers de pages, mais qui ne seront que le dixième du travail titanesque qu’il s’était donné et dont il n’arrivera jamais à bout.

    Yassaman Montazami vient au monde en 1971, à Téhéran. Sa mère et elle rejoignent Behrouz en France en 1974. C’est de là-bas que Behrouz participe à sa manière aux évènements révolutionnaires de 1979.

     

    « Mon père pour qui la laïcité était une des conditions indispensables à l’avènement de la démocratie, avait du reste toujours marqué une forte défiance à l’idée que des religieux s’emparent du pouvoir ».

     

    Leur appartement parisien devient alors un refuge pour des Iraniens en exil, venant des milieux les plus divers, tous fuyant la tenaille de la République Islamique et laissant derrière eux leur rêve d’un Iran enfin libre et juste : poètes, révolutionnaires, en jeans à pattes d’éléphant, gilets en peau de mouton, sandales ou sabots de cuir, « on trouvait là des communistes prosoviétiques, des léninistes, des trotskistes, des maoïstes, des bordiguistes, des albanistes » et même une femme de la haute bourgeoisie monarchiste, épouse en fuite d’un colonel emprisonné.

     

    « A force d’entendre toutes ces histoires, il m’était apparu qu’un vrai iranien était nécessairement un fugitif. (…) Cela ne me dispensait pas pour autant de tenir mon père pour un authentique héros. Ses publications et ses prises de positions politiques lui interdisaient en effet de remettre les pieds en Iran, où elles l’auraient tout droit conduit en prison. La prescience que tout le monde lui reconnaissait au sein de la diaspora iranienne m’emplissait également de fierté : après être retourné à Téhéran dans l’euphorie qui avait suivi la fuite du shah, en février 1979, il avait été l’un des premiers à reprendre l’avion pour l’Europe, dès l’été, pressentant l’hécatombe qui allait décimer les militants gauchistes malgré leur soutien aux islamistes, auxquels les unissait une même détestation de l’impérialisme et de la bourgeoisie ».

     

    Yassaman Montazami nous offre avec ce premier livre l’opportunité de retraverser tout un pan de l’histoire iranienne à travers quelques destins qui y sont liés, et de découvrir ainsi une autre facette de l’Iran, celle notamment d’intellectuels et d’artistes militants qui espéraient là-bas comme ailleurs l’avènement d’un monde meilleur, plus libre et plus équitable. Behrouz, marxiste idéaliste, bon vivant et facétieux, n’a de cesse d’inventer des farces et faire de la vie un éternel terrain de jeu, mais il va cependant petit à petit perdre une certaine insouciance et joie de vivre. Suite à la mort de son propre père en 1988, puis au double échec de son couple et d’une thèse jamais achevée, il retourne en 1997 en Iran, alors qu’on vient d’y élire le président réformateur Mohammad Khatami. Il y retrouve un amour et y cherche ses anciens compagnons. Ceux qui ne sont pas morts ou en exil, ont été brisés par la prison, les tortures, les humiliations.

    « L’Histoire s’était refermée sur eux comme un étau ».

    Avec une écriture à la fois fluide et dense, au travers de son regard de petite fille, puis de l’adulte, sur un père adulé, Yassaman Montazami va et vient dans le temps, au gré de souvenirs tendres et cocasses, et nous offre un témoignage drôle, vivifiant et porteur d’espoir, car l’énergie qui animait Behrouz n’a pas disparu avec lui, les hommes s’en vont, les idées évoluent mais l’essentiel demeure, l’espoir d’un monde libre et meilleur.

     

    Cathy Garcia

     

    Yassaman Montazami

    Yassaman Montazami, qui vit en France depuis 1974, est née à Téhéran en 1971. Docteur en psychologie, elle a travaillé de nombreuses années auprès de réfugiés politiques et a enseigné à l’université Paris VII. Elle exerce actuellement en milieu hospitalier. Le Meilleur des jours est son premier roman.

     

  • Fée d’hiver d'André Bucher

    Note parue sur : http://www.lacauselitteraire.fr/fee-d-hiver-andre-bucher....

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    Le Mot et le Reste décembre 2011, 160 pages, 16 €

     

    Pour celles et ceux qui ne connaîtraient pas encore le talent d’André Bucher, voici une bien belle façon de le découvrir. Dans Fée d’hiver, on sent le souffle d’un Jim Harrison, dont André Bucher est grand lecteur, mais l’écriture de cet écrivain poète paysan est unique. Et justement, elle sent le vécu, le territoire arpenté, la solitude affrontée. Fée d’hiver est un roman à la fois âpre et magnifique, austère et puissamment physique, comme les lieux dans lesquels il prend place dans ce sud de la Drôme, à la limite des Hautes-Alpes. Des lieux sauvages, entourés de montagnes, désertés par les hommes partis rejoindre les villes, où la vie, croit-on, offre plus de facilités.

    Le roman démarre sur un prologue, un article paru dans le journal le Dauphiné Libéré, daté du 31 août 1948. Un fait divers « Drame de jalousie dans le sud de la Drôme », qui fait écho au titre du livre, Fée d’hiver. Cette fée d’hiver qui vient comme pour rompre une malédiction, une sorte de réparation d’accrocs dans les mailles du destin.

    La première partie du roman est un journal intime à deux voix, s’étalant entre 1965 et 1988. Une façon de présenter les lieux, le contexte, les personnages. Daniel et Richard sont deux frères, l’un géant et l’autre court sur pattes, l’un parle peu, l’autre ne parle plus du tout. Ce sont les deux enfants laissés orphelins par le drame familial évoqué dans l’article du journal. Placés en famille d’accueil par la DDASS, ils ont grandi et retournent maintenant vivre dans la ferme familiale aux Rabasses, pas très loin du village de Laborel. Une ferme délabrée, que Richard, l’aîné, va peu à peu transformer en casse. Daniel lui, muet depuis le drame, s’occupe d’un troupeau de brebis. Deux marginaux en quelque sorte, repliés sur eux-mêmes, que les gens alentour prennent pour des attardés.

    Et puis, il y a les Monnier, qui ont une scierie. Le père était l’amant de la mère de Richard et Daniel, responsable en quelque sorte de leur malheur, mais il est mort lui aussi, emporté par un cancer peu de temps après. Restent les deux fils, dont l’aîné dirige maintenant la scierie, et le cousin Louis, le nabot que les frères Monnier aimaient tant tyranniser, étant enfant. Depuis toujours enclins à la morve et à la méchanceté, la vie n’avait pas aidé à les changer ces deux-là. Heureusement il y a Alice, la jeune sœur. Alice est différente et elle n’a pas peur de passer du temps avec Daniel, pendant qu’il fait pâturer ses brebis. Elle passe le voir, cherche à communiquer avec lui. Daniel l’aime beaucoup bien qu’elle soit bien plus jeune que lui, seulement les années passent vite. Alice travaille comme secrétaire à la scierie de ses frères, elle part à midi ravitailler les bûcherons. Un jour, elle a déjà plus de trente ans, elle finit par dire oui au cousin Louis. Daniel décide qu’il ne parlera vraiment plus jamais et arrête son journal. Nous sommes en 1988.

    Le roman enchaîne alors sur l’histoire de Vladimir entre 1995 et 1998. Vladimir est serbo-croate et bûcheron. En 1995, avant le cessez-le-feu entre les Serbes et les Bosniaques, sa sœur et ses parents périssent dans la destruction de leur village. Vladimir, c’est son métier qui l’a sauvé, il était dans la montagne en train de bûcheronner quand c’est arrivé. Quand il est revenu, il n’y avait plus rien, juste larmes, cendres et décombres. Il a donc fui, son pays, ses souvenirs, sa douleur. De pays en pays, une vie rude et solitaire, d’exilé, de sans-papiers, avec pour seul bagage, seul lien avec son passé, une anthologie bilingue de poésie des Balkans. Il exerce son métier partout où il peut, et de pays en pays, finit ainsi par arriver en France. Dans le parc du Lubéron, il travaille comme surveillant d’incendies avec Alain, un étudiant qui prépare une thèse sur l’éclatement de la péninsule des Balkans, et parle donc un peu la langue de Vladimir. Ainsi, tout en guettant les feux, débroussaillant, éclaircissant les bois, il aide ce dernier à perfectionner son français. Le Lubéron hors saison touristique est totalement dépeuplé au grand étonnement de Vladimir.

    « – Et encore, tu n’as rien vu. Ici ça va, on est dans le Lubéron. Passe seulement de l’autre côté du plateau d’Albion, en redescendant jusqu’à l’extrême pointe Sud de la Drôme, à la limite des Hautes-Alpes, tu verras… c’est bien pire. Là-bas même les corbeaux sont inscrits sur les listes électorales. Par contre en tant que bûcheron, tu devrais pouvoir trouver. Plus personne ne veut faire ce boulot ».

    C’est comme ça, qu’en mars 1998, quelques mois après la fin de leur contrat, Vladimir se retrouve face à Alice devant la scierie des Monnier.

    « – Bonjour Madame. Je m’appelle Vladimir, je suis bûcheron et je cherche du travail ».

    Entre temps, Alice, avait donc vécu sa vie de femme mariée. Mariée moins par amour que par peur de rester seule, et aussi sous la pression de ses frères, histoire que la scierie reste en famille. Le petit Louis était devenu un homme, toujours aussi faible, mais plus sournois, et puis il s’était mis à boire, à boire et à frapper. Alice était loin, bien loin de ses rêves. Après huit années de mariage, la coupe était pleine, et elle avait quitté le domicile conjugal, pour aller vivre dans un gîte d’une amie d’enfance, pas très loin des frères Lacour, Richard et Daniel. Ça faisait longtemps qu’elle ne les voyait plus, elle s’en voulait. Les choses allaient changer.

    Vladimir donc, est embauché par la scierie. Non déclaré, il loge dans une caravane vétuste sans aucune commodité, mais il a l’habitude, et se contente de ce qu’il a, jusqu’au jour où les frères Lacour viennent lui témoigner quelques signes d’amitié et finissent par lui proposer d’aménager sur leurs terres, dans une cabane à remettre en état, au fond du Val Triste, à quelques kilomètres de leur ferme.

    « Une tanière toute en rondins de pins mal équarris, adossée à la forêt et donnant sur une clairière avec une vaste prairie où serpentait un ruisseau qui prenait sa source en haut du vallon. L’eau y était fraîche même en été et elle avait un léger goût de rouille ».

    Vladimir ne se doute pas qu’il va préparer là un nid d’amour pour une fée d’hiver.

    André Bucher a l’art de décrire la nature, les sentiments qu’elle provoque et ses propres sentiments à elle, en tant qu’entité vivante à part entière, d’une façon totalement originale, des images non attendues qui donnent beaucoup de fraîcheur à son écriture, outre que l’histoire elle-même est captivante, toute pleine de rebondissements, de profondeur, d’humanité, et de rage aussi. Vraiment, ce roman est un torrent de montagne à glisser à votre chevet, il serait dommage de s’en priver.

     

    Cathy Garcia

     

     

    André Bucher, col de Perty, janvier 2012 © B. P.André Bucher, col de Perty, janvier 2012 © B. P..png

     

    André Bucher, écrivain, paysan, bûcheron, André Bucher est né en 1946 à Mulhouse, Haut-Rhin. Après avoir exercé mille métiers (docker, berger, ouvrier agricole…), il s’installe à Montfroc en 1975, vallée du Jabron, dans la Drôme, où il vit toujours. Il est un des pionniers de l’agriculture bio en France. Écrivain des grands espaces, lecteur de Jim Harrison, Rick Bass, Richard Ford…, des écrivains amérindiens tels James Welch, Louise Erdich, Sherman Alexie, David Treuer…, son écriture puise sa scansion, sa rythmique dans le blues, la poésie, le jazz et le rock’n’roll. La nature n’est pas un décor mais un personnage de ses histoires. Fée d’hiver est son sixième roman.

    Bibliographie :

    Histoire de la neige assoupie, Une hirondelle qui pleure tout le temps, (nouvelles), Chiendents n°17, Cahier d’arts et de littératures, André Bucher, Une géographie intime.

    Fée d’hiver, roman, éditions le mot et le reste, 2012

    La Cascade aux miroirs, roman, Denoël, 2009

    Le Pays de Haute Provence, carnet de voyage, vu de l’intérieur, récit, en collaboration avec un photographe, Pascal Valentin, pour l’office de tourisme du Pays de Haute Provence, 2007

    Déneiger le ciel, roman, Sabine Wespieser, 2007

    Le Matricule des Anges n°80, Clairé par une âpre beauté…

    Pays à vendre, roman, Sabine Wespieser, 2005

    Le Cabaret des oiseaux, roman, Sabine Wespieser, 2004, France-Loisirs, 2005, traduction en langue espagnole El Funambulista, 2007, traduction en chinois, 2008

    Le Pays qui vient de loin, roman, Sabine Wespieser, 2003

    Le Juste Retour des choses, Saint-Germain-des-Prés, Miroir oblique, 1974

    Le Retour au disloqué, Publication par l’auteur, 1973

    La Lueur du phare II, Éditions de la Grisière / Éditions Saint-Germain-des-Prés, Balises, 1971

    La Fin de la nuit suivi de Voyages, J. Grassin, 1970