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CATHY GARCIA-CANALES - Page 608

  • Alexo Xenidis

     

    ET SI JE PARLAIS DE MOI POUR UNE FOIS

     

    Je
    Regarde

    Avec des sentiments mélangés
    Découragement colère beaucoup de lassitude et la sensation de mes vanités
    Cet énorme tas de papiers ce vomi de mots qui s’incruste
    Le monde que je mâchonne et qui ne passe pas
    Cette voix de l’habitude parce que j’écris le matin tous les matins
    Comme si c’était hygiénique je me lève je pisse je fais un café j’écris
    Je ne trouve pas la paix
    Je ne trouve pas la paix
    Je
    Regarde
    L’énorme tas de papiers cette bouillasse de sentiments mélangés
    Le découragement la colère qui s’enfuit la lassitude qui prend la place
    Toute. Toute la place.
    Dis Il faut corriger
    Enlever tailler couper refaire casser que la fin plaise à Tartempion Que le début soit agréable à Ducon
    Foutre aux poèmes des corrections qu’ils chialent un bon coup s’en souviennent
    Qu’ils te regardent comme si tu leur faisais peur
    Miskin les poèmes comme tout aujourd’hui
    Et puis être guerrière et martiale et belliqueuse parler des combats sacrés
    Sauf dans la vie bien sûr
    In real life tu t’écrases tu lèches ta peine à l’abri des regards
    Et tu nettoies derrière
    Je
    Regarde
    Ma vie on dirait l’avant-guerre qui était déjà l’après d’un autre bordel
    Les années quarante que je n’ai pas connues
    Les fêtes décaties la fièvre des bons mots qui s’empare des foules
    On se congratule on moque on se déclare déprimé mais pas dépressif
    J’ai envie d’appuyer sur le bouton marche rapide en avant voir
    Les fêtes sombrer dans le noir les foules devenues muettes le silence
    La terreur soudaine entendre les Si j’avais su
    Cesser d’être Cassandre
    Ne plus dire je vous l’avais bien dit en pensant je ne l’ai pas assez bien dit
    Justement
    Je ne trouve pas la paix
    Je ne trouve pas la paix
    Je ne sais pas où la chercher ni même si elle existe ailleurs que dans mes contorsions
    Ces cabrioles de mots ces vieilles grammaires du malheur décaties agitées qui font des phrases
    Au Guignol du jardin du Luxembourg quand j’étais petite je me souviens de ma terreur
    Il y avait une marionnette qui chaque fois perdait la tête on savait qu’elle allait la perdre
    Elle était faite pour cela, son cou s’étirait s’étirait puis sa tête sautait hors du corps
    Poupée décapitée je hurlais de peur et je continue à hurler
    Le long des sabres qui se soulèvent et des pleutres qui les acceptent en cadeau
    En remerciant pour l’honneur qui leur est fait
    Je ne trouve pas la paix
    Non je ne trouve pas la paix
    Juste par instant un répit un moment bref dans un coin du ring sur le tabouret
    On me passe une éponge sur le visage et des mains me recousent prestes
    Avant que ne sonne le gong pour la reprise pour tituber une fois encore
    Les mains brisées sous les gants la bouche qui saigne les yeux qui ne voient plus
    Juste un répit le temps que je croie encore à la douceur avant d’oublier
    Et que tu me dises que toi et moi ce n’est qu’un intermède une façon de passer le temps
    En attendant des amours sérieuses des vraies des qui font rêver et pleurer
    Je boxe des fantômes, shadow boxing, jusqu’à l’épuisement, le corps se dérobe
    Se défait, s’effiloche, part en fumées en souvenirs s’effondre tombe
    Puis repart prendre sa ration de coups dans la gueule et en redemande
    Alors la paix
    La paix, pourquoi la trouver,
    Pourquoi vivre autrement qu’un enfant qui commence un dessin
    Puis insatisfait arrache la page et recommence sur une belle page neuve
    Le même gribouillis qui soulève le cœur
    Je ne me soucie plus d’en être aux dernières pages presque à la couverture
    Presque au moment de refermer le cahier
    Je marquerai à la place du mot fin
    Ceci est recyclable Je recommencerai
    Et, de nouveau,
    Je ne trouverai pas la paix

     

    A.X.

     

     

     

     

     

     

     

     

  • Julie Rey

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    à genoux vous creuserez sous les coups les plus bas

    à terre vous demanderez pardon pour boire encore

    ne serait-ce qu’une goutte à la source miracle

     

    cg in Pandémonium II

     

     

     

     

     

     

  • Fernando Pessoa

     

    On les appelle "charnelles"

    Ces personnes qui donnent tout émotionnellement

    Âme, cœur, corps et esprit.

    Celles qui, une fois entrées dans ta vie

    Te changent entièrement

    Celles qu’on écoute au-delà de la peau.

    Jusqu'à l'intérieur de l’os.

     

     

     

     

     

  • Camil Tulcan

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    Enduire les fragiles vertèbres de pollen, car dans le delta des prunelles aux confins des reins, l’alpha et l’oméga sont des loups féroces.

     

    cg in Le poulpe et la pulpe (Cardère 2011)

     

     

     

     

     

     

  • Jean Coulon

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    Le passé perdu et l’avenir, cette construction cauchemardesque avec ces monstres souriant à toutes les fenêtres. Une colère antique passe par moi et me ravage. Terrible injustice qui frappe et frappe encore. Marques invisibles, les contusions de l’âme.

    cg in Journal 1999

     

     

     

  • Vient de paraître : Le vin des crapauds - Saïd MOHAMED, Bob De GROOF (linogravures),

    aux Ed. des Carnets du Dessert de Lune 

    poésie, février 2017

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    70 pages (carré, collé) 19 x 29 cm, 18 €



    Préface :



    Pas dit qu’on en boirait de ce vin là, mais on a bien envie d’en savoir plus, alors on ouvre la bouteille… Et d’entrée, c’est l’uppercut, un relent d’enfance qui marche au pas et de pourriture tranquille… Et on sait très vite que oui, nous allons boire tout notre saoul, parce que voici venu l’heure du néant, et Saïd Mohamed en dix lignes nous crache le portrait du monde et ses victoires qui ne sont que défaites/Des noces d’étreintes de sang et de merde.
    Un uppercut crescendo, et on n’en sort pas indemne.
    Le vin des crapauds a vieilli pendant 21 ans dans la cave du poète, et il a le goût acide d’un mauvais vin nouveau, sans doute parce que le malheur, la violence, la bêtise, l’ignorance, les injustices, sont toujours les mêmes, en grappes lourdes, noires, amères, toujours plus grosses et grasses.
    Nous récoltons sur nos mains le sang de nos enfants,
    Tandis que nos maitres boivent le divin nectar
    Des bénéfices de cette boue pétrie aux alliances vénales
    Le poème ici fait sauter le bouchon de la bouteille, celle du vin des fous, du vin des nausées, du vin dont s’enivrent ceux qui ont trop vu œuvrer les bouchers adulés par un bétail sans mémoire. Il ne s’adresse même plus à ceux-là mais à l’acier lui-même, non sans ironie.
    Bel acier cherche ta voie dans les entrailles,
    La viande chaude et le sang doux.
    Couvre-toi de gloire, bel acier.
    Le vin des crapauds, pauvres crapauds, c’est pour trinquer et vomir à tous les morts pour rien, qui pavent les siècles de leurs chairs pourries.
    Je voulais du vin et du silence, dit le poète, mais puisqu’il faut supporter le vain des maux, voilà le vin des mots rances.
    Il faut le boire, comme on dit, jusqu’à la lie et faire la nique d’un rire sans dents aux horreurs, car du poète c'est le lot que de la guerre/ devoir encore extraire l'or de l'amour, nommer l’innommable et égrener les mots magiques, envers et contre, envers et contre… Des cendres de l’espoir, on peut toujours tracer des signes. Vraiment ?
    Le poète ici, dérisoire manchot face à un énième tsunami de ténèbres, s’écroule de lui-même.
    Je ne suis pas ignoble, j'ai honte de vivre.


    © Cathy Garcia, le 9 novembre 2017

     



    Postface: 


    Le vin des crapauds a été écrit en grande partie pendant la première guerre d’Irak, de 1990-91 Certains de ces textes ont été publiés dans la revue Kitoko Jungle Magazine de Guido Kuyl en Belgique, avec des dessins de Bob De Groof. Ensuite, Jacques Morin en a fait en 1995 un numéro de Polder avec des dessins de Fatmir Limani qui publiait lui aussi dans Kitoko. Que Jacmo soit ici remercié.
    Devant les événements récents et ceux à venir provoqués par ce Nouvel Ordre Mondial, comme il a été qualifié, et qui a désigné l’Axe du Mal, les Bons et les Méchants. Ce qui n’est rien d’autre qu’un plan pour détruire les vieilles civilisations en les assujettissant mieux aux lois du marché. Construire du nouveau, sur les cendres de l’ancien qui obéit mieux à son maître. Il m’est apparu essentiel de republier l’ensemble de ces textes qui ont été retravaillés et auxquels des nouveaux poèmes sont venus s’ajouter, dont certains ont été publiés par Alain Boudet sur la Toile de l’un.
    Bob De Groof, à qui j’ai fait part de mon projet, a tout de suite accepté de s’y investir et pendant un an il a travaillé à la gouge sur les grandes plaques de linogravure. Un tirage de tête sur velin d’Arches et au format 50 x 65 cm en a été fait à vingt exemplaires sur BFK Rives 250 grammes dans l’atelier à Fleur de Pierre par l’ami Étienne de Champfleury sur sa presse Marinoni Voiron de 1912.
    Jean-Louis Massot des Carnets du Dessert de Lune qui me publie depuis Souffles en 2006 en fait ici une nouvelle édition. La maquette est de Morgane Pambrun typographe tombée dans les lettres dès sa plus tendre enfance et ensuite formée à l’école Estienne. Des expositions des 14 linogravures sont prévues dans diverses galeries à Paris, Bruxelles, Düsseldorf.
    Ces textes et ces dessins sont notre façon de dire « Non à l’horreur ! »


    Les auteurs :


    Saïd Mohamed est né en Basse-Normandie d’un père berbère, terrassier et alcoolique et d’une mère tourangelle lavandière et asociale. Nomade dans l’âme, il est tour à tour, ouvrier imprimeur, voyageur, éditeur, enseignant à l’école Estienne. A aussi publié en poésie au Dé bleu et à Décharge dans la collection Polder, aux éditions Tarabuste.
    Il a obtenu le prix Poésimage en 1995 pour Lettres Mortes, le prix CoPo pour l’éponge des mots en 2014. Boursier du CNL en 2015. Son blog : http://ressacs.hautetfort.com


    Bob De Groof est peintre, collagiste, graveur-imprimeur, et photographe. Il a fait des assemblages, installations, du street art et a sculpté des totems.
Des expositions de ses œuvres ont eu lieu en Belgique, France, en Allemagne, aux Pays-Bas et aux États-Unis. À travers les années, il a exposé une quarantaine de fois individuellement et a participé à une cinquantaine d’expositions de groupe. Ses travaux se trouvent entres autres dans des collections de pays aussi divers que les États-Unis, la Russie et le Maroc.
    Faisant la connaissance de Saïd Mohamed pendant leur collaboration respective au fanzine KITOKO JUNGLE MAGAZINE, plus récemment ils ont décidé de réaliser un vieux rêve : la réédition et illustration du poème apocalyptique « Le Vin des Crapauds » écrit par Saïd.
Son site : http://www.bobdegroof.eu/tekst/engels/welkom.htm

     

    Pour passer commande :

    http://www.dessertdelune.be/store/p826/Le_vin_des_crapaud%2F%2FSa%C3%AFd_Mohamed.html