Anne Walter
Détachée de l’arbre, une feuille meurt.
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Détachée de l’arbre, une feuille meurt.
Je connais des routes qui deviennent des chemins, qui s’égarent dans l’herbe folle. D’autres ont un destin funeste, elles enflent jusqu’à six, huit, dix voies et finissent en autoroutes.
in Disparates
in Traction Brabant 72
Nulle branche dans la forêt que ne visite le printemps.
Je veux faire de toi, ce que fait le printemps avec les cerisiers.
Dehors, la ville me montra tous ses trous, ses coins, ses appels, ses escaliers comme des trappes, ses boîtes qui se referment, ses lumières sèches qui s’allument et s’éteignent, ses rideaux qui se tirent, ses rues où les foules remontent comme des mauvaises digestions, ses souterrains où elles pendent par grappes, ses ronds-points où elles font exprès d’être nombreuses et de grouiller sur place et de coller ensemble comme les œufs des poissons, ses cafés où les jambes s’entremêlent sous les tables, ses taxis où les bras se croisent sur des dos. L’amour mouillait tout ça, coulait dessus comme une rinçure de vaisselle, y gloussait comme un évier qui se vide.
in Le bonheur des tristes
Bio et bibliographie d'Armand Gatti : http://www.armand-gatti.org/index.php?cat=biographie
Extrait du livre biographique de Frédéric Mitterrand. La récréation.
(Ed. Robert Laffont, octobre 2013, pp.385-386).
Samedi 26 mars 2011
Armand Gatti, c'est une terra incognita pour le ministère. On en est resté à sa collaboration avec Jean Vilar, qui remonte à plus de soixante ans, et au soutien que lui accordait Malraux, ce qui n'est pas tout récent non plus. On lit distraitement les articles qui lui sont consacrés et qui rendent compte de ses expériences théâtrales avec des jeunes partis en vrille, des détenus, des immigrés qui n'ont jamais eu droit à la parole, et tant pis si les critiques sont toujours élogieuses, on ne va pas voir ses spectacles; on lui accorde juste assez d'argent pour se donner bonne conscience, ce qui n'est vraiment pas grand‑chose. On en a un peu peur, comme de tout ce qui est inclassable et ne rentre pas dans les tiroirs bien rangés du ministère. Sa réputation d'agitateur libertaire inflexible, la petite bande qui travaille avec lui et qu'on ne connaît pas, tout ce militantisme sur le front de la misère culturelle et de l'abandon social qui n'a jamais été récupéré par la gauche du confort intellectuel, ça sent trop le phalanstère, le loin d'ici, le vieux et le passé. Au fond, il a bientôt quatre‑vingt‑dix ans et on attend qu'il meure, le communiqué de condoléances bien senti du ministre est déjà dans les tuyaux. Je veux aller le voir, je veux l'aider, je veux qu'il puisse continuer.
Une petite rue au fin fond de Montreuil. Des entrepôts en ruine et des restes d'usine. Décor d'Alexandre Trauner.
Je m'attends à tout : un accueil maussade, une arrivée comme celle d'un chien dans un jeu de quilles, voire pas d'accueil du tout et la porte close. C'est tout le contraire, une gentillesse et une empathie merveilleuses. Dans son pavillon bourré de souvenirs d'une vie follement aventureuse dédiée à tous les combats contre l'injustice, il m'embarque pour une formidable traversée du siècle portée par un verbe magnifique. Autour de lui, des gens qui ont la moitié de son âge qui l'accompagnent, le soulagent de sa fatigue, mettent en forme les projets qu'il porte. Rien d'une secte, juste un engagement obstiné et désintéressé. A côté, l'atelier théâtre avec le toit qui fuit, le chauffage qui marche mal et plusieurs spectacles par an qui fond salle comble.
Parution : 24 Octobre 2013 / Format : 1 x 240 mm / Nombre de pages : 726 / Prix : 24,00 € / ISBN : 2-221-13307-2
Suis dedans avec des textes très inédits (Rances souvenirs ; Copeaux et Dystopie – extrait de ©Ourse bipolaire) et un tableau (They call me names, 2017), papier épais très glacé, ça en jette avec du texte, des photos, de l'art singulier, aborigène aussi, c'est beau, ça coûte 10 euros. Seb Russo aux commandes.
à commander à trakt@gmx.fr