Ed Ross

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Parlons-en de l'amour:
Depuis la naissance de mes seins à eux-mêmes,
comme une chose nouvelle
soumise aux joies et aux épreuves qui mènent à
sa maturation,
depuis la naissance de mes seins à leur propre
convoitise et à celle des autres,
j’ai porté sur mon épaule la lourdeur du regard des hommes.
j’ai aimé la nudité de mon corps bougeant dans l’eau du fleuve.
Ils m'ont reproché de donner naissance à leur désir.
j’ai aimé les routes et les jardins sauvages.
Ils m'ont reproché d’attirer les violeurs par mon inconséquence.
j’ai aimé les femmes, mes sœurs, leurs formes douces.
Ils m'ont reproché de ne pas tout sacrifier à la procréation.
J’ai aimé l’amour,
donné sans rechigner.
Et ils m’ont reproché de n'être pas la servante d'un seul
in Le doux parfum des temps à venir

Il est noir (!) et propose des textes de Cathy Garcia Canalès, Michel Meyer, Ingrid S. Kim, Pénélope Corps et Christophe Siébert. Empreintes de Christophe Lalanne.
C'est une très belle petite revue, petite comme un écrin à la fois sobre et raffiné, pour des textes de grande qualité, ceci dit sans aucun parti pris.




Les clefs de la ville
Les clefs de la ville
Sont tachées de sang
L’Amiral et les rats ont quitté le navire
Depuis longtemps
Sœur Anne ma sœur Anne
Ne vois-tu rien venir
Je vois dans la misère le pied nu d’un enfant
Et le cœur de l’été
Déjà serré entre les glaces de l’hiver
Je vois dans la poussière des ruines de la guerre
Des chevaliers d’industrie lourde
A cheval sur des officiers de cavalerie légère
Qui paradent sous l’arc
Dans une musique de cirque
Et des maîtres de forges
Des maîtres de ballet
Dirigeant un quadrille immobile et glacé
Où de pauvres familles
Debout devant le buffet
Regardent sans rien dire leurs frères libérés
Leurs frères libérés
A nouveau menacés
Par un vieux monde sénile exemplaire et taré
Et je te vois Marianne
Ma pauvre petite sœur
Pendue encore une fois
Dans le cabinet noir de l’histoire
Cravatée de la Légion d’Honneur
Et je vois
Barbe bleue blanc rouge
Impassible et souriant
Remettant
Remettant les clefs tachées de sang
Aux grands serviteurs de l’Ordre
L’Ordre des grandes puissances d’argent.

Hélas ! Hélas !
Trois ou quatre fois hélas!
Voilà le mauvais temps, la crise et tout et tout.
Le capital en prend un coup,
ll se roule par terre et il gueule,
ll bave même un petit peu,
Toute la famille est inquiète.
Qu'est-ce que c'est ?
Ce n’est rien, c‘est la crise, ça va passer.
Mais, dans sa cuisine, la bourgeoise sanglote,
D'une main elle fait le signe de la Croix,
De l‘autre elle fait la cuisine, la mayonnaise.
Avec ses pieds, elle berce les enfants,
Avec sa bouche, elle leur chante une berceuse.
Mais les petits enfants,
Les petits bourgeois ne veulent pas dormir,
lls entendent, venant de très loin,
Les pas et les cris des marcheurs de la faim.
Leur bonne mère leur a dit :
Si vous n‘êtes pas sages, les chômeurs vont venir et ils vont vous prendre.
Les petits bourgeois ont très peur.
Il y a des ogres dans le sous-sol de la maison.
Il y a des chômeurs dans les environs.

Je vous préviens, je ne rends plus les intentions qu'on me prête.
Alors, inutile de réclamer, de vous plaindre.
in l'impossible séjour